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16/01/2013 | FRANCE | N°11-27252

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 janvier 2013, 11-27252


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que M. X...a été engagé le 3 octobre 2005 par la société Meri Man en qualité de " manager département sec " ; que, par lettre du 20 novembre 2008, M. Y..., chef de magasin, a procédé à son licenciement pour faute lourde ;
Attendu que pour dire que le licenciement était nul pour avoir été prononcé par une personne qui n'avait pas le pouvoir de licencier le salarié et condamner la société à verse

r à ce dernier certaines sommes au titre de la rupture du contrat de travail, l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que M. X...a été engagé le 3 octobre 2005 par la société Meri Man en qualité de " manager département sec " ; que, par lettre du 20 novembre 2008, M. Y..., chef de magasin, a procédé à son licenciement pour faute lourde ;
Attendu que pour dire que le licenciement était nul pour avoir été prononcé par une personne qui n'avait pas le pouvoir de licencier le salarié et condamner la société à verser à ce dernier certaines sommes au titre de la rupture du contrat de travail, l'arrêt retient que M. Y..., en sa qualité de " chef de magasin ", catégorie cadre, niveau VII, disposait en vertu de son contrat de travail d'une délégation de pouvoir en matière d'hygiène, de sécurité et de législation économique, que la fiche de fonction annexée à son contrat de travail précisait notamment que le manager participe au recrutement de son rayon, secteur ou unité commerciale, valide la période d'essai conjointement avec la direction, propose les sanctions disciplinaires à la direction en cas de manquement constaté pour un membre de son équipe, et qu'il ne disposait donc pas du pouvoir de licencier mais pouvait tout au plus proposer le licenciement à la direction ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le contrat de travail de M. Y...comportait une clause de délégation de pouvoir et de responsabilité, l'habilitant en qualité de chef de magasin à prendre toute décision pour le compte de la société et que la fiche de fonctions précisait qu'il était responsable de l'ensemble des " procédures " liées au personnel, ce dont il résultait qu'il bénéficiait d'une délégation de pouvoir pour procéder au licenciement du salarié, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Meri Man
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X...était nul pour avoir été prononcé par une personne qui n'avait pas le pouvoir de le licencier et d'AVOIR condamné la société MERIMAN à verser à Monsieur X...les sommes de 8. 610, 54 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 861, 05 € de congés payés afférents, 1. 913, 45 € à titre de salaire pendant la mise à pied outre 191, 34 € de congés payés afférents, 1. 722, 10 € à titre d'indemnité légale de licenciement et 18. 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le pouvoir de licencier : En application de l'article L. 1232-6 du code du travail, pour être valable le licenciement doit procéder de la notification d'une lettre de licenciement émanant de l'employeur ou de son représentant ; que dans les sociétés par actions simplifiées, si en vertu de l'article L. 227-6 du code de commerce, la société est représentée à l'égard des tiers par son président et, pour le cas où ses statuts le prévoient, par un directeur général ou un directeur général délégué dont la nomination est soumise à publicité, cette règle n'exclut pas la possibilité, pour ces représentants légaux, de déléguer le pouvoir d'effectuer des actes déterminés, tels que celui d'engager ou de licencier les salariés de l'entreprise ; qu'aucune disposition n'exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par écrit. Elle peut être tacite et découler des fonctions du salarié qui a conduit la procédure de licenciement. En outre dès lors que l'employeur soutient, à la suite d'une contestation opposée par le salarié licencié, que le licenciement est fondé, il ratifie nécessairement l'initiative prise par son préposé ; que Loïs X...a été embauché par la SAS dont le président était, au moment du licenciement, Roger A... ; que la lettre de convocation à l'entretien préalable, en date du 31 octobre 2008, et la lettre de licenciement du 20 novembre 2008, sont signées de " La Direction M. Y...T. " ; qu'il ressort des contrats de travail versés aux débats que Thierry Y...a été recruté à compter du 3 septembre 2001 par la SA MERIMAN comme " chef de magasin ", catégorie cadre, niveau VII, et que Fabrice Z...a été embauché par cette même société en qualité de " directeur de magasin ", niveau VIII, statut cadre dirigeant, le 13 octobre 2008 ; que Thierry Y...atteste avoir exercé ses fonctions jusqu'au 31 mai 2009 ; qu'il disposait en vertu de son contrat de travail d'une délégation de pouvoir en matière d'hygiène, de sécurité et de législation économique ; que la fiche de fonction annexée à son contrat de travail (manager d'une unité commerciale III-petit point de vente, secteur, rayon) précise notamment que le manager participe au recrutement de son rayon, secteur ou unité commerciale, valide la période d'essai conjointement avec la direction, propose les sanctions disciplinaires à la direction en cas de manquement constatés pour un membre de son équipe ; que Thierry Y...(cf. arrêt rectificatif du 8 février 2012), ne disposait donc pas du pouvoir de licencier. Il pouvait tout au plus proposer le licenciement à la direction. Or au moment où la décision d'engager une procédure disciplinaire a été prise, le 31 octobre 2008, le directeur du magasin, Fabrice Z..., était en poste. Thierry Y...devait en référer à celui-ci, étant observé qu'en vertu de son contrat de travail (article 4), Fabrice Z...disposait d'une délégation de pouvoir sur l'ensemble du personnel du point de vente pour sanctionner ou proposer le licenciement ; qu'ainsi, pas plus le signataire de la lettre de licenciement, chef de magasin, que Fabrice Z..., directeur de magasin déjà en fonction au moment où les principaux faits se sont produits, n'avaient reçu du président de la société le pouvoir de procéder au licenciement d'un salarié ; que le défaut de qualité entraîne la nullité du licenciement ; que le préjudice qui en découle pour le salarié sera réparé par le versement de la somme de 18. 000 euros à titre de dommages et intérêts prenant en compte son ancienneté (3 ans), sa rémunération (2. 870, 18 euros) et le fait qu'il a retrouvé un emploi en août 2010 ; que Loïc X...est fondé à obtenir le paiement du préavis (8. 610, 54 euros), du salaire de la mise à pied (1. 913, 45 euros) et des congés payés afférents, ainsi que de l'indemnité de licenciement (1. 722, 10 euros) » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE sauf lorsqu'une disposition ayant pour objet spécifique la rupture des contrats de travail institue une garantie de fond au profit du salarié en identifiant les personnes habilitées à prononcer un licenciement, tout membre de l'entreprise investi, de par ses fonctions, du pouvoir de diriger l'activité du salarié a qualité pour prononcer la rupture du contrat de travail, sans qu'il soit nécessaire qu'une délégation de pouvoirs ait été préalablement établie par écrit ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que la lettre de licenciement était signée par Monsieur Y...qui était « chef de magasin, statut cadre niveau VII » et dont le contrat de travail était produit aux débats par l'exposante (arrêt p. 4 al. 10-11) ; que ce contrat signé par Monsieur A..., président de la SAS MERIMAN, stipulait qu'« en votre qualité de chef de magasin, de par votre statut, vos responsabilités et en égard à votre compétence et votre expérience professionnelle vous êtes habilité à prendre toute décision pour le compte de la société » et que « d'une manière générale, vous prendrez donc toute initiative pour veiller personnellement à la stricte et constante exécution des dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles édictées en matière économique sanitaire et sociale » ; que la fiche de fonctions « Directeur, cadre niveau 7 » annexée au contrat de travail indiquait que le salarié était « responsable du respect de l'ensemble des procédures liées au personnel (embauche, affichage, sanction) dans le respect de la législation en vigueur (loi et convention collective) » ; qu'en considérant néanmoins que Monsieur Y...n'aurait pas disposé du pouvoir de licencier, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 et L. 1232-6 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le contrat de travail de Monsieur Y...signé par ce salarié et Monsieur A..., directeur de la SAS MERIMAN, stipulait qu'« en votre qualité de chef de magasin, de par votre statut, vos responsabilités et en égard à votre compétence et votre expérience professionnelle vous êtes habilité à prendre toute décision pour le compte de la société » ; qu'en énonçant que Monsieur Y...n'aurait pas « reçu du président de la société le pouvoir de procéder au licenciement d'un salarié », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document produit aux débats, en violation de l'article 1134 du Code civil et du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les écrits produits devant lui ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE la fiche de fonction de « manager d'une unité commerciale III – petit point de vente, secteur, rayon) » visée par la cour d'appel concerne les fonctions exercées par Monsieur X..., salarié licencié, et non celles exercées par Monsieur Y..., directeur de magasin signataire de la lettre de licenciement ; qu'en se fondant sur ce document pour décider que Monsieur Y...ne pouvait que proposer une sanction à la direction et non prononcer le licenciement, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige qui lui était soumis en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIEME PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le pouvoir de licencier un salarié peut faire l'objet d'un mandat, dès lors qu'il n'est pas confié à une personne extérieure à l'entreprise ; qu'il en résulte qu'en application de l'article 1998 du Code civil, la décision de licencier prise par un préposé de l'employeur peut, à tout moment, être ratifiée par le représentant légal de la personne morale de manière expresse ou tacite ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que la société MERIMAN, prise en la personne de son représentant légal en exercice, demandait que Monsieur X...soit débouté de sa demande de nullité en exposant que la lettre de licenciement avait été signée par une personne qui avait qualité pour ce faire et que le licenciement était valablement intervenu en raison des manquements invoqués dans la lettre de licenciement ; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de cette constatation dont il résultait la volonté claire et non équivoque du représentant légal de la société MERIMAN de s'approprier la décision de licencier Monsieur X...prise en son nom par son préposé, la cour d'appel a violé les articles L. 227-6 du Code de commerce, par fausse application, et les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du Code du travail, ensemble l'article 1998 du Code civil ;

ALORS, ENFIN ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la nullité d'un acte juridique passé au nom d'autrui pour absence de pouvoir de représentation de son auteur est une nullité relative qui ne peut être invoquée que par la personne représentée et reste susceptible d'être couverte par confirmation ; qu'en ne recherchant pas si, en demandant à la cour d'appel de dire que le comportement intentionnel de Monsieur X...était constitutif d'une faute lourde, la société MERIMAN n'avait pas entendu couvrir toute irrégularité tirée d'un défaut de pouvoir des auteurs de la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles 1304, 1338 et 1984 du Code civil, ensemble les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-27252
Date de la décision : 16/01/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 05 octobre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 jan. 2013, pourvoi n°11-27252


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:11.27252
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