LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Metz, 7 février 2012) de le débouter de sa demande d'exercice en commun de l'autorité parentale sur sa fille alors, selon le moyen :
1°/ que, lorsqu'il se prononce sur les modalités de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1 du code civil ; qu'il résulte de ce texte que, dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet ; qu'à cet égard, le juge doit s'assurer que le mineur a été informé, par le ou les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, de son droit à être entendu et à être assisté d'un avocat ; qu'en ne recherchant pas si B..., née le ... 2002 et donc capable de discernement, avait été informée de son droit à être entendue et, éventuellement, assistée d'un avocat, la cour d'appel a violé l'article 388-1 du code civil ;
2°/ qu'en principe, les père et mère exercent en commun l'autorité parentale ; que, par exception, le juge peut en confier l'exercice à l'un d'eux si l'intérêt de l'enfant le commande ; que pour débouter M. X... de sa demande d'exercice conjoint de l'autorité parentale, les juges du fond ont retenu que Mme Y... était « définitivement marquée » par les faits d'appels malveillants commis par l'exposant il y a près de huit ans, qui n'ont jamais atteint B... et n'ont pas été réitérés depuis, et craignait « de voir resurgir un tel comportement » ; qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi l'intérêt de l'enfant commanderait que l'autorité parentale fut confiée à la mère seule, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 373-2-1 du code civil ;
3°/ que nul ne peut se constituer une preuve par soi-même ; que le contenu d'un courrier ne peut établir la prétention de son destinataire ; que pour décider qu'il n'est pas conforme à l'intérêt de l'enfant d'accorder au père l'exercice conjoint de l'autorité parentale, les juges du fond se sont fondés sur un courrier rédigé par Mme Y... elle-même, duquel il résulterait que M. X... aurait refusé la demande de cette dernière de libérer un peu plus tôt B... un samedi, jour de son droit de visite, en raison de la tempête et du mauvais état des routes ; qu'en retenant ainsi, comme seul élément de preuve de la prétendue incapacité de M. X... à prendre en considération d'autres intérêts légitimes que les siens, un courrier rédigé par Mme Y... elle-même, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu que, d'abord, M. X... n'est pas recevable à reprocher à la cour d'appel d'avoir omis de rechercher si sa fille avait été informée de son droit à être entendue par le juge et assistée par un avocat dès lors qu'il ne s'est pas prévalu de ce prétendu défaut d'information devant les juges du fond ; qu'ensuite, ayant constaté la permanence d'une difficulté du père à prendre en considération des impératifs légitimes autres que les siens, la cour d'appel en a souverainement déduit qu'un exercice conjoint de l'autorité parentale n'était pas conforme à l'intérêt de l'enfant, justifiant ainsi légalement sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. X... à payer à Mme Y... une somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Thionville du 24 août 2009 en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa demande d'exercice en commun de l'autorité parentale sur l'enfant B... ;
AUX MOTIFS QUE : « selon les dispositions de l'article 372 du code civil, les père et mère exercent en commun l'autorité parentale ; que toutefois lorsque la filiation est établie à l'égard de l'un d'entre eux plus d'un an après la naissance d'un enfant dont la filiation est déjà établie à l'égard de l'autre, celui-ci reste seul investi de l'exercice de l'autorité parentale ; que l'autorité parentale pourra néanmoins être exercée en commun en cas de déclaration conjointe des père et mère devant le greffier en chef du tribunal de grande instance ou sur décision du juge aux affaires familiales ; que selon les dispositions de l'article 371-1 du code civil, l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant ; qu'elle appartient aux père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé, sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne ; que Monsieur X... exerce régulièrement son droit de visite et verse sa pension alimentaire ; qu'il démontre l'existence de l'affection qu'il porte à son enfant et de l'intérêt qu'il porte également à son entretien et son éducation ; qu'il ne justifie pas pour autant de cet intérêt depuis sa naissance compte-tenu de la tardiveté de la reconnaissance alors même qu'il avait été averti de cette naissance par la mère dans les jours qui avaient suivi ; qu'il n'y a donc pas lieu de constater qu'il a démontré l'affection qu'il porte à sa fille depuis sa naissance ; qu'il convient de constater qu'il pourvoit à son entretien et à son éducation par le paiement régulier de la pension alimentaire ; que néanmoins la question est de savoir si l'exercice conjoint de l'autorité parentale est conforme à l'intérêt de l'enfant en ce qu'il peut notamment être exercé de manière sereine par les deux parents en prenant en compte les impératifs légitimes de chacun d'eux ; qu'il ressort des pièces versées au débat que Monsieur X... a envoyé des appels particulièrement insultants à Mademoiselle Y... dès la fin 2002 alors que cette dernière était enceinte de leur fille B... ; qu'au cours de la période de prévention, soit du 7 juillet 2003 au 6 juillet 2004, 2980 appels ont été répertoriés par les services d'enquête, lesquels ont noté que l'écoute de ces messages leur avait permis de mesurer l'impact psychologique et le profond trouble dans lequel Mademoiselle Y... avait dû se trouver après tant d'insultes et de propos grossiers sur sa personne et que le ton avec lequel Monsieur X... s'exprimait était dédaigneux et souvent incisif, démontrant une réelle méchanceté et une volonté de nuire ; que les propos contenus dans les appels de novembre et décembre 2002 sont également particulièrement odieux et démontrent alors son intempérance alcoolique ; que ce comportement a émaillé la fin de la grossesse de Mademoiselle Y... et les premiers mois de l'enfant alors qu'elle avait subi une césarienne et se trouvait de ce fait dans un état de grande vulnérabilité ; que la crainte de Mademoiselle Y... de voir resurgir un tel comportement de la part de Monsieur X... ne saurait être révélateur de mauvaise foi de sa part mais d'une réelle peur, comme étant définitivement marquée par ce comportement qu'elle ne peut oublier ; que Mademoiselle Y... a certes refusé un mandat envoyé par Monsieur X... outre un colis ; qu'il s'agit des deux seuls refus de Mademoiselle Y... alors que ces envois ont été effectués en décembre 2004 à un moment où les parties se trouvaient en cours de procédure pénale, le tribunal Correctionnel de THIONVILLE n'étant intervenu qu'en mai 2005 ; que ces deux refus de Mademoiselle Y... ne sont donc pas de nature à prouver la mauvaise foi de cette dernière et la volonté réitérée de faire obstacle aux liens entre l'enfant et le père dans le seul but de pouvoir ensuite le lui reprocher ; qu'il est heureux que depuis 2004, rien ne puisse être reproché à Monsieur X... sur un plan pénal ; qu'il a bénéficié d'un long suivi en psychiatrie auprès du docteur Z... du 8 juillet 2005 au 25 avril 2007, soit postérieurement à la décision du tribunal correctionnel de THIONVILLE du 12 mai 2005 ; qu'il est à noter qu'il a attendu sa convocation devant le tribunal pour mettre en place ce suivi médical ; que par ailleurs l'attestation du docteur A... du 15 janvier 2010 aux termes de laquelle il atteste à ce jour de l'existence d'aucun trouble psychiatrique patent présente une valeur probante limitée dès lors qu'il ne s'agit pas de son médecin psychiatre habituel ; que pour autant et sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise psychiatrique ou psychologique, il convient de vérifier si, au regard de ces antécédents, Monsieur X... est en mesure de prendre en considération des impératifs autres que les siens et notamment ceux de la mère qui prend en charge l'enfant de manière quotidienne ; qu'il n'y a donc pas lieu de constater que Monsieur X... ne présente aucun trouble psychologique ; qu'il ressort du courrier de Mademoiselle Y... en date du 12 janvier 2010 écrit à l'attention de l'association ... qu'en considération des mauvaises conditions climatiques le samedi 9 janvier 2010 et des mauvaises conditions de circulation entre THIONVILLE et AUDUN LE TICHE (routes enneigées) elle avait demandé à Monsieur X... par l'intermédiaire de l'association de « libérer B... un peu plus tôt dans l'après-midi afin de pouvoir rentrer avant la nuit noire » ; qu'elle indique que Monsieur X... a refusé catégoriquement sa demande au motif que son droit de visite et d'hébergement s'étendait jusqu'à 18 heures et que lui aussi faisait de la route ; que ce courrier alors qu'il est de notoriété publique que les conditions de circulation en Moselle étaient particulièrement difficiles sur les axes secondaires au cours du mois de janvier 2010 est suffisamment probant de l'existence même de cette demande et de la réponse apportée, s'agissant de faits juridiques ; que ce refus alors que la demande avait pour but la sécurité de l'enfant caractérise la permanence d'une difficulté pour Monsieur X... à prendre en considération des impératifs légitimes autres que les siens de sorte qu'il n'est pas conforme à l'intérêt de l'enfant d'accorder au père l'exercice conjoint de l'autorité parentale ; qu'en conséquence la demande de Monsieur X... tendant à ce que l'autorité parentale soit exercée de manière conjointe sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée » ;
1°/ ALORS QUE lorsqu'il se prononce sur les modalités de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération les sentiments exprimés par l'enfant mineur dans les conditions prévues à l'article 388-1 du code civil ; qu'il résulte de ce texte que, dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet ; qu'à cet égard, le juge doit s'assurer que le mineur a été informé, par le ou les titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, de son droit à être entendu et à être assisté d'un avocat ; qu'en ne recherchant pas si B..., née le ... 2002 et donc capable de discernement, avait été informée de son droit à être entendue et, éventuellement, assistée d'un avocat, la Cour d'appel a violé l'article 388-1 du code civil ;
2°/ ALORS QU'en principe, les père et mère exercent en commun l'autorité parentale ; que, par exception, le juge peut en confier l'exercice à l'un d'eux si l'intérêt de l'enfant le commande ; que pour débouter Monsieur X... de sa demande d'exercice conjoint de l'autorité parentale, les juges du fond ont retenu que Madame Y... était « définitivement marquée » par les faits d'appels malveillants commis par l'exposant il y a près de 8 ans, qui n'ont jamais atteint B... et n'ont pas été réitérés depuis, et craignait « de voir resurgir un tel comportement » ; qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi l'intérêt de l'enfant commanderait que l'autorité parentale fut confiée à la mère seule, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 373-2-1 du code civil ;
3°/ ALORS QUE nul ne peut se constituer une preuve par soimême ; que le contenu d'un courrier ne peut établir la prétention de son destinataire ; que pour décider qu'il n'est pas conforme à l'intérêt de l'enfant d'accorder au père l'exercice conjoint de l'autorité parentale, les juges du fond se sont fondés sur un courrier rédigé par Madame Y... elle-même, duquel il résulterait que Monsieur X... aurait refusé la demande de cette dernière de libérer un peu plus tôt B... un samedi, jour de son droit de visite, en raison de la tempête et du mauvais état des routes ; qu'en retenant ainsi, comme seul élément de preuve de la prétendue incapacité de Monsieur X... à prendre en considération d'autres intérêts légitimes que les siens, un courrier rédigé par Madame Y... elle-même, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;