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03/07/2013 | FRANCE | N°12-20981

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 juillet 2013, 12-20981


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... de ce qu'il se désiste de son pourvoi en tant que dirigé contre la société Ancra ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, propriétaire d'une motocyclette Yamaha, tombée d'une remorque alors qu'elle était arrimée au moyen de sangles, fabriquées par la société Ancra international et distribuées par la société MAD assurée auprès de la société GAN assurances, M. X... a assigné ces sociétés en

responsabilité ;

Attendu que pour rejeter les demandes de M. X..., l'arrêt énonce que le distr...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... de ce qu'il se désiste de son pourvoi en tant que dirigé contre la société Ancra ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1147 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, propriétaire d'une motocyclette Yamaha, tombée d'une remorque alors qu'elle était arrimée au moyen de sangles, fabriquées par la société Ancra international et distribuées par la société MAD assurée auprès de la société GAN assurances, M. X... a assigné ces sociétés en responsabilité ;

Attendu que pour rejeter les demandes de M. X..., l'arrêt énonce que le distributeur et le fabricant ne sauraient être en mesure d'envisager tous les cas de figure d'utilisation d'une sangle et qu'on ne peut exiger de leur part une anticipation d'un manque de sens commun des utilisateurs ;

Qu'en statuant ainsi alors que le vendeur professionnel est tenu à l'égard des acheteurs profanes d'une obligation d'information et de conseil portant sur les conditions d'utilisation du matériel vendu, de sorte qu'il lui incombait de rechercher, comme il lui était demandé, si la délivrance d'informations relatives à l'usage du produit n'aurait pas permis à l'acheteur d'éviter le comportement qui lui était imputé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne les sociétés GAN et MAD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juillet deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes et de l'AVOIR condamné à payer à la société GAN ASSURANCES et à la société MAD la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE M. X... fait valoir au soutien de ses demandes que l'expert Y... a constaté avec surprise qu'au maximum de l'effort de traction sur le brio mou des sangles litigieuses, il ne pouvait exercer qu'une tension que de 30 kilos (au lieu de kilos pour les sangles de comparaison) que l'effort permis est insuffisant pour assurer un écrasement complet et suffisant de la fourche avant de la moto arrimée ; qu'aucune précaution d'emploi ou d'arrimage n'est mentionnée sur le blister d'emballage qui comporte peu de caractéristiques techniques et aucun mode d'emploi particulier qu'il y est seulement indiqué que les deux sangles qui sont amorcées comme résistantes à une charge de 200 kilos chacune, soit 400 kilos au total, auraient donc dû pouvoir maintenir une motocyclette de 250 kilos ; mais attendu que l'expert judiciaire, M. Z..., ne fait que confirmer ce que le bon sens commande d'observer, au vu des clichés montrant comment M. X... a arrimé sur sa remorque sa motocyclette, de grosse cylindrée et d'un poids important ; qu'en effet le rail de celle-ci étant peu profond, l'arrimage de l'avant de l'engin devait nécessairement être complété par un arrimage arrière pour éviter que la moto ne verse aux premiers virages ; attendu que l'expert judiciaire relève plus précisément en son rapport que : « la moto était installée et arrimée de la façon suivante sur l'emplacement latéral droit (une autre moto de 150 kilos étant positionnée à ses côtés) : - la roue avant de la moto était en appui dans l'arceau de la remorque prévue à cet effet, la roue avant de la moto n'était pas liée à cet arceau, - la moto était arrimée à la remorque par deux sangles disposées symétriquement par rapport au guidon de la moto ; compte tenu de la géométrie de la moto et de la position des ponts d'ancrage sur la remorque, ces deux sangles étaient pratiquement verticales, - la sangle de droite était crochetée d'une part au guidon de la moto et d'autre part à un anneau d'arrimage solidaire de la remorque, la sangle de gauche était d'une part crochetée au guidon de la moto et d'autre part crochetée dans une lumière (orifice oblong) existant dans la traverse avant de la remorque, - la roue arrière de la moto reposait dans le rail horizontal prévu à cet effet sans y être lié ; attendu que l'expert ajoute (page 13) que la résistance et la fiabilité suffisante de l'arrimage « est conditionnée aux deux paramètres suivants : -nécessité de positionner les sangles aux emplacements adéquats et en nombre suffisant (4) et appliquer aux sangles une tension minimum pour comprimer les suspensions avant et arrière de la moto ; on peut estimer que le respect simultané de ces deux conditions relève du bon sens de l'utilisateur ; toutefois il faut noter que ces conseils ne figurent ni dans les documents délivrés avec les sangles ni dans le manuel d'utilisation de la moto ni dans la notice d'utilisation de la remorque » ; attendu que l'expert formule en conséquence deux hypothèses pour expliquer l'accident : « Hypothèse n° 1 : la tension des sangles était insuffisante pour éviter tout effet de pompage de la suspension avant, les irrégularités et sinuosités de la route ont alors provoqué une chute de tension progressive dans les sangles aboutissant à l'instabilité de la moto qui s'est inclinée, s'est décrochée partiellement et a fini par s'échapper de la remorque ; Hypothèse n° 2 : la tension des sangles était suffisante, mais deux autres phénomènes se sont produits successivement ou simultanément du fait de l'insuffisance d'arrimage : - la verticalité des sangles et l'absence d'immobilisation de la roue avant ont provoqué un déplacement vertical de la moto d'avant en arrière, jusqu'à ce qu'un crochet de deux sangles se libère et que la moto bascule ou jusqu'à ce que la roue avant s'échappe de l'arceau avant de la remorque, - l'absence d'immobilisation par des sangles de la partie arrière de la moto et l'absence de fixation de la roue arrière sur la remorque ont provoqué un déplacement vertical de la partie arrière de la moto jusqu'à ce que la roue arrière s'échappe de son appui, ce qui aboutit à une instabilité du même ordre que celle décrite dans l'hypothèse n° 1 » ; attendu que l'expert précise « à la décharge de l'utilisateur, que les indications et conseils figurant sur les documents délivrés par le distributeur MAD, comme par le fabricant ANCRA lors de l'achat de sangles, sont incomplets pour permettre à un utilisateur néophyte de réaliser un arrimage parfaitement fiable et d'une moto, de surcroît qualifiable de lourde » ; mais attendu que la cour estime que distributeur et fabricant ne sauraient être en mesure d'envisager tous les cas de figure d'utilisation d'une sangle ; qu'on ne saurait exiger de leur part une anticipation d'un manque de sens commun des utilisateurs ; que le jugement qui a retenu un manquement du distributeur à ses obligations contractuelles et qui l'a condamné, avec son assureur, à réparation doit donc être entièrement réformé ;

ALORS QUE le vendeur d'un produit est tenu, à l'égard des acheteurs profanes auxquels il destine le bien, d'une obligation d'information et de conseil portant sur les conditions d'utilisation du matériel vendu ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que l'expert avait relevé que « les documents délivrés par le distributeur MAD comme par le fabricant ANCRA ¿ étaient incomplets » ; qu'en relevant néanmoins, pour écarter toute responsabilité du vendeur qu'il « ne saurai t être en mesure d'envisager tous les cas de figure d'utilisation d'une sangle » et que l'on ne saurait « exiger de sa part une anticipation d'un manque de sens commun des utilisateurs », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la délivrance d'informations relatives à l'usage du produit n'aurait précisément pas permis à l'acheteur d'éviter le comportement qui lui était imputé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-20981
Date de la décision : 03/07/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 08 mars 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 jui. 2013, pourvoi n°12-20981


Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.20981
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