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08/01/2013 | FRANCE | N°12-87023

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 janvier 2013, 12-87023


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Paul X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de TOULOUSE, en date du 16 octobre 2012, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de meurtre, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fonda

mentales, 137-1, 137-4, 145-2, 207, 802 et 593 du code de procédure pénale, dé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Paul X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de TOULOUSE, en date du 16 octobre 2012, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de meurtre, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 137-1, 137-4, 145-2, 207, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 1er octobre 2012 et confirmé la prolongation de la détention de M. X... pour une durée de six mois ;
"aux motifs propres qu'une convocation a été adressée le 23 août 2012 à l'avocat de M. X... en vue d'un débat contradictoire fixé à l'audience du 20 septembre 2012 dans le cadre d'une éventuelle prolongation de la détention provisoire ordonnée le 2 octobre 2011 ; que par suite de l'ordonnance de mise en liberté sous contrôle judiciaire en date du 19 septembre 2012, cette convocation a été annulée par un avis adressé le même jour à l'avocat de M. X... ; que toutefois cette ordonnance du juge d'instruction ayant été frappée d'appel par le ministère public, une nouvelle convocation a été adressée le 19 septembre 2012 à l'avocat de M. X... en vue d'un éventuel débat contradictoire à l'audience du 1er octobre 2012 ; que le juge des libertés et de la détention n'a été effectivement saisi du dossier de l'affaire qu'à la suite de l'arrêt de la chambre de l'instruction du 25 septembre 2012 ; que M. Paul X... ne peut se prévaloir d'une nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention au motif qu'il se serait auto-saisi en adressant le 19 septembre une convocation «de précaution» à un éventuel débat contradictoire ; que les conditions de la saisine du juge des libertés et de la détention doivent s'apprécier au jour où il statue; que la convocation du 19 septembre 2012 émanant des services du juge des libertés et de la détention ne constitue pas un acte juridictionnel susceptible de causer grief mais un acte d'administration judiciaire destiné à faciliter l'organisation des audiences et garantir le respect des délais stricts dans lesquels les décisions du juge doivent être rendues; que dès le 25 septembre 2012, date du prononcé de l'arrêt de la chambre de l'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention, l'avocat de M. X... a pu prendre connaissance du dossier pour assurer la défense de son client à l'audience du juge des libertés et de la détention fixée au 1er octobre 2012 ;
"aux motifs adoptés que comme dans d'autres juridictions en France, généralement parmi les plus importantes, à Toulouse, ce sont les services du juge des libertés et de la détention qui procèdent aux convocations des mis en examen dont il est demandé de prolonger la détention, que ces convocations font l'objet d'un échéancier sur la base d'un tableau des personnes prolongeables, fourni par le greffe de chaque juge d'instruction un mois auparavant environ (les débuts de mois) ; que l'ordonnance de saisine de juge des libertés et de la détention intervient, en cas de volonté par le magistrat de prolonger, quelques jours à quelques heures avant la tenue effective du débat ; qu'en cas de refus de prolonger ou de mise en liberté d'office du magistrat instructeur le débat est alors purement et simplement annulé, cela peut être au dernier moment ; que, dans le cas d'espèce, M. X... et son conseil avaient été convoqués le 19 Septembre 2012 ; que le service ayant été avisé par e-mail du 19 septembre 2012 de la mise en liberté de l'intéressé, sous contrôle judiciaire, avec surveillance électronique, et de l'existence d'un référé détention et donc de l'éventualité d'une réforme de la décision de Mme Y..., une convocation avait été lancée le jour même soit le 19 septembre 2012, à charge de l'annuler, en cas de confirmation de l'ordonnance entreprise ; qu'il s'avérait que la chambre de l'instruction, par arrêt du 25 septembre 2012, infirmait la mise en liberté de M. X... et nous saisissait aux fins de statuer sur la question de la prolongation de la détention provisoire ; que dans ces conditions, la convocation de M. X..., préalable à notre saisine effective, ressortait des nécessités d'une bonne administration de la justice, dont l'effectivité est d'autant plus difficile que les tâches du juge des libertés et de la détention sont nombreuses et n'ont eu de cesse de s'élargir au gré des réformes (étrangers, hospitalisations sous contrainte, mandats…) devenant de plus en plus chronophage et nécessitant une organisation et une anticipation (dès lors qu'elle est possible) la plus rigoureuse possible ; qu'en tout état de cause, ce point ne saurait faire grief, puisque grâce à cette solution prévoyante, les conseils du mis en examen étaient avisés suffisamment tôt et pouvaient disposer du temps nécessaire pour accéder au dossier, nonobstant l'arrêt de la chambre de l'Instruction qui n'apportait aucun élément nouveau au fond ;
"1°) alors qu'en cas de prolongation de la détention provisoire, le juge des libertés et de la détention est saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction, qui lui transmet le dossier de la procédure accompagné des réquisitions du procureur de la République ; qu'en l'espèce, il résulte de l'ordonnance entreprise que le juge des libertés et de la détention a été directement et irrégulièrement saisi aux fins de maintien en détention provisoire par un arrêt de la chambre de l'instruction du 25 septembre 2012 ayant statué sur un appel d'une ordonnance du juge d'instruction de mise en liberté avec assignation à résidence sous surveillance électronique et contrôle judiciaire ; que cette irrégularité doit entraîner l'annulation de l'ordonnance de prolongation de la détention, la cassation sans renvoi et la remise en liberté immédiate de M. X... ;
"2°) alors qu'un juge des libertés et de la détention n'est pas compétent pour organiser de son propre chef, avant toute saisine du juge d'instruction, un débat contradictoire en vue de la prolongation de la détention provisoire et notamment, pour convoquer son avocat à cette fin ; que le juge des libertés a violé les textes et principes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que saisie, par le procureur de la République, de l'appel de l'ordonnance du juge d'instruction prononçant la mise en liberté de M. X... et refusant corrélativement la saisine du juge des libertés et de la détention sollicitée aux fins de prolongation de la détention provisoire, la chambre de l'instruction a, par arrêt du 25 septembre 2012, infirmé cette ordonnance et saisi le juge compétent pour qu'il statue sur la prolongation ; que ce juge ayant prolongé la détention provisoire de M. X..., l'illégalité de sa saisine a été soulevée au soutien de l'appel de l'ordonnance critiquée ; que pour rejeter cette exception, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu que si c'est à tort que la chambre de l'instruction a, dans son arrêt du 25 septembre 2012, saisi le juge des libertés et de la détention de la question de la prolongation de la détention provisoire de M. X... bien qu'elle ait été appelée à statuer sur le recours formé par le procureur de la République contre l'ordonnance du juge d'instruction refusant cette prolongation et mettant le mis en examen en liberté sous contrôle judiciaire, il n'en résulte néanmoins aucun grief pour l'intéressé, dès lors que cette juridiction a ensuite, par l'arrêt attaqué, exercé son contrôle par l'effet de l'examen de l'appel de la décision de prolongation de la détention provisoire intervenue ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 137, 137-3, 144, 145-2 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé la prolongation de la détention de M. X... pour une durée de six mois ;
"aux motifs propres que M. X... reconnaît les faits qui lui sont reprochés mais donne une version des circonstances qui implique directement la victime et les autres protagonistes plutôt que lui-même et qui minimise sa responsabilité personnelle ; que malgré la reconstitution des faits qui a été organisée le 12 juin 2012 par le juge d'instruction, il apparaît indispensable d'éviter tout risque de pression sur les témoins ; que, selon les pièces du dossier, M. X... a des tendances à la dépression qu'il soignait en partie par une consommation alcoolique ; que ces deux éléments conjugués ainsi que les traits de sa personnalité ont entraîné un passage à l'acte fulgurant ; qu'il convient d'éviter tout risque de renouvellement de l'infraction ; que le crime a été commis sur la voie publique dans une ville universitaire où les alcoolisations massives de jeunes étudiants sont fréquentes et constituent un phénomène inquiétant ; que la gravité des faits reprochés à M. X... et les circonstances dans lesquelles ils se sont produits ont provoqué un trouble exceptionnel à l'ordre public ; que si l'assignation à résidence de M. X... pendant dix jours n'a pas donné lieu à des pressions sur les témoins ni à une réitération de l'infraction, ce constat ne suffit pas à écarter le risque que cela se produise en l'absence d'une mesure de détention provisoire qui reste le seul moyen de parvenir aux objectifs suivants alors que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous assignation à résidence avec surveillance électronique ou de contrôle judiciaire, mesures non suffisamment coercitives et qui en tout état de cause ne permettent pas d'apaiser le trouble à l'ordre public ; que la détention provisoire est l'unique moyen : d'empêcher une pression sur les témoins, de prévenir le renouvellement de l'infraction, de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public causé par l'infraction en raison de sa gravité, des circonstances de sa commission, de l'importance du préjudice causé ;
"aux motifs adoptés qu'il convient d'éviter tout risque de pression sur les témoins dans la perspective d'une éventuelle audience de cour d'assises, la procédure étant orale et d'éviter le renouvellement de l'infraction compte tenu de ces éléments de faits et de personnalité ; qu'un placement sous contrôle judiciaire ou sous bracelet électronique serait insuffisant à y parer ne serait-ce qu'en raison de l'existence des moyens modernes de télécommunication ; que l'ordre public est troublé de manière durable s'agissant du meurtre d'un jeune étudiant au cours d'une soirée alcoolisée, tué sans raison en pleine rue, commis au surplus dans une ville universitaire où les alcoolisations massives de jeunes étudiants se banalisent ; que la détention provisoire de M. X... est l'unique moyen, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs suivants : de garantir le maintien à la disposition de la justice ; de prévenir le renouvellement de l'infraction ; de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de la commission de l'infraction, l'importance du préjudice causé par l'infraction ;
"1°) alors qu'aucun risque effectif et concret de pression sur les témoins, propre aux circonstances particulières de l'espèce et à la personne de M. X..., n'est caractérisé non plus que le moindre risque de fuite ;
"2°) alors que le trouble exceptionnel actuellement causé par l'infraction doit s'apprécier au jour où les juges d'appel ont statué ; que l'actualité persistante du trouble exceptionnel causé à l'ordre public n'est pas constatée par l'arrêt au jour de la décision rendue en appel ;
"3°) alors que dans le mémoire régulièrement déposé et visé, la défense faisaient valoir, offre de preuve à l'appui, que M. X... avait une conscience aiguë et douloureuse de sa culpabilité, que le professeur Z... soulignait dans son expertise que «lors de son entretien, il présentait un soubassement dépressif réactionnel non seulement du fait d'une juste appréciation de la gravité des conséquences de son comportement par rapport à la victime mais également par rapport à son milieu familial et aux conséquences désastreuses pour lui », qu'il avait poursuivi ses études en détention, soutenu et accompagné par ses professeurs et amis étudiants, avait pu passer les examens nécessaires à l'obtention de son master I, avait pu obtenir, avec le soutien de ses professeurs, le stage nécessaire à la validation de ce master et à la préservation de ses acquis universitaires, et qu'il serait logé à proximité de son lieu de stage, entouré et suivi régulièrement par ses proches ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces éléments, de nature à écarter le risque de renouvellement de l'infraction et à justifier du caractère suffisant d'une assignation à résidence sous surveillance électronique assortie d'un contrôle judiciaire, la chambre de l'instruction n'a pas suffisamment motivé sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et de l'ordonnance qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction s'est déterminée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Buisson conseiller rapporteur, Mme Guirimand conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Téplier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-87023
Date de la décision : 08/01/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse, 16 octobre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 jan. 2013, pourvoi n°12-87023


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.87023
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