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13/03/2013 | FRANCE | N°11-13645

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 mars 2013, 11-13645


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X... et deux autres salariés de la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), employés en qualité de délégués régionaux, statut cadre, ont assigné la SACEM et la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SACEM (CPRP) devant le tribunal de grande instance afin de faire rectifier le calcul de leurs allocations de retraite calculées sur la seule partie fixe de leur salaire à la différence du mode de calcul retenu notamment pour les dire

cteurs régionaux ; qu'en appel l'action a été dirigée contre l'Institut...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X... et deux autres salariés de la Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique (SACEM), employés en qualité de délégués régionaux, statut cadre, ont assigné la SACEM et la Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SACEM (CPRP) devant le tribunal de grande instance afin de faire rectifier le calcul de leurs allocations de retraite calculées sur la seule partie fixe de leur salaire à la différence du mode de calcul retenu notamment pour les directeurs régionaux ; qu'en appel l'action a été dirigée contre l'Institution de gestion des retraites supplémentaires de la SACEM (IGRS) venant aux droits de la CPRP et la société Quatrem assurances collectives, chargée du paiement des prestations de retraite des salariés de la SACEM ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de refuser de déclarer qu'une inégalité de traitement avait été commise à leur détriment alors, selon le moyen, que la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard du dit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'en se fondant, pour débouter les salariés de leurs demandes, sur le seul constat de l'appartenance des personnels à des catégories différentes, sans constater que la différence de traitement avait bien eu pour objet ou pour but de prendre en compte, de manière objective et pertinente au regard de l'avantage que constituent les prestations de retraite considérées, les spécificités de la situation de chacune de ces deux catégories professionnelles distinctes, ce qui supposerait que ces spécificités soient précisément établies, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ;
Mais attendu qu'en raison des particularités des régimes de prévoyance couvrant les risques maladie, incapacité, invalidité, décès et retraite, qui reposent sur une évaluation des risques garantis, en fonction des spécificités de chaque catégorie professionnelle, prennent en compte un objectif de solidarité, et requièrent dans leur mise en oeuvre la garantie d'un organisme extérieur à l'entreprise, l'égalité de traitement ne s'applique qu'entre les salariés relevant d'une même catégorie professionnelle ;
Et attendu que la cour d'appel a relevé que la CPRP a toujours calculé la retraite des salariés de la SACEM en fonction de la catégorie qui était la leur au jour de leur départ à la retraite conformément aux statuts qui s'imposent à l'ensemble des parties ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les salariés font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les demandes en paiement présentées à l'encontre de la SACEM, alors, selon le moyen, que lors de l'instance d'appel, les parties peuvent modifier le fondement de leurs demandes ou encore ajouter aux demandes soumises au premier juge toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément peu important qu'une demande ait été présentée au premier juge à titre subsidiaire et que son complément le soit à titre principal ; qu'en statuant comme elle l'a fait tout en constatant qu'une demande de condamnation solidaire de la SACEM et de la CPRP, en paiement de dommages-intérêts avait été présentée à titre subsidiaire en première instance, sans rechercher si la demande de condamnation solidaire de la SACEM avec la CPRP présentée en appel, tendant au calcul des prestations de retraite de chaque appelant sur l'ensemble de leur rémunération et au paiement d'un complément de retraite subséquent, n'était pas un complément de la demande initiale de condamnation solidaire au paiement de dommages-intérêts la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 565 et 566 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a énoncé à bon droit que la demande tendant au paiement d'un complément retraite n'avait pas les mêmes fins que la demande initiale de dommages-intérêts liée à des « retenues indues » opérées par la SACEM et la Caisse de retraite sur les retraites des salariés, ce dont elle a déduit que cette demande était nouvelle au sens de l'article 565 du code de procédure civile ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu les articles 565 et 566 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande de dommages-intérêts présentée par les salariés sur le fondement du manquement à l'obligation de loyauté, l'arrêt retient que cette demande est nouvelle dès lors qu'en première instance, les demandeurs avaient sollicité, à titre subsidiaire, le paiement de dommages-intérêts sur le fondement du non-respect de l'article 11 des statuts mais n'avaient présenté aucune demande tant au titre de la violation du préambule de l'accord atypique du 14 mars 1947 qu'à celui d'une prétendue violation de l'accord collectif de travail du 3 février 1984 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les demandes en paiement de dommages-intérêts présentées en appel tendaient aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, peu important que leur fondement juridique ait été modifié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de paiement de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de loyauté, l'arrêt rendu le 6 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la SACEM et l'IGRS aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SACEM et l'IGRS à payer aux demandeurs la somme globale de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize mars deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. X... et autres
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir refusé de déclarer qu'une inégalité de traitement avait été commise au détriment de MM. X..., Y... et Z... et de les avoir déboutés de leurs demandes subséquentes ;
AUX MOTIFS QUE les appelants font valoir que la CPRP commet une inégalité de traitement en ne retenant pas la part proportionnelle du salaire au moment du calcul de la retraite alors que l'ensemble des salariés de la SACEM reçoit une retraite calculée sur la totalité du salaire ; que MM. X..., Y... et Z... ne justifient pas et ne prétendent pas que les dispositions statutaires, dont les critères sont fixés objectivement, ne seraient pas appliquées de manière identique à chaque membre du personnel de la catégorie visée, sans considération d'âge, de sexe, de religion, s'orientation sexuelle, de situation familiale, d'apparence physique, d'activités syndicales ou d'origine ethnique et qu'elles seraient discriminatoires au sens des articles 13 et 141 du traité de Rom et de la directive 2000/78 du 27 novembre 2000 du conseil de l'Union européenne ; qu'ils invoquent le principe d'égalité de traitement reposant sur la règle « à travail égal, salaire égal », considérant que la différence de traitement entre les directeurs régionaux et les délégués régionaux n'est pas compréhensible et ne repose pas sur une raison objective ; que l'intégration à compter des années 1980 de la rémunération proportionnelle des directeurs généraux à leur coefficient hiérarchique et l'intégration, dans les années 1990, au coefficient hiérarchique des heures supplémentaires des employés AE, ne constituent pas des mesures discriminatoires prohibées par la loi dès lors qu'elles visent des catégories entières de personnel qui exercent des fonctions spécifiques et ne bénéficient pas des mêmes modalités de calcul de leur rémunération pour tenir compte de sujétions particulières, sans critères discriminatoires, ni une dérogation à l'article 5 des statuts de la CPRP, la retraite de tous les salariés de ces catégories étant calculée selon les mêmes règles statutaires, étant observé que l'extension de ces mesures à d'autres catégories de personnels relève de la négociation collective qui, en l'espèce, n'a pas dépassé le stade de l'examen de la faisabilité au regard du coût d'une telle modification ou de l'intervention du législateur ; que les délégués régionaux qui changent de statut avant leur départ à la retraite, notamment en étant rattachés au siège de la SAGEM, voient , de ce seul fait objectif et sans aucune mesure discriminatoire, leur rémunération proportionnelle convertie en points et intégrée à leur salaire, le calcul de leur retraite étant effectué conformément aux règles statutaires régissant leur nouvelle catégorie au jour du départ à la retraite ; qu'il ressort de ces éléments que la CPRP a toujours calculé, dans discrimination et sans dérogation, la retraite des salariés de la Sacem en fonction de la catégorie qui était la leur au jour de leur départ à la retraite, conformément aux statuts qui s'imposent à l'ensemble des parties, étant observé que les différentes catégories professionnelles peuvent légitiment faire l'objet d'un traitement différent et que les pratiques salariales de la SACEM sont inopposables à la CPRP dont la condamnation est seule recherchée puisque le présent arrêt sera seulement opposable à la Sacem ;
ALORS QUE la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard du dit avantage, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'en se fondant, pour débouter les salariés de leurs demandes, sur le seul constat de l'appartenance des personnels à des catégories différentes, sans constater que la différence de traitement avait bien eu pour objet ou pour but de prendre en compte, de manière objective et pertinente au regard de l'avantage que constituent les prestations de retraite considérées, les spécificités de la situation de chacune de ces deux catégories professionnelles distinctes, ce qui supposerait que ces spécificités soient précisément établies, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de dommages et intérêts présentée par les salariés sur le fondement du manquement à l'obligation de loyauté ;
AUX MOTIFS QUE se prévalant du protocole de 1947 annexé aux statuts de la CPRP selon lequel tout membre du personnel de la Sacem a vocation à obtenir une allocation de vieillesse en principe égale à la moitié du salaire de l'emploi ou du grade occupé par lui au moment de la cessation de son activité, MM X..., Y... et Z... demandent à la cour de condamner la CPRP à leur payer une indemnité sur le fondement de l'article 1134 du Code civil puisque du fait de l'exclusion de la rémunération proportionnelle du salaire de référence, ils ne perçoivent pas la moitié du dernier salaire versé, ce qui crée une inégalité de traitement ; qu'à tout le moins, il convient de réintégrer la rémunération proportionnelle garantie par l'article 16 de l'accord collectif de travail du 3 février 1984 à hauteur de 20 % du salaire fixe mensuel ; que la CPRP soulève l'irrecevabilité de cette demande sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile ; qu'en première instance, les demandeurs ont sollicité, à titre subsidiaire, le paiement de dommages et intérêts sur le fondement du non respect de l'article 11 des statuts mais n'avaient présenté aucune demande tant au titre de la violation du préambule de l'accord atypique du 14 mars 1947 qu'à celui d'une prétendue violation de l'accord collectif du travail du 3 février 1984 ; qu'il s'agit là de demandes nouvelles qui sont irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile ;
ALORS QUE les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement est différent ; qu'en jugeant irrecevables les demandes fondées sur le protocole annexé aux statuts et sur l'accord collectif adopté en application des dits statuts, demandes qui avaient le même objet que celles formés en première instance, à savoir le paiement de dommages et intérêts destinés à réparer l'inexécution des engagements contractés vis-à-vis de l'ensemble des salariés, la cour d'appel a violé l'article 565 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes en paiement présentées à l'encontre de la SACEM ;
AUX MOTIFS QUE, en première instance, les parties n'avaient, à titre principal, présenté aucune demande à l'encontre de la SACEM à l'exception d'une demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en revanche, à titre subsidiaire, elles avaient sollicité la condamnation solidaire de la CPRP et de la SACEM au paiement de dommages et intérêts et à ne retirer de l'allocation versée que la part des pensions des régimes extérieurs correspondant au salaire de référence et ce sous astreinte ; qu'il apparaît ainsi que devant le tribunal de grande instance de Nanterre, MM X..., Y... et Z... n'avaient pas demandé la condamnation solidaire de la Sacem avec la CPRP à calculer les prestations de retraite de chacun d'eux sur l'ensemble de leur rémunération ni sa condamnation au paiement du complément de retraite suite au nouveau calcul ; que ces demandes présentées pour la première fois devant la cour, qui ne tendant pas aux mêmes fins que celles soumises au premier juge et constituent à l'égard de la SACEM des prétentions nouvelles doivent être déclarées irrecevables ;
ALORS QUE lors de l'instance d'appel, les parties peuvent modifier le fondement de leurs demandes ou encore ajouter aux demandes soumises au premier juge toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément peu important qu'une demande ait été présentée au premier juge à titre subsidiaire et que son complément le soit à titre principal ; qu'en statuant comme elle l'a fait tout en constatant qu'une demande de condamnation solidaire de la Sacem et de la CPRP, en paiement de dommages et intérêts avait été présentée à titre subsidiaire en première instance, sans rechercher si la demande de condamnation solidaire de la SACEM avec la CPRP présentée en appel, tendant au calcul des prestations de retraite de chaque appelant sur l'ensemble de leur rémunération et au paiement d'un complément de retraite subséquent, n'était pas un complément de la demande initiale de condamnation solidaire au paiement de dommages et intérêts la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 565 et 566 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-13645
Date de la décision : 13/03/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 06 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 mar. 2013, pourvoi n°11-13645


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.13645
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