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31/01/2013 | FRANCE | N°11-28793

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 31 janvier 2013, 11-28793


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 567 du code de procédure civile, ensemble l'article 70 du même code ;
Attendu que les demandes reconventionnelles sont recevables lorsqu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., ayant présenté une requête en divorce qui a donné lieu à plusieurs décisions rendues sur les mesures provisoires, a assigné en séparation de corps M. Y... ; que ce dernier a reconventionnellement de

mandé le divorce, puis saisi le juge aux affaires familiales, statuant comme jug...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 567 du code de procédure civile, ensemble l'article 70 du même code ;
Attendu que les demandes reconventionnelles sont recevables lorsqu'elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., ayant présenté une requête en divorce qui a donné lieu à plusieurs décisions rendues sur les mesures provisoires, a assigné en séparation de corps M. Y... ; que ce dernier a reconventionnellement demandé le divorce, puis saisi le juge aux affaires familiales, statuant comme juge de la mise en état, d'une demande de modification des mesures provisoires ; que Mme X... a interjeté appel et a formé, devant la cour d'appel, des demandes reconventionnelles ;
Attendu que, pour déclarer ces demandes irrecevables, l'arrêt retient que Mme X... s'est présentée seule alors que la représentation était obligatoire, qu'elle n'a donc pu, de son propre fait, présenter aucune défense, qu'ainsi, les prétentions qu'elle élève en appel sont irrecevables à l'exception de celles qui se rapportent à la procédure d'appel elle-même, soit la demande formée au titre de la procédure abusive et celle reposant sur la loi du 29 juillet 1881 ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si les demandes reconventionnelles de Mme X... ne se rattachaient pas à la prétention originaire par un lien suffisant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes reconventionnelles de Mme X..., l'arrêt rendu le 27 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne M. Holger Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté l'exercice en commun de l'autorité parentale à l'égard de David et Rebecca par leurs deux parents, Monsieur Y... et Madame X..., fixé la résidence habituelle des enfants au domicile de Monsieur Y..., accordé à Madame X... un droit de visite et d'hébergement, supprimé la contribution de Monsieur Y... à l'entretien et l'éducation des enfants, fixé à 100 € la contribution mensuelle de Madame X... à l'entretien et l'éducation des enfants, fixé à 800 € le montant de la pension alimentaire mensuelle et indexée due par Monsieur Y... à Madame X... à compter du 26 octobre 2010, dit que cette pension serait réévaluée le 1er novembre de chaque année, rejeté les demandes de Madame X... relatives à la procédure abusive, à la suppression des écrits calomnieux et au paiement de dommages-intérêts de ce chef, et déclaré irrecevables le surplus de ses prétentions,
AUX MOTIFS QUE « (...) sur la recevabilité de l'incident introduit devant le juge de la mise en état :
Considérant que la décision du 26 octobre 2010 critiquée devant la cour s'inscrit dans la procédure complexe de dissolution du mariage des époux X.../ Y..., dont il faut rappeler qu'elle a donné lieu à une ordonnance de non conciliation rendue le 13 septembre 2007 suivie de nombreuses décisions modificatives puis, le 18 février 2010, à la saisine du juge du fond par Cynthia X... en vue de faire prononcer à titre principal une séparation de corps sur le fondement de l'altération définitive du lien conjugal, Holger Y... sollicitant reconventionnellement le prononcé du divorce des époux ;
Considérant que le 17 juin 2010, Holger Y... a saisi le juge de la mise en état d'une demande de transfert de la résidence des deux enfants du couple à son domicile et tendant, en tout état de cause, à leur scolarisation à compter de ta rentrée de septembre 2010, son action s'appuyant sur le fait que les enfants étaient déscolarisés par leur mère depuis septembre 2009 ; Considérant que Cynthia X... soutient que cet incident était irrecevable au regard des dispositions de l'article 1118 du code de procédure civile puisque cet état de déscolarisation n'était pas nouveau et avait été pris en compte dans la décision rendue par la cour d'appel le 06 mai 2010 ;

Considérant cependant que la cour dans les motifs de sa décision précitée avait notamment indiqué : Considérant que la décision de déscolariser les enfants prise unilatéralement par Cynthia X... au mépris des droits de Holger Y... est préoccupante puisque Cynthia X... n'a aucune formation pédagogique qui lui permette de se substituer à l'école ;

Qu'il est constant que, postérieurement à cette décision, les enfants n'ont pas été réinscrits dans un cursus scolaire normal pour la rentrée de septembre 2010, leur inscription n'ayant été réalisée qu'à la suite de l'audience tenue devant le juge des enfants le 30 septembre 2010 au cours de laquelle la possibilité d'une décision de placement avait été évoquée faute de scolarisation ;
Considérant que la persistance de l'état de déscolarisation des enfants lors de la rentrée de septembre 2010 constituait le fait nouveau rendant recevable l'incident dont était saisi le juge de la mise en état ;
Sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale :
Considérant que dès le mois de mars 2010, selon un courrier émanant de l'inspection académique des Yvelines, Cynthia X... a été avertie du caractère illicite de sa déclaration d'instruction dans la famille puisque celle-ci était unilatérale ; que bien qu'ayant confirmé la décision fixant la résidence des enfants à son domicile, la cour par son arrêt du 06 mai 2010 a attiré à nouveau l'attention de Cynthia X... sur le caractère préoccupant de cette déscolarisation ;
Que cette dernière ne semble pas avoir pris la mesure du danger auquel elle exposait les enfants, notamment en tenue d'acquisition de leur autonomie, en renouvelant sa position pour l'année scolaire 2010/ 2011 ; qu'en effet, elle ne démontre pas avoir procédé à l'inscription des enfants auprès d'un établissement scolaire, qu'il soit public ou privé, avant la rentrée de septembre 2010 ; que si les conceptions des deux parents en la matière sont opposées, l'un préférant le secteur public à la différence de l'autre qui préfère le secteur privé, l'intérêt des enfants commandait de résoudre rapidement cette difficulté, ce que l'attitude procédurale de Cynthia X... n'a pas permis, le litige n'ayant pu se résoudre que sous la pression conjuguée d'un signalement auprès du procureur de la République et de la position prise par le juge des enfants ; Considérant que celui-ci, tout en prescrivant l'ouverture d'une action éducative en milieu ouvert par son jugement du 07 octobre 2010, a également, par une décision séparée, prescrit une mesure d'examen psychiatrique des deux parents, après avoir observé que le contexte dans lequel se plaçait le litige faisait craindre un envahissement des enfants par le conflit de leurs parents ; que cette mesure avait pour but, clairement exprimé, de mieux cerner la personnalité des parents afin de savoir si l'un ou/ et l'autre ne souffrirait pas d'une pathologie ou d'une fragilité pouvant expliquer la persistance du conflit parental ;

Qu'il convient d'observer que Cynthia X... a refusé de participer à cette mesure d'expertise, pourtant destinée à donner aux intervenants des éléments de nature à leur permettre de protéger les enfants d'un conflit qui leur nuit ;
Considérant que Cynthia X... éprouve donc des difficultés à cerner et satisfaire les intérêts des enfants ;
Considérant que ceux-ci sont maintenant depuis plus d'un an dans un nouvel environnement où ils ont acquis de nouveaux repères et une certaine stabilité ; que les conclusions de l'enquête sociale déposée en janvier 2008 dont il résultait que Holger Y... avait pris une place de père et d'éducateur et qu'il n'existait aucun signe inquiétant d'une relation douteuse avec les enfants ne sont pas remises en cause par les investigations auxquelles se livre le juge des enfants et la mesure d'assistance éducative ;
Considérant que Cynthia X... reconnaît à l'audience que le droit de visite et d'hébergement dont elle bénéficie est respecté et qu'il se déroule bien ; que le père renouvelle à l'audience son accord pour élargir ce droit de visite et d'hébergement aux milieux de semaine qui reste à la discrétion de Cynthia X... ;
Considérant que quel que soit l'amour que porte Cynthia X... à ses enfants, il n'apparaît pas de leur intérêt de bouleverser le cadre dans lequel ils se trouvent, mesure qui les replacerait encore au milieu du conflit parental dont il est nécessaire de les préserver ;
Qu'ainsi, il convient de confirmer la décision du juge de la mise en état en ce qu'il a fixé la résidence des enfants au domicile du père et accordé à la mère un droit de visite et d'hébergement ;
Sur les mesures financières :
Considérant que par application des articles 208 et 212 du Code civil le montant de la pension alimentaire qui est versée par l'un des époux en exécution du devoir de secours est fixé en tenant compte de ses ressources et des besoins du conjoint créancier ;
Que la notion de besoins s'apprécie en fonction du niveau de vie des époux ;
Considérant que pour confirmer la décision du juge aux affaires familiales fixant à 1. 000 euros par mois la pension alimentaire due au titre du devoir de secours, la cour, dans son arrêt du 21 octobre 2008, avait retenu que : Cynthia X... est sans emploi et sans revenus ; elle perçoit 119 euros par mois d'allocations familiales destinées à l'entretien des enfants ; elle déclare supporter des charges mensuelles de 2. 402 euros (frais d'entretien et d'éducation des enfants compris) ; elle fait cependant état de frais d'entretien du véhicule et de frais de carburant importants (450 euros/ mois hors assurance) et d'un entretien du domicile conjugal fort coûteux ; Holger Y... est avocat et ses revenus moyens s'établissent en moyenne à 5. 275 euros par mois pour l'année 2007 ; il supporte le remboursement d'un prêt immobilier (1. 300 euros/ mois) et un loyer mensuel (800 euros/ mois) ; il règle en outre une contribution mensuelle à l'entretien et à l'éducation des enfants ;

Considérant que dans le cadre de l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 06 mai 2010, Holger Y... faisait valoir que son épouse travaillait et qu'elle devrait justifier des revenus fonciers qu'elle tire de la location d'un bien immobilier qui lui appartient en propre ;
Considérant que la cour avait constaté d'une part que si Cynthia X... avait trouvé un travail en octobre 2009 auprès de la société Mercedes-Benz, elle justifiait l'avoir perdu à l'issue de la période d'essai, d'autre part que Holger Y... n'administrait pas le preuve que Cynthia X... est propriétaire d'un bien immobilier ;
Qu'elle en avait conclu que la situation de Cynthia X... n'avait pas évolué depuis l'arrêt du 21 octobre 2008 et rejeté la demande de diminution de la pension alimentaire présentée par son époux ;
Considérant que Holger Y... a, depuis, établi la preuve que Cynthia X... est effectivement propriétaire d'un studio et un parking à Argenteuil en produisant le document hypothécaire correspondant daté du 06 septembre 2010 ; que l'avis d'imposition 2011 sur les revenus de l'année 2010 de Cynthia X... fait mention d'un revenu imposable de 564 euros par mois en ce compris un revenu foncier de 191 euros par mois ;
Considérant que Holger Y... a justifié par la production de son avis d'imposition sur les revenus 2009 qu'ils avaient connu une baisse par rapport à 2008 puisqu'ils s'élevaient à 4. 881 euros par mois ; qu'il ne donne cependant aucune indication sur les revenus perçus en 2010 et en 2011 ni sur les charges qu'il supporte ; il ne verse plus de contribution pour les enfants mais en assure directement la charge depuis septembre 2010 ;
Considérant que la situation économique des parties a donc évolué, en ce que des ressources inconnues de Cynthia X... ont été révélées même si elles demeurent faibles et que les revenus de Holger Y... se sont légèrement dégradés en 2009, l'absence de tout élément sur 2010 et 2011 laissant cependant présumer que cette situation s'est améliorée ; qu'il assure maintenant la charge quotidienne des deux enfants ;
Considérant qu'il doit être observé que Cynthia X... qui n'assure plus cette charge depuis plus d'un an n'a pas tenté de retrouver du travail alors qu'elle a une formation de comptable, est bilingue et ne connaît pas de problèmes de santé invalidants ;
Qu'au vu des ces éléments, si le principe de la réduction de la pension alimentaire adopté par le premier juge doit être approuvé, il convient de limiter celle-ci et de fixer à 800 euros le montant de la pension mensuelle et indexée due au titre du devoir de secours ;
Considérant que Cynthia X... ne critique pas la disposition ayant mis à sa charge une contribution mensuelle de 50 euros par enfant ; que la suppression de la contribution supportée par Holger Y... doit être confirmée puisqu'il a la charge des enfants ;
Sur les demandes reconventionnelles présentées par Cynthia X... :
Considérant que Cynthia X... présente de nombreuses demandes reconventionnelles parfois difficilement compréhensibles et dont l'irrecevabilité est soulevée par Holger Y... ;
Considérant selon l'article 566 du code de procédure civile, que les parties peuvent expliciter les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes et défenses soumises au premier juge et ajouter à celles-ci toutes les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément ;
Considérant que l'incident qui a donné lieu à l'ordonnance critiquée rendue par le juge aux affaires familiales en sa qualité déjuge de la mise en état a été introduit par Holger Y... le 17 juin 2010 ; que l'affaire a été fixée à l'audience du 23 septembre 2010, date à laquelle l'avocat postulant de Cynthia X... a sollicité le report de son examen puisque sa cliente n'avait plus d'avocat plaidant ; qu'en dépit de l'opposition de Holger Y..., l'affaire a fait l'objet d'un renvoi à l'audience du 14 octobre, le juge ayant fait savoir qu'aucun autre renvoi ne serait accordé ; qu'à l'audience du 14 octobre 2010, Cynthia X... s'est présentée seule alors que la représentation était obligatoire puisque l'incident s'inscrivait dans une instance en séparation de corps et en divorce ; que Cynthia X... n'a donc pu, de son propre fait, présenter aucune défense ;
Qu'ainsi, les prétentions qu'elle élève devant la cour sont irrecevables à l'exception de celles qui se rapportent à la procédure même suivie devant la cour, soit la demande formée au titre de la procédure abusive et celle reposant sur la loi du 29 juillet 1881 ;
Considérant que Cynthia X... ne peut démontrer le caractère abusif de la procédure de Holger Y... à son encontre alors que des faits nouveaux ont été mis en évidence ; que sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive doit être rejetée ;
Considérant que faute de les identifier précisément dans les écrits déposés, la demande tendant à la suppression des passages calomnieux sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 apparaît infondée, de même que celle en dommages et intérêts qui l'accompagne ;
Considérant enfin, sur la demande d'audition des enfants, qu'il n'y a pas lieu d'y faire droit ; qu'en effet, cette audition, qu'ils ne demandent pas eux-mêmes, serait de nature à raviver le conflit de loyauté dans lequel ils se débattent et ne serait d'aucune utilité à la cour qui ne pourrait s'assurer de la sincérité de leurs déclarations (...) »,
ALORS QUE les demandes reconventionnelles sont recevables en appel, à la seule condition de se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu'en déclarant irrecevables les demandes reconventionnelles formées par Madame X..., au motif inopérant que celle-ci n'aurait présenté aucune défense en première instance, sans rechercher si ces demandes reconventionnelles se rattachaient aux prétentions originaires par un lien suffisant, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 567 et 70 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-28793
Date de la décision : 31/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 27 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 31 jan. 2013, pourvoi n°11-28793


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.28793
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