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19/06/2013 | FRANCE | N°11-23491

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 juin 2013, 11-23491


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 23 juin 2011), que M. X... a été engagé par société SGS-Thomson Microelectronics ST, devenue la SA STMicroelectronics, en qualité de «marketing manager» par contrat de travail du 5 décembre 1994, pour travailler sur le site de Saint Genis Pouilly dans l'Ain ; que par avenant du 1er juillet 1999, le contrat a été transféré à la société STMicroelectronics NV à Genève à l'effet pour le salarié d'y exercer les fonctions de « manager p

roduct marketing région 5»; que le 8 février 2008, la société STMicroelectronics NV...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 23 juin 2011), que M. X... a été engagé par société SGS-Thomson Microelectronics ST, devenue la SA STMicroelectronics, en qualité de «marketing manager» par contrat de travail du 5 décembre 1994, pour travailler sur le site de Saint Genis Pouilly dans l'Ain ; que par avenant du 1er juillet 1999, le contrat a été transféré à la société STMicroelectronics NV à Genève à l'effet pour le salarié d'y exercer les fonctions de « manager product marketing région 5»; que le 8 février 2008, la société STMicroelectronics NV lui a notifié son départ à la retraite fixé au 31 mai 2008 ; que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes d'Oyonnax pour demander des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que cette juridiction s'est déclarée incompétente ;

Attendu que le demandeur fait grief à l'arrêt de dire le conseil de prud'hommes d'Oyonnax incompétent au profit des juridictions helvétiques alors, selon le moyen :

1°/ que la Convention de Lugano conclue le 30 octobre 2007 modifiant celle signée le 16 septembre 1988 n'est pas applicable aux actions judiciaires intentées antérieurement à son entrée en vigueur, le 1er janvier 2010 en France et le 1er janvier 2011 en Suisse ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'Oyonnax le 4 septembre 2008 pour contester sa mise à la retraite notifiée le 8 février 2008 ; qu'en appliquant néanmoins l'article 19 de la Convention du 30 octobre 2007, la cour d'appel a fait une application rétroactive de cet article, qui n'était pas entré en vigueur, et a violé les textes susvisés ;

2°/ qu'en cas de pluralité de défendeurs domiciliés sur le territoire d'Etats contractants différents, l'un d'eux peut être attrait devant le tribunal du domicile de l'autre ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale française afin d'obtenir la condamnation à la fois de la société française STMicroelectronics SA et de la succursale suisse de la société néerlandaise STMicroelectronics NV ; qu'il importe peu que ses demandes, fondées sur un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, aient été formellement présentées dans deux lettres de saisine, dès lors que celles-ci étaient concomitantes et indissociables ; qu'en déclarant néanmoins que le salarié ne pouvait se prévaloir de la règle susvisée et que la juridiction française était incompétente faute de pluralité de défendeurs, la cour d'appel, qui n'a pris en compte que les demandes dirigées contre la société néerlandaise STMicroelectronics NV, a violé l'article 6 de la Convention de Lugano en sa rédaction du 16 septembre 1988 ;

3°/ que des demandes sont connexes lorsqu'elles sont liées entres elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément ; que M. X... formulait des demandes pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse sur le fondement d'un contrat de travail unique modifié par un avenant qui a substitué la société STMicroelectronics NV à la société STMicroelectronics SA, de sorte que ses demandes contre ces deux sociétés étaient connexes et devaient être jugées par la même juridiction ; qu'en écartant la connexité au motif qu'il n'existait pas « un seul et même contrat », que M. X... avait introduit deux procédures contre chacune de ces sociétés et que « les deux contrats de travail n' avaie nt pas été exécutés au cours de la même période », la cour d'appel s'est fondée sur des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 6 et 22 de la Convention de Lugano en sa rédaction du 16 septembre 1988 ;

4°/ qu'il résulte de l'article 5-1 de la Convention de Lugano en sa rédaction du 16 septembre 1988 qu'en matière de contrat de travail, si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, l'employeur peut être attrait devant la juridiction du lieu où se trouve l'établissement qui l'a embauché ; que M. X... faisait valoir qu'il n'avait pas accompli son travail de manière habituelle en Suisse, mais dans divers pays où il se déplaçait régulièrement ; qu'en écartant ses prétentions en affirmant tout à la fois que le salarié produisait des demandes d'autorisation de voyage et qu'à compter de l'année 1999 il avait exercé exclusivement ses fonctions en Suisse, la cour d'appel s'est contredite, privant ainsi sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu d'abord que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié avait engagé des procédures distinctes contre ses employeurs successifs, sur des fondements différents, en a déduit à bon droit que la pluralité de défendeurs exigée par l'article 6 de la Convention de Lugano, tant dans sa rédaction de 1988 que dans celle de 2007, n'était pas réalisée dans l'instance dont elle était saisie et qui était dirigée uniquement contre le second employeur ;

Attendu ensuite qu'il ne résulte d'aucun élément de la procédure que la condition chronologique posée par l'article 22 de la convention de Lugano de 1988 était remplie en la cause ;

D'où il suit que le moyen qui, en sa dernière branche, remet en discussion des appréciations de fait sous couvert d'une contrariété de motifs, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf juin deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le conseil de prud'hommes d'Oyonnax était incompétent pour connaître du litige opposant M. X... à la société STMicroelectronics NV et d'avoir dit que M. X... devait saisir la juridiction compétente du Canton de Genève (Suisse) ;

AUX MOTIFS QU' il y a lieu de constater qu'aucune critique n'a été émise en ce qui concerne l'exercice par chacune des parties de la voie de recours ouverte, les parties ayant convenu de l'opportunité d'une jonction au demeurant parfaitement justifiée ; qu'il est en vain excipé par M. X... de l'existence d'un seul et même contrat pour la raison que le contrat du 1er juillet 1999 a été conclu avec une personne morale autre que l'employeur initial et M. X..., en diligentant deux procédures distinctes pour rupture à l'encontre de chacune des sociétés concernées, a reconnu lui-même que le 1er juillet 1999 il avait été procédé à la conclusion d'un nouveau contrat de travail ; que M. X... ne saurait davantage arguer de l'existence d'une connexité entre les deux affaires dans la mesure où les deux contrats de travail n'ont pas été exécutés au cours de la même période mais en des temps distincts ; qu'il n'est pas contesté que le contrat de travail en cause a été conclu avec une succursale helvétique de la société de droit néerlandais portant le même nom ; que le litige opposant les parties ressortant de la "matière civile" au sens de son titre 1er, la convention de Lugano a bien vocation à s'appliquer au litige opposant les parties ; qu'en tant que succursale domiciliée en Suisse, la société STMicroelectronics NV est fondée à se prévaloir des dispositions de la convention de Lugano (article 18 section V) ratifiée par les deux pays concernés (France et Suisse) ; que l'application de l'article 14 du code civil ayant été exclue par les signataires de ladite convention (cf. annexe 1), M. X... ne saurait bénéficier du privilège de juridiction en cause pour tenter d'échapper aux dispositions de la convention de Lugano ; que le salarié n'est pas davantage fondé à se prévaloir du bénéfice des dispositions de l'article 6 de la même convention applicable au cas de pluralité de défendeurs dès lors que dans le présent litige il n'y a qu'une seule personne attraite ; que l'article 19 de ladite convention prévoit que l'employeur peut être attrait : 1°) Devant les tribunaux de l'Etat où il a son domicile, 2°) Dans un Etat lié par la présente convention : a) Devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant le tribunal le tribunal du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail, b) Lorsque le travailleur n'accomplit pas ou n'a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant le tribunal du lieu où se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur ; que c'est à tort que pour tenter de faire obstacle à ces dispositions, M. X... a cru devoir soutenir qu'il n'aurait pas travaillé de manière habituelle en Suisse alors même qu'il résulte des pièces versées aux débats (cf. production aux débats des demandes d'autorisation de voyage) qu'à compter de l'année 1999, il a exercé exclusivement ses fonctions à Genève ce qui l'a conduit à faire le choix de résider sur place (Gingins en Suisse) ; que M. X... a d'ores et déjà saisi à titre conservatoire la juridiction genevoise compétente ainsi qu'il l'a reconnu sur interpellation du président à l'audience ; qu'il ne saurait utilement reprocher au premier juge de n'avoir pas été plus précis dans la désignation de la juridiction suisse territorialement compétente ; qu'en l'absence de toute contestation utile de sa part, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que le conseil des prud'hommes d'Oyonnax était territorialement incompétent pour connaître du litige et dit que M. X... devrait saisir la juridiction compétente du canton de Genève en Suisse ; que c'est en revanche à tort qu'au visa de l'article 11 du contrat du 1er juillet 1999, le premier juge a également dit que le droit français devrait être appliqué par la juridiction suisse, dès lors qu'ayant reconnu son incompétence territoriale, il ne pouvait se prononcer sur le droit applicable au litige opposant les parties, ce pourquoi le jugement sera réformé sur ce point ;

1°) ALORS QUE la Convention de Lugano conclue le 30 octobre 2007 modifiant celle signée le 16 septembre 1988 n'est pas applicable aux actions judiciaires intentées antérieurement à son entrée en vigueur, le 1er janvier 2010 en France et le 1er janvier 2011 en Suisse ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'Oyonnax le 4 septembre 2008 pour contester sa mise à la retraite notifiée le 8 février 2008 ; qu'en appliquant néanmoins l'article 19 de la Convention du 30 octobre 2007, la cour d'appel a fait une application rétroactive de cet article, qui n'était pas entré en vigueur, et a violé les textes susvisés ;

2°) ALORS QU' en cas de pluralité de défendeurs domiciliés sur le territoire d'Etats contractants différents, l'un d'eux peut être attrait devant le tribunal du domicile de l'autre ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale française afin d'obtenir la condamnation à la fois de la société française STMicroelectronics SA et de la succursale suisse de la société néerlandaise STMicroelectronics NV ; qu'il importe peu que ses demandes, fondées sur un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, aient été formellement présentées dans deux lettres de saisine, dès lors que celles-ci étaient concomitantes et indissociables ; qu'en déclarant néanmoins que le salarié ne pouvait se prévaloir de la règle susvisée et que la juridiction française était incompétente faute de pluralité de défendeurs, la cour d'appel, qui n'a pris en compte que les demandes dirigées contre la société néerlandaise STMicroelectronics NV, a violé l'article 6 de la Convention de Lugano en sa rédaction du 16 septembre 1988 ;

3°) ALORS QUE des demandes sont connexes lorsqu'elles sont liées entres elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément ; que M. X... formulait des demandes pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse sur le fondement d'un contrat de travail unique modifié par un avenant qui a substitué la société STMicroelectronics NV à la société STMicroelectronics SA, de sorte que ses demandes contre ces deux sociétés étaient connexes et devaient être jugées par la même juridiction ; qu'en écartant la connexité au motif qu'il n'existait pas « un seul et même contrat », que M. X... avait introduit deux procédures contre chacune de ces sociétés et que « les deux contrats de travail n' avaie nt pas été exécutés au cours de la même période », la cour d'appel s'est fondée sur des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 6 et 22 de la Convention de Lugano en sa rédaction du 16 septembre 1988 ;

4°) ALORS QU' il résulte de l'article 5-1 de la Convention de Lugano en sa rédaction du 16 septembre 1988 qu'en matière de contrat de travail, si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, l'employeur peut être attrait devant la juridiction du lieu où se trouve l'établissement qui l'a embauché ; que M. X... faisait valoir qu'il n'avait pas accompli son travail de manière habituelle en Suisse, mais dans divers pays où il se déplaçait régulièrement ; qu'en écartant ses prétentions en affirmant tout à la fois que le salarié produisait des demandes d'autorisation de voyage et qu'à compter de l'année 1999 il avait exercé exclusivement ses fonctions en Suisse, la cour d'appel s'est contredite, privant ainsi sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-23491
Date de la décision : 19/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 23 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jui. 2013, pourvoi n°11-23491


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.23491
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