La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/02/2013 | FRANCE | N°11-14424

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 février 2013, 11-14424


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 mai 2010), que Mme X..., reconnue travailleur handicapé par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel du Nord (COTOREP), a été admise en 1981 au centre d'aide par le travail (CAT) Le Roitelet, géré par l'association Les Papillons blancs (l'association) ; qu'à la suite d'un accident survenu en 1995, elle a été classée en invalidité de troisième catégorie et n'a plus été en mesure de reprendre ses activité

s au sein du CAT ; que par décision du 18 mai 1999, la COTOREP s'est prononcé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 28 mai 2010), que Mme X..., reconnue travailleur handicapé par la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel du Nord (COTOREP), a été admise en 1981 au centre d'aide par le travail (CAT) Le Roitelet, géré par l'association Les Papillons blancs (l'association) ; qu'à la suite d'un accident survenu en 1995, elle a été classée en invalidité de troisième catégorie et n'a plus été en mesure de reprendre ses activités au sein du CAT ; que par décision du 18 mai 1999, la COTOREP s'est prononcée en faveur de sa sortie de cet établissement à compter du 31 mars 1999 ; que l'association ayant radié l'intéressée de ses effectifs, Mme Y..., ès qualités de tutrice de cette dernière, a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que Mme Y..., ès qualités, fait grief à l'arrêt de déclarer incompétente la juridiction prud'homale, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en s'abstenant de rechercher si, comme il l'était soutenu, Mme X..., au sein du CAT Le Roitelet, n'exécutait pas un travail sous l'autorité de ce dernier qui avait le pouvoir de donner des ordres et des directives, de contrôler l'exécution de son travail et d'en sanctionner les manquements, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1221-1 et L. 1411-1 du code du travail ;

2°/ que l'article 4 de la convention n° 159 sur la réadaptation professionnelle et l'emploi des personnes handicapées du 28 juin 1983 prévoit notamment : "des mesures positives spéciales, visant à garantir l'égalité effective de chances et de traitement entre les travailleurs handicapés et les autres travailleurs, ne devront pas être considérées comme étant discriminatoires à l'égard de ces derniers" ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer que le régime spécifique applicable à l'activité professionnelle accomplie par un travailleur handicapé au sein d'un CAT "n'apparaît pas contraire" à ladite convention, sans rechercher si les dispositions du droit français excluant les personnes handicapées, exerçant une activité professionnelle au sein d'un CAT, du bénéfice des dispositions protectrices du droit de travail n'étaient pas discriminatoires, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article précité ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu à bon droit que les personnes admises, en raison de leur handicap, dans un CAT, par décision de la COTOREP devenue la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, ne sont pas liées à cet établissement par un contrat de travail ; que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association CAT Papillons blancs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six février deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Jacoupy, avocat aux Conseils, pour Mme Y....

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la juridiction prud'homale matériellement incompétente pour connaître de la demande de Madame Ginette X... ès-qualités,

AUX MOTIFS QUE

«Selon les dispositions de l'article L 344-2 du Code de l'Action Sociale et des Familles, applicables au moment où Mademoiselle Catherine X... se trouvait accueillie au CAT Le Roitelet, «les centres d'aide par le travail, comportant ou non un foyer d'hébergement, accueillent les adolescents et adultes handicapés qui ne peuvent, momentanément ou durablement, travailler ni dans les entreprises ordinaires ni dans un atelier protégé ou pour le compte d'un centre de distribution de travail à domicile ni exercer une activité professionnelle indépendante».

Ces centres offrent aux personnes qu'ils accueillent «des possibilités d'activités diverses à caractère professionnel, un soutien médico social et éducatif et un milieu de vie favorisant leur épanouissement personnel et leur intégration sociale ».

Si l 'article L 5213-14 précise que les dispositions du Code du Travail « sont applicables aux travailleur handicapés salariés des ateliers protégés et des centres de distribution de travail à domicile », il ne fait aucune référence aux centres d'aide par le travail, lesquels relèvent du Code de l'Action Sociale et des Familles, à l 'exception malgré tout de certaines dispositions du Code du Travail en matière d'hygiène, de sécurité ou de médecine du travail.

L'activité professionnelle accomplie par un travailleur handicapé au sein d'un CAT ne s'inscrit donc pas dans le cadre d'une relation salariée.

Ceci est rappelé par la circulaire du 8 décembre 1978 qui indique en effet que : « les personnes handicapées accueillies dans les centres d'aide par le travail ne relèvent pas, contrairement à celles qui sont embauchées en ateliers protégés, du Code du Travail dans les mêmes conditions que tout autre salarié » et que «si les sommes qu'elles touchent du fait de leur travail, au titre de la garantie de ressources, en particulier, ont toutes les caractéristiques d'un salaire, cela ne suffit pas à leur conférer la qualité de salarié ni l'ensemble des droits qui y sont attachés ».

Les CAT sont des institutions médico sociales dans lesquelles la prestation de travail accomplie par les personnes handicapées constitue une des composantes de l'insertion sociale et s'intègre dans le projet pédagogique.

Contrairement à ce que soutient Madame Ginette X..., ès-qualité de tutrice de Mademoiselle Catherine X..., ce régime spécifique n'apparaît pas contraire à la convention internationale du travail n° 159 concernant la réadaptation professionnelle et l'emploi des personnes handicapées du 20 juin 1983 ni même la convention internationale du travail n° 158 concernant la cessation de la relation de travail à l'initiative de l'employeur du 22 juin 1982.

Le fait que des institutions médico-sociales accueillent des personnes handicapées qui ne sont pas à même de travailler, ni en milieu professionnel classique, ni en atelier protégé, en leur apportant soutient médical, social et professionnel, et en leur assurant une rémunération, ne peut être constitutif d'une quelconque discrimination ou rupture d'égalité.

Si les personnes accueillies en CAT n'ont pas vocation à se voir appliquer le droit du licenciement, leur sortie du Centre n'est aucunement une décision unilatérale de l'employeur mais est conditionnée à une décision de la COTOREP, qui peut être contestée par les intéressées devant la Commission Départementale des Handicapés.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer la décision déférée en ce que le Conseil de Prud'hommes s'est déclaré incompétent matériellement pour connaître du litige opposant Madame Ginette X..., ès-qualités de tutrice de Mademoiselle Catherine X..., à l'association Les Papillons Blancs»,

ALORS, D'UNE PART, QUE

En s'abstenant de rechercher si, comme il l'était soutenu, Mademoiselle Catherine X..., au sein du CAT Le Roitelet, n'exécutait pas un travail sous l'autorité de ce dernier qui avait le pouvoir de donner des ordres et des directives, de contrôler l'exécution de son travail et d'en sanctionner les manquements, la Cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1221-1 et L 1411-1 du Code du Travail,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE

L'article 4 de la Convention 159 sur la réadaptation professionnelle et l'emploi des personnes handicapées du 28 juin 1983 prévoit notamment : «des mesures positives spéciales, visant à garantir l'égalité effective de chances et de traitement entre les travailleurs handicapés et les autres travailleurs, ne devront pat être considérées comme étant discriminatoires à l'égard de ces derniers » ; qu'ainsi, en se bornant à énoncer que le régime spécifique applicable à l'activité professionnelle accomplie par un travailleur handicapé au sein d'un CAT « n 'apparaît pas contraire » à ladite convention, sans rechercher si les dispositions du droit français excluant les personnes handicapées, exerçant une activité professionnelle au sein d'un CAT, du bénéfice des dispositions protectrices du droit du travail n'étaient pas discriminatoires, la Cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article précité.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-14424
Date de la décision : 06/02/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 28 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 fév. 2013, pourvoi n°11-14424


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : Me Jacoupy, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.14424
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award