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26/02/2013 | FRANCE | N°11-22231

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 février 2013, 11-22231


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Laboratoire Aguettant à compter du 4 septembre 2000 en qualité de délégué hospitalier, groupe 6 niveau B de la convention collective de l'industrie pharmaceutique ; que par lettre du 23 mai 2008, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail en reprochant à l'employeur de ne pas respecter les minima de salaire imposés par la convention collective de l'industrie pharmaceutique pour la classification qui était selon

elle la sienne, à savoir, groupe 7 niveau B depuis le 1er avril 2002 ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée par la société Laboratoire Aguettant à compter du 4 septembre 2000 en qualité de délégué hospitalier, groupe 6 niveau B de la convention collective de l'industrie pharmaceutique ; que par lettre du 23 mai 2008, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail en reprochant à l'employeur de ne pas respecter les minima de salaire imposés par la convention collective de l'industrie pharmaceutique pour la classification qui était selon elle la sienne, à savoir, groupe 7 niveau B depuis le 1er avril 2002 ;
Sur le pourvoi incident, qui est préalable :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour accueillir la demande de rappel de salaires formée par la salariée, l'arrêt retient qu'en vertu de l'article L. 2253-3 du code du travail, aucune convention ou accord d'entreprise ou d'établissement ne peut comporter de clauses dérogeant à celles des conventions ou accords professionnels ou interprofessionnels, notamment en matière de salaires minimum ou de classifications, que l'interprétation que fait l'employeur de la classification de la convention collective n'a pas été notifiée à la salariée lors de son changement d'échelon en sorte que celle-ci est fondée à se référer aux seules mentions figurant sur ses bulletins de salaire qui lui attribuent le coefficient 7B de la convention collective de l'industrie pharmaceutique et que l'employeur ne soutient pas que la salariée n'avait pas le niveau de compétence requise pour bénéficier d'un tel coefficient ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, comme le soutenait l'employeur, la classification 7B reconnue à la salariée sur ses bulletins de salaire provenait d'une grille interne à l'entreprise et équivalait en réalité au niveau 7A de la convention collective eu égard aux fonctions réellement exercées par la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Madame X... (salariée) de sa demande tendant à ce qu'il soit dit que sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail la liant à la société LABORATOIRES AGUETTANT (employeur) produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et à ce qu'en conséquence, cette société soit condamnée à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE Madame X... a été embauchée en qualité de délégué hospitalier groupe B6, à partir du 4 septembre 2000 ; que les relations de travail étaient régies, selon le contrat de travail, par la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique, laquelle était en outre mentionnée sur les bulletins de salaire ; que le 1er avril 2002, Madame X... était classée GPE-7 b ; que par courrier du 23 mai 2008, la salariée a pris acte de la rupture de son contrat de travail en ces termes : « (…) vous ne respectez notamment pas les minima de salaire imposés par la convention collective de l'industrie pharmaceutique pour la classification qui est la mienne, à savoir groupe 7 niveau B et ce depuis le 1er avril 2002 » ; que la demande de rappel de salaire est fondée dès lors que la société LABORATOIRE AGUETTANT a, contrairement aux prévisions de l'article L 2253-3 du Code du travail, et, selon ses propres affirmations, adopté en interne, une grille de salaires sans lien avec la convention collective, le coefficient 7 B du laboratoire correspondant en fait au coefficient 7 A de la convention collective, en vertu d'une réunion du comité central d'entreprise du 20 février 1998, le « niveau A correspondant en fait à une maîtrise du poste et le niveau B à un niveau d'expertise » ; qu'aucune notification de cette interprétation de la convention collective n'a été faite à Madame X... lors de son changement d'échelon ; que le problème n'existe pas pour les échelons 6 qui correspondent pour l'ensemble des salariés à l'entrée dans la vie professionnelle ; qu'aucun avenant n'a été proposé à Madame X... lors de sa promotion ; qu'elle est fondée à se référer aux seules mentions de ses bulletins de salaire, lesquels font référence à la convention collective nationale des industries pharmaceutiques ; que la société LABORATOIRE AGUETTANT ne soutient pas que Madame X... n'avait pas le niveau de compétence pour avoir le coefficient 7 B ;
ET AUX MOTIFS ENCORE QUE, sur la prise d'acte, Madame X... justifie d'une rémunération inférieure aux minimum fixés par la convention collective pour le coefficient qui lui était attribué, l'employeur admettant avoir depuis adopté à nouveau les critères de celle-ci, pour éviter toute ambiguïté ; que l'interprétation donnée par l'employeur aux dispositions conventionnelles n'induisait pas, à l'encontre de Madame X..., de volonté de réduire volontairement sa rémunération, sa pratique étant conforme à une délibération des représentants du personnel de 1998 ; que Madame X... ne justifie pas de réclamations antérieures à la prise d'acte ; qu'une régularisation n'était pas exclue eu égard aux développements de la négociation ; que les manquements invoqués à l'appui de la prise d'acte n'étaient pas suffisamment graves pour justifier la rupture immédiate des relations contractuelles ;
ALORS, D'UNE PART, QUE constitue un manquement suffisamment grave pour faire produire à la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse le fait, pour un employeur, de lui verser un salaire inférieur au salaire minimum conventionnel de sa catégorie ; que la Cour d'appel, qui a relevé que le salaire versé à Madame X... était inférieur au salaire minimum garanti par la convention collective applicable, et qui a cependant refusé de faire produire à la prise d'acte de la rupture les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, au prétexte que l'interprétation donnée par l'employeur aux dispositions conventionnelles n'induisait pas, à l'encontre de Madame X..., de volonté de réduire volontairement sa rémunération, dès lors que sa pratique était conforme à une délibération des représentants du personnel de 1998, qu'en outre, l'employeur avait admis avoir depuis adopté à nouveau les critères de celle-ci, pour éviter toute ambiguïté, et qu'enfin, une régularisation n'était pas exclue eu égard aux développements de la négociation, n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et a violé, par fausse application, les articles L2253-3, L2254-1 et L 2262-1du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'absence de protestation du salarié au cours de l'exécution de son contrat de travail ne peut valoir renonciation à son droit de prendre acte de la rupture de son contrat en raison d'un manquement de l'employeur à payer la rémunération conformément au salaire minimum conventionnel garanti ; qu'en opposant à la prise d'acte par l'exposante de la rupture de son contrat de travail le fait qu'elle n'avait pas protesté, antérieurement à cette prise d'acte, contre l'irrégularité du montant de sa rémunération au regard du salaire minimum garanti prévu par la convention collective nationale des industries pharmaceutiques, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP X... et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Laboratoire Aguettant.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait accueilli la demande en rappel de salaire formée par la salariée et D'AVOIR condamné la société LABORATOIRE AGUETTANT à payer à Madame X... la somme de 15.234,55 euros au titre du rappel de salaire, outre celle de 1.523,45 euros au titre des congés payés afférents,
AUX MOTIFS QUE la société LABORATOIRE AGUETTANT soutient une argumentation aux termes de laquelle il ressort qu'elle a adopté en interne un grille de salaires différentes, sans lien avec la convention collective, le coefficient 7B du laboratoire correspondant en fait au coefficient 7A de la convention collective, en vertu d'une réunion du comité central d'entreprise du 20 février 1998, le "niveau A correspondant en fait à une maîtrise du poste et le niveau B à un niveau d'expertise" ; que cependant, en vertu de l'article L 2253-3 du code du travail, aucune convention ou accord d'entreprise ou d'établissement ne peut comporter de clauses dérogeant à celles des conventions ou accords professionnels ou interprofessionnels , en matière de salaires minimum ou de classifications notamment ; que par ailleurs, la Cour observe qu'aucune notification de cette interprétation de la convention collective n'a été faite à madame X... lors de son changement d'échelon ; qu'il n'est en effet pas contesté que le problème n'existe pas pour les échelons 6 qui correspondent pour l'ensemble des salariés à l'entrée dans la vie professionnelle ; qu'aucun avenant n'a été proposé à madame X... lors de sa promotion, il s'ensuit qu'elle est fondée à se référer aux seules mentions figurant sur ses bulletins de salaire, lesquels font exclusivement et explicitement référence à la convention collective nationale ; que la société LABORATOIRE AGUETTANT ne soutient pas par ailleurs, dans le cadre de la présente procédure que madame X... n'avait pas le niveau de compétence requise pour bénéficier du coefficient 7B ; qu'il s'ensuit que c'est à juste titre que les premiers juges ont fait droit à la demande en rappel de salaires dans des termes qui seront cependant modifiés en fonction des nouveaux calculs effectués, non autrement contestés par l'appelante (15 234,55€ outre les congés payés afférents) ;
1°) ALORS QUE l'employeur peut appliquer aux salariés une classification interne différente de celle résultant de la convention collective applicable pourvu qu'elle leur assure une rémunération au moins équivalente aux minima conventionnels ; que le minimum conventionnel dû au salarié est déterminé par référence à la classification conventionnelle qui lui est applicable au regard de ses fonctions réellement exercées ; qu'en l'espèce, la société LABORATOIRE AGUETTANT faisait valoir que les niveaux 7 B et 7 C appliqués au sein de l'entreprise correspondaient respectivement aux niveaux 7 A et 7 B résultant de la convention collective de l'industrie pharmaceutique, le salarié étant assuré de percevoir le minimum conventionnel (cf. tableau comparatif, production n° 8) ; qu'en retenant à l'appui de sa décision qu'il ne pouvait être dérogé aux conventions collectives en matière de salaires minimum et de classifications, lorsque la mise en place d'une classification interne différente de celle résultant de la convention collective était licite dès lors qu'elle n'était pas moins favorable à la salariée eu égard à ses fonctions réellement exercées, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil, et l'article L. 2253-3 du Code du travail par fausse application ;
2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige ; qu'en retenant que la société LABORATOIRE AGUETTANT ne soutenait pas que la salariée n'avait pas le niveau de compétence requis pour bénéficier du coefficient conventionnel 7 B, lorsque l'exposante soutenait clairement que la classification interne 7 B était attribuée à la salariée en considération de ses fonctions réelles et ne correspondait qu'à une qualification conventionnelle 7 A, ce dont il résultait que l'intéressée ne pouvait prétendre à la qualification conventionnelle 7 B, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société LABORATOIRE AGUETTANT et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents qui leur sont soumis ; qu'en l'espèce, les bulletins de paie (production n° 4) distinguaient clairement, d'une part, la mention de la convention collective applicable, d'autre part, la profession et la classification de la salariée, sans nullement indiquer que cette classification se référait à la convention collective visée (production n° 4) ; qu'il en résultait que la seule mention « GPE 7 B » figurant sur les bulletins n'ouvrait pas droit aux minima conventionnels afférents à la classification conventionnelle 7 B ; qu'en retenant que les rappels de salaires réclamés étaient fondés sur les mentions figurant sur les bulletins de paie, la cour d'appel a dénaturé les énonciations claires et précises de ce document, et violé l'article 1134 du Code civil ;
4°) ALORS en tout état de cause QUE l'employeur est admis à démontrer que la mention de la classification d'une salariée sur son bulletin de paie ne correspond pas à la classification conventionnelle, mais à une classification spécifique à l'entreprise ; qu'en l'espèce, la société LABORATOIRE AGUETTANT offrait de démontrer, au moyen d'une note interne et d'un courrier du syndicat professionnel auquel elle adhérait, que la classification 7B mentionnée sur le bulletin de paie correspondait en fait à une classification interne à l'entreprise et non à la classification conventionnelle (cf. productions n° 5 et 7) ; qu'en se référant aux seules mentions du bulletin de paie, sans rechercher si l'employeur ne démontrait pas que le coefficient mentionné renvoyait à une classification propre à l'entreprise et différente de celle résultant de la convention collective, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE lors de l'audience de jugement, le conseil a demandé à la SAS LABORATOIRE AGUETTANT de produire l'accord d'entreprise, validé par les représentants du personnel ; que dans les délais impartis, la société n'a pas fourni ce document ; que l'accord d'entreprise ‘non produit' aurait dû être affiché dans la société ;
5°) ALORS QUE la société LABORATOIRE AGUETTANT soulignait que la classification interne ne résultait pas d'un accord d'entreprise, mais d'un acte unilatéral qui avait seulement été approuvé par les représentants du personnel ; qu'à supposer qu'elle ait adopté les motifs des premiers juges reprochant à la société LABORATOIRE AGUETTANT de n'avoir pas produit l'accord d'entreprise et de ne l'avoir pas affiché dans l'entreprise, la cour d'appel aurait statué par des motifs inopérants et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-22231
Date de la décision : 26/02/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 31 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 fév. 2013, pourvoi n°11-22231


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.22231
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