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16/05/2013 | FRANCE | N°11-27897

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 mai 2013, 11-27897


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société France Demeure en qualité de comptable à compter du 1er octobre 1996 ; qu'elle a été licenciée pour motif économique le 3 mars 2009 en raison de la suppression de son poste ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale le 1er juillet 2009 de demandes tendant à voir déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre ;
Sur le premier

moyen :
Vu l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Attendu que la lettre de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société France Demeure en qualité de comptable à compter du 1er octobre 1996 ; qu'elle a été licenciée pour motif économique le 3 mars 2009 en raison de la suppression de son poste ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale le 1er juillet 2009 de demandes tendant à voir déclarer sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre et condamner son employeur à lui verser diverses sommes à ce titre ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Attendu que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes, l'arrêt retient que la suppression de l'emploi de la salariée s'inscrit dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise rendue nécessaire pour la sauvegarde de sa compétitivité et que son licenciement a bien une cause économique et réelle ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'employeur avait invoqué, dans la lettre de licenciement, des difficultés financières conduisant à la suppression du poste de la salariée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société France Demeure aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE selon les dispositions de l'article L. 1233-3 du Code du travail, "Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par la salariée, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques" ; que selon l'article L.1233-6 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé des motifs économiques invoqués par l'employeur et doit énoncer l'incidence précise du motif économique sur l'emploi occupé par la salariée ; qu'il appartient aux juges du fond d'apprécier la réalité des difficultés économiques invoquées, à la date du licenciement, et de constater, le cas échéant, la suppression d'emploi ; que la réorganisation de l'entreprise ou du groupe peut constituer un motif économique dès lors qu'il est justifié, qu'elle est effectuée pour sauvegarder sa compétitivité ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, doit énoncer des faits précis et matériellement vérifiables ; qu'en l'espèce, que dans la lettre prononçant le licenciement économique de Mme X... du 3 mars 2009, la société FRANCE DEMEURE invoque l'accumulation des difficultés financières de la société, la baisse inquiétante de son chiffre d'affaires " cela étant très certainement dû à la crise immobilière récente qui s'installe", le poids des charges qui commencent à devenir supérieur aux recettes, menaçant ainsi la pérennité de l'entreprise, la suppression de son poste et l'absence de possibilité de reclassement ; que la salariée soutient que le motif économique invoqué est prospectif, du fait de l'utilisation de l'adverbe "certainement " qui évoque des probabilités, que contrairement à ce que soutient l'employeur, les charges d'exploitation de mars 2008 à mars 2009 ont baissé de près de 22 % ; que le licenciement a une cause économique réelle et sérieuse lorsqu'il est établi que la réorganisation de l'entreprise qui entraîne des suppressions d'emplois, est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; qu'en l'espèce, que la réalité et le sérieux du motif économique du licenciement de la salariée sont établis par les pièces comptables produites (baisse du chiffre d'affaires de 23, 19 % au 31 mars 2009 par rapport au 31 mars 2008 et résultat d'exercice en perte (-47.939 €), que la salariée était parfaitement informée de la situation financière des différentes sociétés à la gestion desquelles elle a participé activement, que la société France Demeure Beauchamp et la société France Demeure Frepillon ont été déclarées en liquidation judiciaire en mars 2009 et juin 2006, que la société a obtenu un plan d'apurement des dettes ; qu'il en résulte que la suppression de l'emploi de Mme X... s'inscrit dans le cadre d'une réorganisation de l'entreprise rendue nécessaire pour la sauvegarde de sa compétitivité (réduction de ses charges salariales) et que son licenciement a bien une cause économique et réelle.
ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes du débat quant aux motifs qui y sont énoncés et interdisent à l'employeur d'en invoquer de nouveaux ; qu'en jugeant le licenciement de Madame Jocelyne X... fondé sur une cause réelle et sérieuse au regard de la nécessité de sauvegarder la compétitivité économique de l'entreprise, quand la lettre de licenciement faisait état de difficultés économiques et non d'une réorganisation destinée à sauvegarder la compétitivité économique de l'entreprise, la Cour d'appel a violé l'article L.1232-6 du Code du travail.
ALORS subsidiairement QUE la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ne constitue pas en soi une cause économique de licenciement, seule la réorganisation consécutive à la nécessité de sauvegarder la compétitivité constituant une telle cause ; qu'en admettant que la suppression du poste de Madame Jocelyne X... ait pu être justifiée par la nécessité de sauvegarder la compétitivité économique de l'entreprise quand aucune réorganisation n'était avérée ni même invoquée, la Cour d'appel a violé l'article L.1233-3 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QU'en application des dispositions de l'article L.1233- 4 du même code, "Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ; que le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure ; que les offres de reclassement proposée au salarié sont écrites et précises "; qu'il appartient à l'employeur de rechercher s'il existe des possibilités de reclassement, de proposer aux salariés dont le licenciement est envisagé des emplois disponibles de même catégorie ou, à défaut, de catégorie inférieure, fût-ce par voie de modification des contrats de travail, en assurant au besoin l'adaptation de ces salariés, à une évolution de leur emploi ; que la salariée a refusé d'adhérer à la CRP qui lui a été proposée le 23 février 2009 ; que celle-ci soutient que la société n'a entrepris aucune recherche sérieuse de reclassement, que la société a lancé une offre d'emploi auprès de Pôle-Emploi dès le 13 mars 2009 consistant en l'engagement d'une employée de gérance de copropriété (24 h hebdomadaires), que Mme Y... a intégré l'effectif de la société le 12 mai 2009 (niveau Employé 3) très peu de temps après la fin de son préavis ( du 4 mars au 7 mai 2009), que l'employeur a manqué à son obligation de formation et d'adaptation ; mais que comme le fait valoir à juste titre la société appelante qui employait quatre salariés et qui avait déjà procédé au licenciement de deux employés entre janvier et février 2009, qu'il n'existait aucun emploi disponible relevant de la même catégorie ou d'emploi équivalent ou même de catégorie inférieure à celui que la salariée occupait lorsque son licenciement a été prononcé, que le poste créé après le départ de Mme X... (gestionnaire comptable), de catégorie inférieure (Employé 3) lui a été proposé le 7 mai 2009 dans le cadre d'une priorité de réembauchage au sein de l'entreprise, mais la salariée l'a refusé le 15 mai du fait de sa faible rémunération (1.363 € pour 104 h par mois) ; que cette proposition de reclassement est individualisée au vu de la fiche de poste produite et est conforme aux exigences légales, étant écrite, précise, concrète, comportant la localisation, la description des tâches, le niveau de rémunération ; qu'il résulte des pièces produites, que l'employeur a fait des recherches sérieuses des possibilités de reclassement et justifie de l'impossibilité de reclasser la salariée, compte tenu de la faible taille de l'entreprise ; que c'est donc à tort que la juridiction prud'homale a dit que la société avait méconnu l'obligation de reclassement de la salariée ; qu'au regard de ce qui précède, il convient d'infirmer le jugement et de dire que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de débouter Mme X... de ses prétentions.
ALORS QUE le licenciement d'un salarié pour motif économique n'a de cause réelle et sérieuse que si l'employeur a recherché les possibilités de reclassement et s'est trouvé dans l'impossibilité de reclasser le salarié concerné ; qu'en affirmant « qu'il résulte des pièces produites, que l'employeur a fait des recherches sérieuses des possibilités de reclassement», la Cour d'appel qui n'a pas précisé les éléments lui permettant de parvenir à une telle conclusion a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile.
ET ALORS QUE le reclassement doit être tenté avant la notification du licenciement ; qu'en affirmant que l'employeur aurait satisfait à cette obligation en proposant à Madame Jocelyne X... un poste de catégorie inférieure le 7 mai 2009, soit plus de deux mois après la notification de son licenciement et après l'expiration du délai de préavis, la Cour d'appel a violé l'article L.1233-4 du Code du travail.
ALORS enfin QUE l'obligation de reclassement doit être exécutée de bonne foi ; que Madame Jocelyne X... faisait valoir dans ses écritures d'appel qu'avait manqué à cette obligation son employeur qui avait fait diffuser dix jours après la notification de son licenciement une offre d'emploi portant sur un poste qui aurait du lui être proposé au titre du reclassement ; qu'en se contentant d'affirmer que ledit poste, dont l'existence n'était pas même contestée, avait été créé après le départ de Madame Jocelyne X..., sans rechercher si le processus de recrutement n'était pas contemporain du licenciement, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.1233-4 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-27897
Date de la décision : 16/05/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Cour d'appel de Versailles, 12 octobre 2011, 10/03698

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 12 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 mai. 2013, pourvoi n°11-27897


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27897
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