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05/02/2013 | FRANCE | N°12-81239

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 février 2013, 12-81239


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Guillaume X...,- M. Hubert Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2012, qui, pour harcèlement moral, les a condamnés, chacun, à trois mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Su

r le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-33-2 d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Guillaume X...,- M. Hubert Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2012, qui, pour harcèlement moral, les a condamnés, chacun, à trois mois d'emprisonnement avec sursis, 10 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-33-2 du code pénal, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré MM. X... et Y... coupables de harcèlement moral ;
"aux motifs que les prévenus contestent tous les témoignages recueillis par les forces de l'ordre ou établis sous forme testimoniale ; que pour autant, la cour ne voit aucun dépôt de plainte pour faux témoignages ; que faute pour les prévenus de démontrer la fausseté des propos tenus par les témoins, ces témoignages ne peuvent être écartés ; que la seule déclaration qu'un témoignage est faux ne suffit évidemment pas à caractériser son caractère mensonger ;
"alors qu'il appartient aux juges répressifs d'apprécier la valeur probante des témoignages soumis aux débats, qui ne valent qu'à titre de simples renseignements ; qu'en tenant pour probants les témoignages à charge par cela seul que les prévenus n'en avaient pas démontré la fausseté et n'avaient pas porté plainte pour faux témoignages, la cour d'appel a méconnu les textes et le principe ci-dessus énoncés" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-33-2 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré MM. X... et Y... coupables de harcèlement moral ;
"au motifs que M. Y..., employeur de Mme Z..., a comme obligation de fournir du travail à ses salariés, contrepartie du salaire perçu, et il ne peut s'en affranchir, sauf situation économique ou relation sociale telle que le licenciement s'impose ; que le motif d'une prétendue rationalisation des activités des salariés, dont la cour n'a eu aucune explication précise, ne saurait constituer un motif autorisant un employeur de laisser une salariée désoeuvrée ; que, de plus, le fait pour un employeur, pendant une durée de trois mois, de ne fournir à un salarié aucun matériel, crayon, ordinateur, papier, téléphone est à l'évidence un comportement démontrant la volonté affichée d'écarter de toute activité une salariée ; qu'une cliente, Mme A..., interrogée lors de l'enquête préliminaire, devait indiquer l'absence de tout matériel pour travailler, Mme Z... n'ayant qu'une table vide à sa disposition et qu'elle n'avait même pas pu établir un simple devis ; que l'incidence de pénibilité de ce comportement n'a d'ailleurs pas échappé à M. Y... qui devait le reconnaître lors de l'enquête préliminaire et l'admettait devant la cour ; que le seul fait, au demeurant non démontré, que la salarié a refusé de faire un travail ne saurait légitimer un tel comportement puisque si un salarié ne satisfait plus et commet des fautes, la voie du licenciement est prévue par la loi ; qu'encore le fait que des transactions quant à une rupture négociée aient débuté fin octobre ne saurait en aucune manière autoriser un employeur à ne fournir aucun travail ni aucun matériel à une salariée et ce, surtout pendant une durée de trois mois ; que, dès lors, le comportement adopté par l'employeur, mais aussi celui de son directeur commercial, relais actif de M. Y..., ont incontestablement dégradé les conditions de travail de Mme Z... et ont outrepassé de loin les limites de leur pouvoir de direction, et ont ainsi porté atteinte à la dignité du salarié et compromis son avenir professionnel ; que ce seul comportement consistant à laisser un salarié dans un désoeuvrement total, coupé de toute activité, de tout lien professionnel avec l'extérieur et ainsi démontrant sa totale inutilité sociale suffit à caractériser l'infraction de harcèlement moral reprochée à chacun des prévenus sans qu'il soit nécessaire de s'interroger sur la véracité ou non de l'absence de chauffage et de la suppression d'un fauteuil adapté à l'état de santé de la salariée ;
"alors que le seul fait de ne pas fournir de travail à un salarié ne suffit pas à caractériser le délit de harcèlement moral ; qu'en considérant que les prévenus s'étaient rendus coupables de harcèlement moral du seul fait qu'ils avaient laissé la salariée dans un «désoeuvrement total» faute de lui avoir fourni du travail, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-3, 222-33-2 et 222-45 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé à l'encontre de MM. X... et Y... l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant une durée de trois années ;
"aux motifs que le comportement adopté par les deux prévenus commande de prononcer l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant une durée de trois années ;
"alors que la peine d'interdiction des droits civiques, civils et de famille n'est pas encourue en cas de condamnation pour harcèlement moral ; que, dès lors, en prononçant cette peine à l'encontre des deux prévenus qu'elle déclarait coupables de harcèlement moral, la cour d'appel, qui a ainsi prononcé une peine non prévue par les textes réprimant ce délit, a méconnu les textes et le principe ci-dessus mentionnés" ;
Vu l'article 111-3 du code pénal ;
Attendu que nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi ;
Attendu qu'après avoir déclaré MM. X... et Y... coupables de harcèlement moral, l'arrêt attaqué les condamne notamment à trois ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi une peine complémentaire non prévue par les article 222-33-2 et 222-44 du code pénal réprimant le délit reproché, la cour d'appel a méconnu les texte et principe ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes, en date du 20 janvier 2012, en ses seules dispositions ayant condamné les demandeurs à une peine complémentaire d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, toutes autres dispositions étant expressément maintenues
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nîmes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Straehli conseiller rapporteur, Mme Guirimand conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-81239
Date de la décision : 05/02/2013
Sens de l'arrêt : Cas. part. par voie de retranch. sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 20 janvier 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 fév. 2013, pourvoi n°12-81239


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.81239
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