LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 mai 2011), que Mme X...a été engagée par contrat à durée indéterminée du 16 août 2000 par la société Lundbeck en qualité de directeur régional spécialiste ; qu'elle a été licenciée le 20 septembre 2007 et a saisi le conseil de prud'homme pour contester cette décision et solliciter diverses indemnités ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que, tenu de motiver sa décision, le juge ne peut déduire la solution du litige du seul exposé des prétentions des parties sans fournir aucune motivation propre ; qu'en se bornant à déduire l'absence de toute mauvaise gestion de la réunion d'information médicale tenue en octobre 2006 du seul exposé des moyens respectifs des parties, sans apprécier, par une motivation propre, la valeur respective de ceux-ci, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, la société Lundbeck faisait valoir que la réunion organisée par Mme X...le week-end des 7 et 8 octobre 2006 ne répondait pas aux exigences de l'article L. 4113-6 du code de la santé publique dès lors que seule la journée du samedi avait réellement été consacrée à la communication sur un thème scientifique et reprochait à la salariée de l'avoir exposée au risque que la prise en charge de ce séjour soit analysée en un avantage en nature prohibé et pénalement sanctionné ; qu'en laissant ce moyen déterminant sans réponse, la cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que dans ses conclusions d'appel, la société Lundbeck exposait qu'en ce qui concerne la réunion médicale du 3 mai 2007, la salariée était de mauvaise foi lorsqu'elle mettait en cause l'existence d'une obligation déclarative pour les intervenants n'appartenant pas au corps médical ; qu'au soutien de ce moyen, l'employeur produisait une déclaration faite à l'instance ordinale portant sur l'intervention d'un philosophe ; qu'en considérant néanmoins que Mme X...observait, sans être contredite, que les prestations réalisées par M. Y..., professeur de photographie, ne relevaient d'aucune des deux activités soumises à déclaration, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Lundbeck et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu que le pourvoi ne tend qu'à remettre en cause l'exercice par la cour d'appel, qui a statué par une décision motivée répondant à des conclusions dont elle a souverainement apprécié la portée, des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lundbeck aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Lundbeck et la condamne à payer à Mme X...la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Lundbeck
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de Mme X...était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'il ressort de la lettre de licenciement que trois griefs sont invoqués à l'encontre de la salariée :- sa mauvaise gestion des réunions d'information médicales dites RIM et le non respect des DMOS (diverses mesures d'ordre social) en vigueur dans l'entreprise,- un turnover important au sein des salariés de la région Ile-de-France dont elle avait la responsabilité,- le remboursement sans autorisation d'un voyage personnel ; que c'est en vain que Mme X...se prévaut de la prescription des faits qui lui sont reprochés s'agissant des deux premiers griefs qui ne s'analysent pas en des fautes, comme le soutient à juste titre la société Lundbeck, mais en une mauvaise exécution prétendue de ses obligations contractuelles et ainsi en une insuffisance professionnelle ; quant au troisième grief, qui revêt incontestablement un caractère disciplinaire, il n'est pas établi puisque Mme X...justifie par un message électronique de Mme A...du 16 février 2007 qu'elle avait obtenu l'autorisation requise pour agir de la sorte ; que s'agissant de la mauvaise gestion des réunions médicales d'information et du non respect des règles DMOS en vigueur dans l'entreprise, la société Lundbeck se réfère à trois réunions tenues en octobre 2006, mai 2007 et juin 2007 ; que Mme X...rappelle que les DMOS sont les dispositions régissant les relations entre les médecins et l'industrie pharmaceutique, que l'article L. 4113-6 du code de la santé publique prohibe le fait, pour les entreprises pharmaceutiques de procurer ou de proposer des avantages en nature ou en espèce, sous quelque forme que ce soit, d'une façon directe ou indirecte, aux membres des professions médicales, les deuxième et troisième alinéas de cet article prévoyant toutefois des exceptions à cette interdiction, sous réserve de déclaration préalable au conseil de l'ordre des médecins dans deux cas :- lorsque les avantages en question sont perçus par les professionnels de santé en contrepartie d'activités de recherche ou d'évaluation scientifique,- lorsque les avantages consistent en une manifestation dite d'hospitalité offerte lors de manifestations de promotion ou lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel et scientifique, à condition que cette hospitalité soit d'un niveau raisonnable et limitée à l'objectif professionnel et scientifique principal de la manifestation et ne soit pas étendue à des personnes autres que les professionnels directement concernés ; que les réunions d'information médicales sont considérées comme des hospitalités offertes à l'occasion de manifestations à caractère professionnel et scientifique qui doivent faire l'objet de déclarations dites DMOS contenant la lettre d'invitation, le programme de la manifestation, la liste nominative des professionnels de santé invités, l'entreprise organisatrice devant communiquer la liste définitive des professionnels de santé invités, l'entreprise organisatrice devant communiquer la liste définitive des professionnels ayant répondu favorablement la veille de la manifestations, la nature ou le montant de chacune des prestations prises en charge à l'occasion de la manifestation considérée ; que la déclaration DMOS prévue par la société Lundbeck permet à l'organisateur de la réunion de renseigner le service compétent sur ces différents éléments afin qu'il effectue la déclaration auprès du conseil de l'ordre ; qu'au regard de ces éléments, la société Lundbeck n'établit pas en quoi la salariée n'aurait pas respecté ces règles et fait ainsi courir des risques à l'entreprise, s'agissant de la réunion d'information médicale du 14 juin 2007 pour laquelle elle lui reproche d'avoir utilisé des cartons d'invitation non soumis à l'approbation de la direction des affaires pharmaceutiques et le fait que le nombre de participants déclarés invités était inférieur à celui indiqué dans les devis qu'elle avait demandés ; qu'en effet, en l'absence de production du carton d'invitation litigieux, la salariée fait valoir à bon droit qu'il est impossible de vérifier s'il est conforme ou non aux modèles de la société Lundbeck ; que, quant au fait qu'elle aurait engagé des frais pour 125 participants alors que sur la liste des invités validée par le conseil de l'ordre figuraient seulement 85 médecins, la salariée établit avoir fait figurer le 17 mars 2007 dans le logiciel de gestion de la société Teams, le nom des 125 participants ayant indiqué leur présence, validé cette information le 6 avril suivant, ce qui l'a conduite à commander un buffet pour 125 personnes en mai 2007 ; qu'elle observe que la feuille d'émargement reprend les noms de ces 125 personnes et qu'elle ne saurait être responsable des 43 défections effectivement constatées qu'elle a mentionnées sur le logiciel Teams le 27 juin suivant et qu'elle a également rappelé par message électronique du même jour ; que, s'agissant de la réunion d'information médicale organisée en octobre 2006, la société Lundbeck soutient que le programme qui avait été déclaré n'a pas été suivi puisque les ateliers scientifiques n'ont pas eu lieu, que le compte-rendu indique seulement qu'au moment du déjeuner, un point a été fait sur les données pharmacologiques du Seroplex et ne mentionne pas que les données pharmacologiques et cliniques de l'Escitolopram ont été évoquées ; que Mme X...rappelle que l'Escitalopram est la molécule utilisée par le Seroplex, que l'atelier prévu sur les antidépresseurs a bien eu lieu le dimanche à la suite du déjeuner et que celui relatif aux expressions de la psychiatrie dans la bande-dessinée initialement prévue le dimanche matin à 9 h 30 a eu lieu le samedi ; que, s'agissant de la réunion d'information médicale du 3 mai 2007, les deux factures qui n'ont pas été déclarées au service DMOS mais on été reçues par le service de l'administration des ventes le 21 mai 2007, concernent non pas des médecins mais des prestations réalisées par M. Y..., professeur de photographie et la salariée t observe sans être contredite qu'elles ne relèvent d'aucune des deux activités soumises à déclaration ; que la mauvaise gestion de ces trois réunions médicales et le non-respect des règles liées à la DMOS ne sont pas davantage établis ; qu'en ce qui concerne le « fort turnover » de la région Ile-de-France, Mme X...relève à juste titre qu'il résulte de la pièce 51 de la société Lundbeck qu'en 2007, deux personnes sur dix ont démissionné dans la région dont elle avait la responsabilité soit turnover de 20 % et non de 70 % ; qu'elle produit les attestations de ces deux salariés soit :- M. B...qui déclare que son départ de la société Lundbeck était un choix personnel puisque la proposition qui lui a été faite par une autre société s'analysait en une promotion avec hausse importante de salaire ;- M. C...qui précise ne pas avoir démissionné « à cause de Mme X...ma directrice régionale, mais parce que j'ai eu une opportunité d'évolution de poste » ; qu'elle verse également, outre des articles de presse, une lettre de l'inspection du travail datée certes du 10 janvier 2008 soit postérieure à son licenciement mais qui commence ainsi « au cours de l'année 2007, j'ai reçu de nombreux témoignages de salariés de la société Lundbeck sis 37, avenue Pierre 1er de Serbie, Paris 8ème, me faisant part d'un climat de souffrance au travail au sein de cette entreprise ; Vous avez pu être victime ou témoin d'agissements ayant provoqué une dégradation de vos conditions de travail ou à l'origine de votre départ de la société. Vous trouverez par conséquent ci-joint un questionnaire … ; » ; que, s'agissant du fait qu'elle n'essayait pas de « développer ses collaborateurs », elle produit aux débats des attestations d'anciens collaborateurs contredisant de tels propos :- Mme F... qui déclare notamment que Mme X...était une directrice des plus professionnelles de par son talent managérial, ses compétences partagées lors des accompagnements sur le terrain, son implication et son exigence lors des séminaires, sa rigueur administrative, s'est attachée à développer ses compétences tout au long de leurs quatre années de travail en commun ;- Mme D...qui précise que Mme X...s'est toujours attachée à faire évoluer ses collaborateurs ;- M. B...qui atteste que la promotion dont il a bénéficié au sein d'une autre société et qui a justifié sa démission était en partie due à l'appelante « qui a tout mis en oeuvre pour mon développement au sein de Lundbeck : communication, lobbying » ; que Mme E..., médecin responsable formation scientifique et environnement témoigne également de ce que Mme X...« a constamment accordé un intérêt et une attention particulière à son équipe dès leur stage d'intégration à la formation et sur toute la durée, elle restait très attentive à la progression de leur savoir faire, anticipant d'emblée sur leurs besoins en vue de leur développement professionnel … » ;
ALORS, 1°), QUE, tenu de motiver sa décision, le juge ne peut déduire la solution du litige du seul exposé des prétentions des parties sans fournir aucune motivation propre ; qu'en se bornant à déduire l'absence de toute mauvaise gestion de la réunion d'information médicale tenue en octobre 2006 du seul exposé des moyens respectifs des parties, sans apprécier, par une motivation propre, la valeur respective de ceux-ci, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QUE, dans ses conclusions d'appel (pp. 14 et 15), la société Lundbeck faisait valoir que la réunion organisée par Mme X...le week-end des 7 et 8 octobre 2006 ne répondait pas aux exigences de l'article L. 4113-6 du code de la santé publique dès lors que seule la journée du samedi avait réellement été consacrée à la communication sur un thème scientifique et reprochait à la salariée de l'avoir exposée au risque que la prise en charge de ce séjour soit analysée en un avantage en nature prohibé et pénalement sanctionné ; qu'en laissant ce moyen déterminant sans réponse, la cour d'appel a, de nouveau, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 3°) QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 16), la société Lundbeck exposait qu'en ce qui concerne la réunion médicale du 3 mai 2007, la salariée était de mauvaise foi lorsqu'elle mettait en cause l'existence d'une obligation déclarative pour les intervenants n'appartenant pas au corps médical ; qu'au soutien de ce moyen, l'employeur produisait une déclaration faite à l'instance ordinale portant sur l'intervention d'un philosophe ; qu'en considérant néanmoins que Mme X...observait, sans être contredite, que les prestations réalisées par M. Y..., professeur de photographie, ne relevaient d'aucune des deux activités soumises à déclaration, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Lundbeck et violé l'article 4 du code de procédure civile.