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23/01/2013 | FRANCE | N°11-28075

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 janvier 2013, 11-28075


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen soulevé d'office après avis adressé aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles L. 1232-6 et L. 1132-1 du code du travail ;
Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement ; que le second, faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de sant

é du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen soulevé d'office après avis adressé aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles L. 1232-6 et L. 1132-1 du code du travail ;
Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, l'employeur est tenu d'énoncer le ou les motifs du licenciement dans la lettre de licenciement ; que le second, faisant interdiction de licencier un salarié notamment en raison de son état de santé ou de son handicap ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié ; qu'il en résulte que la lettre de licenciement doit énoncer expressément la perturbation dans le fonctionnement de l'entreprise et la nécessité de pourvoir au remplacement du salarié absent, dont le caractère définitif doit être vérifié par les juges du fond ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 9 décembre 1993 en qualité de vendeuse par la société Dinopa devenue Coiff'idis, a été en arrêt-maladie du 10 mai au 20 juillet 2007, puis de manière continue à compter du 15 octobre 2008 ; qu'ayant été licenciée le 23 juin 2009, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les difficultés prouvées par l'employeur sont de nature à caractériser les perturbations dans le fonctionnement du magasin dans lequel la salariée était affectée, rendant nécessaire le remplacement définitif de celle-ci et justifiant ainsi son licenciement ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait elle-même constaté que la lettre de licenciement visait une perturbation dans le fonctionnement de l'établissement dans lequel travaillait la salariée et non de l'entreprise, ce dont il résultait que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société Coiff'idis à payer à Mme X... les sommes de 375,78 euros au titre de la régularisation de salaires conventionnels, congés payés inclus, 86,46 euros au titre de la régularisation de son indemnité de licenciement et 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 11 octobre 2011 entre les parties par la cour d'appel de Rouen ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de l'arrêt ayant statué sur le bien fondé du licenciement ;
Déclare le licenciement de Mme X... dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Renvoie devant la cour d'appel de Caen pour qu'il soit statué sur les conséquences financières de ce licenciement ;
Condamne la société Coiff'idis Le Havre aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute la société Coiff'idis Le Havre de sa demande et condamne cette société à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Il est fait grief à la Cour d'appel de ROUEN d'avoir débouté Mme X... de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la société COIFF'IDIS a licencié Mme X... par lettre recommandée AR du 23 juin 2009, « motif pris de ce que sa maladie prolongée perturbait le fonctionnement de l'établissement et que l'expérience des derniers mois montrait qu'il était difficile de recruter des personnes en contrat de travail à durée déterminée puis de les maintenir dans l'entreprise, que le magasin ne pouvait fonctionner avec une seule vendeuse, que le recours au contrat de travail à durée déterminée ou à l'intérim ne permettait pas le fonctionnement normal du magasin compte tenu notamment de la gamme étendue de produits à proposer et donc à connaître et que le mécontentement de clients mal orientés par méconnaissance des produits constituait un trouble impossible à admettre » (cf. arrêt, p. 3) que l'employeur prouve qu'il a remplacé définitivement Mme X... à compter du 26 août 2009, soit un peu plus de deux mois après le licenciement en embauchant par contrat à durée indéterminée Mme Y... qui avait auparavant fait l'objet de deux contrats de travail à durée déterminée pour remplacer temporairement la salariée absente ; qu'il prouve également que le remplacement de Mme X... ne pouvait se faire de manière interne à la société compte tenu de la petite taille du magasin fonctionnant à deux personnes et de son éloignement des autres centres d'activité de l'entreprise ; que par ailleurs, il est établi qu'il a dû recourir successivement à deux salariées extérieures dont Mme Y... qui lui a fait connaître qu'elle aurait quitté l'entreprise si elle n'avait pas été embauchée à titre définitif ce qui aurait conduit au recrutement d'une troisième salariée à titre précaire en l'espace de 6 mois ; qu'enfin M. Z..., formateur au sein de la société atteste qu'une semaine de formation et de pratique est nécessaire pour seulement « commencer à maîtriser » le système informatique et les tâches commerciales lesquelles nécessitent au surplus la maîtrise de produits destinés à des professionnels dont la variété et la multiplicité sont illustrés par les catalogues et inventaires versés aux débats ; que les difficultés ainsi prouvées par l'employeur sont de nature à caractériser des perturbations dans le fonctionnement du magasin rendant nécessaire le remplacement définitif de Mme X... et justifiant ainsi le licenciement ; que Mme X... ne saurait se prévaloir, pour remettre en cause la conclusion qui s'évince de ces éléments, de la mise en demeure de reprendre le travail qui lui a été adressée par l'employeur le 21 avril 2009, en se fondant sur l'article 48 de la convention collective applicable (commerce de gros) qui dispose : « Si l'absence se prolonge, suivant les cas, au-delà du 80e ou 170e jour, l'employeur peut mettre l'intéressé en demeure, par lettre recommandée, de reprendre son travail dans les dix jours suivant l'envoi de ladite lettre. Si l'intéressé n'a pas repris son travail dans ce délai, le contrat de travail sera rompu et le salarié recevra alors l'indemnité de licenciement dans les conditions fixées par la convention » ; qu'il ne peut en effet être déduit du seul envoi de la mise en demeure que l'employeur a considéré que l'échéance du terme de la période de six mois constituait à elle seule une cause de rupture du contrat de travail, dès lors qu'il n'a pas procédé immédiatement au licenciement et qu'il a invoqué dans la lettre de licenciement des motifs distincts de ceux tirés d'une simple échéance de ce terme ; que par ailleurs, contrairement à ce qu'allègue la salariée, le circonstance que Mme Y... qui remplaçait Mme X... ait, dans son propre intérêt adressé à l'employeur des lettres des 17 avril et 18 juin aux fins d'être embauchée à titre définitif, est sans incidence sur la validité du licenciement de Mme X..., dès lors que les conditions exigées pour la validité d'un licenciement motivé par une absence prolongée sont par ailleurs réunies ; qu'enfin, si Mme X... se prévaut de l'exemple de la salariée d'une autre agence qui avait pu être remplacée lors d'une absence prolongée, l'employeur prouve que la situation était différente, le remplacement ayant pu être assuré, au moins dans un premier temps, par une personne qui, venant d'achever le remplacement d'une autre salariée, était déjà en place dans le magasin ;
1/ ALORS QU'en cas de licenciement motivé par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié consécutives à son état de santé, l'employeur doit se prévaloir dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, d'une part, de la perturbation du fonctionnement de l'entreprise, et, d'autre part, de la nécessité du remplacement du salarié, dont le juge doit vérifier s'il est définitif ; qu'après avoir constaté que dans la lettre de licenciement, qui fixait les termes du litige, l'employeur s'était borné à invoquer l'existence de perturbations dans le fonctionnement de l'entreprise, sans se prévaloir la nécessité du remplacement de la salariée, la cour d'appel devait juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
2/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'après avoir constaté que dans la lettre de licenciement, l'employeur s'était borné à invoquer l'existence de perturbations dans le fonctionnement de l'entreprise, sans se prévaloir la nécessité du remplacement de la salariée, la cour d'appel devait rechercher si la lettre de licenciement qui fixait les limites du litige, visait d'une part, la perturbation du fonctionnement de l'entreprise, et, d'autre part, la nécessité du remplacement du salarié ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, à laquelle elle était invitée, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
3/ ALORS QUE s'il est possible de procéder à un licenciement motivé non par l'état de santé mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié la salarié ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif par l'engagement d'un autre salarié ; qu'en l'espèce après avoir constaté que Mme X... qui avait fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie était affectée dans l'un des magasins de la société COIFF'IDIS, la Cour d'appel devait apprécier la perturbation alléguée dans le cadre de l'entreprise ; qu'en l'appréciant dans le cadre du seul magasin du HAVRE, la Cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;
4/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'après avoir constaté que Madame X... qui avait fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie était affectée dans l'un des magasins de la société COIFF'IDIS, la Cour d'appel a considéré que le remplacement de Mme X... ne pouvait se faire de manière interne à cette société compte tenu de la petite taille du magasin du HAVRE qui fonctionnait à deux personnes et de son éloignement des autres centres d'activités de l'entreprise ; qu'en s'abstenant de préciser les sites auxquels elle faisait allusion, de nature à permettre d'apprécier la situation objective de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;
ET 5/ ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE la lettre de licenciement fixant les limites du litige avait fait état de la situation objective de l'entreprise au regard de la situation du seul magasin du HAVRE; qu'en appréciant la situation de ce magasin d'après son éloignement des autres centres d'activité de l'entreprise, circonstance distincte de celle évoquée dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé L. 1132-1 du code du travail ensemble, l'article L. 1232-6 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-28075
Date de la décision : 23/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 11 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jan. 2013, pourvoi n°11-28075


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Ghestin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.28075
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