LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X...-Y...du désistement de son pourvoi à l'égard de M. Xavier Z..., ès qualités ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 31 janvier 2012), que M. X...-Y..., associé en industrie au sein de la SCP d'huissiers de justice Charles A..., Geneviève Y...-A... et François-Xavier X...-Y...(la SCP), du 2 juillet 1999 au 16 mai 2010, a engagé une action indemnitaire contre Mme Y..., associée majoritaire, lui reprochant d'avoir commis un abus de majorité en s'opposant à l'augmentation de capital qui aurait dû intervenir conformément à l'article 43 du décret du 31 décembre 1969 et à l'article 29 des statuts de la société et lui permettre d'être attributaire de parts sociales et de l'avoir ainsi amené à se retirer de la société ;
Attendu que M. X...-Y...reproche à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en refusant de qualifier le comportement de Mme Y...d'abus de majorité ayant causé un préjudice à M. X...tout en constatant qu'elle n'avait pas procédé aux augmentations de capital comme le lui imposait l'article 43 du décret du 31 décembre 1969, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles 1382 du code civil et 43 du décret du 31 décembre 1969 ;
2°/ qu'en adoptant les motifs des premiers juges qui qualifiaient la perte de chance de préjudice hypothétique, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'en limitant l'application de l'article 43 du décret à la seule période postérieure à l'entrée de l'associé dans la société, la cour d'appel a ajouté une condition au texte et violé l'article 43 du décret du 31 décembre 1969 ;
4°/ qu'en limitant l'application de l'article 43 du décret à la seule période postérieure à l'entrée de l'associé dans la société sans que les statuts ne posent une telle condition, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 29 des statuts de la SCP violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que, si l'augmentation de capital prévue par l'article 43 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 en cas de dégagement de plus-values d'actif dues à l'industrie des associés a un caractère automatique et si les statuts de la société civile professionnelle ne peuvent fixer que les conditions d'application de ce texte sans pouvoir la rendre facultative, la modification de ces statuts qui en résulte doit néanmoins être, sur la demande de l'un des associés concernés, soumise à l'assemblée générale qui la décide si les conditions statutaires en sont réunies ; qu'ayant, par motifs propres et adoptés, constaté, d'une part, que les autres associés n'avaient pas demandé l'application de ces dispositions réglementaires et statutaires avant l'entrée de M. X...-Y...dans la SCP, ce dont elle a exactement déduit qu'il ne pouvait s'en prévaloir pour cette période, et, d'autre part, que, depuis lors, la plus-value du droit de représentation de la clientèle pour cinq années consécutives était inférieure au seuil de 20 % de la valeur de cet élément d'actif, fixé par les statuts pour que son incorporation au capital puisse être décidée, de sorte qu'il ne pouvait prétendre à une distribution de parts sociales, la cour d'appel, qui s'est bornée, sans dénaturation, à faire application des statuts à la lumière du texte réglementaire, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X...-Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X...-Y...; le condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme Geneviève Y...-A... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Defrénois et Lévis, avocat aux Conseils, pour M. X...-Y...
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif d'AVOIR débouté Monsieur X...de sa demande tendant à faire juger que Madame Y...avait commis un abus de majorité en s'opposant à une augmentation de capital, qui aurait dû intervenir conformément à l'article 43 du décret du 31 décembre 1969 et à l'article 29 des statuts de la SCP ; en conséquence, d'avoir débouté Monsieur X...de sa demande fondée sur l'article 1382 du code civil. Il est également reproché à l'arrêt d'avoir condamné Monsieur X...à payer à Madame Y...la somme de 6000 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« il convient de relever que les parties ne contestent pas les calculs de l'expert B...et s'opposent seulement sur la valeur de base du droit de présentation qu'il convient de prendre en considération ;
attendu que, faisant valoir qu'aucune augmentation du capital social n'était intervenue depuis la création de la société, Monsieur X...soutient que c'est la somme de 123 484 € qui doit servir de base de calcul ;
attendu qu'il y a lieu de rappeler que, nonobstant les dispositions combinées des articles 43 et 29, aucune augmentation de capital n'a été décidée ou même apparemment discutée " à compter du dixième exercice social, puis tous les cinq ans " ce qui explique le montant très important de la plus-value calculée par l'expert ;
attendu que l'intimée soutient quand à elle que la plus value latente doit être calculée par la différence entre la valeur réévaluée du droit de clientèle à la date d'entrée dans la SCP de Monsieur X...et sa valeur vénale potentielle et que, dès lors, ainsi que l'a calculé l'expert, ladite plus-value n'atteint pas les 20 % prévus par les statuts puisqu'elle s'élève à 11, 4 % ;
attendu qu'il importe peu que ce mode de calcul ne corresponde à aucune règle comptable ainsi que l'a noté l'expert et que l'a confirmé Monsieur C...consulté par le conseil de l'appelant ;
attendu en effet que la règle posée par l'article 43 tend à partager les plus-values d'actifs dues à l'industrie des associés à intervalles réguliers ;
qu'en l'espèce, étant constaté que cette règle n'a jamais été appliquée au sein de la SCP, Monsieur X...ne saurait s'en prévaloir pour la période antérieure à son entrée dans la SCP puisque, par hypothèse, les plus-values d'actifs réalisés au cours de cette période ne peuvent être dues à son industrie ;
que, ainsi que rappelé plus haut, la plus value réalisée pendant sa présence dans la SCP s'est élevée à 11, 4 %, soit une plus-value inférieure à celle qui, par application de l'article 29, aurait dû conduire à une augmentation de capital ;
qu'il ne saurait être reproché dans ces conditions à Madame Y...de s'être opposée à celle-ci, dès lors que, " les plus-values d'actif dues à l'industrie des associés ", selon les termes de l'article 29, ne représentaient pas " depuis cinq années consécutives " au moins 20 % de la valeur de l'élément d'actif considéré ;
que c'est donc pour des motifs pertinents que la cour adopte que le tribunal a rejeté les demandes tant principales que subsidiaires ;
attendu que par voie de conséquence, ses demandes complémentaires seront elles aussi rejetées ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il y a lieu de relever tout d'abord que l'irrespect des dispositions précitées article 43 du décret et article 29 des statuts n'est assorti de sanction, ni par le décret susvisé, ni par les statuts ;
les statuts qui doivent fixer les conditions d'application de l'article 43 du décret du 31 décembre 1969 se réfèrent à la notion de " valeur d'origine de l'élément d'actif considéré " ;
compte tenu de la périodicité prévue, si les textes avaient été correctement appliqués, cette valeur de référence aurait évolué au cours du temps dans les comptes de la SCP, la plus-value devant être calculée pour chaque tranche par rapport à la tranche précédente ;
il s'infère des textes précités que Monsieur X...n'est pas fondé à solliciter leur application, à son seul bénéfice, depuis l'origine de la société, c'est-à-dire à compter de la date à laquelle il a fait bénéficier la SCP de son industrie, soit le 2 juillet 1999, et pour la seule périodicité le concernant ;
il a été retenu que la décision de Madame Y...de s'opposer à une augmentation de capital et à l'octroi de partie des parts sociales créée à Monsieur X...n'était pas abusive dans la mesure où les conditions légales et statutaires n'étaient pas remplies ;
si Monsieur X...a pu légitimement éprouver une déception en raison du refus de Madame Y...d'accepter une évolution de sa situation au sein de la SCP, Madame Y...n'était pas tenue juridiquement d'accepter pour la période considérée l'attribution à son fils et associé, de parts en capital ;
en conséquence, la perte de son exercice professionnel par Monsieur X...est uniquement consécutive à sa volonté de quitter la société ;
la perte de chance des plus-values à venir constitue un préjudice hypothétique non indemnisable ;
en conséquence, en l'absence de faute de Madame Y...et de préjudice indemnisable au sens de l'article 1382 du code civil, il y a lieu de débouter Monsieur X...de ses demandes de dommages et intérêts ;
1/ ALORS, d'une part, QU'en refusant de qualifier le comportement de Madame Y...d'abus de majorité ayant causé un préjudice à Monsieur X...tout en constatant qu'elle n'avait pas procédé aux augmentations de capital comme le lui imposait l'article 43 du décret du 31 décembre 1969, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles 1382 du code civil et 43 du décret du 31 décembre 1969 ;
2/ ALORS, d'autre part, QU'en adoptant les motifs des premiers juges qui qualifiaient la perte de chance de préjudice hypothétique, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
3/ ALORS, ensuite, QU'en limitant l'application de l'article 43 du décret à la seule période postérieure à l'entrée de l'associé dans la société, la cour d'appel a ajouté une condition au texte et violé l'article 43 du décret du 31 décembre 1969 ;
4/ ALORS, enfin, QU'en limitant l'application de l'article 43 du décret à la seule période postérieure à l'entrée de l'associé dans la société sans que les statuts ne posent une telle condition, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 29 des statuts de la SCP violant ainsi l'article 1134 du code civil.