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26/06/2013 | FRANCE | N°11-81296

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 juin 2013, 11-81296


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Thomas X...,

1°) contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAU, en date du 4 mai 2007, qui, dans l'information suivie contre lui, du chef de viol aggravé, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

2°) contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 3 février 2011, qui, pour atteintes sexuelles aggravées, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement dont trois ans avec surs

is et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Thomas X...,

1°) contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAU, en date du 4 mai 2007, qui, dans l'information suivie contre lui, du chef de viol aggravé, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

2°) contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 3 février 2011, qui, pour atteintes sexuelles aggravées, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement dont trois ans avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, dirigé contre l'arrêt du 4 mai 2007, pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 77, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué n'a pas fait droit à la demande de nullité du procès-verbal de notification de garde à vue présentée par M. X... ;
"aux motifs que ¿ il est fait grief à la procédure de garde à vue de M. X..., premièrement d'être nulle pour défaut de mention exacte du magistrat du Parquet avisé de cette mesure, deuxièmement d'être nulle en raison du fait que la mention de l'heure de placement en garde à vue est identique à celle de l'information du parquet ; que sur le premier grief : que le procès-verbal de placement en garde à vue de M. X... précise que "le 24 Janvier 2007 à 9 heures, le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Dax a été informé de la présente garde à vue" ; qu'il résulte donc de cette mention que le Parquet pris en la personne du procureur de la République lui-même a bien été avisé ; que, sur le second grief : que le fait que l'heure du placement en garde à vue coïncide exactement avec l'heure de l'information donnée au Parquet ne présente que des avantages en termes de protection des libertés publiques ; que ce grief ne saurait être retenu et que contrairement à ce que soutient la défense, une telle pratique ne permet pas de suspecter que l'information au Parquet n'a pas été faite ;
"1°) alors que le juge répressif doit, en tant que gardien de la liberté individuelle, opérer un contrôle concret et effectif, et non purement formel, du respect des exigences liées à l'information immédiate du parquet lors du placement d'une personne en garde à vue ; qu'en se contentant de retenir qu'il résultait de la mention du procès-verbal que le parquet pris en la personne du Procureur de la République lui-même avait été avisé sans rechercher, comme elle y était invitée, si une telle information du Procureur de la République lui-même, dont l'absence était établie aux dates et heures du placement, n'avait pas été par principe impossible, la chambre de l'instruction n'a pas exercé un contrôle effectif de la régularité de la garde à vue et a violé les textes susvisés ;
"2°) alors que, le juge répressif doit, en tant que gardien de la liberté individuelle, opérer un contrôle concret et effectif, et non purement formel, du respect des exigences liées à l'information immédiate du parquet lors du placement d'une personne en garde à vue ; qu'en retenant, après avoir constaté la mention au procès-verbal d'une stricte identité d'horaires entre le moment du placement en garde à vue du demandeur et celui de l'information du parquet, mention par nature intrinsèquement mensongère puisque matériellement impossible, que celle-ci ne permettait pas de suspecter que la garantie d'information du parquet n'aurait pas été respectée, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les textes susvisés" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, l'un des magistrats du parquet de Dax, lesquels, en raison du principe de l'indivisibilité du ministère public, peuvent légalement se substituer l'un à l'autre, ayant été avisé du placement en garde à vue de M. X..., dès le début de cette mesure, les dispositions de l'article 77 du code de procédure pénale, dans sa rédaction en vigueur le 24 janvier 2007, ont été respectées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, dirigé contre l'arrêt du 3 février 2011, pris de la violation des articles 7 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 227-25 et 227-26 4° du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré M. X... coupable d'atteintes sexuelles sur mineur de quinze ans avec la circonstance aggravante que la mineure a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion du message à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de cinq ans dont trois avec sursis assorti d'une mise à l'épreuve ;
"aux motifs qu'ii est constant que le prévenu est entré en contact avec la victime par internet, puis a poursuivi le dialogue avec celle-ci par la même voie ; qu'il s'est montré menaçant lorsque celle-ci a paru se désintéresser de ce dialogue et s'éloigner de lui ; que le prévenu a fini par convenir qu'il connaissait l'âge de la victime, 14 ans, lequel était d'ailleurs clairement indiqué dans un de ses courriels. II a utilisé un site de rencontre pour adolescents se faisant passer pour un jeune de 17 ans, se présentant ensuite comme âgé de 19 ans, obtenant ainsi l'adresse électronique de la victime pour discuter avec elle sur MSN à de nombreuses reprises sur plusieurs semaines, la jeune fille mise progressivement en confiance, lui livrant des éléments importants de sa vie ; que de son côte, âgé en réalité de 26 ans, il indiquait être attiré par elle, prétendant même l'aimer ; que les messages ont ensuite revêtu une connotation sexuelle ; que la jeune fille, lorsqu'il a souhaité la rencontrer, a louvoyé et repoussé à plusieurs reprises le rendez-vous, indiquant qu'elle n'était pas prête pour ce genre de relations, tentant même de l'exclure de sa liste d'amis sur MSN ; que c'est alors qu'il s'est montré non seulement encore insistant, mais directement menaçant, notamment en prétendant envoyer des virus sur l'ordinateur de la victime ou celui de ses parents, sur lesquels il se disait renseigné ; que ceci tout en continuant à laisser des messages non dénués d'affection, gardant ainsi sur cette jeune fille en recherche d'affection, une réelle emprise ; que si celle-ci a pensé, comme le souligne le premier juge, du haut de ses 14 ans, qu'allant au rendez-vous, elle le convaincrait par ses seules paroles de ne pas avoir de relations sexuelles lors de cette première rencontre, dès ce premier contact physique, il l'a sodomisée et pénétrée vaginalement, proposant même, aux dires de la victime, une fellation ; que le prévenu convient que cette rencontre a été des plus rapide, les relations sexuelles pratiquées sinon imposées sans aucun préliminaire ni marque d'affection, dans un bois, au bord d'une route ; qu'iI ne saurait se dédouaner en prétendant que la victime était parfaitement consentante, du moins qu'il n'a pas pris conscience de ce refus ; qu'en effet, non seulement la différence d'âge et d'évidence de maturité, l'emprise acquise par les contacts internet, entrecoupés de propositions et de menaces relèvent d'une attitude de quasi prédation sur une jeune fille immature sur le plan sexuel, en recherche d'affection, encore traduite par ses propos ultérieurs pour le moins méprisants ; que c'est précisément ce genre d'attitude et l'abus réalisé par moyen de communication informatique, permettant à des individus, par des conversations trompeuses et répétées, d'obtenir de personnes plus jeunes, perçues comme telles, des faveurs sexuelles, que la loi a entendu punir sévèrement ; que la déclaration de culpabilité sera donc confirmée ;
"alors que le droit pénal ne peut en principe intervenir dans le domaine des pratiques sexuelles consenties qui relèvent du libre arbitre des individus sauf à ce que soit établie l'existence de raisons particulières graves de nature à justifier une ingérence des pouvoirs publics dans le domaine de la sexualité ; qu'en sanctionnant pénalement le majeur qui a eu un rapport sexuel consenti avec un mineur de quinze ans du seul fait de l'âge du mineur sans établir de distinction au sein de la catégorie des mineurs de quinze ans entre ceux qui, en raison de leur jeune âge, ne peuvent jamais accepter en connaissance de cause un acte sexuel et dont le consentement est dès lors nécessairement surpris dans des circonstances constitutives d'une agression sexuelle, et ceux qui, disposant d'un discernement suffisant, peuvent librement consentir à avoir un rapport sexuel, lequel relève alors de la sphère privée, le délit de l'article 227-25 du code pénal porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée ; qu'en appliquant ce texte aux faits reprochés et en déclarant le demandeur coupable du chef d'atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans, la cour d'appel a violé les textes et principes susvisés" ;
Attendu que le moyen, mélangé de fait, qui invoque pour la première fois, devant la Cour de cassation, la violation de dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme, est nouveau et comme tel irrecevable ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, dirigé contre l'arrêt du 3 février 2011, pris de la violation des articles 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 66 de la Constitution, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-19 et 132-24 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe constitutionnel d'individualisation des peines ;
"en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a condamné le demandeur à une peine de cinq ans d'emprisonnement dont trois ans avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans ;
"aux motifs que de même que les sanctions prononcées, au regard de la gravité intrinsèque de l'infraction, de son caractère hautement attentatoire à l'ordre public et au traumatisme de la victime, la condamnation à une peine d'emprisonnement pour partie ferme s'en trouvant justifiée et nécessaire, aucune autre sanction ou peine de substitution ne paraissant adéquate à semblable déviance. La Cour ne trouve pas, en l'état du dossier, de justifications suffisantes pour envisager un quelconque aménagement ab initio de la peine d'emprisonnement ferme ;
"1°) alors que, en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire ; qu'en justifiant le prononcé d'un emprisonnement ferme au seul regard de la gravité des faits sans mieux s'expliquer sur les éléments de personnalité du condamné démontrant que celui-ci bénéficiait d'un casier judiciaire vierge, était unanimement décrit comme une personne respectueuse et stable, ne présentant au surplus aucune dangerosité psychiatrique, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs et a violé les textes susvisés ;
"2°) alors que la peine d'emprisonnement ferme prononcée doit faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 du code pénal, sauf si la personnalité et la situation du condamné l'interdisent et sauf impossibilité matérielle ; qu'en excluant tout aménagement de la peine d'emprisonnement ferme prononcée à l'encontre du demandeur sans mieux motiver sa décision quant aux éléments de la personnalité et de la situation du condamné qui faisaient obstacle à un tel aménagement, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs et a violé les textes susvisés" ;
Vu l'article 132-24 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ce texte, qu'en matière correctionnelle, en dehors des condamnations en récidive légale prononcées en application de l'article 132-19-1, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; que, dans ce cas, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 à 132-28 ;
Attendu que, pour condamner M. X... à cinq ans d'emprisonnement, dont trois ans avec sursis et mise à l'épreuve, l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs exempts de toute référence à la personnalité de l'auteur de l'infraction, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure ;

Par ces motifs :

I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 4 mai 2007 :
Le REJETTE ;
II - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 3 février 2011 :
CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la peine, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Pau, en date du 3 février 2011, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Pau, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Pau et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Laurent conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-81296
Date de la décision : 26/06/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 03 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 jui. 2013, pourvoi n°11-81296


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.81296
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