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20/02/2013 | FRANCE | N°11-28611

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 février 2013, 11-28611


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 octobre 2011) que M. X..., recruté en qualité de praticien hospitalier médecin chef de service par l'Association hospitalière Sainte-Marie a, le 11 avril 2007, fait part à son employeur de son souhait de travailler à temps partiel à compter du 1er décembre 2007 afin de pouvoir bénéficier du dispositif de retraite progressive ; que le 21 mai suivant, il a demandé à travailler à 80 % de son temps à partir du 1er janvier 2008 et à exercer

les droits acquis sur son compte épargne temps ; qu'en juillet 2007, l'empl...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 25 octobre 2011) que M. X..., recruté en qualité de praticien hospitalier médecin chef de service par l'Association hospitalière Sainte-Marie a, le 11 avril 2007, fait part à son employeur de son souhait de travailler à temps partiel à compter du 1er décembre 2007 afin de pouvoir bénéficier du dispositif de retraite progressive ; que le 21 mai suivant, il a demandé à travailler à 80 % de son temps à partir du 1er janvier 2008 et à exercer les droits acquis sur son compte épargne temps ; qu'en juillet 2007, l'employeur a répondu favorablement à sa demande en lui précisant que concomitamment à son passage à 80 % il cesserait d'assurer les fonctions de chef de secteur ; que le 16 octobre 2007, le salarié a renoncé à sa demande de retraite progressive et maintenu son choix de travailler à temps partiel et d'exercer ses droits à la réduction du temps de travail à compter du 1er janvier 2008 ; que contestant les modalités de calcul de sa rémunération, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié diverses sommes à titre de majorations de salaire, de pertes de salaire, de perte de salaire complémentaire, d'indemnité compensatrice de congés payés et d'indemnité de départ, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; qu'en l'espèce, dans sa lettre du 18 novembre 2008 adressée au salarié, l'employeur indiquait « pour votre qualification, de nombreux courriers ont été échangés entre les mois de mai et décembre 2007 concernant votre souhait de partir en retraite progressive au 1er janvier 2008 pour ne travailler qu'à 80 % avec prise en compte de votre compte épargne temps antérieurement acquis et en abandonnant vos fonctions de médecin-chef de service incompatibles avec une activité réduite » ; que l'employeur rappelait donc que c'était le salarié qui avait souhaité à la fois réduire son activité et abandonner ses fonctions de médecin-chef de service incompatibles avec son activité réduite ; qu'en ne retenant que la fin de cette phrase pour en déduire que c'était l'employeur qui avait imposé au salarié d'abandonner ses fonctions de chef de service, la cour d'appel a dénaturé par omission cette lettre et méconnu son obligation de ne pas dénaturer les écrits versés aux débats ;
2°/ que la lettre par laquelle le salarié se borne à prendre note qu'à partir du moment où il exercera une activité réduite, il n'aura plus les fonctions de médecin chef de service ne permet pas de déduire qu'il a été contraint de renoncer à ses fonctions de médecin-chef en contrepartie de la réduction de son activité ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser une telle contrainte, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et des articles 1109 et 1134 du code civil ;
3°/ que n'est pas acceptée par contrainte la modification du contrat de travail qui est intervenue à la demande du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'employeur avait précisé au salarié par lettre du 4 février 2009 « nous vous rappelons que vous n'exercez plus à votre demande les fonctions de médecin-chef depuis le 1er janvier 2008 puisque vous avez souhaité travailler à partir de cette date à 80 % » ; qu'en déduisant de cette lettre que le salarié aurait été contraint de renoncer à ses fonctions de médecin, chef de service, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles L. 1221-1 du code du travail et des articles 1109 et 1134 du code civil ;
4°/ que dans ses écritures d'appel, l'employeur faisait valoir que c'était à sa demande que M. X... avait cessé d'exercer ses fonctions de chef de service à compter du 1er janvier 2008 ; qu'il justifiait ses dires en produisant une lettre du 16 octobre 2007 dans laquelle M. X... informait son employeur qu'il maintenait son choix de ne plus travailler qu'à 40 % au 1er janvier 2008 tout en lui précisant « Je cesserai mes fonctions de médecin-chef au 1er janvier 2008 » ; qu'en jugeant que le salarié avait été contraint par son employeur de renoncer à ses fonctions de médecin-chef sans s'expliquer sur cet élément de preuve de nature à démontrer que c'était à sa demande que cette modification du contrat de travail était intervenue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
5°/ qu'en vertu de l'adage « nul n'est censé ignorer la loi », l'erreur d'une partie sur l'étendue de ses droits ne peut vicier son consentement ; qu'en retenant le défaut d'accord exprès du salarié à l'abandon de son statut de chef de service en raison de sa méprise sur l'étendue de ses droits, la cour d'appel a violé l'adage précité, ensemble l'article 1110 du code civil ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans être tenue de s'expliquer sur ceux qu'elle décidait d'écarter, la cour d'appel, par motifs propres et adoptésexempts d'insuffisance et de dénaturation, a constaté que l'employeur avait imposé au salarié l'abandon de ses fonctions de chef de service ; qu'elle en a déduit à bon droit qu'il s'agissait d'une modification du contrat de travail que le salarié pouvait refuser ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'Association hospitalière Sainte-Marie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute l'Association hospitalière Sainte-Marie de sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour l'Association hospitalière Sainte-Marie
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné l'Association Hospitalière Sainte Marie à payer à Monsieur X... les sommes de 4.899,15 euros à titre de majorations de salaire, de 19.205,04 euros à titre de pertes de salaire, de 489,92 euros à titre de congés-payés sur majorations de salaire, de 1.920,50 euros à titre de congés-payés sur pertes de salaire, de 14.659,81 euros à titre de perte de salaire complémentaire, de 1.465,88 euros brut à titre d'indemnité compensatrice de congés-payés, de 5.073,94 euros à titre d'indemnité de départ et de 200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
AUX MOTIFS PROPRES QUE Monsieur X... exerçait les fonctions de médecin chef de service au sein de l'Association Hospitalière Sainte Marie dans le cadre d'un détachement ; qu'il a souhaité en 2007 bénéficier d'un départ progressif à la retraite, son intention première étant, comme l'ensemble des courriers échangés par la suite l'établiront, de réduire son activité ; qu'il expose que pour accéder à sa demande, qui constituait un droit, le Directeur de l'Association Hospitalière Sainte Marie, lors d'une discussion, l'aurait sommé de renoncer à ses fonctions de chef de service ce a quoi il acquiesçait convaincu que la sollicitation de son employeur constituait le préalable légal à la satisfaction de sa requête ; qu'aucun avenant n'a été régularisé, les termes d'un courrier du 10 novembre 2008 dans lequel l'employeur reprenait l'historique des discussions confirment que c'est bien ce dernier qui a imposé à Monsieur X... l'abandon de ses fonctions de médecin chef de service ; qu'en effet, ce courrier comportait la mention suivante « en abandonnant vos fonctions de médecin chef de service incompatibles avec une activité réduite » ce qui démontre que l'employeur avait bien subordonné l'octroi de l'avantage demandé par Monsieur X... à l'abandon de son statut de chef de service lui présentant ce préalable comme incontournable ; que cette analyse est confirmée par les termes utilisés par Monsieur X... dans son courrier du 21 mai 2007 dans lequel il indiquait « j'ai bien pris note qu'à partir de ce moment je n'aurai plus les fonctions de médecin chef de service » se trouvant dès lors contrainte de renoncer à ces fonctions ; que l'intimé rappelle également les termes du courrier de son employeur du 4 février 2009 apportant la précision suivante : « nous vous rappelons que vous n'exercez plus à votre demande les fonctions de médecin-chef depuis le 1er janvier 2008 puisque vous avez souhaité travailler à partir de cette date à 80 % » ; que ce n'est qu'après avoir reçu une réponse à ses interrogations par l'inspecteur du travail lui confirmant le 4 mars 2009 « au égard de l'ensemble de ces éléments, vous êtes en droit de demander à votre employeur un rétablissement dans vos responsabilités de chef de service » que Monsieur X... a saisi la juridiction prud'homale ; qu'il en résulte qu faute d'assentiment exprès en raison de la méprise du salarié sur l'étendue de ses droits, l'employeur ne pouvait lui imposer la modification d'un élément essentiel de son contrat de travail consistant à renoncer à son statut de chef de service au prétexte qu'il souhaitait exclusivement réduire son activité en recourant à l'épuisement de ses jours RTT de son compte épargne temps faute de pouvoir bénéficier d'une retraite progressive ; que dès lors que cette rétrogradation est illégitime, le refus opposé par Monsieur X... à la signature d'un contrat de droit privé, dont il ne discute pas le caractère impératif, et l'application corrélative de la convention collective nationale de 1951, apparaît justifié et ses revendications tendant à se voir reconnaître le statut de médecin chef sont parfaitement fondées ; qu'il convient donc de faire droit à la demande de rappel de salaire actualisée présentée par Monsieur X... et dont le quantum n'est nullement discuté par l'employeur ; que l'indemnité de départ à la retraite sera également modifiée compte tenu de la catégorie dont dépendait le salarié ; que le seul préjudice subi par Monsieur X... réside essentiellement dans la perte de ses revenus et il n'est justifié d'aucun préjudice distinct dès lors que la rétrogradation du salarié a été présenté, non comme une mesure discriminatoire, mais comme la conséquence de la réduction effective de son activité ; que Monsieur X... sera donc débouté de ce chef ;
ET AUX MOTIFS SUPPOSES ADOPTES QUE constitue une modification du contrat de travail le fait de retirer à un salarié certaines de ses responsabilités ; qu'en l'espèce, Monsieur X... a perdu sa responsabilité de chefferie ; que dès lors qu'une modification du contrat de travail nécessite l'accord exprès du salarié pour que celle-ci prenne effet ; qu'il n'a pas été fait d'avenant au contrat de travail signifiant un reclassement dans la qualification de Monsieur X... ; que l'intégration d'office de Monsieur X... dans la convention collective nationale 51, après sa perte de responsabilité, lui a fait perdre en salaire brut la somme de 19 205, 04 euros ; que l'utilisation des droits CET acquis, même s'il y a diminution du temps de travail, n'équivaut pas à un passage à temps partiel, et de ce fait, n'entraîne pas de diminution de salaire.
1° - ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; qu'en l'espèce, dans sa lettre du 18 novembre 2008 adressées au salarié, l'employeur indiquait « pour votre qualification, de nombreux courriers ont été échangés entre les mois de mai et décembre 2007 concernant votre souhait de partir en retraite progressive au 1er janvier 2008 pour ne travailler qu'à 80 % avec prise en compte de votre CET antérieurement acquis et en abandonnant vos fonctions de médecin chef de service incompatibles avec une activité réduite » ; que l'employeur rappelait donc que c'était le salarié qui avait souhaité à la fois réduire son activité et abandonner ses fonctions de médecins chef de service incompatibles avec son activité réduite ; qu'en ne retenant que la fin de cette phrase pour en déduire que c'était l'employeur qui avait imposé au salarié d'abandonner ses fonctions de chef de service, la Cour d'appel a dénaturé par omission cette lettre et méconnu son obligation de ne pas dénaturer les écrits versés aux débats.
2° - ALORS QUE la lettre par laquelle le salarié se borne à prendre note qu'à partir du moment où il exercera une activité réduite, il n'aura plus les fonctions de médecin chef de service ne permet pas de déduire qu'il a été contraint de renoncer à ses fonctions de médecin chef en contrepartie de la réduction de son activité; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser une telle contrainte, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et des articles 1109 et 1134 du Code civil.
3° - ALORS QUE n'est pas acceptée par contrainte la modification du contrat de travail qui est intervenue à la demande du salarié ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que l'employeur avait précisé au salarié par lettre du 4 février 2009 « nous vous rappelons que vous n'exercez plus à votre demande les fonctions de médecin-chef depuis le 1er janvier 2008 puisque vous avez souhaité travailler à partir de cette date à 80 % » ; qu'en déduisant de cette lettre que le salarié aurait été contraint de renoncer à ses fonctions de médecin chef de service, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles L. 1221-1 du Code du travail et des articles 1109 et 1134 du Code civil.
4° - ALORS QUE dans ses écritures d'appel, l'employeur faisait valoir que c'était à sa demande que Monsieur X... avait cessé d'exercer ses fonctions de chef de service à compter du 1er janvier 2008 ; qu'il justifiait ses dires en produisant une lettre du 16 octobre 2007 dans laquelle Monsieur X... informait son employeur qu'il maintenait son choix de ne plus travailler qu'à 40 % au 1er janvier 2008 tout en lui précisant « Je cesserai mes fonctions de médecin-chef au 1er janvier 2008 » (cf. ses conclusions d'appel, p. 4, § 4 et 5 et p. 5, § 3 et 4) ; qu'en jugeant que le salarié avait été contraint par son employeur de renoncer à ses fonctions de médecin-chef sans s'expliquer sur cet élément de preuve de nature à démontrer que c'était à sa demande que cette modification du contrat de travail était intervenue, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
5° - ALORS QU'en vertu de l'adage « nul n'est censé ignorer la loi », l'erreur d'une partie sur l'étendue de ses droits ne peut vicier son consentement ; qu'en retenant le défaut d'accord exprès du salarié à l'abandon de son statut de chef de service en raison de sa méprise sur l'étendue de ses droits, la Cour d'appel a violé l'adage précité, ensemble l'article 1110 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-28611
Date de la décision : 20/02/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 25 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 fév. 2013, pourvoi n°11-28611


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.28611
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