LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article l'article 34, point 2, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, par jugement du 4 avril 2008 du tribunal de Braga, au Portugal, la société TSD confection a été condamnée à payer une certaine somme à la société Rampa, laquelle a obtenu du greffier en chef d'un tribunal de grande instance une décision déclarant le jugement exécutoire en France ; que la société TSD confection a formé un recours contre cette décision en faisant valoir qu'elle n'avait pu se défendre, n'ayant été destinataire d'aucun acte traduit en langue française ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt relève que la société TSD confection, qui a reçu la notification de l'injonction de payer du tribunal de Braga du 17 décembre 2007 avec les conditions précises des voies de recours, a formé opposition dans le délai de dix jours mais n'a pas procédé au paiement des frais de justice comme cela avait été précisément indiqué dans la notification, entraînant le retrait de l'opposition et la décision du tribunal de Braga du 4 avril 2008 ; qu'il relève qu'il n'a pas été formé de recours devant une juridiction portugaise contre cette dernière décision dont il n'est pas contesté qu'elle a été également régulièrement notifiée ; qu'il retient que la société TSD confection avait donc, contrairement à ce qu'elle affirme, été mise en mesure de contester la décision et de se défendre, ce qu'elle n'a pas fait ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si l'absence de traduction en langue française des actes de la procédure conduite au Portugal n'avait pas privé la société TSD confection de la possibilité de se défendre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne la société Rampa aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société TSD confection la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour la société TSD confection
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt d'avoir confirmé la déclaration du greffier en chef du tribunal de grande instance de CASTRES constatant, au visa de l'article 509-2 du code de procédure civile, la force exécutoire en France du jugement du tribunal judiciaire de BRAGA du 4 avril 2008 ;
AUX MOTIFS QUE la SARL TSD CONFECTION ne rapporte pas la preuve du caractère manifestement contraire à l'ordre public de l'Etat membre requis, la France, de la reconnaissance par le greffier du TGI de CASTRES, le 10 juillet 2009, du caractère exécutoire du jugement du tribunal de commerce de BRAGA du 4 avril 2008, qu'elle invoque conformément à l'article 34 du règlement européen du 22 décembre 2000 ; qu'en effet, la cession des créances du 5 janvier 2004 de la société QUADRIGA à l'encontre de la SARL TSD CONFECTION au profit de la société RAMPA a bien été notifiée au débiteur cédé le 30 avril 2004 par fax auquel la société TSD CONFECTION a répondu dès le 5 mai 2004 en sollicitant l'original des factures mais sans critiquer la cession des créances ; que la SARL TSD CONFECTION n'établit donc pas le défaut de cession de créance au débiteur cédé qu'elle invoque ; que par ailleurs, la SARL TSD CONFECTION qui a reçu la notification de l'injonction de payer du tribunal judiciaire de BRAGA du 17 décembre 2007 avec les conditions précises des voies de recours, a formé opposition dans le délai de 10 jours mais n'a pas procédé au paiement des frais de justice comme cela avait été précisément indiqué dans la précédente notification, entraînant le retrait de l'opposition et la décision du tribunal de BRAGA du 4 avril 2008 ; qu'il n'a pas été formé de recours devant une juridiction portugaise contre cette dernière décision du tribunal judiciaire de commerce de BRAGA dont il n'est pas contesté qu'elle a été également régulièrement notifiée ; que la SARL TSD CONFECTION avait donc, contrairement à ce qu'elle affirme, été mise en mesure de contester la décision et de se défendre, ce qu'elle n'a pas fait ; que la cour ne peut que constater que les motifs invoqués pour refuser ou révoquer la déclaration critiquée ne sont pas établis en application de l'article 45 du règlement du 22 décembre 2000 ;
ALORS, de première part, QU'aux termes de l'article 34, point 2, du Règlement 44/2001 du 22 décembre 2000, une décision rendue dans un Etat membre n'est pas reconnue dans un autre Etat membre si l'acte introductif d'instance ou un acte équivalent n'a pas été signifié ou notifié au débiteur défaillant en temps utile et de telle manière qu'il puisse se défendre, à moins qu'il n'ait pas exercé de recours à l'encontre de la décision alors qu'il était en mesure de le faire ; que le juge saisi de la contestation d'une déclaration constatant la force exécutoire d'une décision d'un autre Etat membre est tenu de s'assurer du respect des droits de la défense ; qu'en l'espèce, un jugement rendu par un tribunal portugais a fait injonction à la société de droit français TSD CONFECTION de payer une certaine somme à la société de droit portugais RAMPA, prétendument cessionnaire d'une créance contre la société TSD CONFECTION ; que la société TSD CONFECTION a fait appel de l'ordonnance d'exequatur de ce jugement ; qu'elle a fait valoir qu'elle n'avait pu se défendre, n'ayant aucune connaissance de la langue ou de la procédure portugaise, et n'avait été destinataire d'aucun acte traduit en langue française ; qu'en ne recherchant pas si l'absence de traduction en langue française de la procédure diligentée au Portugal ne suffisait pas à méconnaître l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
ALORS, de deuxième part, QUE dans ses conclusions, la société TSD CONFECTION faisait valoir qu'elle n'avait pu se défendre, n'ayant aucune connaissance de la langue ou de la procédure portugaise, et n'avait été destinataire d'aucun acte traduit en langue française ; qu'elle produisait aux débats un courrier adressé le 14 avril 2008 au tribunal judiciaire de BRAGA sollicitant une traduction en français des actes dressés en portugais et qu'elle ne pouvait comprendre ; qu'en retenant néanmoins qu'il n'était pas contesté que la notification à la société TSD CONFECTION, de la décision, dont la reconnaissance en France de la force exécutoire était litigieuse, avait été régulière, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil par dénaturation ;
ALORS, de troisième part, QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux moyen péremptoires des conclusions des parties ; qu'en l'espèce, en ne répondant pas au moyen péremptoire des conclusions de la société TSD CONFECTION, pris de la contrariété du jugement étranger à l'ordre public français par la méconnaissance des dispositions de l'article 1690 du code civil, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.