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19/12/2012 | FRANCE | N°11-20063

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 décembre 2012, 11-20063


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 25 février 2011), que Mme X...a été engagée le 3 décembre 2001, en qualité de déléguée médicale par l'agence Chambrelant, par contrat à durée déterminée puis par contrat à durée indéterminée ; qu'elle était affectée à la prospection des produits fabriqués et/ ou diffusés par les laboratoires IPRAD pour les zones Ouest et Sud de l'île ; que, le 11 décembre 2008, l'employeur lui a notifié un avertissement ; qu'elle

a saisi le conseil de prud'hommes pour en obtenir l'annulation ainsi que des domma...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 25 février 2011), que Mme X...a été engagée le 3 décembre 2001, en qualité de déléguée médicale par l'agence Chambrelant, par contrat à durée déterminée puis par contrat à durée indéterminée ; qu'elle était affectée à la prospection des produits fabriqués et/ ou diffusés par les laboratoires IPRAD pour les zones Ouest et Sud de l'île ; que, le 11 décembre 2008, l'employeur lui a notifié un avertissement ; qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes pour en obtenir l'annulation ainsi que des dommages-intérêts ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ qu'ayant constaté que sur les trois griefs reprochés à la salariée pour justifier l'avertissement, deux d'entre eux n'étaient pas établis, la cour d'appel aurait dû nécessairement en déduire que la mesure disciplinaire prononcée à l'encontre de la salariée était disproportionnée à la faute commise ; qu'en ne procédant pas à une telle déduction, la cour d'appel a violé les articles L. 1331-1, L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail ;
2°/ que, d'autre part, en tout état de cause, que selon l'article L. 1332-1 du code du travail, aucune sanction ne peut être infligée au salarié sans que celui-ci soit informé dans le même temps et par écrit des griefs retenus contre lui ; que la cour d'appel qui a retenu que le comportement négatif et maladroit adopté par Mme X...lors du diner avait « affecté l'image de l'agence au regard de Philippe Y..., directeur export des laboratoires IPRAD, ébranlant ainsi la relation professionnelle entretenue entre ce dernier et l'employeur », et a déduit de cette seule constatation que l'avertissement litigieux était pleinement justifié et proportionné aux faits reprochés, s'est fondée sur un grief qui n'était pas mentionné dans le courrier informant la salariée de la sanction prononcée à son encontre, en violation des dispositions de l'article L. 1332-1 du code du travail ;
3°/ que, plus subsidiairement, que Philippe Y...indiquait dans sa lettre du 15 décembre 2008 adressée à l'agence Chambrelant rester « extrêmement dubitatif sur l'avenir de cette collaboration professionnelle entre ces deux visiteuses médicales », annonçant que la chef de zone se rendrait « dans les semaines à venir sur l'île afin de vérifier qu'a minima un statu quo est respecté » ; que la cour d'appel, qui a cru pouvoir retenir que le comportement de la salariée avait ébranlé « la relation professionnelle entretenue entre Philippe Y...et l'employeur, si bien qu'il était " extrêmement dubitatif sur l'avenir de cette collaboration " et qu'il missionnerait la chef de zone " afin de vérifier qu'a minima un statu quo est respecté ", pour en déduire que l'avertissement était proportionné au fait reproché, négligeant que la collaboration visée par le client au sein de ce courrier était celle des deux déléguées médicales et non la relation professionnelle entretenue par le client avec l'agence, a dénaturé de la lettre du 15 décembre 2008, en violation de l'article 1134 du code civil, ensemble le principe selon lequel il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ;
4°/ que, très subsidiairement, qu'aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que ces mesures comprennent la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ; qu'ayant évoqué la question de la rétribution sur le stockage de marchandises à son domicile qu'elle assumait depuis plus de deux ans, Mme X...s'était vu adresser par M. Philippe Y...des propos insultants et méprisants (« Tu arrêtes de me parler de fric, Cécile, tu te tais ou tu te tires ») dont la teneur n'était d'ailleurs pas contestée par l'intéressé ; qu'il s'en déduisait que la salariée avait subi une agression verbale de la part d'un client de l'agence, trouvant sa cause dans un manquement de l'employeur à ses obligations d'organisation et de mise en place de moyens adaptés ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'employeur avait été, par son manquement, à l'origine de l'agression verbale subie par la salariée, de sorte que cette dernière ne pouvait à tout le moins faire l'objet d'une sanction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1, ensemble l'article L. 4121-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé, en se fondant sur des griefs dont la salariée avait été informée et par une appréciation souveraine des éléments de preuve qu'elle n'a pas dénaturés, que la salariée avait eu lors d'un dîner professionnel un comportement négatif et maladroit ayant affecté l'image de l'agence, la cour d'appel a pu en déduire que la salariée avait commis une faute et que l'avertissement prononcé était une sanction proportionnée à la faute commise ; que le moyen, irrecevable en sa quatrième branche comme nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme Cécile X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Mademoiselle Cécile X...de ses demandes en annulation de l'avertissement du 11 décembre 2008 ainsi qu'en paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, Aux motifs qu'il n'est pas discuté que la journée du 03 décembre 2008 a été consacrée à la formation de Nathalie Z...par Philippe Y..., en présence de Cécile X...et qu'à l'issue de cette journée, ce dernier a proposé un dîner aux deux délégués médicaux ; qu'il est essentiellement reproché à la salariée d'avoir à cette occasion, tenu un " discours extrêmement désagréable, désobligeant, voire diffamatoire " vis-à-vis de Philippe Y...et de Nathalie Z..., manifesté une volonté " très forte de ne pas respecter les directives validées par l'agence et le laboratoire ", perturbé la sérénité du lieu ; que l'avertissement relevant du pouvoir disciplinaire de l'employeur, il appartient à celui-ci de démontrer le caractère fautif des agissements du salarié ; qu'en défense, Cécile X...affirme avoir fait l'objet d'un avertissement injustifié, reposant sur des faits mensongers qui se sont déroulés dans un cadre privé ; qu'elle affirme que Philippe Y...s'est emporté, en tenant des propos insultants et méprisants ('Tu arrêtes de me parler de fric, Cécile, tu te tais ou tu te tires ") lorsqu'elle a abordé la question d'une rétribution sur le stockage de marchandises à son domicile ; qu'à ce titre, elle produit aux débats l'attestation de Pascal A..., employé de salle au restaurant le " PTI ZINC ", qui déclare " n'avoir pas constaté de nuisances particulières en salle le soir où Mme X...était présente dans le restaurant (...) Et qu'elle a quitté la salle de manière tout à fait normale en saluant poliment l'équipe " ; qu'il ressort de ce témoignage corroboré par les déclarations convergentes de P. Y..., qui admet avoir perdu son calme, et de Nathalie Z..., que la " sérénité des lieux " n'a nullement été perturbée par la salariée elle ; qu'un tel grief est donc écarté ; qu'à l'appui de sa sanction, l'agence CHAMBRELANT verse aux débats la lettre de Philippe Y...du 15 décembre 2008, dans laquelle ce dernier relate l'incident ayant eu lieu lors du dîner ; que selon lui, Cécile X...était " extrêmement négative sur sa prochaine collaboration avec Nathalie Z...", affirmant sa volonté de ne lui " prêter aucune aide " ; qu'il reconnaît avoir perdu son calme " choqué par l'attitude de Cécile X...et lui avoir demandé en termes très directs de quitter la table et de rentrer chez elle " ; que par ailleurs, il ressort du mail envoyé le 1er février 2009 par Nathalie Z...à l'employeur, qu'au cours du dîner, le sujet de la réception des nouveaux échantillons par les délégués médicaux a été abordé et qu'un désaccord est intervenu entre la salariée intimée et elle même à propos du stockage et de la réception desdits échantillons ; qu'ainsi, la cour observe d'abord que si le dîner du 03 décembre 2008 avait au départ un caractère privé, celui-ci a disparu lorsque Philippe Y..., avec l'assentiment de ses invitées, a ouvert explicitement un aparté professionnel, rendant la suite de l'entretien de la même nature ; qu'étant constaté que l'employeur n'a pas articulé de griefs précis et concrets quant à la volonté de Cécile X...de ne pas respecter les directives de l'agence et du laboratoire, ne faisant que stigmatiser l'attitude de la salariée à l'égard du représentant dudit laboratoire, il s'avère cependant, que son comportement négatif et maladroit, lors du dîner dans sa phase professionnelle a affecté l'image de l'agence, au regard de Philippe Y..., directeur Export des laboratoires IPRAD, ébranlant ainsi, la relation professionnelle entretenue entre ce dernier et l'employeur, si bien qu'il indiquait à l'agence dans sa lettre, qu'il était " extrêmement dubitatif sur l'avenir de cette collaboration " et qu'il missionnerait Marie-Sophie B..., chef de zone, " afin de vérifier qu'à minima un statu quo est respecté " ; que cette réaction révélatrice des dégâts provoqués par l'image négative que la salariée intimée a renvoyée à un partenaire essentiel de l'entreprise suffit à fonder l'avertissement litigieux qui est pleinement justifié et proportionné aux faits reprochés ; que dans ces conditions, la décision entreprise est infirmée en ce sens ;

Alors, d'une part, qu'ayant constaté que sur les trois griefs reprochés à la salariée pour justifier l'avertissement, deux d'entre eux n'étaient pas établis, la Cour d'appel aurait dû nécessairement en déduire que la mesure disciplinaire prononcée à l'encontre de la salariée était disproportionnée à la faute commise ; qu'en ne procédant pas à une telle déduction, la Cour d'appel a violé les articles L. 1331-1, L. 1333-1 et L. 1333-2 du Code du travail ;
Alors, d'autre part, en tout état de cause, que selon l'article L. 1332-1 du Code du travail, aucune sanction ne peut être infligée au salarié sans que celui-ci soit informé dans le même temps et par écrit des griefs retenus contre lui ; que la Cour d'appel qui a retenu que le comportement négatif et maladroit adopté par Mademoiselle X...lors du diner avait « affecté l'image de l'agence au regard de Philippe Y..., directeur Export des laboratoires IPRAD, ébranlant ainsi la relation professionnelle entretenue entre ce dernier et l'employeur », et a déduit de cette seule constatation que l'avertissement litigieux était pleinement justifié et proportionné aux faits reprochés, s'est fondée sur un grief qui n'était pas mentionné dans le courrier informant la salariée de la sanction prononcée à son encontre, en violation des dispositions de l'article L. 1332-1 du Code du travail ;
Alors, plus subsidiairement, que Philippe Y...indiquait dans sa lettre du 15 décembre 2008 adressée à l'agence CHAMBRELANT rester « extrêmement dubitatif sur l'avenir de cette collaboration professionnelle entre ces deux visiteuses médicales », annonçant que la chef de zone se rendrait « dans les semaines à venir sur l'île afin de vérifier qu'a minima un statu quo est respecté » ; que la Cour d'appel, qui a cru pouvoir retenir que le comportement de la salariée avait ébranlé « la relation professionnelle entretenue entre Philippe Y...et l'employeur, si bien qu'il était " extrêmement dubitatif sur l'avenir de cette collaboration " et qu'il missionnerait la chef de zone " afin de vérifier qu'a minima un statu quo est respecté ", pour en déduire que l'avertissement était proportionné au fait reproché, négligeant que la collaboration visée par le client au sein de ce courrier était celle des deux déléguées médicales et non la relation professionnelle entretenue par le client avec l'agence, a dénaturé de la lettre du 15 décembre 2008, en violation de l'article 1134 du Code civil, ensemble le principe selon lequel il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ;
Alors, enfin, très subsidiairement, qu'aux termes de l'article L. 4121-1 du Code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que ces mesures comprennent la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ; qu'ayant évoqué la question de la rétribution sur le stockage de marchandises à son domicile qu'elle assumait depuis plus de deux ans, Mademoiselle X...s'était vu adresser par Monsieur Philippe Y...des propos insultants et méprisants (« Tu arrêtes de me parler de fric, Cécile, tu te tais ou tu te tires ») dont la teneur n'était d'ailleurs pas contestée par l'intéressé ; qu'il s'en déduisait que la salariée avait subi une agression verbale de la part d'un client de l'agence, trouvant sa cause dans un manquement de l'employeur à ses obligations d'organisation et de mise en place de moyens adaptés ; qu'en s'abstenant de rechercher si l'employeur avait été, par son manquement, à l'origine de l'agression verbale subie par la salariée, de sorte que cette dernière ne pouvait à tout le moins faire l'objet d'une sanction, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1333-1, ensemble l'article L. 4121-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-20063
Date de la décision : 19/12/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 25 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 déc. 2012, pourvoi n°11-20063


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20063
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