LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 octobre 2011), que M. X... a procédé à des rachats partiels d'un contrat d'assurance-vie en unités de compte qu'il avait souscrit en 1994 ; que l'administration fiscale lui a notifié deux propositions de rectification, l'une au titre des années 2004 à 2006 et l'autre au titre des années 2007 et 2008, prenant notamment en compte le gain réalisé par cette opération de rachat, en l'intégrant comme revenu pour le plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ; qu'après mises en recouvrement du complément d'impôt en résultant et rejet de ses réclamations, M. X... a saisi le tribunal de grande instance afin d'être déchargé de cette imposition ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le moyen, que l'impôt de solidarité sur la fortune du redevable ayant son domicile fiscal en France est réduit de la différence entre, d'une part, le total de cet impôt et des impôts dus en France et à l'étranger au titre des revenus et produits de l'année précédente, calculés avant imputation des crédits d'impôt et des retenues non libératoires, et, d'autre part, 85 % du total des revenus nets de frais professionnels de l'année précédente après déduction des seuls déficits catégoriels dont l'imputation est autorisée par l'article 156 du code général des impôts, ainsi que des revenus exonérés d'impôt sur le revenu réalisés au cours de la même année en France ou hors de France et des produits soumis à un prélèvement libératoire ; que, pour déterminer l'assiette des revenus de référence pour l'application du plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune, les revenus liés au gain sur placements en assurances en unités de compte ne doivent être intégrés dans les revenus exonérés qu'au moment de leur dénouement total ; qu'en l'espèce, il est constant que M. X... détenait un contrat d'assurance-vie en unités de compte ouvert auprès de la société Cardif assurance-vie ; que M. X... ayant effectué des rachats partiels sur le contrat d'assurance-vie, la société Cardif a déclaré à l'administration fiscale les montants versés, exonérés d'impôts sur le revenu, au titre des années 2003 à 2006 ; que l'administration fiscale a cependant pris en compte ces gains exonérés pour déterminer le montant de l'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune de chacune des années suivant la période de perception ; qu'en statuant ainsi, alors que le gain sur placement en unités de compte a une valeur de placement qui varie et n'a pas la nature de revenu, mais de variation de valeur de capital, la cour d'appel a violé l'article 885 V bis du code général des impôts, ensemble l'article 125-0 A de ce même code ;
Mais attendu que, tant au regard de l'article 125-0 A du code général des impôts, inséré au chapitre de ce code consacré à l'impôt sur le revenu, qu'à celui de l'article 885 V bis du même code, les gains nets tirés des cessions de valeurs mobilières, même soumis à un régime spécifique d'imposition, constituent une des composantes du revenu net soumis à imposition sur le revenu ; que, dès lors, l'arrêt retient à bon droit que les sommes perçues au titre de rachats partiels d'un contrat d'assurance-vie en unités de compte doivent être ajoutées aux revenus imposables pour déterminer le plafonnement éventuel de l'ISF ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la première branche ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur Jacques X... tendant au prononcé du dégrèvement des sommes mises en recouvrement au titre du redressement concernant l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les années 2004 à 2008 ;
AUX MOTIFS QUE "M. Jacques X... reconnaît avoir procédé sur la période redressée à des rachats partiels de contrat d'assurance-vie en unités de compte souscrit en 1994 auprès de la société Cardif Assurance-vie en précisant que ce contrat se composait de différentes lignes de placements et que les rachats partiels s'effectuaient pour partie sur des lignes ne dégageant pas de profit ; qu'il estime que le calcul global et forfaitaire de l'administration fiscale est une anomalie et propose de retenir sur la période de rachat des années 2003 à 2008, des gains réels s'élevant à 273.092 euros au lieu de 845.306 euros déclarés par la société Cardif Assurance-vie à l'administration, en exposant que les gains réalisés sur des placements en unités de compte en cas de rachat partiel peuvent être purement fictifs en cas de moins value ultérieure et ne représenter qu'une variation de valeur de capital et non un revenu exonéré à intégrer dans l'assiette des revenus servant de calcul au plafonnement de l'ISF selon les dispositions de l'article 125-0 du code général des impôts ; Qu'il conclut que le mécanisme de calcul imposé par l'administration fiscale aboutit à une taxation sans fondement légal et que seul le dénouement total du contrat permet de déterminer un revenu ; Que l'administration fiscale conteste la thèse qui lui est opposée en se fondant sur l'article 885 V bis du code général des impôts ; que l'appelant conteste le caractère probant des déclarations souscrites par la société Cardif Assurance-vie et affirme ne pas avoir eu connaissance des montants indiqués par la société Cardif Assurance-vie alors que cette dernière a régulièrement déclaré à l'administration fiscale, conformément à l'article 242 ter 1 du code général des impôts, avoir versé à M. X... des revenus exonérés provenant d'un contrat en unités de compte et que l'article 49 de l'annexe 111 du même code prévoit que le tiers déclarant, remet dans tous les cas à son client un état récapitulatif des revenus de capitaux mobiliers de l'année précédente ; que l'obligation qui incombe à l'administration d'informer le contribuable de la teneur des renseignements qu'elle a recueillis ne s'étend pas aux informations fournies annuellement par ces tiers à l'administration et au contribuable ; que M. X... fait également à tort grief à l'administration fiscale de ne pas avoir justifié du caractère probant des imprimés fiscaux uniques émanant de la société Cardif Assurance-Vie qui devraient être certifiés par un expert judiciaire alors qu'il appartient seulement aux services fiscaux de mentionner dans la proposition de rectification le nom du tiers déclarant pour que la procédure soit contradictoire ; encore que l'appelant qui conteste la réalité des profits réalisés n'apporte aucune preuve contraire au regard des éléments fournis par la société Cardif Assurance-vie ; que M. X... soutient que les gains indiqués par la société Cardif Assurance-Vie ne peuvent être assimilés à des revenus exonérés rentrant dans l'assiette des revenus de référence pour l'application du plafonnement de l'ISF ; que l'administration fiscale procède selon un calcul global et forfaitaire "incohérent" et que les revenus liés au gain sur placements en assurances en unités de compte doivent être intégrés dans les revenus exonérés à retenir pour le calcul du plafonnement qu'au moment de leur dénouement total ; Mais que la doctrine administrative du 1er octobre 1999, 7 S-6-99 n° 38, prévoit qu'au titre des revenus à prendre en compte pour le calcul du plafonnement figurent : "Les produits exonérés d'impôts sur le revenu attachés aux bons et contrats de capitalisation ainsi qu'aux placements de même nature (assurance-vie) visés à l'article 125-0 A du code général des impôts pour lesquels le contrat est dénoué (rachat partiel ou total)" ; ainsi que les sommes perçues par l'appelant au titre de rachats partiels sur son contrat d'assurance-vie déclarées par la société Cardif Assurance-vie au titre des années 2003 à 2006 doivent donc bien être ajoutées à ses revenus imposables pour déterminer le plafonnement éventuel de son ISF au cours des années 2004 à 2007 conformément à l'article 885 V bis du code général des impôts" (arrêt, p. 4 à 6) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE "L'article 885 V bis du code général des impôts dispose : "l'impôt de solidarité sur la fortune du redevable ayant son domicile fiscal en France est réduit de la différence entre, d'une part, le total de cet impôt et des impôts dus en France et à l'étranger au titre des revenus et produits de l'année précédente, calculés avant imputation des crédits d'impôt et des retenues non libératoires, et, d'autre part, 85 p. 100 du total des revenus nets de frais professionnels de l'année précédente après déduction des seuls déficits catégoriels dont l'imputation est autorisée par l'article 156, ainsi que des revenus exonérés d'impôt sur le revenu réalisés au cours de la même année en France ou hors de France et des produits soumis à un prélèvement libératoire." En l'espèce la société Cardif Assurance-Vie, auprès de laquelle Monsieur X... détient un contrat d'assurance vie en unités de compte, a régulièrement déclaré à l'administration fiscale les montants versés à Monsieur X... et exonérés d'impôts sur le revenu au titre des années 2003 à 2006 et comme tels pris en compte pour déterminer le montant de l'imposition à l'ISF de chacune des années suivants la période de perception. Le contribuable conteste le caractère probant des éléments produits par la société Cardif Assurance Vie mais force est de constater que d'une part, la procédure de déclaration des revenus versés au titre d'une assurance vie a été respectée puisque la société Cardif a produit les imprimés fiscaux prévus par le code général des impôts à l'administration fiscale et que d'autre part Monsieur X... n'apporte pas la preuve que les déclarations litigieuses sont erronées. En outre, il a pu à plusieurs reprises dans le cadre d'une procédure contradictoire démontrer la réalité des revenus perçus sur la période 2003 à 2006, sans pouvoir reprocher à l'administration d'avoir accordé foi aux déclarations de la banque. Monsieur X... admet avoir effectué des rachats partiels sur son contrat d'assurance-vie en unités de compte ouvert en 1994 et invoque par ailleurs les dispositions de l'article 1649 O.A du code général des impôts pour soutenir que la variation à la hausse de la valeur du capital placé au titre d'un contrat de capitalisation en unités de compte n'est pas assimilable à un revenu exonéré à intégrer dans l'assiette des revenus servant de calcul au plafonnement des impôts directs. Nonobstant la question de l'applicabilité aux revenus des années 2003 à 2006 de l'article 1649 O.A. invoqué, issu de la loi de finances du 30 décembre 2005 instituant le "bouclier fiscal", force est de constater que les sommes perçues par Monsieur X... au titre de rachats partiels sur son contrat d'assurance vie en unités de compte ont bien la nature de revenus, qui doivent être ajoutés à ses revenus imposables pour déterminer un éventuel plafonnement de son ISF au titre des années 2004 à 2007" (jugement, p. 4 et 5) ;
1°) ALORS QUE les instructions et circulaires administratives, sans lier les juges, n'obligent que les fonctionnaires auxquels elles sont adressées et dans les sphères de leurs fonctions ; que si la doctrine de l'administration fiscale lie celle-ci, il n'en demeure pas moins que les circulaires n'ont aucune force obligatoire ;
Qu'en l'espèce, Monsieur X... faisait valoir dans ses écritures d'appel que les gains indiqués par la société Cardif Assurance Vie ne pouvaient être assimilés à des revenus exonérés rentrant dans l'assiette des revenus de référence pour l'application du plafonnement ISF, les revenus liés au gain sur placements en assurances en unités de compte ne devant être intégrés dans les revenus exonérés qu'au moment de leur dénouement total ;
Que, pour décider le contraire, la cour d'appel s'est bornée à reproduire servilement les termes de « la doctrine administrative du 1er octobre 1999 », sans même vérifier si cette simple circulaire était applicable aux années concernées (2004 à 2007), et sans aucune autre forme de motivation propre ;
Qu'en se fondant ainsi exclusivement, par un argument d'autorité, sur une circulaire administrative dépourvue de toute force obligatoire, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 1er du code civil ;
2°) ALORS QUE l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) du redevable ayant son domicile fiscal en France est réduit de la différence entre, d'une part, le total de cet impôt et des impôts dus en France et à l'étranger au titre des revenus et produits de l'année précédente, calculés avant imputation des crédits d'impôt et des retenues non libératoires, et, d'autre part, 85 % du total des revenus nets de frais professionnels de l'année précédente après déduction des seuls déficits catégoriels dont l'imputation est autorisée par l'article 156 du code général des impôts, ainsi que des revenus exonérés d'impôt sur le revenu réalisés au cours de la même année en France ou hors de France et des produits soumis à un prélèvement libératoire ; que, pour déterminer l'assiette des revenus de référence pour l'application du plafonnement de l'ISF, les revenus liés au gain sur placements en assurances en unités de compte ne doivent être intégrés dans les revenus exonérés qu'au moment de leur dénouement total ;
Qu'en l'espèce, il est constant que Monsieur Jacques X... détenait un contrat d'assurance-vie en unités de compte ouvert auprès de la société Cardif Assurance-Vie ; que Monsieur X... ayant effectué des rachats partiels sur le contrat d'assurance-vie, la société Cardif a déclaré à l'administration fiscale les montants versés, exonérés d'impôts sur le revenu, au titre des années 2003 à 2006 ; que l'administration fiscale a cependant pris en compte ces gains exonérés pour déterminer le montant de l'imposition à l'ISF de chacune des années suivants la période de perception ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le gain sur placement en unités de compte a une valeur de placement qui varie et n'a pas la nature de revenu, mais de variation de valeur de capital, la cour d'appel a violé l'article 885 V bis du code général des impôts, ensemble l'article 125 OA de ce même code.