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26/06/2013 | FRANCE | N°12-15593

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2013, 12-15593


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 8 octobre 2004 par la société Datacol France en qualité de directeur général, a été licencié pour motif économique par lettre du 16 juillet 2009 ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour retards répétés et importants dans le paiement du salaire, alors, selon le moyen, que tout retard dans le paiement du salaire cause nécessairement au sa

larié un préjudice qu'il appartient aux juges du fond de réparer par l'allocation de dom...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 8 octobre 2004 par la société Datacol France en qualité de directeur général, a été licencié pour motif économique par lettre du 16 juillet 2009 ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour retards répétés et importants dans le paiement du salaire, alors, selon le moyen, que tout retard dans le paiement du salaire cause nécessairement au salarié un préjudice qu'il appartient aux juges du fond de réparer par l'allocation de dommages-intérêts ; qu'en statuant dès lors comme elle a fait, sans constater que le retard de paiement du salaire résultait d'une cause étrangère qui ne pouvait être imputée à la société Datacol France, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu que les juges du fond ont constaté que l'employeur avait versé l'intégralité des salaires dus dès la réclamation du salarié et que celui-ci ne justifiait d'aucun préjudice particulier ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1233-3 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse l'arrêt retient par motifs propres que, d'une part, la société fait valoir que la lettre de licenciement est motivée, qu'elle possède des locaux à Paris susceptibles d'accueillir le siège social pour un coût maîtrisé, que les délégués du personnel ont constaté l'intérêt économique et stratégique du transfert du siège social de Nice à Nanterre et émis un avis favorable, qu'elle a spontanément produit aux débats le bilan 2009, le rapport de gérance à l'assemblée générale du 29 juin 2010, le rapport du commissaire aux comptes explicitant la nouvelle organisation ayant pour finalité d'améliorer l'efficacité de la force de vente, qu'elle produit le livre du personnel justifiant de l'embauche de nouveaux commerciaux et démontre la progression de son chiffre d'affaires, qu'aucun poste d'encadrement n'était disponible en Italie où la société mère connaissait également des difficultés économiques ; que d'autre part, la société produit ces pièces ; que par suite c'est après une juste analyse des documents produits que les premiers juges ont retenu la cause réelle et sérieuse du licenciement en constatant par des motifs pertinents que la cour adopte que la situation économique de la société a motivé le transfert du siège social ainsi que la proposition de reclassement refusée par le salarié ; et par motifs adoptés que la situation économique a motivé le transfert du siège social à Nanterre justifiant la proposition de transfert dans un autre établissement (Grenade) refusée par le salarié ;

Qu'en statuant ainsi sans rechercher si le licenciement était justifié par des difficultés économiques ou par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 17 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Datacol France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Datacol France à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à l'octroi d'une indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... conclut à la nullité du licenciement faute de production de toute pièce relative à la situation économique de l'employeur, à la nécessité de transférer le siège à Nanterre et de l'y affecter, et de toute recherche loyale de reclassement notamment au siège de la société mère ; que, toutefois, la société DATACOL fait valoir que la lettre de licenciement est motivée, qu'elle possède des locaux à Paris susceptible d'accueillir le siège social pour un coût maîtrise, que les délégués du personnel ont constate l'intérêt économique et stratégique du transfert du siège social, et émis un avis favorable ; qu'elle observe en outre avoir spontanément produit aux débats le bilan 2009, le rapport de gérance de l'assemblée générale du 29 juin 2010, le rapport du commissaire aux comptes explicitant la nouvelle organisation ayant pour finalité d'améliorer l'efficacité de la force de vente ; elle indique enfin produire le livre du personnel justifiant de l'embauche de nouveaux commerciaux et démontrer la progression de son chiffre d'affaire elle précise qu'aucun poste d'encadrement n'était disponible en Italie ou la société mère connaissait également des difficultés économiques ; qu'il est constant que les pièces sus indiquées sont produites ; que par suite, c'est après une juste analyse des documents produits, que les premiers juges ont déclaré licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse en constatant, par des motifs pertinents que la cour adopte, que la situation économique de la société DATACOL a motivé le transfert du siège social ainsi que la proposition de reclassement refusée par Monsieur X... ; que pour conclure à un transfert fictif du siège social, Monsieur X... invoque en premier lieu les conclusions du commissaire aux comptes outre l'absence de mention du transfert dans le procès-verbal de l'assemblée générale du 29 juin 2010 au titre des événements importants survenus au cours de l'année , toutefois, il est constant d'une part que cette assemblée générale s est tenue à Paris, d'autre part qu'aux termes des dites conclusions, le commissaire aux comptes prend acte de ce que l'entreprise a « déménagé à nouveau » en 2009, ce qui entraîné de « nouvelles procédures » ; qu'il en résulte que Monsieur X... n'est pas fondé à soutenir que l'absence de mention de ce transfert au titre des événements importants en démontre le caractère fictif ; que de même, si Monsieur X... fait valoir en second lieu que la procédure a fin de transfert du siège social de l'entreprise a été initiée dès le mois de mars 2009, soit avant même la fin de celle visant à obtenir l'autorisation de le licencier pour faute grave, force est d'admettre toutefois qu'aucun texte n'interdit à l'employeur d'envisager la réorganisation de son entreprise, pendant l'instruction d'une demande d'autorisation de licenciement, en ce compris la décision concernant le siège de l'entreprise ; que par ailleurs, et comme souligné par les premiers juges, il est constant que la procédure à fin de licenciement disciplinaire, rejetée par l'administration le 17 juin 2009, était donc close à la date de convocation de Monsieur X... à l'entretien préalable au licenciement économique, fixée le 25 juin 2009 initialement et finalement reportée au 30 juin, il en résulte que Monsieur X... n'est pas fondé a soutenir que le dit transfert n'a eu lieu que pour contourner le refus de l'autorisation administrative de licenciement ; qu'en outre, le moyen pris en sa troisième branche, tiré de la circonstance que des mesures d'accompagnement, similaires à celles prises lors du transfert de l'activité de l'entreprise au cours de l'année 2008, n'ont pas été mises en place à l'occasion du transfert du siège social, apparaît inopérante et ne peut qu'être écarté, étant observé de surcroît qu'il résulte du courrier invitant Monsieur X... a accepter ou refuser ladite modification que des mesures d'accompagnement concernant les frais de déménagement et recherche de logement avaient été mises en place ; qu'enfin, l'obligation de reclassement n'excluant pas les offres dans un poste moins bien rémunéré, le moyen pris en sa quatrième branche, tiré du manque de sérieux de la proposition de reclassement à Grenade, en qualité de Directeur des Opérations moyennant paiement d'un salaire net annuel de 40 000 euros, ne peut également qu'être rejeté, étant observé que cette offre faite le 3 juin 2009, à la suite du relus de Monsieur X... en date du 16 mai de se voir rattacher au nouveau siège social, ne peut non plus être qualifiée de tardive ; qu'il s'ensuit que Monsieur X..., n'est également pas fonde à soutenir que l'employeur a failli à son obligation de reclassement ;

Et AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE début mars 2009, parallèlement à la procédure de licenciement initiée à l'encontre de Monsieur X... et close le 17 juin 2009, la société DATACOL envisage le transfert de son siège social de Nice à Paris, mettant en oeuvre une procédure de consultation des délégués du personnel débutant le 26 mars 2009 et dans laquelle le motif économique du transfert est mis en évidence ; que, suite à cette consultation, le siège social étant transféré à Paris, Monsieur X... refuse le poste qui lui est proposé à Nanterre par un courrier recommandé avec accusé de réception daté du 16 mai 2009 que, suite à ce refus Monsieur X... reçoit une proposition de reclassement dans une filiale de DATACOL à Grenade qu'il qualifie de « pas sérieuse » et refuse ; que, suite à ces refus, Monsieur X... est convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour motif économique par deux courriers recommandés, l'entretien ayant eu lieu le 30 juin 2009, date à laquelle il recevra en outre un document de présentation de la convention de reclassement ; que Monsieur X... est licencié pour motif économique par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 16 juillet 2009, la date de fin du préavis étant fixée au 9 novembre 2009 ; qu'en conséquence les éléments versés au débat font la preuve que la procédure de licenciement disciplinaire de Monsieur X... est close préalablement à la convocation de ce dernier à un entretien préalable à un licenciement économique ; que la situation économique a motivé le transfert du siège social de DATACOL à Nanterre, justifiant ainsi la proposition de transfert dans un autre établissement refusée par Monsieur X... ; qu'en conséquence que Monsieur X... est licencié pour motif économique dans le respect des textes en vigueur ;

ALORS, d'une part, QUE constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par l'employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification du contrat de travail, refusée par le salarié, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; qu'en énonçant, pour retenir l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, que la situation économique de la société DATACOL avait motivé le transfert du siège social et, partant, la proposition de modification du contrat de travail adressée à Monsieur X..., sans vérifier que cette décision était justifiée par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou par les difficultés économiques qu'elle rencontrait, la Cour d'appel a violé l'article L.1233-3 du Code du travail ;

ALORS, d'autre part, QUE la réalité du motif économique invoqué doit être appréciée au regard du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'employeur ; qu'en l'espèce, il était constant que la société DATACOL FRANCE appartient au groupe italien DATACOL, exerçant, comme sa filiale, une activité de distribution de matériel et d'outillage ; qu'en limitant dès lors son analyse à la société DATACOL FRANCE, sans rechercher si la décision de déménagement du siège social à l'origine du licenciement était justifiée par la situation économique du groupe DATACOL, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1233-3 du Code du travail ;

Et ALORS, encore, QUE ne constitue pas une cause économique réelle et sérieuse de licenciement la réorganisation décidée à seule fin d'assurer une meilleure organisation de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel celle-ci appartient ; qu'en déboutant dès lors Monsieur X... de sa demande, après avoir relevé que le transfert du siège social de la société DATACOL FRANCE avait, selon cette dernière, pour finalité d'améliorer l'efficacité de la force de vente de l'entreprise, et alors que la lettre de licenciement notifiée au salarié, dont les termes fixaient les limites du litige, justifiait cette décision par une exigence d'« augmenter » la productivité, la Cour d'appel n'a pas tiré toutes les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, au regard des articles L.1235-1 et L.1233-3 du Code du travail, ainsi violés ;

ALORS, enfin, QUE le licenciement économique ne peut intervenir que lorsque le reclassement de l'intéressé n'est pas possible ; que les recherches de reclassement doivent être menées à l'intérieur du groupe, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer une permutation du personnel, même si certaines de ces entreprises sont situées à l'étranger, sauf à l'employeur à démontrer que la législation applicable localement aux salariés étrangers ne permet pas le reclassement ; qu'en l'espèce, dans ses écritures (p. 10), Monsieur X... relevait que la société DATACOL FRANCE ne démontrait pas même avoir recherché s'il existait des possibilités de reclassement au sein, notamment, de la société mère située en Italie ; qu'en déboutant dès lors le salarié de sa demande, au seul motif qu'un emploi de directeur des opérations au sein de la filiale espagnole du groupe avait été proposé à Monsieur X..., sans constater la réalité et le sérieux des démarches entreprises par la société DATACOL FRANCE afin de rechercher s'il existait des postes disponibles, compatibles avec la qualification du salarié, au sein des différentes entreprises du groupe auquel elle appartenait, la Cour d'appel a violé les articles L.1233-3 et L.1233-4 du Code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts pour retards répétés et importants dans le paiement du salaire.

AUX MOTIFS QUE Monsieur X... demande paiement d'une somme de 4.000 euros en indiquant avoir été contraint pour obtenir le 18 novembre 2008 régularisation des augmentations de salaire 2007 et 2008, prévues dans sa lettre d'engagement du 8 octobre 2004, puis avoir été contraint le 21 janvier 2009 de saisir le conseil de prud'hommes en référé pour obtenir, dès le lendemain, paiement du salaire de mois de décembre 2008 outre 13ème mois ; que toutefois, par un motif pertinent que la cour ne peut qu'adopter tout en constatant qu'il n'est allégué d'aucun préjudice résultant du retard de paiement, le conseil de prud'hommes a rejeté cette demande en observant que les pièces du dossier établissait l'intégrale libération de l'employeur au titre des salaires dus ;

Et AUX MOTIFS, adoptés des premiers juges, QUE les éléments versés au débat font la preuve que Monsieur X... a été réglé de l'intégralité de ses droits concernant les salaires et accessoires de salaires ;

ALORS QUE tout retard dans le paiement du salaire cause nécessairement au salarié un préjudice qu'il appartient aux juges du fond de réparer par l'allocation de dommages et intérêts ; qu'en statuant dès lors comme elle l'a fait, sans constater que le retard de paiement du salaire résultait d'une cause étrangère qui ne pouvait être imputée à la société DATACOL FRANCE, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-15593
Date de la décision : 26/06/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2013, pourvoi n°12-15593


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.15593
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