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13/03/2013 | FRANCE | N°11-22271

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mars 2013, 11-22271


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que M. X... a été engagé le 28 septembre 2006 en qualité d'agent de propreté par la société L'Union France entretien ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ; que le conseil de prud'hommes y a partiellement fait droit par jugement du 13 mars 2009 ; que le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 26 mars 2009 ; que faisant appel du jugement, il a contesté son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Atte

ndu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé sur se...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé, que M. X... a été engagé le 28 septembre 2006 en qualité d'agent de propreté par la société L'Union France entretien ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ; que le conseil de prud'hommes y a partiellement fait droit par jugement du 13 mars 2009 ; que le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 26 mars 2009 ; que faisant appel du jugement, il a contesté son licenciement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé sur ses demandes fondées sur une contestation de la clause de mobilité, alors, selon le moyen, que la formation des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures de remise en état qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que constitue un trouble manifestement illicite l'usage abusif par l'employeur d'une clause de mobilité, ayant consisté à affecter à de multiples reprises le salarié d'une entreprise de nettoyage sur des sites de plus en plus éloignés de son domicile et ayant porté une atteinte excessive à sa vie privée et familiale ; qu'en décidant le contraire pour la considération inopérante de l'existence d'une contestation sérieuse, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a fait ressortir qu'en l'état des éléments de fait qui lui étaient soumis, l'abus invoqué par le salarié dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité n'était pas manifeste ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé sur ses demandes relatives à la nullité du licenciement, alors, selon le moyen, que le juge des référés est compétent pour prononcer la nullité d'un licenciement discriminatoire, caractéristique d'un trouble manifestement illicite ; qu'en retenant, pour le débouter de ses demandes, que le juge des référés n'était pas compétent pour se prononcer sur le caractère discriminatoire du licenciement prononcé après la saisine du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé l'article L. 1455-6 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu, dans la limite des pouvoirs qu'elle tient de l'article R. 1455-6 du code du travail, que le licenciement de l'intéressé n'était pas manifestement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu l'article 1153 du code civil ;
Attendu que, pour fixer à la date de l'arrêt le point de départ de l'intérêt légal sur les provisions au titre d'un rappel de salaire et de prime, la cour d'appel a retenu que l'intérêt ne pouvait courir que du jour de la décision qui les avait accordées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié avait sollicité le paiement des intérêts à compter de la demande de provision et que cette demande en justice valait sommation de payer faisant courir les intérêts moratoires, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à la date de l'arrêt le point de départ de l'intérêt légal sur la condamnation aux rappels de salaire, de prime et de congés payés, l'arrêt rendu le 26 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société L'Union France entretien aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société L'Union France entretien à payer à la SCP Didier et Pinet la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de monsieur X... fondées sur une contestation de la clause de mobilité.
AUX MOTIFS PROPRES QUE monsieur X... ne peut sérieusement soutenir que le juge des référés soit compétent pour invalider une clause contractuelle insérée dans un contrat qu'il a signé ; que les premiers juges ont justement relevé le risque d'outrepasser leurs pouvoirs ; qu'ils ont souligné pertinemment la contradiction non seulement de moyens, mais d'arguments (clause qui « altérerait la santé du salarié du fait de déplacements trop longs », mais en même temps « l'empêcherait de chercher un travail complémentaire » au-delà de 35 heures hebdomadaires, soit au péril de sa santé) ; qu'au surplus d'autres contradictions résultent de ses écritures devant la cour ; qu'il soutient que la clause est abusivement utilisée motif pris qu'il « travaillait auparavant à proximité de son domicile », soit à Paris, mais tout aussi contradictoirement il fait valoir (page 10 de ses écritures) que « le premier lieu d'affectation est : ... – Chilly Mazarin » ; que la clause litigieuse visant « des départements limitrophes du département du premier lieu d'affectation », qu'il ne peut disconvenir que le département de l'Essonne soit limitrophe de celui de la Seine et Marne, où l'employeur l'a affecté au dernier état, soit à Marne-la-Vallée, le tout dans la « Région Ile-de-France » visée également par la clause ; qu'à cet égard, il n'a d'ailleurs jamais protesté concernant son affectation initiale à Rambouillet, dont la cour relève qu'il s'agit d'une destination accessible pour un salarié domicilié dans le 15ème arrondissement de Paris, proche de la gare Montparnasse qui commande la relation ferroviaire avec cette localité ; qu'il prétend en outre inexactement avoir fait l'objet de « six » affectations différentes successives ; qu'en cet état l'allégation d'abus ne peut manifestement prospérer devant la juridiction des référés, qui outrepasserait ses pouvoirs en le caractérisant ou refusant de le caractériser ; il y a contestation sérieuse, faisant échec à la reconnaissance d'un trouble manifestement illicite et à l'allocation de diverses provisions sur dommages intérêts réclamées au titre de l'abus prétendu (« utilisation abusive de la clause », atteinte excessive à la vie privée familiale », « absence de contre-partie financière », non-respect d'avis médical »), laquelle, encore une fois, s'appuierait sur la caractérisation de fautes dans l'exécution du contrat de travail, qui échappe à la compétence de cette juridiction ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE concernant la contestation de la clause de mobilité, la formation de référé considère que cette clause est un élément contractuel partie intégrante d'un contrat de travail signé et accepté par les deux parties ; que rien n'indique que ce contrat ait été « imposé » au salarié ; que l'article L. 1455-5 du code du travail décrit la compétence de la formation de référé : « dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend » ; qu'il convient de rappeler que constitue notamment une contestation sérieuse la détermination de la portée d'une clause contractuelle. Nous sommes précisément dans ce cas de figure ; que de plus, on doit rappeler ici les conditions d'intervention d'une formation de référé :
- il faut un caractère d'urgence, apprécié par le juge au jour de l'audience,- le trouble invoqué par le demandeur doit être démontré sans contestation sérieuse,- la décision à intervenir a un caractère provisoire et ne saurait donc aborder le fond du litige, encore moins le trancher,- en prenant la décision de suivre les demandes du plaignant, le juge doit avoir la certitude que la demande repose sur un droit incontestable. Si ce n'est pas le cas, il n'y a pas lieu à référé.
Que la formation de référé considère qu'en l'espèce :
- l'urgence n'est pas démontrée. En effet, la fatigue de monsieur X... peut avoir beaucoup de causes et son désir de travailler audelà des 35 heures accomplies chez la Sarl LFE, d'une part, ne va pas aller dans le bon sens pour atténuer l'asthénie constatée chez monsieur X..., d'autre part, ne relève pas d'une évidence sociétale dans une époque où les instances syndicales représentant les salariés considèrent déjà les « 35 heures » comme un maximum tolérable,- le trouble invoqué ci-dessus n'est pas incontestable,- prendre une décision sur la validité d'une clause contractuelle relève du fond,- la contestation de ce type de clause n'est pas prévue par une disposition légale.
Que la formation de référé considère donc que cette demande et l'ensemble des chefs de demandes qui lui sont attachés ne peut donner lieu à référé ;
ALORS QUE la formation de référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures de remise en état qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que constitue un trouble manifestement illicite l'usage abusif par l'employeur d'une clause de mobilité, ayant consisté à affecter à de multiples reprises le salarié d'une entreprise de nettoyage sur des sites de plus en plus éloignés de son domicile et ayant porté une atteinte excessive à sa vie privée et familiale ; qu'en décidant le contraire pour la considération inopérante de l'existence d'une contestation sérieuse, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de monsieur X... relatives à la nullité du licenciement.
AUX MOTIFS QUE ces demandes reposent sur l'affirmation que le licenciement fait suite à la saisine du conseil de prud'hommes par le salarié ; le licenciement étant expressément fondé sur des carences décrites précisément dans l'exécution de la fonction au poste finalement rejoint, le juge des référés ne saurait, sous peine d'un dépassement de pouvoirs, l'analyser au fond comme discriminatoire en application de l'article L. 1124-4 du code du travail ; quand bien même le licenciement a-t-il été prononcé après la saisine du conseil de prud'hommes, ce texte ne fait nullement échec à la reconnaissance de motifs réels et sérieux le justifiant, qu'il appartient aux seuls juges du fond de retenir ou d'écarter ;
ALORS QUE le juge des référés est compétent pour prononcer la nullité d'un licenciement discriminatoire, caractéristique d'un trouble manifestement illicite ; qu'en retenant, pour débouter monsieur X... de ses demandes, que le juge des référés n'était pas compétent pour se prononcer sur le caractère discriminatoire du licenciement prononcé après la saisine du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé l'article L. 1455-6 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'intérêt légal sur les condamnations prononcées à titre de provisions court seulement à compter du jour de la décision.
AUX MOTIFS QUE s'agissant de provisions allouées en référé, cet intérêt ne peut courir que du jour de la décision qui les a accordées ; l'ordonnance sera réformée en ce qu'elle a fixé un point de départ antérieur : le point de départ sera fixé au jour du présent arrêt pour les provisions complémentaires accordées ; il n'y a pas lieu à ce jour à capitalisation (arrêt p. 7 § 4) ;
ALORS QUE la créance d'une somme d'argent dont le principe et le montant résultent de la loi ou du contrat et non de l'appréciation du juge porte intérêt dès la sommation de payer ; qu'il en est ainsi des sommes allouées par le juge des référés à titre de provision ; qu'en fixant dès lors au jour de sa décision le point de départ des intérêts sur les sommes allouées provisionnellement à titre de rappel de salaire et de congés payés, la cour d'appel a violé l'article 1153 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-22271
Date de la décision : 13/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 26 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mar. 2013, pourvoi n°11-22271


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.22271
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