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05/12/2012 | FRANCE | N°11-18429

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 décembre 2012, 11-18429


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Attendu qu'engagé le 9 octobre 2002 par la société Sommer en qualité d'ouvrier boucher, M. X... a été licencié pour faute grave par une lettre du 22 février 2007 pour insubordination et comportement agressif et menaçant ;
Attendu que pour dire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et

condamner en conséquence l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour lic...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;
Attendu qu'engagé le 9 octobre 2002 par la société Sommer en qualité d'ouvrier boucher, M. X... a été licencié pour faute grave par une lettre du 22 février 2007 pour insubordination et comportement agressif et menaçant ;
Attendu que pour dire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner en conséquence l'employeur au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, outre l'indemnité légale de licenciement et une indemnité de procédure, l'arrêt retient que la société Sommer ne présente pas la lettre qu'elle a reproduite comme étant datée du 29 janvier 2007 et signée par le supérieur hiérarchique du salarié, qu'elle présente une autre lettre, certes en date du 29 janvier 2007 et signée par le chef d'atelier M. Y..., mais rédigée en termes différents et qu'en tout cas, elle ne fournit pas la preuve qu'elle a mentionnée dans la lettre de licenciement ;
Qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de la lettre du 29 janvier 2007 invoquée dans les écritures de l'employeur et reproduite dans la lettre de licenciement, déjà communiquée en première instance, et dont la communication en cause d'appel n'avait pas été contestée par le salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile, et 37 de la loi du 10 juillet 1991 rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour la société Somer.
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la société Somerà verser à Monsieur Yusuf X... la somme de 15. 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article L 1235-3 du code du travail, la somme de 3. 152, 04 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 315, 20 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice des congés payés sur préavis, la somme de 702, 12 euros bruts à titre d'indemnité légale de licenciement, la somme de 2. 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné le remboursement à Pôle Emploi, à charge de la société Somer, des indemnités de chômage servies à Monsieur Yusuf X..., et ce dans la limite de six mois d'indemnités, condamné la société Somerà verser à Maître A... la somme de 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette avocate renonce à percevoir la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, et condamné la société Somerà supporter les entiers dépens de première instance et d'appel ;
AUX MOTIFS QUE dès lors que pour donner un effet immédiat à la décision de licenciement et se dispenser du délai-congé, l'employeur a invoqué la faute grave du salarié, il lui appartient d'en apporter la preuve, et ce dans les termes qu'il a énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; en l'espèce, la lettre de licenciement du 22 février 2007 a été notifiée dans les termes suivants : " Depuis plusieurs mois nous devons regretter votre comportement particulièrement agressif tant à l'égard de vos collègues que de vos supérieurs hiérarchiques. Ainsi début février, Monsieur Z... qui était à l'atelier constatait que vous ne travailliez pas et vous a demandé pourquoi. Vous vous êtes alors une fois de plus emporté contre Monsieur Z..., lui déclarant que vous n'étiez pas obligé de travailler. En outre, un des chefs d'atelier qui est aussi votre supérieur hiérarchique nous a indiqué par courrier du 29. 01. 2007 que : " M. X..., refuse systématiquement d'obtempérer. Il ne travaille plus, n'écoute plus les consignes. Quand je lui demande d'effectuer une tâche précise, il me dit de le faire moi-même, qu'il n'a des ordres à recevoir de personne et qu'il n'est pas obligé de travailler. De même son comportement se dégrade de jour en jour, il nous empêche de travailler dans de bonnes conditions. Tous les autres salariés sont perturbés par son comportement. " Votre comportement est constitutif d'une insubordination manifeste. En outre, un de vos collègues, portait à notre connaissance par courrier du 25. 01. 2007 que vous exerciez des menaces sur sa personne, ainsi il nous révélait : " je me permets de vous signaler que mon collègue de travail Yusuf X..., me dérange dans mon travail. Il est venu à plusieurs reprises me menacer. Il m'a dit qu'il vous avait demandé une augmentation et que vous la lui avait refusé. Il m'a dit de venir vous parler pour que vous l'augmentiez car il prépare un mauvais coup pour vous et votre entreprise (...) Il est difficile pour moi de travailler dans ces conditions. " Ce comportement agressif et menaçant à l'égard de vos collègues et sur le lieu de travail est fortement préjudiciable au bon fonctionnement de notre entreprise. Nous avions déjà été contraints de sanctionner votre comportement agressif, irrespectueux et d'insubordination à l'égard de votre supérieur hiérarchique par courrier des 02. 05. 2005 et 20. 12. 2006. Ces faits sont constitutifs d'une faute grave et rendent impossible la poursuite de votre activité dans l'entreprise, même pendant un préavis " ; or, sur le premier grief énoncé de refus de travail déclaré à Monsieur Z..., la société intimée ne produit aucune preuve ; sur le deuxième grief, la société intimée ne présente pas la lettre qu'elle a reproduite comme étant datée du 29 janvier 2007 et signée par le supérieur hiérarchique du salarié appelant ; elle présente une autre lettre, certes en date du 29 janvier 2007 et signée par le chef d'atelier Erdogan Y..., mais rédigée en termes différents ; en tout cas, elle ne fournit pas la preuve qu'elle a mentionnée dans la lettre de licenciement ; sur le troisième et dernier grief, la société intimée apporte effectivement aux débats la lettre datée du 25 janvier 2007 qu'elle a citée et partiellement reproduite dans la lettre de licenciement ; cette lettre est dactylographiée en français et signée par le salarié Ali B...
C...; mais la société intimée produit également une lettre manuscrite de la même date, rédigée en turc et signée par le même Ali B...
C...; la traduction ultérieurement faite par un expert traducteur assermenté fait apparaître que si le sens général de la lettre manuscrite est similaire à celui de la lettre dactylographiée, les faits rapportés sont différents ; en particulier, dans sa lettre manuscrite en turc, Monsieur Ali B...
C...n'a pas annoncé que Monsieur Yusuf X... préparait " un mauvais coup'", et il n'a pas rappelé à son employeur l'obligation de sécurité qui incombe à de dernier ; il s'ensuit que la valeur probante de la lettre dactylographiée, à laquelle s'est référée la société Someralors qu'elle était destinataire d'une lettre manuscrite de son salarié Ali B...
C..., est pour le moins douteuse ; il en résulte qu'en définitive, faute pour la société intimée d'apporter la preuve des faits énoncés dans la lettre de licenciement, non seulement la faute grave alléguée n'est pas établie, mais le licenciement prononcé s'avère dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Et AUX MOTIFS QU'en conséquence, par application de l'article L 1235-3 du code du travail, et sans qu'il y ait à statuer sur la demande du chef de travail dissimulé que Monsieur Yusuf X... ne présente qu'à titre subsidiaire, le salarié appelant est en premier lieu fondé à obtenir l'indemnisation du préjudice que lui a nécessairement fait subir le licenciement abusivement prononcé, et ce pour un montant qui ne peut être inférieur aux six derniers mois de salaire ; au vu des éléments que Monsieur Yusuf X... produit sur l'étendue de son réel préjudice, alors qu'il n'a pu retrouver d'emploi stable et qu'il a perdu la possibilité d'obtenir une carte de résident valable dix ans, une exacte évaluation conduit la Cour à fixer à 15. 000 euros le montant des dommages et intérêts qui doivent lui revenir ; en application de l'article L 1235-4 du même code, il s'impose de mettre à la charge de l'employeur le remboursement des indemnités de chômage servies au salarié abusivement licencié, et ce dans la limite de six mois d'indemnités ; en deuxième lieu, le salarié appelant est fondé à obtenir l'indemnisation de la période de préavis de deux mois dont l'employeur l'a privé ; sur la base d'une rémunération moyenne mensuelle qu'il chiffre exactement à 1. 576, 02 euros, il y a lieu de faire droit à sa demande d'indemnité compensatrice de préavis pour la somme de 1. 576, 02 x 2 = 3. 152, 04 euros bruts, majorée de la somme de 315, 20 Euros bruts pour les congés payés y afférents, et ce avec les intérêts au taux légal à compter du 11 octobre 2007, date d'introduction de sa demande ; en troisième lieu, le salarié appelant est fondé à obtenir une indemnité légale de licenciement ; sur la même base de calcul et en considération de l'ancienneté acquise dans l'entreprise, l'indemnité doit être fixée à 4, 455 x 0, 10 x 1. 576, 02 = 702, 12 euros bruts, et ce également avec les intérêts au taux légal depuis l'introduction de la demande ; en quatrième lieu, le salarié appelant est fondé à obtenir la délivrance d'un bulletin de paie pour les sommes accordées et soumises à cotisation, et ce sous astreinte ; il est équitable qu'en outre, par application de l'article 700 du code de procédure civile, l'employeur contribue aux frais irrépétibles qu'il a contraint le salarié à exposer tant à hauteur d'appel que devant les premiers juges, et qu'en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, il participe aux frais et honoraires de l'avocat du salarié qui est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle ; enfin, par application de l'article 696 du code de procédure, il échet de mettre les entiers dépens à la charge de l'employeur qui succombe ;
ALORS QUE le courrier du 29 janvier 2007 de Monsieur Erdogan Y..., chef d'atelier et supérieur hiérarchique de Monsieur X..., visé dans la lettre de licenciement et dans les conclusions de la société SOMER, avait fait l'objet d'une communication régulière et non contestée devant la Cour d'appel ; que la Cour d'appel a affirmé que « la société intimée ne présente pas la lettre qu'elle a reproduite comme étant datée du 29 janvier 2007 et signée par le supérieur hiérarchique du salarié appelant ; elle présente une autre lettre, certes en date du 29 janvier 2007 et signée par le chef d'atelier Erdogan Y..., mais rédigée en termes différents ; en tout cas, elle ne fournit pas la preuve qu'elle a mentionnée dans la lettre de licenciement » ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que le courrier du 29 janvier 2007 de Monsieur Erdogan Y..., chef d'atelier et supérieur hiérarchique de Monsieur X..., visé dans la lettre de licenciement, avait été versé aux débats, la Cour d'appel a violé les articles 16 et 132 du Code de Procédure Civile ;
Et ALORS QUE la lettre de licenciement reproduisait des extraits du courrier du 29 janvier 2007 de Monsieur Erdogan Y..., chef d'atelier et supérieur hiérarchique de Monsieur X..., courrier versé aux débats par la société SOMER; que la Cour d'appel a affirmé que « la société intimée ne présente pas la lettre qu'elle a reproduite comme étant datée du 29 janvier 2007 et signée par le supérieur hiérarchique du salarié appelant ; elle présente une autre lettre, certes en date du 29 janvier 2007 et signée par le chef d'atelier Erdogan Y..., mais rédigée en termes différents ; en tout cas, elle ne fournit pas la preuve qu'elle a mentionnée dans la lettre de licenciement » ; qu'en statuant comme elle l'a fait alors que la lettre de licenciement reproduisait des extraits du courrier du 29 janvier 2007 de Monsieur Erdogan Y..., chef d'atelier et supérieur hiérarchique de Monsieur X... versé aux débats par la société SOMER, la Cour d'appel a dénaturé le courrier du 29 janvier 2007 et la lettre de licenciement du en violation de l'article 1134 du Code Civil ;
ALORS encore QU'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de Procédure Civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-18429
Date de la décision : 05/12/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 29 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 déc. 2012, pourvoi n°11-18429


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18429
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