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12/12/2012 | FRANCE | N°11-22382

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 décembre 2012, 11-22382


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 7 juin 2011), qu'engagée le 17 mars 2003 par Mme X..., Mme Y... a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 11 janvier 2005 ; qu'à l'issue d'une visite de reprise en date du 21 mai 2007, le médecin du travail a déclaré la salariée apte sous condition d'aménagement du temps de travail avec reprise progressive sur la base de trois heures par jour ; que cet avis a été réitéré le 11 juin 20

07 ; que le médecin du travail ayant, le 12 juillet 2007, retenu que le poste d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 7 juin 2011), qu'engagée le 17 mars 2003 par Mme X..., Mme Y... a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 11 janvier 2005 ; qu'à l'issue d'une visite de reprise en date du 21 mai 2007, le médecin du travail a déclaré la salariée apte sous condition d'aménagement du temps de travail avec reprise progressive sur la base de trois heures par jour ; que cet avis a été réitéré le 11 juin 2007 ; que le médecin du travail ayant, le 12 juillet 2007, retenu que le poste de travail pouvait être repris à temps complet sans toutefois porter des charges trop lourdes, l'inspecteur du travail a été saisi par la salariée d'un recours à l'encontre de ce dernier avis ; que la salariée, après avoir refusé diverses propositions, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation de son contrat de travail ;

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de cette demande, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en vertu de l'article L. 4624-1 du code du travail, il appartient à l'inspecteur du travail de se prononcer définitivement sur l'aptitude du salarié en cas de difficultés ou désaccords sur l'avis émis par le médecin du travail ; que la décision de l'inspecteur de travail s'impose au juge judiciaire ; qu'en l'espèce, dans sa décision du 14 septembre 2007, l'inspectrice du travail a rejeté la décision d'aptitude à temps complet sans port de charges lourdes du docteur Z... et dit que Mme Y... était apte à reprendre le travail sur un poste aménagé comportant une limitation des horaires (sans dépasser 3 heures par jour), sans port de charges, et comportant une partie des tâches pouvant être effectuées en position assise ; qu'à l'appui de sa décision, elle a notamment retenu que Mme Y... « a été reconnue invalide 1ère catégorie par la caisse primaire d'assurance maladie en date du 1er mai 2007, ce qui correspond à la perte des 2/3 de la capacité de travail, (…) que Mme Y... a, par ailleurs, été reconnue comme travailleur handicapé en date du 1er octobre 2004 avec l'attribution d'une carte « station debout pénible », (…) que les deux avis émis par le docteur Z... en date du 21 mai 2007 et du 11 juin 2007 font référence à l'article R. 241-51-1 du code du travail et donc s'inscrivent dans le cadre d'une inaptitude, (…) que en date du 11 juin 2007 dans un certificat médical remis à Mme Y..., le docteur Z... indique que « celle-ci ne peut plus exercer ses fonctions d'aide soignante, à temps complet, telles qu'elle les exerçait avant son problème de santé et notamment concernant le port de charges ». (…) que l'avis contesté d'aptitude du 12 juillet 2007 à temps complet sans port de charges lourdes a été rendu alors qu'aucun élément nouveau n'apparaît dans le dossier permettant de revenir sur le certificat médical précité concluant à l'inaptitude à temps complet » ; qu'en considérant pourtant que Mme Y... n'avait pas été déclarée inapte à reprendre son ancien poste, la cour d'appel a méconnu la décision de l'inspectrice du travail reconnaissant l'inaptitude de la salariée et violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

2°/ que dans sa décision du 14 septembre 2007, l'inspectrice du travail a retenu que les deux avis émis par le médecin du travail, le docteur Z..., en date du 21 mai 2007 et du 11 juin 2007, faisaient référence à l'article R. 241-51-1 du code du travail (devenu R. 4624-31) et donc s'inscrivaient dans le cadre d'une inaptitude ; qu'il s'ensuit que, comme le faisait valoir la salariée dans ses conclusions d'appel, l'employeur était tenu de reprendre le paiement du salaire à l'issue du délai d'un mois fixé par l'article L. 1226-4 du code du travail, soit à compter du 11 juillet 2007, et elle pouvait se prévaloir du manquement de l'employeur à cette obligation pour solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'en considérant pourtant que l'employeur n'était pas tenu de reprendre le paiement du salaire à compter du 11 juillet 2007 et que, ce dernier n'ayant à un quelconque moment manqué à ses obligations, il ne saurait y avoir lieu à résiliation du contrat à ses torts, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-6 et L. 1226-4 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que l'inspecteur du travail, avait, rejetant le troisième avis du médecin du travail en date du 12 juillet 2007, décidé que la salariée était apte à reprendre le travail sur un poste aménagé comportant une limitation des horaires sans port de charges et comportant une partie des tâches pouvant être effectuées en position assise, la cour d'appel a, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, ni les articles L. 1226-4 et L. 1226-6 du code du travail visant un salarié déclaré inapte, constaté que les deux premiers avis, lesquels, en l'absence de recours, s'imposaient aux parties, faisaient mention de la possibilité d'une reprise progressive du travail sur la base de trois heures et sans port de charge ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le moyen, pris en sa troisième branche, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour Mme Y...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Madame Martine Y... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et de ses demandes en paiement d'une indemnité de licenciement, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'un rappel de salaire ;

AUX MOTIFS QUE, - Sur la rupture du contrat de travail : Madame Y... a fait l'objet d'un arrêt de travail, du 11 janvier 2005 au 21 mai 2007, pour maladie dont l'origine est étrangère à son activité professionnelle. A l'issue de la visite médicale de reprise, ce même jour, le médecin du travail, après avoir constaté que Madame Y... était en état d'invalidité 1 depuis le 1er mai 2007, a émis un avis de reprise progressive possible sur une base journalière de 3 heures et sans port de charge ; le 1er juin 2007, Madame X... a transmis au médecin du travail un projet d'aménagement de poste conforme en tous points à ses préconisations. Le 11 juin 2007, à l'occasion de la seconde visite médicale de rappel, le médecin du travail a confirmé son premier avis. Madame Y... a refusé la proposition d'aménagement de poste la concernant, le 13 juin 2007, compte tenu de la diminution de salaire que cela entraînait. Le 29 juin 2007, Madame X... après s'être rapprochée de la CPAM formulait deux nouvelles propositions à Madame Y... sur 70 % d'un temps complet, maximum autorisé pour que la salariée ne voie pas sa rente d'invalidité amputée. Ces deux propositions qui ne comportaient aucun port de charge ont fait l'objet d'un nouveau refus le 3 juillet 2007 de la part la salariée ; Madame X... a alors sollicité un nouvel examen médical, tout en formulant à Madame Y... une troisième proposition d'aménagement de poste, à temps complet cette fois, par un courrier du 5 juillet 2007, que cette dernière refusait deux jours plus tard. La troisième visite médicale du 12 juillet 2007 a confirmé que « le poste de travail peut être repris à temps complet sans toutefois porter des charges trop lourdes ». Dès le 13 juillet, Madame Y... a fait l'objet d'un nouvel arrêt de travail qui a été régulièrement prolongé jusqu'au 8 octobre 2007. Elle a saisi le même jour l'inspection du travail qui a rejeté « la décision d'aptitude à temps complet sans port de charges lourdes » du médecin du travail ; tout en observant que « Mme Y... est apte à reprendre le travail sur un poste aménagé comportant une limitation des horaires (sans dépasser 3 heures par jour) sans port de charge et comportant une partie des tâches pouvant être effectuées en position assise. » ; lors de la visite de reprise du 3 octobre 2007, le médecin du travail observait : « la salariée ne peut plus reprendre son travail à temps complet. Mais elle pourrait effectivement travailler à temps partiel (3h/j) - inapte à temps complet - apte à un poste aménagé au niveau horaire) ». Le 26 octobre 2007, Madame Y... refusait également la proposition de poste qui en découlait. Il n'apparaît pas que Madame Y... ait contesté les divers avis rendus par le médecin du travail à l'exception de celui du 12 juillet 2007. Contrairement aux affirmations de Mme Y..., l'avis rendu par le médecin du travail, conforme dans son principe à celui de l'inspection du travail, doit s'entendre d'un avis d'aptitude avec réserves et aménagements de poste ; cet avis ne constitue pas une inaptitude, de sorte que l'employeur ne peut aucunement procéder au licenciement de la salariée qui est en droit de refuser, comme elle l'a fait et justement fait remarquer, toute proposition de reclassement emportant modification de son contrat de travail. Madame X... a systématiquement procédé à l'aménagement du poste de travail de Madame Y..., conformément aux préconisations du médecin du travail et aux souhaits de la salariée ; il n'apparaît donc pas, que l'employeur ait, à un quelconque moment, manqué à ses obligations ; dès lors, il ne saurait y avoir lieu à résiliation du contrat à ses torts et la décision du premier juge sera ainsi réformée ; - Sur les autres demandes de Madame Y... : Madame Y..., sans en préciser le fondement juridique, prétend à un rappel de salaire pour la période du 11 juillet 2007 au mois de septembre 2008 inclus, en reprochant à l'employeur de ne pas avoir repris le paiement des salaires. Madame Y... n'a pas été déclarée inapte à l'issue de la visite médicale de reprise du 11 juin 2007 ; elle ne l'a pas davantage été lors de la dernière visite du 3 octobre 2007 et elle s'est retrouvée en arrêt de travail entre le 13 juillet et le 8 octobre 2007. Il ressort des dispositions de l'article 1226-4 du Code du travail que ce n'est que dans l'hypothèse où le salarié a été médicalement déclaré inapte, que l'employeur qui n'a procédé ni à son reclassement ni à son licenciement a l'obligation de reprendre le paiement du salaire dans le délai d'un mois qui suit la seconde visite médicale de reprise ou la seule et unique, en cas de danger grave et immédiat. Tel n'est manifestement pas la situation de Madame Y... qui se verra déboutée de ses prétentions. Madame Y... sollicite enfin le paiement de diverses sommes pour licenciement irrégulier et sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'une indemnité de licenciement ; elle poursuit encore la remise sous astreinte des documents de fin de contrat et des bulletins de salaire rectifiés. Dès lors que la résiliation du contrat aux torts de l'employeur n'a pas été prononcée, Madame Y... se verra déboutée de l'ensemble de ses prétentions ;

1) ALORS QU'en vertu de l'article L. 4624-1 du Code du travail, il appartient à l'inspecteur du travail de se prononcer définitivement sur l'aptitude du salarié en cas de difficultés ou désaccords sur l'avis émis par le médecin du travail ; que la décision de l'inspecteur de travail s'impose au juge judiciaire ; qu'en l'espèce, dans sa décision du 14 septembre 2007, l'inspectrice du travail a rejeté la décision d'aptitude à temps complet sans port de charges lourdes du docteur Z... et dit que Madame Martine Y... était apte à reprendre le travail sur un poste aménagé comportant une limitation des horaires (sans dépasser 3 heures par jour), sans port de charges, et comportant une partie des tâches pouvant être effectuées en position assise ; qu'à l'appui de sa décision, elle a notamment retenu que Madame Martine Y... « a été reconnue invalide 1ère catégorie par la caisse primaire d'assurance maladie en date du 1er mai 2007 ce qui correspond à la perte des 2/3 de la capacité de travail, (…) que Madame Y... a par ailleurs été reconnue comme travailleur handicapé en date du 1er octobre 2004 avec l'attribution d'une carte « station debout pénible », (…) que les 2 avis émis par le Dr Z... en date du 21 mai 2007 et du 11 juin 2007 font référence à l'article R. 241-51-1 du code du travail et donc s'inscrivent dans le cadre d'une inaptitude, (…) que en date du 11 juin 2007 dans un certificat médical remis à Madame Y..., le Dr Z... indique que « celle-ci ne peut plus exercer ses fonctions d'aide soignante, à temps complet, telles qu'elle les exerçait avant son problème de santé et notamment concernant le port de charges ». (…) que l'avis contesté d'aptitude du 12 juillet 2007 à temps complet sans port de charges lourdes a été rendu alors qu'aucun élément nouveau n'apparaît dans le dossier permettant de revenir sur le certificat médical précité concluant à l'inaptitude à temps complet » ; qu'en considérant pourtant que Madame Martine Y... n'avait pas été déclarée inapte à reprendre son ancien poste, la Cour d'appel a méconnu la décision de l'inspectrice du travail reconnaissant l'inaptitude de la salariée et violé la loi des 16-24 août 1790, ensemble le principe de la séparation des pouvoirs ;

2) ALORS QUE dans sa décision du 14 septembre 2007, l'inspectrice du travail a retenu que les deux avis émis par le médecin du travail, le docteur Z..., en date du 21 mai 2007 et du 11 juin 2007, faisaient référence à l'article R. 241-51-1 du Code du travail (devenu R. 4624-31) et donc s'inscrivaient dans le cadre d'une inaptitude ; qu'il s'ensuit que, comme le faisait valoir la salariée dans ses conclusions d'appel, l'employeur était tenu de reprendre le paiement du salaire à l'issue du délai d'un mois fixé par l'article L. 1226-4 du Code du travail, soit à compter du 11 juillet 2007, et elle pouvait se prévaloir du manquement de l'employeur à cette obligation pour solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'en considérant pourtant que l'employeur n'était pas tenu de reprendre le paiement du salaire à compter du 11 juillet 2007 et que, ce dernier n'ayant à un quelconque moment manqué à ses obligations, il ne saurait y avoir lieu à résiliation du contrat à ses torts, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-6 et L. 1226-4 du Code du travail, ensemble l'article 1184 du Code civil ;

3) ALORS QU'en tout état de cause, il incombait à l'employeur de tirer les conséquences du refus de la salariée d'accepter les propositions de reclassement qui emportaient modification de son contrat de travail, et de procéder à son licenciement ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 07 juin 2011


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 12 déc. 2012, pourvoi n°11-22382

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Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 12/12/2012
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11-22382
Numéro NOR : JURITEXT000026778624 ?
Numéro d'affaire : 11-22382
Numéro de décision : 51202636
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2012-12-12;11.22382 ?
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