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19/12/2012 | FRANCE | N°11-24307

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 19 décembre 2012, 11-24307


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens, réunis, ci-après annexés :
Attendu, qu'ayant relevé à bon droit que le préteur de deniers n'avait pas l'obligation de requalifier le contrat qui lui était présenté, mais devait avertir l'emprunteur des risques pouvant résulter de l'absence de garantie résultant du contrat proposé, la cour d'appel a justement retenu, sans modifier l'objet du litige, que la CRCAM avait manqué à son obligation de renseignement sur ce point et que cette faute avait causé aux époux X... un pr

éjudice dont elle a souverainement apprécié le montant ;
D'où il suit que...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens, réunis, ci-après annexés :
Attendu, qu'ayant relevé à bon droit que le préteur de deniers n'avait pas l'obligation de requalifier le contrat qui lui était présenté, mais devait avertir l'emprunteur des risques pouvant résulter de l'absence de garantie résultant du contrat proposé, la cour d'appel a justement retenu, sans modifier l'objet du litige, que la CRCAM avait manqué à son obligation de renseignement sur ce point et que cette faute avait causé aux époux X... un préjudice dont elle a souverainement apprécié le montant ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux X... à payer à la caisse régionale de crédit agricole mutuel de Franche-Comté, la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des époux X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour les époux X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité la réparation du préjudice matériel de Monsieur et Madame X... à 71200 euros et de les avoir déboutés du surplus de leur demande ;
AUX MOTIFS QUE « Dès lors, la convention ainsi conclue devait être soumise aux dispositions d'ordre public de l'article L 231-2 du même code, et en particulier comporter la justification des garanties légales de livraison et le remboursement apportées par le constructeur. L'article 231-10 fait obligation au prêteur de vérifier, avant d'émettre une offre de prêt destinée au maître de l'ouvrage, que le contrat contient des énonciations obligatoires au moment où l'acte lui est transmis. Si ce texte ne met pas à la charge du prêteur l'obligation de requalifier le contrat qui lui est soumis, il ne le dispense pas de son obligation de renseignement et de conseil à l'égard du maître de l'ouvrage à qui il fait une offre de prêt : à cet égard, le CREDIT AGRICOLE ne saurait prétendre avoir exécuté cette obligation du simple fait que les époux X... ont signé le 16 novembre 2006 une " attestation sur l'honneur " aux termes de laquelle ils ont certifié et attesté que " la loi du 19 décembre 1990 relative au contrat de construction de maison individuelle ne s'applique pas et qu'aucun contrat de construction ne sera établie " ; en effet la banque tenue d'un devoir de conseil et d'information ne saurait se contenter des déclarations du maître d'ouvrage, profane en la matière ; s'il ne lui appartient pas de s'immiscer dans la convention passée entre l'accédant à la propriété et son co-contractant, et encore moins de conseiller à l'accédant tel cadre contractuel plutôt que tel autre, le prêteur a au moins la capacité de constater, au vu des éléments d'information qu'il doit recueillir (origine du plan, nature des prestations prévues à partir du devis) que les modalités de la convention choisie privent le maître de l'ouvrage de la protection légale dont il devrait bénéficier-et de l'en avertir, ainsi que de tirer toutes conséquences utiles pour lui-même quant à l'octroi du financement sollicité. Le CREDIT AGRICOLE, en l'espèce, était d'autant plus contraint de procéder à une telle analyse, qu'il a participé à l'élaboration le 10 juin 2005 de la charte dite La Maison et la Loi : celle-ci prévoit expressément que les établissements de crédit signataires s'impliquent dans une " démarche destinée à favoriser auprès des futurs accédants à la propriété la bonne connaissance de leurs droits ", et s'engagent " à réaliser un examen des documents fournis à l'appui d'une demande de financement d'une maison individuelle pour vérifier la nature exacte du contrat liant le client et son futur constructeur. Il en résulte que le CREDIT AGRICOLE a, vis-à-vis des époux X..., manqué à son obligation de conseil et de renseignement. Les appelants sollicitent en réparation la somme de 166. 544, 83 € correspondant au coût de l'achèvement de la maison, des pénalités de retard, de l'absence d'assurances dommages-ouvrage, aux conséquences financières (intérêts injustifiés, loyers, frais de cautionnement hypothécaire, charges d'entretien, surcoût sur certains lots), et au préjudice moral. Le dommage subi par les époux X... du fait d'un manquement de la banque qui les a privés de la possibilité de ne pas souscrire un contrat dépourvu de toute protection, réside non pas dans le coût de la construction réalisée en définitive par la Société GARDAVAUX HABITATIONS, mais dans la perte de la somme versée à Hervé Y..., pour laquelle ils n'ont pas bénéficié d'une garantie de remboursement-soit 71. 200 €, montant réglé après l'intervention du CREDIT AGRICOLE. Le retard dans la construction en revanche, comme le règlement d'intérêts dits intercalaires, l'obligation de demeurer locataires et de supporter des frais financiers ou autres ne procèdent pas de la faute commise par le CREDIT AGRICOLE, mais du comportement du co-contractant seul. Il est difficile de comprendre sur quel fondement les époux X... réclament paiement d'un montant de 7. 650 euros correspondant à l'assurance dommages-ouvrage s'agissant d'une dépense qu'ils n'ont pas engagée » (arrêt pp. 3-4) ;
1/ ALORS QUE l'article L. 231-6 du Code de la construction et de l'habitation couvre le maître de l'ouvrage contre les risques d'inexécution ou de mauvaise exécution des travaux prévus au contrat de construction d'une maison individuelle et qu'il est interdit au prêteur de débloquer des fonds sans avoir eu communication de l'attestation de garantie de livraison ; qu'en l'espèce, après avoir retenu que le contrat de construction conclu par les époux X... était soumis aux dispositions d'ordre public du Code de la construction et de l'habitation, et doit comporter la justification d'une garantie de livraison et constaté que le CREDIT AGRICOLE avait débloqué les fonds nécessaires à l'exécution du contrat de construction sans avoir communication de l'attestation de garantie, la cour d'appel ne pouvait juger que la banque avait manqué à un simple devoir de conseil et d'information sans violer les articles L. 231-1, L. 231-2, L. 231-6 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble, les articles 1142 et 1147 du Code civil ;
2/ ALORS QUE la garantie de livraison a pour objet de couvrir l'ensemble des surcoûts des emprunteurs suite à la défaillance du constructeur et la banque doit vérifier l'existence de la garantie de livraison avant de débloquer les fonds ; que pour limiter la réparation due aux époux X..., la cour d'appel a énoncé que le manquement de la banque les a privés de la possibilité de ne pas souscrire un contrat dépourvu de toute protection et que leur préjudice réside non pas dans le coût de la construction définitive, mais dans la perte de la somme versée au constructeur défaillant, pour laquelle ils n'ont pas bénéficié d'une garantie de remboursement, quand la banque devait réparer l'ensemble des dommages liés à la souscription et à l'exécution d'un contrat non conforme aux dispositions légales impératives, la cour d'appel, en statuant ainsi, a violé les articles L. 231-1, L. 231-6 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 du Code civil ;
3/ ALORS QUE, la banque qui prive fautivement l'emprunteur de la garantie de livraison dans un contrat de construction d'une maison individuelle doit en réparer tous les dommages y afférents ; qu'en l'espèce il est constant qu'en émettant une offre de prêt puis en débloquant les fonds en l'absence d'une garantie de livraison, la banque a seule permis aux emprunteurs de s'engager dans la construction litigieuse sans bénéficier de la protection d'ordre public du Code de la construction et de l'habitation, et elle a été ainsi à l'origine de l'intégralité du préjudice qu'ils ont subi ; qu'en énonçant que les surcoûts engagés par les EPOUX X... ne procèdent pas de la faute commise par le CREDIT AGRICOLE mais du comportement du cocontractant seul, la cour d'appel a violé les articles L. 231-2, L. 231-6, L. 231-10, du Code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 1147 du Code civil ;
4/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, la banque qui prive fautivement l'emprunteur dans un contrat de construction d'une maison individuelle de la garantie de livraison doit en réparer tous les dommages y afférents ; qu'en l'espèce la cour d'appel ne pouvait limiter la réparation due aux époux X... en se bornant à énoncer que le retard dans la construction, le règlement d'intérêts dits intercalaires, l'obligation de demeurer locataires ne procèdent pas de la faute commise par le CREDIT AGRICOLE, mais du comportement du co-contractant seul, sans rechercher si l'absence de garantie légale de l'article L. 231-6 du Code de la construction et de l'habitation n'avait pas sa cause dans le seul manquement de la banque, et sans expliquer en quoi le co-contractant était seul responsable des dommages subis par les emprunteurs entachant ainsi sa décision d'un manque de base légale au regard des articles L. 231-6 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble, l'article 1147 du Code civil ;
5/ ALORS ET A TITRE SUBSIDIAIRE QUE même si la faute de la banque devait s'analyser en un manquement à son obligation de conseil et d'information, elle impliquerait une perte de chance de conclure un contrat conforme aux dispositions légales impératives c'est à dire permettant aux emprunteurs de conclure un contrat sécurisé ; qu'en l'espèce, dès lors qu'il est constant que les époux X... n'ont pas bénéficié de la protection légale impérative leur assurant une garantie intégrale de la réalisation de l'opération litigieuse jusqu'à son terme, la cour d'appel qui a dit que leur dommage était simplement la perte de chance de ne pas souscrire un contrat dépourvu de toute protection, quand la faute de la banque leur a fait perdre une chance de conclure un contrat conforme à l'ordre public de protection, a violé les articles L. 231-2 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation, ensemble, l'article 1147 du Code civil ;
6/ ALORS ET A TITRE SUBSIDIAIRE ENFIN QUE, les dispositions impératives du Code de la construction de l'habitation ont pour objet de protéger les emprunteurs contre tout risque d'insolvabilité du constructeur et obligent la banque à vérifier qu'ils disposent d'une garantie d'achèvement de travaux ; qu'à supposer même que la banque ne soit débitrice que d'une obligation de conseil et d'information, la cour d'appel ne pouvait limiter la réparation du préjudice subi par les époux X... quand la banque devait les garantir contre tout risque de surcoût jusqu'à l'achèvement de la construction, indemniser le retard et les conséquences d'un paiement anticipé en application de l'article L 231-6 du Code de la construction et de l'habitation, de sorte que la banque devait réparer le préjudice lié à la souscription d'un contrat non conforme aux articles L. 231-2, L 231-6 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé ces textes, ensemble l'article 1147 du Code civil ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité la réparation du préjudice matériel de Monsieur et Madame X... à 71200 euros et de les avoir déboutés du surplus de leur demande ;
AUX MOTIFS QU'« il est difficile de comprendre sur quel fondement les époux X... réclament paiement d'un montant de 7. 650 euros correspondant à l'assurance dommages-ouvrage s'agissant d'une dépense qu'ils n'ont pas engagée » (arrêt p. 4) ;
1/ ALORS QUE, le juge doit trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et que le Code de la construction et de l'habitation oblige le prêteur à n'émettre une offre de prêt qu'après avoir vérifié que le contrat de construction comporte la référence à une assurance dommages-ouvrage souscrite par le maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce, dès lors que la cour d'appel constate que le CREDIT AGRICOLE a émis une offre de prêt sans vérifier la mention de la référence de l'assurance dommages-ouvrage des emprunteurs, elle ne pouvait, pour débouter les époux X... de leur demande, se borner à énoncer qu'il est difficile de comprendre sur quel fondement ils réclamaient paiement d'un montant de 7. 560 euros correspondant à l'assurance dommages-ouvrage, quand ils se prévalaient expressément des dispositions des articles L. 231-1 et s. du Code de la construction dont la cour d'appel devait faire application ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile, ensemble les articles L. 231-1, L. 231-6 et L. 231-10 du Code de la construction et de l'habitation ;
2/ ALORS QUE, le juge est tenu de respecter les termes du litige ; qu'en l'espèce les époux X... demandaient réparation de leur préjudice du fait de la méconnaissance par la banque de son obligation de ne pas émettre une offre de prêt en l'absence de référence à l'assurance dommages-ouvrage conformément aux dispositions impératives du Code de la construction et de l'habitation ; qu'en énonçant pour débouter les époux X... de leur demande en paiement d'un montant correspondant à l'assurance dommages-ouvrage qu'il est difficile de comprendre sur quel fondement les époux X... réclament paiement d'un montant de 7. 560 euros correspondant à l'assurance dommages-ouvrage, quand leurs conclusions visaient expressément les articles applicables du Code de la construction et de l'habitation à l'appui de leurs prétentions, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-24307
Date de la décision : 19/12/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 22 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 19 déc. 2012, pourvoi n°11-24307


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.24307
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