LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 622-26, alinéa 3, du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que les 15 septembre et 17 novembre 2009, la société TPR démolition rénovation construction (la débitrice) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, M. X... étant désigné liquidateur (le liquidateur) ; que la société Le Plombier, qui n'avait pas déclaré sa créance dans le délai légal, a saisi le juge-commissaire d'une requête en relevé de forclusion le 28 septembre 2010 ;
Attendu que pour relever la société Le Plombier de la forclusion, l'arrêt retient que celle-ci a agi dans le délai exceptionnel d'un an et qu'à aucun moment le liquidateur n'a été expressément informé par la débitrice du montant de la dette, de sorte qu'il n'a pas été en mesure de faire connaître précisément à la société Le Plombier tant l'existence et le montant de la dette que la procédure à suivre, d'où il résulte que, n'ayant pas été mise dans la possibilité de connaître l'existence et les conditions de recouvrement de sa créance durant le délai normal de six mois, cette société n'a commis elle-même aucune défaillance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé, d'un côté, que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire avait fait l'objet d'un avis au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) le 30 septembre 2009 et, de l'autre, que la société Le Plombier avait connu sa créance, de façon incontestable, après l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 24 novembre 2009 et répondu, le 23 décembre 2009, au courrier du liquidateur qui l'informait avoir pris connaissance de son éventuelle qualité de créancier, ce dont il résultait que la société Le Plombier n'avait pas été dans l'impossibilité de connaître l'existence de sa créance avant l'expiration du délai de six mois à compter de la publication du jugement d'ouverture, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé, par fausse application, le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'appel de la société Le Plombier, l'arrêt rendu le 26 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Infirme le jugement du tribunal de commerce de Cusset du 4 janvier 2011, sauf en ce qu'il a déclaré l'opposition de la société Le Plombier recevable en la forme ;
Déclare irrecevable la demande en relevé de forclusion de la société Le Plombier ;
Condamne la société Le Plombier aux dépens de l'instance en cassation et à ceux afférents aux instances devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne également à payer à M. X..., ès qualités, la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour M. X..., ès qualités.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré recevables l'action et l'appel de l'EURL LE PLOMBIER, d'avoir relevé celle-ci de la forclusion qui frappait son droit à déclarer sa créance de 52.026 € au passif de la SARL TPR DEMOLITION RENOVATION CONSTRUCTION et d'avoir dit en conséquence que cette créance sera inscrite sur l'état des créances de cette société ;
AUX MOTIFS QUE la société LE PLOMBIER soutient que sa défaillance durant ce délai de six mois n'est pas due à son fait et qu'en outre, le débiteur avait omis d'énumérer cette créance lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6 du Code de commerce ; qu'elle estime ainsi pouvoir être relevée de la forclusion acquise ; qu'elle soutient, en outre, dans le même sens que les courriers de Maître X... étaient peu explicites et n'étaient pas de nature à lui donner connaissance de la procédure à suivre ; qu'au surplus, elle énonce les défaillances de son avocat à MONTPELLIER dans le recouvrement de cette somme ; que si dernier argument ne peut être pris ici en compte, il reste à déterminer si la société LE PLOMBIER a été informée de ses droits et a ou non été l'auteur d'une défaillance dans la poursuite de ceux-ci ; que la société LE PLOMBIER n'a connu sa créance de façon incontestable qu'après qu'a été rendu l'arrêt de la Cour de MONPELLIER du 24 novembre 2009 qui condamnait une société à payer à la société débitrice des sommes correspondant aux règlements dus aux sous-traitants, dont la société LE PLOMBIER elle-même ; que Maître X... a écrit, le 14 décembre 2009, à la société LE PLOMBIER pour dire qu'il prenait connaissance « de votre éventuelle qualité de créancier au passif de la société TPR DEMOLITION RENOVATION CONSTRUCTION (DCR) » ; qu'il en résulte qu'il ignorait alors la créance en son existence et en son montant ; que le débiteur ne lui avait pas fait connaître cette dette de sa part ; que cette lettre de Maître X... à la société LE PLOMBIER énonce seulement qu'un recours en relevé de forclusion est possible « si vous l'estimez utile » ; que la société LE PLOMBIER a demandé des explications par courrier à Maître X..., le 23 décembre 2009 ; qu'elle n'a pas eu de réponse ; que devant l'incertitude des démarches en cours, la tardiveté de l'établissement certain de sa créance, la difficulté dans laquelle le liquidateur judiciaire a été laissé par le débiteur lui-même de connaître sa créance, voire l'état de créancier de la société LE PLOMBIER et par suite, l'imprécision des éléments d'information qu'il a pu apporter à la société LE PLOMBIER, on doit constater que celle-ci n'a pas manifesté un comportement défaillant et a agi à la mesure de ce qu'elle pouvait faire dans le délai imparti de six mois ; que, cependant, c'est dans le délai exceptionnel d'un an que la société LE PLOMBIER a agi en relevé de forclusion ; qu'il convient donc d'établir si les conditions spécifiques à ce délai prolongé sont également remplies ; que le délai, en effet, selon les termes de l'article L. 622-26 du Code de commerce est porté à un an par le créancier placé dans l'impossibilité de connaître l'existence de leur créance avant l'expiration du délai de six mois ; qu'il est constant qu'à aucun moment, Maître X... n'a été expressément informé par le débiteur, la société DRC, du montant de la dette de sorte qu'il n'a pas été en mesure de faire connaître précisément à la société LE PLOMBIER tant l'existence et le montant de celle-ci que la procédure à suivre – laquelle est de la compétence des professionnels des procédures collectives-, d'où il résulte que la société LE PLOMBIER n'ayant pas été mise dans la possibilité de connaître l'existence de sa créance et les conditions de recouvrement de celle-ci durant le délai normal pour demander un relevé de forclusion, n'a commis elle-même aucune défaillance et se trouve ainsi bénéficier de la prorogation dudit délai jusqu'à un an ; que ce délai a été respecté ; que la demande de relevé de forclusion est donc recevable et le jugement sera infirmé ;
1°) ALORS QU' il résulte de l'article L. 622-26 alinéa 3 du Code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005, que le délai de l'action en relevé de forclusion n'est porté de six mois à un an qu'en faveur des créanciers placés dans l'impossibilité de connaître l'existence de leur créance avant l'expiration du premier délai ; qu'aussi bien, la Cour d'appel, ayant constaté que la société LE PLOMBIER avait connu l'existence de sa créance avec l'arrêt de la Cour de MONTPELLIER du 24 novembre 2009, qui condamnait un maître de l'ouvrage à payer à la société DRC des sommes correspondant aux règlements dus aux soustraitants, dont la société LE PLOMBIER elle-même et qu'elle avait alors correspondu avec Maître X... liquidateur de la société DRC au cours du mois de décembre 2009, lequel avait alors indiqué la nécessité de procéder à une demande en relevé de forclusion de sa créance, ces deux faits se situant à l'intérieur du délai de six mois pour agir en relevé de forclusion, n'a pu, au seul motif de l'imprécision des démarches à effectuer pour procéder à cette demande en relevé de forclusion, retenir que celle-ci n'avait pas manifesté un comportement défaillant et qu'elle avait agi à la mesure de ce qu'elle pouvait faire dans le délai imparti de six mois ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait qu'elle avait eu connaissance de l'existence de sa créance dans le délai de six mois et qu'elle avait été avertie de la nécessité de la formalité de présenter une demande en relevé de forclusion de créance, a violé par fausse application les dispositions de l'article L. 622-26 alinéa 3 du Code de commerce ;
2°) ALORS QUE Maître X... avait fait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il avait expressément indiqué, par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 22 décembre 2009, effectivement reçue par sa destinataire, qu'elle pouvait effectuer un relevé de forclusion en vue de déclarer sa créance avant le 30 mars 2010, date d'expiration du délai de six mois ; que, la Cour d'appel, qui n'a pas répondu à ce moyen péremptoire et a retenu simultanément que la société LE PLOMBIER, faute d'avoir reçu les informations nécessaires, avait été placée dans l'impossibilité de connaître sa créance, a entaché sa décision d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.