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18/09/2013 | FRANCE | N°12-21293

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 septembre 2013, 12-21293


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 1er mars 2012), que la SCI du Tremblois (la SCI) a donné à bail un domaine agricole à Mme X... qui l'a exploité en dernier lieu dans le cadre de l'EARL des Sables (l'EARL) constituée avec son fils ; que la locataire a agi aux fins d'être autorisée à céder son bail à ce dernier ; que la bailleresse a demandé reconventionnellement la résiliation du bail pour défaut de paiement du loyer ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrÃ

ªt de rejeter sa demande de résiliation du bail alors, selon le moyen :
1°/ ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 1er mars 2012), que la SCI du Tremblois (la SCI) a donné à bail un domaine agricole à Mme X... qui l'a exploité en dernier lieu dans le cadre de l'EARL des Sables (l'EARL) constituée avec son fils ; que la locataire a agi aux fins d'être autorisée à céder son bail à ce dernier ; que la bailleresse a demandé reconventionnellement la résiliation du bail pour défaut de paiement du loyer ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de résiliation du bail alors, selon le moyen :
1°/ que le bailleur peut demander la résiliation du bail s'il justifie de deux défauts de paiement de fermage ayant persisté après mise en demeure postérieure à l'échéance ; qu'une seule mise en demeure peut être délivrée si elle porte sur des échéances différentes ; que dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait, par des motifs inopérants tirés d'une prétendue mauvaise foi du bailleur, tout en constatant que le paiement du complément de fermage était dû par la preneuse, et n'avait pas été réglé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411- 31 du code rural et de la pêche maritime ;
2°/ que la renonciation à un droit ne se présume pas et doit résulter de la manifestation claire et non équivoque de l'intention de celui qui entend renoncer ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait par des motifs insusceptibles de caractériser l'intention de la bailleresse de renoncer à réclamer le paiement du complément de fermage dû par la preneuse, la cour d'appel n'a pas davantage légalement justifié sa décision au regard du texte ci-dessus visé ;
3°/ que la règle selon laquelle les obligations doivent être exécutées de bonne foi n'autorise pas le juge à s'affranchir d'une législation d'ordre public ; que le bailleur qui réclame du preneur le paiement du loyer dont il est débiteur au titre du bail à lui consenti ne peut être regardé comme manquant à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi ; que dès lors en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime et de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel n'ayant pas retenu que la bailleresse avait renoncé à demander le paiement du complément de fermage sur lequel elle fondait sa demande de résiliation, le moyen, pris en sa deuxième branche, manque en fait ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que la SCI, habituellement scrupuleuse dans la rédaction des factures de fermage, s'était abstenue de demander le complément de loyer au point que Mme X... avait pu légitimement croire que sa cocontractante avait renoncé à en demander paiement et que la première mise en demeure était intervenue deux mois après la demande d'autorisation de céder le bail et retenu que la bailleresse avait manqué à son devoir de loyauté envers sa locataire, la cour d'appel, qui a pu en déduire que la SCI ne pouvait se prévaloir de ce défaut de paiement à l'appui d'une demande de résiliation, a légalement justifié sa décision ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime, ensemble l'article L. 331-2 du même code ;
Attendu que pour accueillir la demande d'autorisation de céder son bail formée par Mme X..., l'arrêt retient qu'une autorisation d'exploiter, qui n'est exigée qu'en cas d'installation, d'agrandissement ou de réunion d'exploitations agricoles, n'est pas nécessaire en l'occurrence puisqu'une fois la cession autorisée, le domaine loué continuera d'être exploité à l'identique par l'EARL et relève que par une lettre du 6 juin 2011 produite par Mme X..., la direction départementale des territoires confirme que la cession envisagée se traduira uniquement par un changement dans la vie sociale de l'EARL, ce qui ne relève pas du contrôle des structures ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si l'EARL ne devait pas être, à la date de la cession projetée, titulaire d'une autorisation d'exploiter compte tenu du seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le quatrième moyen :
Attendu que la cassation sur le troisième moyen entraîne, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef du dispositif condamnant la SCI à payer à Mme X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour abus de droit ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a autorisé Mme X... à céder son bail et condamné la SCI du Tremblois à lui payer une certaine somme à titre de dommages et intérêts pour abus de droit, l'arrêt rendu le 1er mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille treize, signé par M. Terrier, président, et par M. Dupont, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour la société du Tremblois.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI DU TREMBLOIS de sa demande de résiliation du bail consenti à Madame Z... ;
AUX MOTIFS QU'en l'espèce, par lettre recommandée avec AR du 18 octobre 2010, la SCI du TREMBLOIS a mis en demeure Madame Colette Z... de payer la somme de 3.167,93 euros au titre du "complément de fermage" échu pour les années 2005 à 2009 ; que cette mise en demeure rappelait les dispositions de l'article L411-31 du code rural sur la résiliation du bail en cas de non-paiement des fermages ; que, compte-tenu du soin scrupuleux dont la SCI du TREMBLOIS témoigne habituellement dans la rédaction de ses factures de fermage, le fait que ce "complément de fermage" n'y fût plus mentionné "depuis de nombreuses années" et qu'il n'ait jamais fait l'objet de la moindre réclamation avant le 15 octobre 2010, pouvait légitimement laisser croire à Madame Colette Z... que le bailleur n'entendait plus s'en prévaloir ; or, que réclamer soudainement l'arriéré de ce "complément" pour les cinq dernières années échues et non encore prescrites, en faisant simultanément de cette première réclamation une mise en demeure visant la faculté de résiliation du bail, sans même avoir jamais fait précéder ce courrier de la moindre démarche amiable, caractérise la mauvaise foi du bailleur que cette mauvaise foi est d'autant plus patente que ladite mise en demeure intervient seulement deux mois après que Madame Colette Z... a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux aux fins de se voir autoriser à céder son bail à son fils Cyril ; que cette mise en demeure apparaît manifestement comme une mesure de rétorsion et comme une manoeuvre aux fins de contourner les effets d'une possible autorisation de la cession du bail par la justice ; qu'en recourant à un tel stratagème, la SCI du TREMBLOIS a manqué à son devoir de loyauté vis-à-vis de son preneur et ne peut donc se prévaloir valablement de l'absence de paiement dans les trois mois de sa mise en demeure pour obtenir la résiliation du bail ; que par conséquent, la SCI du TREMBLOIS sera déboutée de sa demande de résiliation du bail ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le bailleur peut demander la résiliation du bail s'il justifie de deux défauts de paiement de fermage ayant persisté après mise en demeure postérieure à l'échéance ; qu'une seule mise en demeure peut être délivrée si elle porte sur des échéances différentes ; que dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait, par des motifs inopérants tirés d'une prétendue mauvaise foi du bailleur, tout en constatant que le paiement du complément de fermage était dû par la preneuse, et n'avait pas été réglé, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et doit résulter de la manifestation claire et non équivoque de l'intention de celui qui entend renoncer ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait par des motifs insusceptibles de caractériser l'intention de la bailleresse de renoncer à réclamer le paiement du complément de fermage dû par la preneuse, la Cour d'appel n'a pas davantage légalement justifié sa décision au regard du texte ci-dessus visé ;
ALORS, ENFIN, QUE la règle selon laquelle les obligations doivent être exécutées de bonne foi n'autorise pas le juge à s'affranchir d'une législation d'ordre public ; que le bailleur qui réclame du preneur le paiement du loyer dont il est débiteur au titre du bail à lui consenti ne peut être regardé comme manquant à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi ; que dès lors en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 411-31 du code rural et de la pêche maritime et de l'article 1134 du Code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a autorisé la cession du bail à Monsieur Cyril Z... ;
AUX MOTIFS QUE « a) Le défaut d'entretien des parcelles louées: l'huissier de justice a constaté l'existence d'un dépôt de gravas sur la parcelle C92 Madame Colette Z... a répliqué qu'il s'agissait d'un apport de matériaux en vue de remettre en état le chemin qui se trouve à proximité, ce que rien ne vient infirmer, puisqu'aucun élément du dossier ne montre que ce dépôt a été maintenu sur une longue période. Ce fait ne peut donc être imputé à tort au preneur, il démontre au contraire son souci d'entretenir les accès aux parcelles. De même, l'huissier a relevé la présence de purin stagnant sur la parcelle C91, mais sans indiquer si un ruisseau s'écoule alentour. Le preneur a expliqué qu'il s'agissait d'un stockage de fumier en bout de champ dans l'attente de son épandage pour fumer le sol, ce qui relève d'une bonne pratique agronomique. Sur une parcelle (cadastrée ZA1), l'huissier a constaté la pousse de rejets d'arbustes, tandis que sur une autre (cadastrée ZB 1), il a contraire relevé que les accrus forestiers avaient été coupés. Ces deux constatations contradictoires sont reprochées au preneur. Le contrôle des ligneux sur les parcelles louées requiert un soin constant de la part de l'exploitant, mais sur des superficies aussi vastes que celles qui sont données en location (89 hectares), il ne peut être raisonnablement exigé que tous les rejets d'arbustes soient maîtrisés partout immédiatement et simultanément. Il est légitime que cet entretien s'échelonne dans le temps, d'autant plus qu'il est dépendant des saisons et de la météo. En outre, la surface très restreinte sur laquelle les rejets ont été constatés, si on la compare à la superficie louée totale, est la preuve que la végétation est globalement plutôt bien maîtrisée sur l'ensemble du domaine donné à bail. Le bail de 1975, réitéré en 1985, stipulait que les preneurs ne pouvaient arracher ou abattre aucun arbre, notamment "les saules situés le long du ruisseau de la Queue de l'Etang" sans le consentement du bailleur. L'huissier a constaté "l'absence de saules" le long du ruisseau séparant les parcelles C90 et 93. Mais d'une part, cette constatation est insuffisante pour déterminer si ce ruisseau situé entre les parcelles C90 et C93 est bien le ruisseau de la Queue de l'Etang. D'autre part, si Madame Colette Z... reconnaît avoir pratiqué des coupes d'entretien à cet endroit, elle précise qu'elles remontent à la SCI du TREMBLOIS ne justifie, ni même ne prétend avoir jamais fait, ni à cette époque ni depuis lors, aucune remarque à son preneur sur ces coupes d'arbres, ce qui prouve qu'elle n'a pas accordé d'importance à ces pratiques, bien qu'elles fussent contraires aux dispositions de l'article L41l-28 du code rural et aux stipulations expresses du bail. L'huissier a 120359 BP relevé non pas l'absence d'entretien "des fossés et rigoles", mais l'absence de curage d'un seul fossé, celui qui jouxte le Bois des Lièvres. Mais là encore, le fait que l'huissier instrumentaire n' ait trouvé qu'un seul fossé qui ne soit pas parfaitement curé, alors que le domaine loué couvre 89 hectares et que ce type d'entretien s'effectue nécessairement selon un programme étalé dans le temps, démontre plutôt que Madame Colette Z... assume de façon satisfaisante son obligation de curage et d'entretien des fossés. La SCI du TREMBLOIS prétend que sur les six puits du domaine, plusieurs ne seraient plus entretenus. Toutefois, le PROCÈS-VERBAL de constat ne mentionne que le puits de la parcelle C72 comme étant en partie "déposé et cassé". Madame Colette Z... explique que les bovins se sont frottés sur les pierres de ce puits et en ont fait tomber une. Il s'agit donc là d'une détérioration causée par l'usage de la chose. Ce dommage deviendrait fautif si sa réparation n'intervenait pas dans un délai raisonnable, faute qui n'est pas établie en l'occurrence. b/ Le retournement de parcelles sans autorisation du bailleur : Madame Colette Z... reconnaît que certaines parcelles en herbe ont été retournées et labourées, comme le lui reproche le bailleur. Elle explique que ces changements culturaux sont intervenus lorsqu'elle a abandonné la production laitière, et cela en pleine intelligence avec le bailleur qui lui a imposé à cette occasion l'avenant précité du 26 novembre 1980 (compensation de la livraison de lait et de beurre par une indemnité en argent).La preuve de l'accord amiable du bailleur sur l'étendue exacte et la localisation des parcelles converties en culture n'est toutefois pas rapportée par la locataire. En tout état de cause, eu égard à l'importance des superficies concernées (plusieurs dizaines d'hectares), cette conversion de prairies à la céréaliculture n'a pu échapper à la vigilance du bailleur. Or, il est constant que la SCI du TREMBLOIS n'a jamais notifié le moindre avertissement, ni même la moindre demande d'explication à son preneur sur ces changements culturaux jusqu'à ce que naisse entre eux le litige causé par la demande de cession du bail, ce qui démontre là encore le peu d'importance accordé par le bailleur à cette question. Ce grief apparaît donc comme de pure circonstance. c/ Le labourage du chemin de VOIRINCOURT: Les photographies aériennes produites par la SCI du TREMBLOIS démontrent que Madame Colette Z... a labouré le chemin d'exploitation qui séparait les parcelles C93 et C96, alors que ce chemin desservait un bois que la SCI du TREMBLOIS dit lui appartenir. Cet agissement est incontestablement fautif. La SCI du TREMBLOIS produit toutefois une lettre du maire de la commune de LANEIJVELOTTE, en date du 8 avril 2011, qui indique que Monsieur Cyril Z... s'est engagé à restituer l'emprise du chemin. Il ne ressort pas du dossier que cet engagement n'ait pas été tenu. II ne ressort pas non plus du dossier que la SCI du TREMBLOIS ait jamais interpellé son preneur sur cette suppression de chemin avant l'introduction de cette instance judiciaire. d/ Les dégradations causées à des biens non loués : Le bailleur ne peut se prévaloir, pour refuser la cession, que des manquements du preneur dans l'exécution du 120359 BP bail. Les agissements du preneur concernant des biens étrangers au bail ne peuvent donc motiver le refus de la cession, surtout s'ils ne causent aucun préjudice au bailleur, comme en l'espèce. Au surplus, le bailleur ne démontre pas l'imputabilité à Madame Colette Z... de la plupart des atteintes aux biens non loués dont il se plaint (dépôt d'encombrants sur le chemin dit "des vaches", élargissement du chemin du bois du Tremblois).e/ Le non-paiement des fermages : Les pièces produites au dossier démontrent que Madame Colette Z... s'est toujours acquittée du paiement des fermages avec ponctualité. Quant au litige concernant le retard de paiement de l'indemnité "lait-beurre", l'intention vindicative du bailleur a été établie, de sorte que ce retard qui ne peut être retenu pour motiver une résiliation du bail ne peut l'être, à plus forte raison, pour motiver un refus de cession du bail à un descendant. Au total, s'il apparaît que certains griefs formés par la SCI du TREMBLOIS à l'encontre de Madame Colette Z... ont quelque consistance en fait (coupes d'arbres non autorisées, retournement de parcelles sans respect scrupuleux de la procédure prévue par le code rural, labourage d'un chemin d'exploitation), leur gravité doit être appréciée à l'aune de l'étendue des surfaces louées et de la durée de la location. Or, cette application du principe de proportionnalité conduit à considérer que ces griefs ne revêtent pas, en l'espèce, un gravité suffisante pour justifier le refus de cession du bail par Madame Colette Z... à son fils Cyril Z... » ;
ALORS QUE le juge appelé à se prononcer sur une demande de cession du bail par le preneur au profit d'un descendant doit vérifier qu'elle ne risque pas de porter atteinte aux intérêts légitimes du bailleur ; que l'intérêt légitime de ce dernier doit s'apprécier compte tenu de la bonne foi du cédant et de la capacité du cessionnaire à respecter les obligations nées du bail ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que la preneuse avait, à la date de la cession projetée, manqué à ses obligations d'entretien des biens loués et de mise en valeur conformément à leur destination, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime ;
ALORS, EN OUTRE, ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE des manquements du preneur à ses obligations même s'ils ne remplissent pas les conditions exigées pour la résiliation du bail peuvent justifier le refus d'autorisation de cession ; que dès lors, en considérant, pour statuer comme elle l'a fait, que le retard dans le paiement du supplément de fermage « lait-beurre », qui ne pouvait être retenu pour motiver une résiliation du bail ne pouvait l'être, à plus forte raison, pour motiver un refus de cession du bail à un descendant, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte ci-dessus visé.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a autorisé la cession du bail à Monsieur Cyril Z... ;
AUX MOTIFS QUE l'autorisation administrative préalable n'est exigée qu'en cas d'installation, d'agrandissement ou de réunion d'exploitations agricoles, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence, puisqu'une fois la cession autorisée, le domaine loué continuera d'être exploité à l'identique par 1'EARL des Sables. ; que Madame Z... produit un courrier de la Direction départementale des territoires en date du 6 juin 2011 qui confirme que la cession envisagée se traduira uniquement par un changement dans la vie sociale, ce qui ne relève plus du champ du contrôle des structures depuis la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006.
ALORS QUE lorsque les terres prises à bail sont mises à la disposition d'une société et que l'exploitation des parcelles par le cessionnaire est effective dans le cadre sociétaire, l'autorisation d'exploiter, quand elle est nécessaire, doit être détenue par la société ; qu'en l'espèce, la bailleresse avait fait valoir que le seuil de déclenchement du contrôle des structures prévu par le schéma départemental des structures agricoles du département de MEURTHE ET MOSELLE était de 130 ha, de sorte que la superficie mise en valeur par la société des SABLES, étant de 156 ha 81 a 70 ca, cette dernière devait justifier d'une autorisation d'exploiter à la date de la cession projetée ; que dès lors, en se déterminant comme elle l'a fait, pour autoriser la cession, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 331-2 et L. 411-35 et L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SCI DU TREMBLOIS à payer à Mme Z... la somme de 2500 euros à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces produites, et notamment de la lettre que la SCI du TREMBLOIS a adressée le 5 juillet 2010 à Monsieur Cyril Z..., qu'elle exigeait qu'un nouveau bail fût conclu, d'une durée de vingt-cinq ans afin d'autoriser une augmentation des fermages ; que Madame Colette Z... ayant refusé ces conditions financièrement défavorables pour son successeur, la SCI du TREMBLOIS a décidé d'exercer sur elle des pressions et des mesures de rétorsion, en exigeant, sous peine de résiliation, le paiement immédiat d'une indemnité annuelle qu'elle ne réclamait plus depuis de nombreuses années ou en refusant la cession du bail en alléguant des motifs de pure circonstance ; que ces manoeuvres déloyales ont eu pour effet de causer un préjudice à Madame Z... notamment en ce qu' elle a dû retarder son départ à la retraite ;
ALORS QUE l'exercice d'un droit ne peut constituer une faute que si le titulaire de ce droit en fait, à dessein de nuire, un usage préjudiciable à autrui ; que ni le fait pour le bailleur de solliciter la résiliation du bail pour défaut de paiement des fermages ou ni celui de refuser au preneur l'autorisation de cession du bail à un descendant, en raison de l'atteinte portée par cette opération à ses intérêts légitimes, ne sauraient être constitutifs d'un abus de droit de nature à justifier sa condamnation à des dommages et intérêts envers le preneur ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié au regard de l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-21293
Date de la décision : 18/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 01 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 sep. 2013, pourvoi n°12-21293


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.21293
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