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25/06/2013 | FRANCE | N°12-86537

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 juin 2013, 12-86537


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Alexandre X...,
- M. Vincent Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 27 septembre 2012, qui, pour provocation à la haine ou à la violence lors d'une manifestation sportive, les a condamnés, le premier, à 500 euros d'amende, le second, à 600 euros d'amende, et à une interdiction de paraître dans les stades ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 juin 2013 où étaient présents dans l

a formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Guirimand consei...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Alexandre X...,
- M. Vincent Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 27 septembre 2012, qui, pour provocation à la haine ou à la violence lors d'une manifestation sportive, les a condamnés, le premier, à 500 euros d'amende, le second, à 600 euros d'amende, et à une interdiction de paraître dans les stades ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 juin 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Guirimand conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Monfort conseiller rapporteur, M. Beauvais conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Téplier ;

Sur le rapport de M. le conseiller MONFORT et les conclusions de M. l'avocat général SALVAT ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Sur la recevabilité des mémoires additionnels déposés le 24 janvier 2013 :

Attendu que ces mémoires, produits après le dépôt du rapport, sont irrecevables par application de l'article 590 du code de procédure pénale ;

Vu les mémoires personnels et les observations complémentaires produits ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, lors d'un match de football opposant, au Stade de France, le club du " Paris Saint Germain " à celui du " Racing Club de Lens ", une banderole de plusieurs mètres de long a été déployée dans la tribune occupée par les supporters parisiens, portant l'inscription : " Pédophiles, chômeurs, consanguins... Bienvenue chez les chtis " ; que l'information a permis d'identifier les auteurs de cette exhibition, notamment MM. X... et Y... ; que, renvoyés devant le tribunal correctionnel, ces derniers ont été retenus dans les liens de la prévention du chef de provocation à la haine ou à la violence à l'occasion d'une manifestation sportive ; qu'ils ont relevé appel de cette décision, ainsi que le ministère public ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation proposé par M. Y..., pris de la violation de l'article 502 du code de procédure pénale ;

Attendu que, pour rejeter l'exception d'irrecevabilité de l'appel du ministère public, prise de ce que cet appel avait été inscrit par le greffier sur le registre immédiatement après celui du prévenu, et n'avait été régularisé par un magistrat du parquet que postérieurement, l'arrêt retient que l'examen de l'acte d'appel, dûment signé, et qui fait foi jusqu'à inscription de faux, permet de s'assurer que le procureur de la République de Bobigny a effectivement et valablement interjeté appel à la suite de l'exercice par M. Y... de cette voie de recours, et que la pratique dénoncée par le prévenu n'a pas d'incidence juridique dès lors qu'elle n'attente en rien au plein exercice de ses prérogatives par le ministère public ;

Attendu que, dès lors qu'il n'est ni justifié, ni même allégué, que l'irrégularité invoquée ait porté atteinte aux intérêts du demandeur, le moyen, qui reprend l'argumentation développée sur ce point devant les juges du fond, est inopérant ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par M. Y..., pris de la violation de l'article 184 du code de procédure pénale ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, prise de ce que cette ordonnance n'a pas visé les observations de la défense, qu'elle n'a pas tenu compte de celles-ci dans sa motivation, et s'est fondée uniquement sur le réquisitoire définitif du parquet, l'arrêt relève que la lecture de l'acte montre que les juges d'instruction ont motivé leur décision à l'égard de M. Y... en mentionnant ses dénégations, et après avoir répondu aux objections juridiques soulevées, et qu'ils se sont spécialement prononcés tant sur les éléments de fait que sur la portée des charges et le fondement juridique de la poursuite ;

Attendu qu'en constatant ainsi, sans insuffisance ni contradiction, que l'ordonnance de renvoi a mentionné les raisons pour lesquelles il existait contre M. Y... des charges suffisantes, par une motivation prise au regard des réquisitions du ministère public et des observations des parties précisant les éléments à charge et à décharge, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par M. Y... et le premier moyen de cassation proposé par M. X..., pris de la violation de l'article L 332-6 du code du sport ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour retenir MM. X... et Y... dans les liens de la prévention, l'arrêt relève que l'assimilation, sur la banderole exhibée, des personnes originaires du Nord de la France, et précisément des supporters du club de Lens, présents dans le stade, à des " pédophiles, des chômeurs et des consanguins ", a caractérisé une entreprise dénigrante, et qu'en les réduisant à des individus ayant des relations sexuelles avec des mineurs, ayant choisi de ne pas travailler et issus de relations entre parents, cette attaque, consignée sur une banderole de plusieurs dizaines de mètres de long, tenue par une centaine d'individus, dont certains masqués, a constitué une provocation à la haine ou à la violence envers les personnes du Nord et les supporters du club de Lens ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, les juges ont justifié leur décision, dès lors qu'ils ont constaté que, tant par son sens que par sa portée, le propos incriminé, affiché sur une banderole visible de tous, tendait, lors d'une manifestation sportive, à inciter le public présent dans l'enceinte à la haine ou à la violence à l'égard d'un groupe de personnes, et que les éléments constitutifs du délit prévu par l'article L. 332-6 du code du sport étaient ainsi réunis ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé par M. Y... et le second moyen de cassation proposé par M. X..., pris de la violation des articles L. 332-11 du code du sport, et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que, pour confirmer les peines d'amende, et la peine complémentaire d'interdiction de paraître dans les stades déjà prononcée par les premiers juges, prévue par l'article L. 332-11 du code du sport, et après avoir précisé les modalités de mise en oeuvre de cette interdiction, également énoncées par ce texte, l'arrêt conclut que cette " déclaration de culpabilité " constitue une mesure nécessaire dans une société démocratique, qui suppose que, dans une enceinte sportive où des valeurs anciennes de fraternité et d'échange entre participants sont unanimement prônées par les organisateurs de matches de football, le racisme ou l'incitation à la haine ou à la violence soient exclus ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans accorder à la peine complémentaire d'interdiction de paraître dans les stades un quelconque caractère d'automaticité, la cour a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq juin deux mille treize ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-86537
Date de la décision : 25/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

SPORTS - Manifestation sportive - Provocation à la haine ou à la violence lors d'une manifestation sportive - Eléments constitutifs - Elément matériel - Provocation - Cas

Le délit de provocation à la haine ou à la violence lors d'une manifestation sportive, prévu et puni par l'article L. 332-6 du code du sport, est caractérisé dans le cas où il est constaté que, tant par son sens que par sa portée, le propos incriminé tendait, lors d'une compétition sportive, à inciter le public présent à la haine ou à la violence à l'égard d'un groupe de personnes. Tel est le cas d'une banderole, exhibée lors d'un match de football, portant des inscriptions assimilant les supporters d'un club de football du Nord de la France, présents dans le stade, à des "pédophiles, des chômeurs et des consanguins". Une telle attaque, en réduisant les personnes visées à des individus ayant des relations sexuelles avec des mineurs, ayant choisi de ne pas travailler, et issus de relations entre parents, constitue la provocation punie par la loi


Références :

article L. 332-6 du code des sports

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 septembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 jui. 2013, pourvoi n°12-86537, Bull. crim. criminel 2013, n° 161
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2013, n° 161

Composition du Tribunal
Président : Mme Guirimand (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Salvat
Rapporteur ?: M. Monfort

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.86537
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