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26/06/2013 | FRANCE | N°11-24224

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 26 juin 2013, 11-24224


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 février 2011), qu'André Noël Y...est décédé le 26 août 1992, laissant pour héritiers, sa veuve, Isabelle Z..., et leurs trois enfants Sylviane Y..., épouse A..., Robert Y..., et Bernard Y..., décédé lui-même le 9 avril 1993 laissant pour héritiers sa veuve, Mme B..., et leur fils, Grégory ; que le tribunal de grande instance de Toulon a, par jugement du 18 novembre 2004, ordonné la licitation Ã

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 février 2011), qu'André Noël Y...est décédé le 26 août 1992, laissant pour héritiers, sa veuve, Isabelle Z..., et leurs trois enfants Sylviane Y..., épouse A..., Robert Y..., et Bernard Y..., décédé lui-même le 9 avril 1993 laissant pour héritiers sa veuve, Mme B..., et leur fils, Grégory ; que le tribunal de grande instance de Toulon a, par jugement du 18 novembre 2004, ordonné la licitation à la barre du tribunal des biens immobiliers dépendant des successions et indivisions, fixé leurs valeurs et dit qu'il devra être tenu compte, par le notaire, des règles affectant l'usufruit d'Isabelle Z...; que, suivant jugement d'incident du 12 mai 2005, le juge des criées du tribunal de grande instance de Toulon a inséré au cahier des charges de la vente les mentions selon lesquelles Isabelle Z...renonçait à son droit d'usufruit sur partie des biens vendus en pleine propriété (lots 1, 2, 3, 4 et 6) et déclarait exercer son droit d'usufruit et occuper le lot 5 de la même vente ; que M. Grégory Y...et Mme B...ont assigné M. C..., ès qualités, Isabelle Z..., M. Robert Y...et Mme A...pour qu'ils soient condamnés à leur payer une certaine somme ; que, par jugement du 29 avril 2010, le tribunal de grande instance de Toulon a débouté M. Grégory Y...et Mme B..., veuve Y..., de leur demande tendant à faire juger qu'Isabelle Z...avait renoncé à son usufruit, et de celle en paiement d'une somme de 350 000 euros à raison du fait que celle-là n'avait pas permis la vente du lot n° 5 en pleine propriété ;

Attendu que M. Grégory Y...et Mme B..., veuve Y..., font grief à l'arrêt confirmatif de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que, par un jugement du 18 novembre 2004, le tribunal de grande instance de Toulon avait fixé la valeur des biens immobiliers dépendant des successions et indivisions, et ordonné la licitation de ces « propriétés » ; qu'il avait également dit que le notaire devrait tenir compte des règles affectant l'usufruit de Mme Z...; que ce jugement prévoyait ainsi la licitation des biens en pleine propriété, et le report du droit d'usufruit sur le prix d'adjudication ; qu'en jugeant cependant que les exposants ne pouvaient exiger que la licitation se fasse en pleine propriété, et que Mme Z...aurait pu rester usufruitière d'un immeuble licité, la cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement précité du 18 novembre 2004, en violation des articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;

2°/ que, par un jugement du 18 novembre 2004, le tribunal de grande instance de Toulon avait fixé la valeur des biens immobiliers dépendant des successions et indivisions, et ordonné la licitation de ces « propriétés » ; qu'il avait également dit que le notaire devrait tenir compte des règles affectant l'usufruit de Mme Z...; qu'il ressort des propres constatations des juges du fond que Mme Z...avait ensuite déclaré « renoncer à son droit d'usufruit », ainsi que cela a été constaté dans un jugement incident du 12 mai 2005 de la chambre des criées du tribunal de grande instance de Toulon (production) ; qu'il devait nécessairement s'en déduire que, si le jugement du 18 novembre 2004 avait prévu la licitation des biens en pleine propriété et le report du droit d'usufruit sur le prix d'adjudication, Mme Z...avait ensuite expressément renoncé à son droit d'usufruit, cette renonciation ne pouvant dès lors plus concerner que le report de l'usufruit sur le prix d'adjudication ; qu'en jugeant au contraire que Mme Z...n'aurait pas renoncé à ce report d'usufruit sur le prix d'adjudication, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 578 et 621 du code civil ;

Mais attendu que l'arrêt relève qu'Isabelle Z..., commune en biens meubles et acquêts, et bénéficiaire d'une donation entre époux, a opté pour l'usufruit de la totalité des biens de la succession d'André Noël Y..., qu'elle a accepté que les biens immobiliers sur lesquels elle avait ce droit d'usufruit soient vendus en pleine propriété, sans renoncer à cet usufruit, et qu'elle l'a conservé sur le lot n° 5 ; que les juges du fond ont également retenu, par motifs propres et adoptés, que le jugement de la chambre des criées ayant pour seul objet de donner connaissance aux futurs adjudicataires des conditions d'occupation des biens immobiliers, l'annexion d'un dire d'Isabelle Z...au cahier des charges de la vente n'a eu aucune influence sur les modalités du partage de la succession d'André Noël Y...;

Attendu que la cour d'appel en a exactement déduit qu'en ordonnant la vente des biens immobiliers, le jugement du 18 novembre 2004, dont les termes ambigus devaient nécessairement être interprétés, n'a pas pu ordonner la vente de l'usufruit de sorte qu'Isabelle Z...est restée usufruitière ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme B..., veuve Y..., et M. Grégory Y...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer aux consorts Y...la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour M. Grégory Y...et Mme B...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR notamment débouté Monsieur Grégory Y...et Madame Catherine B...veuve Y...de leur demande tendant à faire juger que Madame Isabelle Z...veuve Y...avait renoncé au report de l'usufruit sur le prix d'adjudication des immeubles autres que le lot n° 5, et rejeté leur demande en paiement d'une somme de 350. 000 ¿ à raison du fait que Madame Isabelle Z...veuve Y...n'avait pas permis la vente du lot n° 5 en pleine propriété,

AUX MOTIFS PROPRES QUE « (...) sur l'usufruit de Mme Z...veuve Y...:

« Mme Isabelle Z...veuve Y...est bénéficiaire d'une donation entre époux. Elle a opté pour l'intégralité en usufruit.

« à la date du décès de son mari, le 26 août 1992, Mme Isabelle Z..., née le 25 septembre 1928, était âgée de 64 ans.

« selon les barèmes fiscaux, la valeur de l'usufruit représentait 50 % de la valeur de la pleine propriété.

« dans un souci de conciliation, Mme Isabelle Z...veuve Y...a accepté que ses droits d'usufruit se reportent à 40 % seulement au titre de ses droits dans la succession de son mari dans la répartition du prix des biens vendus. Elle a accepté que des biens immobiliers sur lesquels elle avait un droit d'usufruit soient vendus en pleine propriété, de sorte que la valeur de son droit d'usufruit se reportait dans le partage du prix des biens vendus. Toute autre clause, comme une renonciation pure et simple, alors qu'elle avait accepté la succession, eût été une donation équivalente aux coindivisaires, germe de difficultés futures et certainement non décidée par Mme Z.... Elle n'a jamais manifesté cette intention libérale ;

« en ce qui concerne le lot n° 5, l'appartement de Bormes, sur lequel elle a conservé son usufruit, ce choix ne peut lui être reproché, compte tenu de ses droits. Certains coindivisaires n'ont aucun droit d'exiger à leur grand-mère et belle-mère de se déposséder de ces droits et de lui demander une indemnité pour avoir refusé.

« pour autant, malgré le caractère totalement infondé d'une telle action, il ne peut être dit qu'elle ait été fautive et il n'y pas lieu à condamner M. Grégory Y...à payer à ce titre des dommages et intérêts (...) ».

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « (...) 4) Madame Catherine B...veuve Y...et Monsieur Grégory Y...sollicitent la condamnation des défendeurs à lui régler la somme de 350 000 euros correspondant à une « diminution d'actif » puisqu'ils ont obtenu la vente de tous les biens immeubles en pleine propriété avec « report d'usufruit » alors qu'il n'y a pas lieu à report de l'usufruit sur le prix d'adjudication des biens vendus à la barre du tribunal » puisque Madame Isabelle Z...veuve Y...avait renoncé à son usufruit sur divers biens immobiliers (à l'exception de celui situé ...), cette renonciation concernant évidemment « le report d'usufruit ».

« il ressort du jugement rendu le 18 novembre 2004 que le tribunal qui a ordonné la licitation des biens en indivision successorale, a indiqué « qu'il devra être tenu compte par le Notaire commis, Maître D..., des règles affectant l'usufruit de Madame Isabelle Z...veuve Y...»

« dans sa décision rendue le 12 mai 2005, la Chambre des Criées a ordonné que soient insérées au cahier des charges les mentions suivantes :
«- que « Madame Isabelle Z...veuve Y...renonce à son droit d'usufruit sur partie des biens qui seront vendus en pleine propriété en plusieurs lots...
«- que « Madame Isabelle Z...veuve Y...déclare exercer son droit d'usufruit et occuper le bien suivant : LE LOT CINQ DE LA VENTE : UNE PROPRIETE sise ..., comprenant VILLA avec terrain, le tout cadastré section ALn° 115 pour 795 m ² sur la mise à prix de 164 000 euros ».

« contrairement à la position soutenue par les demandeurs, ces deux décisions ne sont nullement contradictoires puisqu'elles ne poursuivaient pas le même objectif. La première décision du 18 novembre 2004 ne concerne que les héritiers de André Y...et tend à régler la manière dont le partage doit s'effectuer. La deuxième décision rendue le 12 mai 2005 par la Chambre des Criées n'avait pour seul objectif que celui de donner connaissance aux futurs adjudicataires des conditions d'occupation des biens immobiliers mis en vente par l'annexion d'un simple dire au cahier des charges.

« en effet, il convient de rappeler que « le cahier des charges » est le document fondamental contenant les conditions générales de la vente et une fois l'adjudication passée, il constitue selon la jurisprudence un élément de la « loi des parties » entre vendeur et acquéreur. C'est ainsi que lorsqu'il manque un élément au cahier des charges au moment de son dépôt, celui-ci peut être complété par un « dire d'annexion au cahier des charges ». Il en résulte que cette deuxième décision rendue par la Chambre des Criées n'a eu aucune influence sur les modalités du partage de la succession d'André Y...;

« la demande de Monsieur Grégory Y...et de Madame Catherine B...veuve Y...tendant à faire juger qu'il n'y a pas lieu à report de l'usufruit sur le prix d'adjudication des biens vendus à la barre du tribunal doit être rejetée puisque Madame Isabelle Z...veuve Y...n'a en réalité nullement renoncé à son usufruit ou plus exactement au report d'usufruit sur le prix d'adjudication ;

« 5) Madame Catherine B...veuve Y...et Monsieur Grégory Y...sollicitent la condamnation solidaire de Madame Isabelle Z...veuve Y..., de Monsieur Robert Y...et de Madame Sylviane Y...épouse A...à régler à l'indivision successorale la somme de 350 000 euros correspondant au manque à gagner sur le prix d'adjudication obtenu dans le cadre de la vente de la seule nue-propriété du bien immobilier situé ...en faisant valoir que la valeur de ce bien en toute propriété était de 520 000 euros environ.

« les défendeurs rétorquent à juste titre que seule la nue-propriété du bien a été vendue, l'usufruit ayant été fixé à 40 % et que Madame Isabelle Z...veuve Y..., usufruitière, est en droit d'user de son usufruit comme bon lui semble. La demande est donc rejetée (...) »,

ALORS QUE 1°), par un jugement du 18 novembre 2004 (production), le tribunal de grande instance de TOULON avait fixé la valeur des biens immobiliers dépendant des successions et indivisions, et ordonné la licitation de ces « propriétés » ; qu'il avait également dit que le notaire devrait tenir compte des règles affectant l'usufruit de Madame Z...veuve Y...; que ce jugement prévoyait ainsi la licitation des biens en pleine propriété, et le report du droit d'usufruit sur le prix d'adjudication ; qu'en jugeant cependant que les exposants ne pouvaient exiger que la licitation se fasse en pleine propriété, et que Madame Z...aurait pu rester usufruitière d'un immeuble licité, la Cour d'appel a méconnu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement précité du 18 novembre 2004, en violation des articles 1351 du Code civil et 480 du Code de procédure civile,

ALORS QUE 2°), par un jugement du 18 novembre 2004, le tribunal de grande instance de TOULON avait fixé la valeur des biens immobiliers dépendant des successions et indivisions, et ordonné la licitation de ces « propriétés » ; qu'il avait également dit que le notaire devrait tenir compte des règles affectant l'usufruit de Madame Z...veuve Y...; qu'il ressort des propres constatations des juges du fond que Madame Z...veuve Y...avait ensuite déclaré « renoncer à son droit d'usufruit », ainsi que cela a été constaté dans un jugement incident du 12 mai 2005 de la chambre des criées du tribunal de grande instance de TOULON (production) ; qu'il devait nécessairement s'en déduire que, si le jugement du 18 novembre 2004 avait prévu la licitation des biens en pleine propriété et le report du droit d'usufruit sur le prix d'adjudication, Madame Z...veuve Y...avait ensuite expressément renoncé à son droit d'usufruit, cette renonciation ne pouvant dès lors plus concerner que le report de l'usufruit sur le prix d'adjudication ; qu'en jugeant au contraire que Madame Z...veuve Y...n'aurait pas renoncé à ce report d'usufruit sur le prix d'adjudication, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 578 et 621 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-24224
Date de la décision : 26/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 26 jui. 2013, pourvoi n°11-24224


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.24224
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