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14/03/2013 | FRANCE | N°12-13060

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 14 mars 2013, 12-13060


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale et le tableau des maladies professionnelle n° 1 A. dans sa rédaction issue du décret n° 91-877 du 3 septembre 1991, applicable à l'espèce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Robert X..., salarié intérimaire de la société Adia mis en qualité de manutentionnaire-cariste, du 26 août au 13 décembre 2002 puis du 16 au 19 décembre 2002, à disposition de la société Affinages

Champagne-Ardennes (la société AFICA) qui récupère et refond des métaux, a déposé le...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale et le tableau des maladies professionnelle n° 1 A. dans sa rédaction issue du décret n° 91-877 du 3 septembre 1991, applicable à l'espèce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Robert X..., salarié intérimaire de la société Adia mis en qualité de manutentionnaire-cariste, du 26 août au 13 décembre 2002 puis du 16 au 19 décembre 2002, à disposition de la société Affinages Champagne-Ardennes (la société AFICA) qui récupère et refond des métaux, a déposé le 24 janvier 2003 une demande de prise en charge au titre de la législation professionnelle d'une encéphalopathie aiguë au plomb, maladie inscrite au tableau 1 A., qui a été acceptée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Marne (la caisse) ; qu'ayant saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande de reconnaissance d'une faute inexcusable à l'encontre tant de son employeur que de la société AFICA, il est décédé le 18 avril 2011 et ses ayants droit ont repris l'instance ;
Attendu que pour dire que la maladie dont le salarié a été atteint bénéficie d'une présomption d'imputabilité professionnelle, l'arrêt énonce que c'est à bon droit que les premiers juges, retenant que les conditions médicales (taux de plombémie ou taux de protoporphyrine érythrocytaire sanguine supérieur à 20 microgrammes/g d'hémoglobine et pour l'anémie taux de ferritine normal ou élevé) sont alternatives, la seule constatation d'un taux de plombémie supérieur au taux fixé suffit à caractériser la maladie en question ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que le tableau n° 1 A. prévoit qu'au dépassement du seuil de plombémie s'ajoutent les signes cliniques qu'il énumère, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de ce tableau et de l'article susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 décembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Affinages Champagne-Ardennes
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(sur la régularité de la procédure d'instruction)
Le moyen fait grief à l'arrêt d'AVOIR déclaré la décision de prise en charge opposable à la société ADIA et dit que la maladie du salarié était due à la faute inexcusable de la société AFICA substitué dans les pouvoirs de le la société ADIA, employeur ;
AUX MOTIFS QUE « la Société ADIA, qui avait formulé des réserves, soutient que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie n'a pas respecté son obligation d'information en transmettant au seul salarié le questionnaire prévu et ne l'a pas informé de la clôture de l'instruction et de la possibilité pour elle de consulter le dossier et en conséquence n'a pas respecté le principe du contradictoire ; que la caisse sur laquelle pèse la charge de la preuve ne justifie ni de l'envoi ni de la réception du courrier du 27 mai 2003 dont elle se prévaut ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose à la caisse primaire l'envoi d'un courrier par lettre recommandée avec accusé de réception et que si la charge de la preuve lui incombe, elle peut l'apporter par tous moyens lesquels sont appréciés souverainement par les juges du fond ; qu'en l'espèce, il est démontré que la caisse primaire a adressé le 29 janvier 2003 une demande de renseignements à l'employeur ; que le 28 février ce dernier répondait « vous nous avez fait parvenir une demande de reconnaissance de maladie professionnelle du 19 décembre 2002 concernant notre ancien salarié Monsieur Robert X...… » et détaillait le poste occupé, les conditions de travail et sa position quant au caractère professionnel de la maladie ; que l'employeur a été en conséquence mis en mesure d'apporter toutes les informations qu'il jugeait nécessaire ; que le 22 avril 2003 la caisse primaire notifiait à l'employeur un délai complémentaire d'instruction ; que la caisse primaire produit la copie du courrier en date du 23 mai 2003 dont l'employeur conteste la réception voire même l'envoi ; que ce courrier vise expressément le délai de dix jours pour consulter le dossier ; que s'agissant d'une copie, issue du disque dur du centre informatique dont dépend la caisse, l'absence de signature ne saurait suffire à mettre en cause son authenticité ; que la caisse démontre suffisamment avoir tenu informé régulièrement l'employeur des formalités de la procédure engagée par l'envoi des courriers précédents dont la réception n'est pas contestée ; que ces éléments suffisent à démontrer l'existence et l'envoi effectif, à la date y figurant, de la lettre de clôture » ;
AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTÉS QUE « sur la contestation relative à l'opposabilité à l'employeur (ADIA) de la décision de prise en charge de la Caisse Primaire : selon l'article R.441-11 du Code de la Sécurité Sociale, hors les cas de reconnaissance implicite et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants droits et de l'employeur. En cas de réserves de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les causes et les circonstances de la maladie. En l'espèce, la Société ADIA reproche à la caisse primaire de n'avoir respecté son obligation d'information en ne la mettant pas en mesure d'apporter des observations complémentaires avant que la caisse ne prenne sa décision, alors que l'employeur qui avait été destinataire de la copie de la déclaration de maladie professionnelle, d'un questionnaire et d'une notification de prolongation de l'instruction, s'est vu notifier le 27 mai 2003, la clôture de l'instruction et l'invitant en l'absence de nouveau élément à venir consulter le dossier. La Société ADIA n'ayant pas réagi dans le délai imparti, est donc mal fondée à conclure à l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de Monsieur X... par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de la Marne » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en vertu de l'article 1316-1 du Code civil, l'écrit sous forme électronique ne vaut preuve qu'à condition que son auteur puisse être dûment identifié et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité ; que l'article 287 du code de procédure civile impose aux juges de vérifier spontanément le respect des conditions posées par l'article 1316-1 du Code civil lorsqu'une des parties conteste la force probatoire du document ; qu'au cas présent, en considérant le document produit par la CPAM de la MARNE comme « la copie du courrier en date du 23 mai 2003 » (Arrêt p.4 alinéa7) tout en constatant qu'il s'agissait « d'une copie, issue du disque dur du centre informatique dont dépend la Caisse » (Arrêt p.4 alinéa 8), sans rechercher si le fichier informatique litigieux avait bien été établi le 23 mai 2003 et conservé dans des conditions interdisant à la Caisse de modifier le contenu de ce document, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1316-1 du Code civil et 287 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE SECONDE PART, QUE l'admission par le juge judiciaire d'une prétendue copie informatique qui ne présente aucune garantie de fidélité, d'inaltérabilité et d'intégrité n'est pas conforme aux exigences du procès équitable ; de sorte qu'en admettant que la preuve de l'exécution de son obligation d'information par la caisse était rapportée par la production d'un document informatique dont rien ne permettait de garantir qu'il n'avait pas été établi par la caisse pour les besoins du litige, la cour d'appel a violé l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(sur la décision de prise en charge)
Le moyen fait grief à l'arrêt d'AVOIR constaté le caractère professionnel de la maladie présentée par Monsieur X..., déclaré la décision de la Caisse opposable à la Société ADIA et dit que ladite maladie professionnelle était due à une faute inexcusable de la Société AFICA substituée à la Société ADIA ;
AUX MOTIFS QUE « l'employeur tout comme la Société AFICA soutiennent que la maladie ne remplissait pas les conditions prévues au tableau n°1 A des affections dues au plomb ou à ses composés et que le taux de plombémie a subi une modification par décret en date du 23 décembre 2003 modifiant l'article R.231-58-6-2 du Code de la Sécurité Sociale et fixé à 70 µg plomb par litre de sang pour les hommes la valeur limite à ne pas dépasser ; que le seuil à prendre en considération était donc de 70 µg plomb par litre de sang pour les hommes la valeur limite à ne pas dépasser ; que le seuil à prendre en considération était donc de 70 µg et non 40 µg ; que le taux selon le certificat médical était de 518 mg/100 ml de sang en décembre 2002 soit largement inférieur au taux applicable à l'époque et qu'en l'absence de dispositions transitoires et que quand bien même ce taux est aujourd'hui supérieur au seuil résultant du décret de décembre 2003, le médecin traitant ne fait pas mention d'une analyse d'urine ou d'anémie ; que l'article 5-III du décret sus-visé a prévu des dispositions transitoires soit 70 µg /1 jusqu'au 31 décembre 2003 et 50 µg/1 du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 ; que la déclaration de la maladie professionnelle est datée du 24 janvier 2003 ; que la déclaration de maladie est datée du 24 janvier 2003 et était accompagnée d'un certificat médical du 19 décembre 2002 ; que la décision de reconnaissance est intervenue le 10 juin 2003 ; qu'ainsi la caisse a procédé à l'instruction du dossier de Monsieur X... dans le respect des dispositions en vigueur ; que la caisse ne pouvait faire application d'une règle édictée postérieurement à sa prise de décision ; que c'est à bon droit et par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges retenant que les conditions médicales (taux de plombémie ou taux de protoporphyrine érythrocytaire sanguine supérieur à 20 microgrammes/g d'hémoglobine et pour l'anémie taux de ferritine normale ou élevé) étant alternatives, la seule constatation du taux de plombémie supérieur au taux fixé est suffisante à caractériser la maladie en question ; qu'aucun document médical contraire n'est produit ; que la maladie dont était affectée Monsieur X... était inscrite au tableau n°1 A la caisse primaire pouvait instruire le dossier sans saisir le Comité régionale de reconnaissance des maladies professionnelles » ;
AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTÉS QU'« en l'espèce Monsieur X... a présenté le 24 janvier 2003 une encéphalopathie aigue au plomb qui selon les constatations du Docteur Y..., répondent aux conditions médicales exigées au tableau n°1 A des maladies professionnelles du régime général relatif aux affections dues au plomb et à ses composés. Les conditions médicales figurant au tableau n°1 A stipulent que « pour toutes les encéphalopathies aiguës et subaiguës, l'exposition au plomb doit être caractérisée par une plombémie supérieure à 40 microgrammes par 100 ml de sang et les signes cliniques associés à un taux d'acide delta aminolévulinique urinale supérieur à 15 milligrammes/g (microgrammes/g) de créatinine ou à un taux de protoporhyrine érythrocytaire sanguine supérieur à 20 microgrammes/g d'hémoglobine et pour l'anémie à un taux de ferritine normale ou élevé. Les conditions médicales étant alternatives, il importe peu que le taux de PPZ relevé sur la personne de Monsieur X... soit inférieur à 20 comme le soutient la Société ADIA, dès lors que la plombémie observée de 47 µg/100 ml de sang est supérieure au seuil fixé dans le tableau. Ces constatations sont propres à caractériser la maladie en question et ne sont combattues par aucun document médical contraire » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE SELON LE JUGEMENT CONFIRMÉ, il suffirait de relever que la plombémie observée de 47 µg sur 100 ml de sang soit supérieure au seuil fixé dans le tableau pour qu'une telle constatation permette de caractériser la maladie du tableau n°1-A3° ; que cependant ledit tableau énonce « pour toutes les manifestations aiguës et subaiguës, l'exposition au plomb doit être caractérisée par une plombémie supérieure à 40 microgrammes par 100 ml de sang et les signes cliniques associés à un taux d'acide delta aminolévulinique urinaire supérieur à 15 milligrammes/g de créatinine » de sorte que, violent ce tableau ainsi que l'article L.461-1 du Code de la Sécurité Sociale les juges du fond qui estiment que les conditions de prise en charge seraient satisfaites sur la base de la seule constatation du taux de plombémie supérieure au taux fixé (arrêt, p. 5, al. 8) et qui négligent ainsi l'exigence du tableau relative à la nécessaire association du taux susvisé aux signes cliniques associés à un taux d'acide delta aminolévulinique urinaire supérieur à 15 mg/g de créatinine ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE violent l'article 455 du Code de procédure civile les juges du fond qui laissent dépourvues de toute réponse les conclusions de la Société AFICA faisant valoir que les examens médicaux pratiqués sur Monsieur X... n'ont porté que sur la plombémie et le taux PPZ mais non sur le taux d'acide delta aminolévulinique urinaire et que le taux limite de PPZ n'était pas lui-même atteint, de sorte qu'aucune des conditions complémentaires n'étaient remplies ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE viole encore l'article 455 du Code de procédure civile la Cour d'appel qui, statuant par un premier arrêt du 23 juin 2010, avait considéré que, nonobstant la motivation du jugement, la maladie ne pouvait être reconnue comme professionnelle parce que les conditions du tableau n'étaient pas remplies (arrêt, 23 juin 2010, p. 5, al. 1) et qu'il y avait lieu de saisir le CRRMP et qui, sans aucunement s'en expliquer, affirme au contraire dans son deuxième arrêt qu'elle adopte les motifs « pertinents » dudit jugement ;
ALORS ENFIN QUE pour être opposable à l'employeur la maladie doit respecter les conditions du tableau sur le fondement duquel elle a été prise en charge ; que les conditions du tableau doivent également être établies pour pouvoir engager sa responsabilité sur le fondement de la faute inexcusable ; qu'à ce titre il appartient à la Caisse et au salarié de démontrer que le délai de prise en charge du tableau était rempli ; qu'au cas présent, la société AFICA faisait valoir que le tableau 1A prévoyait un délai de prise en charge de 30 jours ; qu'elle ajoutait que la cessation de l'exposition au risque avait eu lieu le 19 décembre 2002, date de la fin son contrat de travail, et que la première constatation médicale était datée du 24 janvier 2003 soit 34 jours après la fin de l'exposition ; qu'en s'abstenant de vérifier, cependant qu'il lui était expressément demandé, si la maladie avait été médicalement constatée durant le délai de prise en charge prévu par le tableau 1A, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce tableau et de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-13060
Date de la décision : 14/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 07 décembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 14 mar. 2013, pourvoi n°12-13060


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.13060
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