LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses huit branches, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 28 juin 2011), que M. X... et Mme Y... se sont mariés, le 5 juin 1970 ; que le juge aux affaires familiales, par décision du 5 novembre 2004, a prononcé leur divorce et a ordonné avant dire droit une mesure d'expertise sur le montant de la prestation compensatoire ;
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de limiter à 180 000 euros la somme due par M. X... à titre de prestation compensatoire ;
Attendu que, sous couvert de griefs non fondés de violation de l'article 1134 du code civil, manque de base légale et défaut de motifs, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, les appréciations des juges d'appel, qui n'étaient pas tenus de répondre au détail de l'argumentation des parties et qui ont souverainement estimé, au vu de l'ensemble des éléments versés aux débats, que la disparité créée dans les conditions de vie respectives des époux par la rupture du mariage au détriment de l'épouse justifiait l'octroi à celle-ci d'une prestation compensatoire d'un montant de 180 000 euros ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme Y...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR limité à 180 000 euros la somme due par Monsieur X... à Madame Y... à titre de prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QUE les époux sont tous les deux âgés de 62 ans ; qu'ils sont mariés depuis 31 ans, la vie commune dans le mariage ayant duré plus de 20 ans ; qu'ils ont eu deux enfants actuellement majeurs ; que Monsieur X... perçoit des retraites de la CRAV pour 1 111 euros, de la CGME pour 967 euros et de la CGIS pour 386 euros, soit un total de 2 465 euros par mois ; qu'il est propriétaire en propre d'un immeuble... et d'une villa au Sénégal qu'il estime à 80 000 euros ; qu'il perçoit un loyer mensuel de 620 euros d'un locataire de SCHILTIGHEIM ; qu'il est propriétaire en indivision pour un quart d'un immeuble situé à REICHSTETT ; qu'il a cédé ses parts de sa Société DECOPEINT à son fils Gilles mais que les 400 000 euros restant à payer ont été saisis le 7 mai 2004 par Madame Y... ; qu'il a néanmoins perçu 100 000 euros sous forme de rente jusqu'en juin 2007 ; qu'il a été condamné en première instance à payer la somme de 298 184 euros à son fils Gilles et a fait l'objet d'un redressement fiscal qu'il conteste pour 308 328 euros, au titre de ses revenus au Sénégal ; qu'il a fait des investissements importants au Sénégal dans le cadre d'un GIE l'ENVOL qui a été liquidé et dans lequel il aurait perdu 260 000 euros ; qu'il a acquis un bateau de 92 750 euros ; qu'il est remarié et supporte la charge de deux enfants ; que Madame Y... perçoit des retraites de la CRAV de 1 153 euros et de caisses complémentaires pour 292 euros, soit un total mensuel de ares sur laquelle a été bâti le domicile conjugal ; que les époux sont propriétaires sous le régime de la communauté de nombreux biens immobiliers ; qu'ils sont ainsi propriétaires d'un terrain à MITELFELD, d'une SCI LES SARCELLES sur laquelle il reste un lot évalué par Madame Y... à 150 000 euros, d'une SCI SOGEBEL évaluée à 284 000 euros, d'un bien à PORT BARCARES cédé pour 75 000 euros bloqués chez le notaire sur lequel il resterait 39 456 euros, et d'un immeuble à GRIES évalué à 600 000 euros en 2004, par Maître Z..., notaire chargé par le premier juge d'évaluer les patrimoines respectifs des époux ; que Madame Y... produit des devis de 2007 selon lesquels la remise en parfait état de cet immeuble nécessiterait pour 143 633 euros de travaux, mais sa valeur en serait alors plus importante ; que les époux sont également propriétaires en communauté de deux villas au Sénégal dans le cadre d'une SCI LA MARINA DE SALY ; que la valeur des biens, les revenus et les charges y afférentes, et la part de chacune des parties après la liquidation de la communauté sont âprement discutés par les parties qui fournissent des éléments contradictoires qui ont évolué au fil des années ; qu'il est difficile d'évaluer les biens situés au Sénégal ; que Maître Z... n'est pas arrivé à conclure sur ces questions posées par le premier juge au terme de 34 mois de travail ; que le notaire commis par le Tribunal de BRUMATH, Maître A..., a dû établir un procès-verbal de difficulté le 4 septembre 2008 ; que le partage de la communauté des époux ne relève pas de la compétence du juge aux affaires familiales, mais les montants devant revenir à chacun des époux peuvent être évalués au minimum à 575 000 euros ; que chacun des époux fait face aux charges de la vie courante, sans particularités remarquables ; qu'en considération de l'ensemble de ces éléments, la disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives des époux au détriment de Madame Y... tant en revenu que surtout en patrimoine justifie la mise à la charge de Monsieur X... d'une prestation compensatoire de 180 000 euros, au total, à l'exclusion d'attribution complémentaire de la totale propriété du domicile conjugal ; que Madame Y... ne justifie pas d'un préjudice consécutif à la production de documents par Monsieur X... et doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts ;
1°/ ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les éléments de preuve soumis à son examen ; que dans sa déclaration sur l'honneur du 1er septembre 2010, Monsieur X... avait indiqué que son patrimoine propre était estimé à 247 000 euros, soit 167 000 euros pour son immeuble au Sénégal et 80 000 euros pour son immeuble rue ... à SCHILTIGHEIM ; qu'en retenant en conséquence que Monsieur X... « est propriétaire en propre d'un immeuble... et d'une villa au Sénégal qu'il estime à 80 000 euros », la Cour d'appel a dénaturé la déclaration sur l'honneur précitée, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2°/ ALORS QU'il résultait d'une attestation établie par Monsieur Gilles X... (fils de monsieur Gérard X...), le 7 novembre 2007 que Gérard X... avait perçu, au titre de la cession de parts de la Société DECOPEINT, la somme de 600 175 euros (après déduction de la somme de 400 000 euros saisie par Madame Y...) ; qu'en énonçant dès lors qu'il avait « perçu 100 000 euros », la Cour d'appel a dénaturé l'attestation précitée, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
3°/ ALORS QUE Madame Y... avait régulièrement versé aux débats un jugement du Tribunal de grande instance de STRASBOURG du 28 janvier 2010 aux termes duquel les Sociétés FINANCIERE GW et DECOPEINT (dont Monsieur Gilles X..., le fils, était président-directeur général délégué) étaient déboutées de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de Monsieur Gérard X..., celui-ci se voyant en outre octroyer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; qu'en relevant dès lors qu'« il a été condamné en première instance à payer la somme de 298 184 euros à son fils Gilles », sans viser ni analyser la pièce sur laquelle elle se fondait pour procéder à une telle affirmation, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°/ ALORS QUE la circonstance que Monsieur X... ait fait l'objet d'un redressement fiscal pour 308 328 euros – au surplus contesté – au titre de revenus qu'il avait perçus au Sénégal était sans aucune incidence sur l'appréciation de la disparité créée par le divorce ; qu'en se fondant dès lors sur cette somme pour apprécier la situation financière de Monsieur X... et, partant, la disparité dans les conditions de vie respectives des parties, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 271 du Code civil ;
5°/ ALORS QUE le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; que pour examiner la situation financière de Monsieur X..., la Cour d'appel a retenu qu'« il a fait des investissements importants au Sénégal dans le cadre d'un GIE l'ENVOL qui a été liquidé et dans lequel il aurait perdu 260 000 euros » ; qu'en statuant ainsi par voie de simple affirmation, sans viser ni même analyser les éléments de preuve servant de fondement à sa décision sur ce point, la Cour d'appel a derechef violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
6°/ ALORS QUE Monsieur X... avait versé aux débats cinq déclarations sur l'honneur dont deux respectivement en date des 10 janvier 2009 et 1er septembre 2010 ; que dans la première, il déclarait avoir un enfant de neuf ans à charge tandis que dans la seconde, postérieure de vingt mois à la précédente, il déclarait avoir à sa charge deux enfants de neuf ans ; qu'en affirmant encore que Monsieur X... « supporte la charge de deux enfants » sans examiner la déclaration sur l'honneur dans laquelle il déclarait n'en avoir qu'un, la Cour d'appel a encore violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
7°/ ALORS QU'il résultait des pièces régulièrement versées aux débats par Madame Y... (bordereau de communication de pièces, pièce n° 14) que le montant total de la retraite qu'elle percevait s'élevait à 1 157 euros dont 864, 43 euros de la CRAV et 292, 80 euros de la retraite complémentaire ; qu'elle avait dûment rappelé le montant total de sa retraite et le détail de celle-ci dans ses écritures d'appel (p. 11) ; qu'en énonçant en conséquence que Madame Y... perçoit, au titre de sa retraite, « un total mensuel de 1 445 euros », la Cour d'appel a dénaturé le décompte établi par les caisses de retraite, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
8°/ ALORS QUE Madame Y... avait expressément fait valoir que Monsieur X... avait racheté et encaissé deux assurancesvie de la communauté ; qu'en s'abstenant de répondre à ses conclusions tendant à établir que le patrimoine de Monsieur X... était plus important que celui décrit dans sa déclaration sur l'honneur, la Cour d'appel a derechef violé l'article 455 du Code de procédure civile.