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26/06/2013 | FRANCE | N°12-14753

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2013, 12-14753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 8 novembre 2011), que suite au déraillement de deux wagons de train de fret ferroviaire survenu le 18 juillet 2009 en gare de Forbach, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du secteur de Metz de la SNCF a décidé d'ordonner une mission d'expertise lors de sa réunion du 28 juillet 2009 ;
Attendu que le CHSCT fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance de référé ayant annulé la délibération adoptée par le

CHSCT alors, selon le moyen :
1°/ que selon les dispositions de l'article L. 46...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 8 novembre 2011), que suite au déraillement de deux wagons de train de fret ferroviaire survenu le 18 juillet 2009 en gare de Forbach, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) du secteur de Metz de la SNCF a décidé d'ordonner une mission d'expertise lors de sa réunion du 28 juillet 2009 ;
Attendu que le CHSCT fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance de référé ayant annulé la délibération adoptée par le CHSCT alors, selon le moyen :
1°/ que selon les dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de Travail (CHSCT) peut faire appel à un expert agrée «lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement» ; que pour annuler la désignation de l'expert, la cour d'appel a relevé que l'accident ferroviaire survenu en gare de Forbach a été «ponctuel», n'a eu que des conséquences matérielles et constituerait un risque inhérent à la circulation des trains pour en déduire qu'aucun risque grave dans l'établissement ne justifiait l'expertise ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors que le déraillement d'un train survenu en gare, en présence de salariés aux abords des voies, avait nécessairement exposé ceux-ci à un risque grave, ce qui justifiait l'expertise sollicitée, la cour d'appel a, par motifs propres, violé le texte susvisé ;
2°/ que pour annuler la désignation de l'expert, la cour d'appel a relevé que le recours à l'expertise serait prématuré en l'absence de précision préalable sur les causes de l'accident ferroviaire lui-même ; qu'en statuant ainsi, alors que le CHSCT invoquait le risque grave né de la pluriactivité sur un même établissement ¿compte tenu de l'usage par des opérateurs privés des voies sur lesquelles interviennent les agents de la SNCF ¿, ce dont il résultait que la détermination de la cause technique du déraillement du train n'était pas un préalable à l'étude des risques encourus par les agents du fait de la pluriactivité sur le site, la cour d'appel a, par motifs propres, statué sur un motif inopérant et violé l'article L. 4614-12 du code du travail ;
3°/ que le champ de compétence du CHSCT et, par conséquent, celui de ses pouvoirs, est l'établissement, envisagé comme le lieu au sein duquel des travailleurs exercent leur activité ; qu'en conséquence, le CHSCT est compétent pour assurer la protection de tous les travailleurs intervenant dans son périmètre ¿l'établissement ¿ même si, en tant que coopératrice de l'activité, une entreprise extérieure est également concernée ; qu'en annulant la désignation de l'expert aux motifs qu'une procédure d'expertise du CHSCT de la SNCF ne saurait concerner des procédures mises en oeuvres par d'autres opérateurs que cette société, la cour d'appel a, par motifs adoptés, violé l'article L. 4614-12 du code du travail qu'en tout cas en statuant ainsi sans rechercher si le personnel de la SNCF était, comme il était soutenu, directement concerné quant à sa sécurité par lesdites procédures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions ;
Mais attendu que selon les dispositions de l'article L. 4614-12-1° du code du travail, le CHSCT ne peut faire appel à un expert agréé que lorsqu'un risque grave , révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement ;
Et attendu qu'ayant retenu qu'il n'y avait pas de risque grave identifié et actuel dès lors que le déraillement de deux wagons d'un train de marchandises, motivant selon le CHSCT la décision de recours à l'expert, était un événement ponctuel, que les procédures de sécurité mises en oeuvre par la SNCF avaient efficacement fonctionné, et que la SNCF avait diligenté des enquêtes internes et demandé auprès du tribunal administratif la désignation d'un expert technique pour comprendre les causes de cet accident, la cour d'appel a fait une exacte application de ces dispositions et en a à bon droit déduit qu'il y avait lieu d'annuler la délibération du CHSCT ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SNCF aux dépens ;
Vu les articles L. 4614-3 du code du travail et 700 du code de procédure civile, condamne la SNCF à payer au CHSCT du secteur de Metz de l'Even Lorraine Nord la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour le CHSCT du secteur de Metz de l'Even Lorraine Nord
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé l'ordonnance ayant annulé la délibération adoptée par le CHSCT le 28 juillet 2009.
AUX MOTIFS propres QU'aux termes de l'article L. 4614-12 du code du travail, «le CHSCT peut faire appel à un expert agréé lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement» ; qu'en l'espèce, il est constant que le déraillement de deux wagons qui n'a eu que des conséquences matérielles est survenu pour des causes qui demeurent ignorées à ce jour ; qu'à la demande de Réseau Ferré de France, une expertise judiciaire a été ordonnée par le Tribunal administratif et que des enquêtes internes se poursuivent ; que l'incident déploré a permis de vérifier l'efficacité des procédures de sécurité mise en place par la SNCF, lesquelles ont permis l'arrêt d'urgence du train impliqué et d'assurer la fermeture des voies et que, en tout cas, il n'a pas révélé l'existence d'une insuffisance de ces procédures et de leur mise en oeuvre ; qu'il suit de là que, en l'état, le seul fait du déraillement de deux wagons, qui constitue une risque inhérent à la circulation des trains mais qui, au lieu où il s'est produit, est demeuré ponctuel, ne permet pas de considérer qu'il existe objectivement un risque grave dans l'établissement de l'Even Lorraine Nord justifiant l'appel à un expert par le CHSCT ; que du reste, le recours à l'expertise apparaît pour le moins prématuré alors qu'il convient au préalable de déterminer les causes de l'incident, ce que le cabinet SECAFI n'est pas en mesure de déterminer compte tenu de son manque de qualification sur le plan technique, pour vérifier ensuite, au vu des conclusions de l'expertise ordonnée par le Tribunal administratif et éventuellement des enquêtes en cours, si cet incident révèle ou non par les causes qui l'ont engendré l'existence d'un risque grave pour la sécurité des employés de l'Even Lorraine Nord susceptible de rendre nécessaire l'expertise revendiquée par le Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail ; qu'en conséquence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les arguments et moyens développées par les parties, il y a lieu de confirmer la décision entreprise.
AUX MOTIFS adoptés QUE le tribunal considère que l'organisation d'une expertise n'a d'utilité que si elle tend à améliorer la sécurité des agents après modification des systèmes en place ; qu'or en l'espèce, l'employeur, à savoir la SNCF, n'a pas le pouvoir de s'immiscer dans les systèmes mis en place par les autres opérateurs pour les modifier ; que donc l'expertise restera lettre morte ; que dans ces conditions, la Juridiction estime qu'elle ne saurait porter sur une analyse des procédures de sécurité mises en place par d'autres opérateurs que la SNCF ; que de même, elle ne peut concerner que les risques auxquels sont exposés les personnels de l'établissement équipement Nord Lorraine relevant du site de Metz
ALORS QUE selon les dispositions de l'article L. 4614-12 du code du travail, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de Travail (CHSCT) peut faire appel à un expert agrée «lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement» ; que pour annuler la désignation de l'expert, la cour d'appel a relevé que l'accident ferroviaire survenu en gare de Forbach a été «ponctuel», n'a eu que des conséquences matérielles et constituerait un risque inhérent à la circulation des trains pour en déduire qu'aucun risque grave dans l'établissement ne justifiait l'expertise ; qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors que le déraillement d'un train survenu en gare, en présence de salariés aux abords des voies, avait nécessairement exposé ceux-ci à un risque grave, ce qui justifiait l'expertise sollicitée, la cour d'appel a, par motifs propres, violé le texte susvisé.
ET ALORS encore QUE pour annuler la désignation de l'expert, la cour d'appel a relevé que le recours à l'expertise serait prématuré en l'absence de précision préalable sur les causes de l'accident ferroviaire lui-même ; qu'en statuant ainsi, alors que le CHSCT invoquait le risque grave né de la pluriactivité sur un même établissement ¿compte tenu de l'usage par des opérateurs privés des voies sur lesquelles interviennent les agents de la SNCF ¿, ce dont il résultait que la détermination de la cause technique du déraillement du train n'était pas un préalable à l'étude des risques encourus par les agents du fait de la pluriactivité sur le site, la cour d'appel a, par motifs propres, statué sur un motif inopérant et violé l'article L. 4614-12 du code du travail.
ET ALORS en outre QUE le champ de compétence du CHSCT et, par conséquent, celui de ses pouvoirs, est l'établissement, envisagé comme le lieu au sein duquel des travailleurs exercent leur activité ; qu'en conséquence, le CHSCT est compétent pour assurer la protection de tous les travailleurs intervenant dans son périmètre ¿l'établissement ¿ même si, en tant que coopératrice de l'activité, une entreprise extérieure est également concernée ; qu'en annulant la désignation de l'expert aux motifs qu'une procédure d'expertise du CHSCT de la SNCF ne saurait concerner des procédures mises en oeuvres par d'autres opérateurs que cette société, la cour d'appel a, par motifs adoptés, violé l'article L. 4614-12 du code du travail.

QU'en tout cas en statuant ainsi sans rechercher si le personnel de la SNCF était, comme il était soutenu, directement concerné quant à sa sécurité par lesdites procédures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-14753
Date de la décision : 26/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 08 novembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 jui. 2013, pourvoi n°12-14753


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.14753
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