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23/04/2013 | FRANCE | N°12-85027

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 avril 2013, 12-85027


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme Rose-Marie X..., épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 25 mai 2012, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée du chef d'homicide involontaire, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-6, 221-8 et 221-10 du co

de pénal, violation de l'article 1382 du code civil et de l'article 6 § 1 de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- Mme Rose-Marie X..., épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 25 mai 2012, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée du chef d'homicide involontaire, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-6, 221-8 et 221-10 du code pénal, violation de l'article 1382 du code civil et de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, violation des articles 2 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé une ordonnance de non-lieu ;
"aux motifs propres et non contraires qu'il résulte des éléments du dossier, et notamment de l'expertise médicale et du rapport d'accréditation du Centre hospitalier de Saint-Malo, que M. Y... a été admis pour sa sixième hospitalisation en psychiatrie le 10 octobre 2005, secteur 35G02, dans le service du docteur Z..., service qui comporte au total 23 lits, tous occupés le 31 octobre 2005, de sorte que M. Y..., qui se trouvait dans une chambre à deux lits selon le plan du service et la répartition des patients, partageait nécessairement sa chambre avec un autre patient, dont M. A..., cadre infirmier, a indiqué qu'il devait être quelque part dans le service lors de l'entretien qu'il avait eu en début d'après-midi avec l'intéressé ; que M. A... précisait d'ailleurs dans son audition que "les patients manifestant une forte volonté suicidaire, comme M. Y..., sont en chambre double, parce que l'autre patient peut alerter" avant d'indiquer qu'il ne savait pas où se trouvait l'autre patient au moment où lui-même était passé dans la chambre ; que la critique faite par ailleurs au service d'hospitalisation de la faculté qu'a eu Yann Y... d'utiliser sa ceinture qui lui avait été laissée, trouve sa justification dans le désir, exprimé par tous les intervenants, de ne pas déshumaniser l'intéressé lui-même, le rapport de soins existant avec lui et le rappel constant qu'il s'agit effectivement d'un service de soins et non de surveillance ; que cette volonté qui s'inscrit dans une visée thérapeutique est rappelée comme étant de pratique générale, notamment par le docteur B..., psychiatre à Dinan, qui indique que c'était cette manière de concevoir les soins et de laisser leur ceinture aux malades hospitalisés qui était en usage dans l'hôpital de Dinan où il exerçait ;
"aux motifs que les experts commis indiquent que "le retrait de vêtements ou biens à un patient hospitalisé en secteur psychiatrique pouvait porter atteinte au respect de la personne et mettre ainsi à mal un suivi qui doit se faire le plus humainement possible ; ils précisaient, en outre, qu'un patient, décidé à passer à l'acte suicidaire, peut trouver facilement et inévitablement, au sein de l'hôpital, un objet le lui permettant : drap, vêtement, serviette, ustensile de cuisine" et entérinent ainsi le fait pour le service hospitalier d'avoir laissé sa ceinture à Yann Y... ; que, s'agissant de l'abstention également critiquée du placement de celui-ci en chambre d'isolement, il sera retenu que ce placement lui aussi ne se pratique que dans une perspective de sécurité et non de soins, sur prescription médicale sauf urgence, la question ne s'étant pas posée pour Yann Y..., ainsi que le déclare M. C..., car "ses angoisses étaient impressionnantes mais pouvaient retomber car il répondait à la prise en charge" ; qu'il est, par ailleurs, reproché l'absence de précautions particulières prises face à l'état suicidaire exprimé par Yann Y... ; qu'il ressort de l'ensemble des déclarations du personnel soignant que M. Y..., s'il était certes connu pour souffrir d'une pathologie pouvant l'amener à proférer des idées suicidaires et pour être déjà passé à l'acte par le passé, n'avait pas exprimé de manière particulière, le jour des faits ou ceux précédents, des idées noires ; que, selon le docteur Z..., son médecin traitant habituel, son état s'était plutôt amélioré la semaine précédente, raison pour laquelle ce médecin avait autorisé une sortie de l'intéressé chez Mme sa mère ; que le personnel soignant intervenant avait même craint, après l'incident survenu le matin, un passage à l'acte sur autrui car si M. Y... se trouvait dans un état de mal-être certain, celui-ci se manifestait par une certaine agitation, voire agressivité ; que, par ailleurs, face à cette crise ponctuelle et à cette agitation manifestée par M. Y..., il lui a été d'abord prescrit un sédatif supplémentaire par le médecin présent dans le service, lequel lui a été administré vers 13 heures puis, la vigilance du service à son égard ayant été constante, et du fait de son agitation manifestée à nouveau pendant la réunion de transmission, il lui a été prescrit, à 14 heures 25, par le médecin, une injection pour l'apaiser, et c'est au moment de lui administrer cette injection vers 14 heures 45 qu'il a été découvert pendu dans sa chambre alors qu'il avait été à nouveau vu par M. A... vers 14 heures 15, laissé dans sa chambre par celui-ci dans un état apparent de calme, puis de nouveau vers 14 heures 30 ; qu'ainsi, la succession des précautions et soins pratiqués à l'égard de M. Y... témoigne donc, de la part du service, une préoccupation constante de l'évolution de celui-ci en sorte qu'aucune négligence dans la surveillance, dans les soins, dans son accompagnement et dans les mesures prises en lien avec le passage à l'acte suicidaire n'est donc caractérisée si bien qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis l'infraction d'homicide volontaire au préjudice de M. Y... ;
"1) alors que, si M. A..., cadre infirmier, a précisé que les patients manifestant une forte volonté suicidaire, comme M. Y..., sont en chambre double parce que l'autre patient peut alerter, il a par ailleurs précisé qu'il ne savait pas où se trouvait l'autre patient au moment où lui-même était passé dans la chambre ; qu'il est constant qu'au moment du passage à l'acte, le patient était encore seul dans sa chambre ; qu'après avoir relevé qu'un patient manifestant une forte volonté suicidaire est placé en chambre double parce que l'autre patient peut alerter tout en constatant, par ailleurs, que l'on ne sait ce qu'il en a été de cet autre patient, la chambre de l'instruction retient une motivation insuffisante et/ou inopérante au regard des exigences de l'article 593 du code de procédure civile, violé ;
"2) alors que la chambre de l'instruction affirme que M. Y... n'aurait pas exprimé, de manière particulière, des idées noires et que selon le docteur Z..., son médecin traitant habituel, son état s'était plutôt amélioré la semaine précédente ; cependant que dans son mémoire, la partie civile insistait sur le fait qu'il résultait du cahier du service que la veille du drame, soit le 30 octobre 2005, après-midi, au moment du retour de permission du patient, que ce dernier « Préférerait mourir que de vivre ça. En a marre de la vie… », étant observé que, le 31 octobre 2005, le jour du passage à l'acte, on trouve indiquées, sur le même cahier de l'hôpital les mentions suivantes : « vécu d'angoisses fluctuant. Evocation d'idées suicidaires, de faire du mal ou de se faire du mal ; vers 12 heures 30, raptus agressif envers le personnel soignant, déclare trop souffrir. Vouloir en finir », étant observé que, dans son mémoire, la partie civile faisait encore valoir que contrairement à ce que psychiatres, aides-soignants ou infirmiers ont pu laisser entendre, M. Y... avait très clairement fait part de ses intentions suicidaires dès le 30 octobre puis à nouveau le 31 octobre, ce qui avait été prouvé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans consacrer le moindre motif à ce qui était ici soutenu à partir de mentions relevées par l'hôpital lui-même sur l'état du patient les 30 et 31 octobre 2005, mentions faisant été d'une volonté réitérée d'en finir, la chambre de l'instruction viole de plus fort ce que postule l'article 593 du code de procédure civile par rapport à une motivation pertinente ;
"3) et alors que, lorsqu'un patient est admis dans un hôpital psychiatrique, lorsqu'il est notoire qu'il est habité par des idées suicidaires, lorsqu'il est avéré que la veille et le jour des faits il avait clairement déclaré préférer mourir que de vivre et en avoir marre de la vie, l'hôpital se devait de faire en sorte d'éviter que le patient ait à porter de main ce qui lui permettrait de passer à l'acte ; et ce, ne serait-ce qu'au titre d'une organisation normale du service et de soins normaux à apporter aux patients eu égard à leur propre état de crise ; qu'en estimant que le fait d'avoir finalement laissé le patient seul dans une chambre double et de l'avoir laissé avec une ceinture qu'il utilisera pour mettre fin à ses jours au motif qu'il n'est pas d'usage d'ôter aux malades leurs effets personnels susceptibles d'être dangereux afin de ne pas les déshumaniser, la chambre de l'instruction retient là encore une motivation inopérante, contraire à ce que postulent des soins adaptés et des mesures de surveillance adaptées à la situation d'un patient schizophrène, voulant mettre fin à ses jours, l'ayant clairement exprimé et en réalité se trouvant seul dans une chambre qui était double, en statuant comme elle l'a fait, la cour viole de plus fort les textes cités au moyen" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, que l'information était complète et qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit reproché, ni toute autre infraction ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Harel-Dutirou conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-85027
Date de la décision : 23/04/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, 25 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 avr. 2013, pourvoi n°12-85027


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.85027
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