LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 juin 2011) que M. X..., ingénieur-conseil, a souscrit une assurance de responsabilité professionnelle auprès de la société Sagena qui, après avoir accepté sa demande, l'informa par lettre du 25 février 2005, qu'elle refusait sa garantie et que l'attestation d'assurance et la note de couverture d'un chantier de construction qu'elle avait délivrées, étaient dépourvues d'effet ; que le tribunal de grande instance de Lille ayant dit de nul effet la lettre précitée, M. X... a assigné la société Sagena en réparation de son préjudice financier et de son préjudice d'image ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de limiter aux sommes de 10 000 euros la réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros celle de son préjudice d'image, alors, selon le moyen que l'attestation de M. Y... mentionne que " s'agissant des deux autres programmes, nous ne pouvions attendre l'issue des procédures, nous les avons confiés à un autre prestataire au lieu et place de M. X... " ; qu'en jugeant qu'il ne résultait aucunement de cette attestation que d'autres chantiers auraient été attribués à M. X..., la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, ayant relevé que M. X... ne versait aucun document précontractuel relatif à d'autres programmes dont l'invocation demeurait vague, a estimé par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que rendait nécessaire l'ambiguïté de ses termes, que l'attestation de M. Y... était insuffisante à établir que d'autres chantiers auraient été attribués à M. X... ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... fait reproche à l'arrêt de limiter le montant de la réparation de son préjudice financier à la somme de 10 000 euros, alors, selon le moyen : 1°/ que la pièce de nature à établir que la marge bénéficiaire de l'entreprise de M.
X...
était de 46, 11 % de son chiffre d'affaires émanant de l'association de gestion agréée dont il dépendait constituait la page 2 de la production n° 1 intitulée " attestation d'adhésion de M. X... " du bordereau de communication de pièces de M. X... du 1er février 2011 ; qu'en jugeant que la pièce n'avait pas été régulièrement produite, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en rejetant la pièce de nature à établir que la marge bénéficiaire de l'entreprise de M.
X...
était de 46, 11 % de son chiffre d'affaire, la société Sagena contestant en avoir eu communication quand il résultait du bordereau de communication de pièces de M. X... du 1er février 2011 que la pièce litigieuse avait bien été communiquée au représentant de la société Sagena, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que c'est sans encourir le grief du moyen, que la cour d'appel a constaté que la pièce comptable qui serait de nature à établir le pourcentage de marge bénéficiaire que M. X... déclarait réaliser, figurait au dossier de plaidoiries de ce dernier mais n'avait pas été régulièrement produite, le bordereau de communication de pièces ne la visant pas ; que le moyen manque en fait ;
Sur le troisième moyen pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... fait encore reproche à l'arrêt de le condamner à payer à la société Sagena la somme de 39 945, 23 euros au titre des cotisations d'assurance impayées, avec intérêt au taux légal à compter du 7 avril 2006, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en condamnant l'assuré à payer la totalité des primes d'assurances au titre des années 2005 et 2006 après avoir constaté que le contrat d'assurance, souscrit pour couvrir l'activité de M. X... de 2005 ainsi qu'un chantier à Langres débuté courant 2004, annulé par l'assureur le 25 février 2005, n'avait été reconnu valable que le 1er décembre 2005 et que les chantiers pour l'année 2005 notamment de Langres et de Belfort avaient été annulés, M. X... ne bénéficiant plus d'aucune garantie pour sa responsabilité décennale ce dont il résultait nécessairement que le contrat d'assurance n'avait plus aucun aléa au moment où il avait été reconnu valable par le tribunal, la cour d'appel a violé l'article L. 113-2 du code des assurances et l'article 1126, 1131 et 1964 du code civil ;
2°/ que M. X... faisait expressément valoir dans ses conclusions que du fait de l'annulation du contrat d'assurance, il s'était retrouvé paralysé dans son exercice professionnel ce dont il résultait nécessairement qu'il ne s'était engagé sur aucun chantier de nature à engager sa responsabilité décennale ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant rappelé que le contrat d'assurance souscrit par M. X... pour couvrir son activité professionnelle à compter du 30 décembre 2004, avait été reconnu valable par jugement du tribunal de grande instance de Lille en date du 1er décembre 2005, a constaté que M. X... avait poursuivi l'exercice de son activité d'ingénieur-conseil jusqu'au 31 décembre 2007 en sorte que la garantie de la société d'assurances pouvait être recherchée pour des chantiers réalisés de 2005 à 2007 ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer à la société Sagena la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la société Sagena à payer M. X... la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier et la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice d'image ;
AUX MOTIFS QUE M. X... ne justifie de la perte d'aucun autre chantier en lien avec la faute de la société Sagena ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. X... ne verse aucun document pré-contractuel relatif à ces autres chantiers dont l'invocation reste vague ; que l'attestation de M. Y... se contente de préciser : » S'agissant de deux autres programmes, nous ne pouvions attendre l'issue des procédures, nous les avons confiés à un autre prestataire au lieu et place de M. X... » ; que les autres pièces produites par M. X... à l'appui de la perte « d'autres chantiers » (pièces en demande n° 16 et 17) ne sont d'aucune pertinence, la pièce 16 étant la carte d'identité de M. Y... et la pièce 17 un bordereau d'envoi d'une attestation de résiliation du chantier de Langres, élément déjà admis au titre de ce chantier par le tribunal ; qu'en conséquence le tribunal ne peut retenir aucun préjudice, complet ou sous forme de perte de chance au titre d'autres chantiers dont il n'est pas acquis au titre des pièces produites et aux termes de l'attestation de M. Y... qu'ils auraient été attribués à M. X... ;
ALORS QUE l'attestation de M. Y... mentionne que « s'agissant des deux autres programmes, nous ne pouvions attendre l'issue des procédures, nous les avons confiés à un autre prestataire au lieu et place de M. X... » ; qu'en jugeant qu'il ne résultait aucunement de cette attestation que d'autres chantiers auraient été attribuées à M. X..., la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité la condamnation de la société Sagena à payer M. X... la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice financier ;
AUX MOTIFS QUE sur le préjudice financier : M. X... réclame au titre des chantiers de Langres et de Belfort la somme de 98 268, 96 € ; qu'il applique au montant des honoraires perdus-213 118, 54 €- un pourcentage de marge bénéficiaire de 46, 11 % ; que si M. X... affirme que le pourcentage de marge bénéficiaire de son entreprise était de 46, 11 %, il ne le démontre pas ; qu'il se réfère en effet à une pièce émanant de l'association de gestion agréée dont il dépendait ; qu'or, en première instance, le tribunal a à juste titre écarté cette pièce pour non-respect du principe du contradictoire ; qu'en effet au vu du bordereau de signification de pièces du 10 mars 2009, ce document ne faisait pas partie des 22 pièces signifiées ; que cette pièce qui figure au dossier de plaidoiries de M. X... en cause d'appel n'est pas davantage régulièrement produite, le bordereau de communication de pièces au dossier de la cour émanant de l'avoué de M. X... ne reprenant que l'attestation d'adhésion de M. X... et l'attestation du cabinet d'expertise-comptable GPS exponentiel du 5 octobre 2010, alors même que la société Sagena fait observer que cette communication ne lui a pas été faite ; que la pièce en cause ne doit donc pas être prise en compte pour la détermination du préjudice de M. X... qui est toutefois acquis ; qu'au vu des éléments dont la cour dispose, le préjudice de Pierre X... doit être fixé à la somme de 10 000 € ; que s'agissant ensuite de la demande en paiement de dommages-intérêts à hauteur de 65 000 € au titre de deux autres programmes cette demande doit être rejetée, la perte de ces chantiers, ainsi qu'il a été précédemment retenu, n'étant pas établie ; que sur le préjudice d'image : devant la cour, M. X... réclame l'indemnisation de son préjudice d'image consistant en une perte de clientèle de la société Akerys Promotion ; que M. X... produit une attestation du cabinet d'expertise comptable GPS Exponentiel en date du 5 octobre 2. 010 aux termes de laquelle Robert Z..., expert-comptable, indique qu'à la vue du livre journal présenté par M. X... reprenant l'ensemble des encaissements et décaissements des années 2005 à 2007, aucune facturation nouvelle n'a été effectuée à la société « 4 M Akerys » sur cette période ; qu'il est donc établi que la faute de la société Sagena a été à l'origine d'une perte de chance pour M. X... de conclure de nouveaux contrats avec la société Akerys Promotion ; qu'au vu des éléments dont la cour dispose, cette perte de chance doit être évaluée à la somme de 10 000 € ;
1/ ALORS QUE la pièce de nature à établir que la marge bénéficiaire de l'entreprise de M.
X...
était de 46, 11 % de son chiffre d'affaire émanant de l'association de gestion agréée dont il dépendait constituait la page 2 de la production n° 1 intitulée « attestation d'adhésion de Monsieur Pierre X... » du bordereau de communication de pièces de M. X... du 1er février 2011 ; qu'en jugeant que la pièce n'avait pas été régulière produite, la cour d'appel de a violé l'article 1134 du code civil ;
2/ ALORS QU'en rejetant la pièce de nature à établir que la marge bénéficiaire de l'entreprise de M.
X...
était de 46, 11 % de son chiffre d'affaire, la société Sagena contestant en avoir eu communication quand il résultait du bordereau de communication de pièces de M. X... du 1er février 2011 que la pièce litigieuse avaient bien été communiquée au représentant de la société Sagena, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. X... à payer à la société Sagena le somme de 39 945, 23 € au titre des cotisations d'assurance impayées, avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2006
AUX MOTIFS QUE M. X... a souscrit un contrat d'assurance professionnelle pour son activité d'ingénieur conseil le 30 décembre 2004, contrat reconnu valable par décision du 1er décembre 2005 ; que c'est à tort que le tribunal a retenu que la demande en paiement des primes d'assurances par la société Sagena n'avait aucun objet au motif que cette dernière ne justifiait ou n'invoquait aucun chantier sur lequel sa couverture d'assurance de la responsabilité de M.
X...
serait active ; qu'en effet, le contrat d'assurance avait bien un objet, le risque, puisqu'en dépit de la cessation des relations contractuelles avec la société 4 M Promotion, Pierre X... a poursuivi l'exercice de son activité d'ingénieur conseil-il a cessé son activité au 31 décembre 2007- et la garantie de la compagnie d'assurances peut encore être recherchée pour des chantiers réalisés de 2005 à 2007 au titre de la responsabilité décennale de Pierre X... ; que dans ces conditions, la société Sagena est bien-fondée en sa demande en paiement à hauteur de la somme de 39 945, 23 € représentant les cotisations d'assurance impayées au titre des années 2005 et 2006, avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2006, date de la réception de la mise en demeure ;
1/ ALORS QU'en condamnant l'assuré à payer la totalité des primes d'assurances au titre des années 2005 et 2006 après avoir constaté que le contrat d'assurance, souscrit pour couvrir l'activité de M. X... de 2005 ainsi qu'un chantier à Langres débuté courant 2004, annulé par l'assureur le 25 février 2005, n'avait été reconnu valable que le 1er décembre 2005 et que les chantiers pour l'année 2005 notamment de Langres et de Belfort avaient été annulés, M. X... ne bénéficiant plus d'aucune garantie pour sa responsabilité décennale ce dont il résultait nécessairement que le contrat d'assurance n'avait plus aucun aléa au moment où il avait été reconnu valable par le tribunal, la cour d'appel a violé l'article L. 113-2 du code des assurances et l'article 1126, 1131 et 1964 du code civil.
2/ ALORS QU'en toute hypothèse, M. X... faisait expressément valoir dans ses conclusions que du fait de l'annulation du contrat d'assurance, il s'était retrouvé paralysé dans son exercice professionnel ce dont il résultait nécessairement qu'il ne s'était engagé sur aucun chantier de nature à engager sa responsabilité décennale ; qu'en ne répondant pas à ce chef péremptoire des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.