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11/06/2013 | FRANCE | N°12-18989

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 11 juin 2013, 12-18989


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé que le devis de la société Europ'équipement pour la réalisation d'une centrale de béton avait été complété par le cahier des charges de la Société d'études et application composants Guiraud frères (la société Guiraud frères), qu'il englobait toutes les prestations et les travaux nécessaires et qu'il avait été accepté par le maître de l'ouvrage pour un prix ferme et non révisable, hors TVA, sans aucun détail du mod

e de calcul de chaque poste, la cour d'appel, devant laquelle la société Europ'équipeme...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé que le devis de la société Europ'équipement pour la réalisation d'une centrale de béton avait été complété par le cahier des charges de la Société d'études et application composants Guiraud frères (la société Guiraud frères), qu'il englobait toutes les prestations et les travaux nécessaires et qu'il avait été accepté par le maître de l'ouvrage pour un prix ferme et non révisable, hors TVA, sans aucun détail du mode de calcul de chaque poste, la cour d'appel, devant laquelle la société Europ'équipement n'avait pas invoqué un bouleversement de l'économie du contrat, qui n'avait pas à se livrer à des recherches que ses constatations rendaient inopérante et qui a pu en déduire que le marché étant forfaitaire, la société Europ'équipement était mal fondée à réclamer le paiement de travaux supplémentaires non commandés ou ratifiés par le maître de l'ouvrage, a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant retenu que le manquement de la société Europ'équipement à ses obligations contractuelles s'était poursuivi pendant plusieurs mois malgré des mises en demeure répétées du maître de l'ouvrage, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire que la rupture du contrat d'entreprise devait être imputée à la faute exclusive de cette société ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Europ'équipement et M. X... et associés, ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Europ'équipement et M. X... et associés, ès qualités, à payer à la Société d'études et application composants Guiraud frères la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Europ'équipement et de M. X... et associés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Europ'équipement et la société X... et associés, ès qualités

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté la Société EUROP'EQUIPEMENT de sa demande tendant à voir condamner la Société SEAC GUIRAUD FRERES à lui payer la somme de 126.006,97 euros au titre des travaux supplémentaires réalisés sur le site de Saint Martin de Crau ;

Aux motifs que « aucun acte sous seing privé de marché n'a été établi par les deux parties ; la SARL Europ'Equipement a dressé un devis n° 25791-03 le 7 avril 2006 comportant descriptif technique pour une "centrale tour pour béton de préfabrication, stockage des granulats en tout métallique et distribution béton" avec détail de chacun des postes le composant pour un prix de 788.617 € HT ; que la SA Seac Guiraud Frères a passé commande le 14 avril 2006 en précisant son cahier des charges et les caractéristiques du matériel au prix de 788.617 € "ferme et non révisable, hors TVA, l'ensemble rendu monté et mis en cadence, transports, assurances, déplacement, hébergement et tous autres frais éventuels compris", disposition qui n'a fait l'objet d'aucune remarque de la part de la SARL Europ'Equipement dans son courrier en réponse du 5 mai 2006 puis du 6 juin 2006 ; que cette dernière mention suffit à conférer au marché un caractère forfaitaire au sens de l'article 1793 du Code civil, même si aucune référence n'est expressément faite à ce texte ; que la consistance des prestations était précisément définie aux pages 1 à 12 du devis complété par le cahier des charges rappelé par le maître de l'ouvrage dans son courrier du 14 avril 2006 englobant tous les travaux nécessaires pour aboutir au but recherché ; que le prix était fixé globalement, sans aucun détail du mode de calcul de chaque poste ; qu'aucune réserve quelconque ni prévision de suppléments ou modifications n'y figurait ; que la SARL Europ'Equipement est donc mal fondée à réclamer le montant d'une facture n° 27354 en date du 29/06/2007 de 126.006,97 € pour "transformation de l'installation due à la non consultation et à la non validation réalisés en cours de montage" (99.925 € HT) et "travaux effectués sur la centrale en dehors de la garantie" (liste jointe 5.432 € HT) ; que l'expert a tout d'abord relevé des doublons sur les pièces communiquées (page 15 du rapport) ; que même s'il a pu noter "qu'un certain nombre de travaux en particulier pour ce qui concerne la charpente métallique support de la centrale a bien été modifiée" (page 31), leur coût ne peut, en droit, être mis à la charge du maître de l'ouvrage dès lors que la SA Seac Guiraud Frères ne les a pas commandés par écrit, n'a pas donné son accord préalable sur leur prix et ne les a pas davantage ratifiés, n'ayant pas délivré d'ordre de service, ayant toujours refusé de s'en acquitter, le simple fait de les laisser se réaliser ne pouvant valoir approbation tacite ou renonciation à invoquer l'article 1793 du Code civil » ;

Alors que, de première part, la qualification de marché à forfait suppose la constatation d'un plan arrêté et convenu avec le maître de l'ouvrage ; que les juges ne peuvent justifier leur décision par des affirmations générales et non circonstanciées ; qu'en se bornant à énoncer, pour retenir la qualification de marché à forfait, que la consistance des prestations était précisément définie dans le devis de la Société EUROP'EQUIPEMENT complété par le cahier des charges rappelé par le maître de l'ouvrage dans son courrier du 14 avril 2006 englobant tous les travaux nécessaires pour aboutir au but recherché, ce sans rechercher et ni vérifier, ainsi qu'il lui était pourtant expressément demandé, si le fait que la Société EUROP'EQUIPEMENT avait été contrainte de débuter les travaux sans plan arrêté afin de ne pas retarder davantage le chantier et si le fait que le plan d'ensemble daté du 28 mars 2006 avait fait l'objet de modifications perpétuelles notamment les 3 avril, 25 avril, 17 août et 1er septembre 2006, ne privaient pas de toute précision suffisante les travaux mentionnés dans le devis EUROP'EQUIPEMENT du 7 avril 2006 et dans la commande de la Société SEAC GUIRAUD FRERES du 14 avril suivant, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1793 du Code civil ;

Alors que, de seconde part, le maître de l'ouvrage est tenu d'acquitter le prix des travaux supplémentaires réalisés par l'entrepreneur lorsque, par leur nature ou leur coût, ils conduisent à un bouleversement de l'économie du marché forfaitaire initial ; que l'arrêt relève que le marché initial avait été conclu pour un montant de 788.617 euros et que les travaux supplémentaires réclamés par la Société EUROP'EQUIPEMENT faisaient l'objet d'une facture d'un montant de 126.006,97 euros, soit 16% du marché initial, d'une part, et que ces travaux correspondaient à des transformations dues à la non consultation et à la non validation des plans par la Société SEAC ainsi qu'à des travaux effectués sur la centrale en dehors de la garantie, notamment portant sur la charpente métallique support de la centrale, d'autre part ; qu'en se bornant à énoncer, pour rejeter la demande de paiement des travaux supplémentaires formée par la Société EUROP'EQUIPEMENT, que la Société SEAC GUIRAUD FRERES avait passé une commande dont les prestations étaient précisément définies, à un prix ferme et non révisable, et n'avait pas donné son accord aux travaux supplémentaires litigieux, qu'elle n'avait pas ratifiés par la suite, ce sans rechercher au préalable si ces travaux, de par leur nature, leur coût ou leur ampleur, n'emportaient pas un bouleversement de l'économie du marché de nature à faire perdre à ce dernier son caractère forfaitaire initial, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1793 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de la Société EUROP'EQUIPEMENT tendant à voir condamner la Société SEAC GUIRAUD FRERES à lui payer la somme de 229.500 euros de dommages et intérêts au titre de la résiliation injustifiée du marché du Grand Fougeray ;

Aux motifs que « la SARL Europ'Equipement a dressé un devis n° 26808-01 du 6 avril 2006 d'une centrale à béton avec distribution du béton et automatisme et la SA Seac Guiraud Frères a passé commande le 21 juillet 2006 en précisant son cahier des charges au prix de 975.000 € + 138.300 € avec un planning au 8 janvier 2007 pour le hall 1 et 12 mars 2007 pour le hall 2 ; que ce planning a été rappelé par le maître de l'ouvrage dans un courrier du 10 août 2006 avec menace de se prévaloir de la clause de résiliation insérée à la convention à son profit en cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations et notamment au respect des délais et par courriers du 27 novembre 2006, 5 décembre 2006 la SA Seac Guiraud Frères a mis en demeure la SARL Europ'Equipement de lui fournier divers plans sous la même menace ; que par courrier du 6 décembre 2006 celle-ci lui a fait part de son impossibilité de respecter les délais, ne pouvant honorer ses commandes envers ses sous-traitants faute de pouvoir verser les acomptes réclamés, "n'étant en mesure de livrer que certains éléments (grand tapis d'alimentation et déchargeurs de camion), d'autres n'étant qu'en partie fabriqués et d'autres non commencés", preuve qu'elle avait bien accepté le marché et commencé à l'exécuter ; elle a proposé un nouveau planning décalé à la mi-avril 2007 pour le début de marche en automatique, ce que la SA Seac Guiraud Frères n'a pas accepté dans son courrier en réponse du 12 décembre 2006, lui demandant parallèlement de préciser comment cet entrepreneur allait alimenter les halls en béton avant que la centrale ne soit opérationnelle, courrier qui a été renouvelé le 15 janvier 2007 puis 18 janvier 2007 ; que par nouvelle lettre du 11 avril 2007 le maître de l'ouvrage a noté "être toujours en attente des plans détaillés de chaque étage de la centrale et de ses équipements pour en valider l'implantation, des plans d'attente des platines afin de pouvoir réaliser le génie civil, d'une caution sans date limite de validité, de votre solution pour fournir notre usine en béton dès son démarrage, déplorant qu'aucun équipement ne soit parvenu sur le site ni aucun signe d'avancement ne soit visible depuis décembre et être dans l'obligation de constater son immobilisme total depuis plus de trois mois sur ce chantier malgré l'ampleur du préjudice et nous prenons acte de la rupture à votre initiative de nos relations contractuelles" ; que par télécopie du 18 avril 2007 la SARL Europ'Equipement alors proposé l'installation d'une centrale de chantier avec mise en route au 4 juin 2007 puis par nouvelle télécopie du 5 juin 2007 différé la livraison au 11 juin 2007 puis l'ayant effectuée le 14 juin 2007 a procédé à son enlèvement le 4 juillet 2007 que ces données traduisent un manquement de la SARL Europ'Equipement à ses obligations contractuelles d'autant plus grave et caractérisé qu'il s'est poursuivi plusieurs mois malgré plusieurs mises en demeure ; qu'aucun grief ne peut être retenu à l'encontre du maître de l'ouvrage ; que le contrat imposait la fourniture d'une caution bancaire pour le versement du premier acompte que l'entrepreneur n'a pas été en mesure de produire et ce dernier ne pouvait subordonner la poursuite des travaux sur le site de Grand Fougeray au règlement du solde du marché relatif au site de Saint Martin, en l'absence de clause contractuelle l'autorisant, les deux marchés étant indépendants l'un de l'autre ; que la SARL Europ'Equipement avait pris acte par mail du 15 septembre 2006 de ce que le maître de l'ouvrage avait accepté son plan d'ensemble de la centrale et la position de la benne et considérait son accord comme acquis, de sorte qu'elle ne saurait aujourd'hui soutenir qu'il ne les avait pas validés ; qu'ainsi, la rupture du contrat d'entreprise effective depuis le mois de juillet 2007 doit être imputée à la faute exclusive de la SARL Europ'Equipement ; sur ses incidences : que les demandes de la SARL Europ'Equipement en indemnisation, notamment pour gain manqué, doivent être rejetées puisqu'elle est seule à l'origine de la rupture » ;

Alors que les juges du fond doivent répondre aux moyens opérants, susceptibles d'avoir une incidence sur la solution du litige, contenus dans les écritures des parties ; que pour rejeter la demande de dommages-intérêts formée par la Société EUROP'EQUIPEMENT au titre du caractère injustifié de la résiliation anticipée du marché du Grand Fougeray par la Société SEAC GUIRAUD FRERES, l'arrêt a inféré du courrier du 6 décembre 2006 par lequel la Société SEAC refusait le nouveau planning décalé à la mi-avril 2007 proposé par Société EUROP'EQUIPEMENT, du courrier du 11 avril 2007 par lequel la Société SEAC indiquait être toujours en attente des plans détaillés de chaque étage de la centrale, et du fait que la Société EUROP'EQUIPEMENT avait installé le 14 juin 2007 une centrale à béton mobile dont la livraison était prévue le 4 juin précédent, puis enlevé cette centrale le 4 juillet suivant, qu'aucun manquement ne pouvait être imputé à la Société SEAC GUIRAUD FRERES ; qu'en retenant l'absence de tout manquement dans le chef du maître de l'ouvrage sans répondre au moyen des écritures délaissées de la Société EUROP'EQUIPEMENT, assorti d'offres de preuve et tiré de ce que la Société SEAC n'avait pas fait procéder aux travaux de génie civil qui lui incombaient, ce qui avait eu pour conséquence d'empêcher EUROP'EQUIPEMENT d'intervenir utilement, et notamment de faire fonctionner la centrale mobile qu'elle avait installée sur place le 15 juin 2007, et de ce que la Société SEAC GUIRAUD FRERES n'avait pas validé les plans d'ensemble de la Société EUROP'EQUIPEMENT, ce qui expliquait que cette dernière n'avait pas été en mesure de réaliser les plans de détails exigés par le maître de l'ouvrage, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 12-18989
Date de la décision : 11/06/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 09 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 11 jui. 2013, pourvoi n°12-18989


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.18989
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