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27/11/2012 | FRANCE | N°11-18556;11-18557;11-18558;11-18559;11-18560

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2012, 11-18556 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 11-18. 556, Y 11-18. 557, Z 11-18. 558, A 11-18. 559 et B 11-18. 560 ;
Sur le moyen unique, commun à tous les pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 29 mars 2011), que les représentants des employeurs et des organisations syndicales représentatives des salariés du secteur de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie, soumis à la convention collective nationale étendue des entreprises artisanales relevant de ce secteur, ont conclu, le 24

avril 2006, un avenant n° 83 à cette convention collective par lequel i...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 11-18. 556, Y 11-18. 557, Z 11-18. 558, A 11-18. 559 et B 11-18. 560 ;
Sur le moyen unique, commun à tous les pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 29 mars 2011), que les représentants des employeurs et des organisations syndicales représentatives des salariés du secteur de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie, soumis à la convention collective nationale étendue des entreprises artisanales relevant de ce secteur, ont conclu, le 24 avril 2006, un avenant n° 83 à cette convention collective par lequel ils ont décidé de mettre en oeuvre un régime de remboursement complémentaire obligatoire des frais de santé pour les salariés entrant dans le champ d'application de ce secteur ; que la société AG2R prévoyance a été désignée aux termes de l'article 13 de l'avenant pour gérer ce régime et que l'article 14 a imposé à toutes les entreprises entrant dans le champ d'application de l'avenant n° 83 de souscrire les garanties qu'il prévoit à compter du 1er janvier 2007 ; que l'accord a été étendu au plan national, par arrêté ministériel du 16 octobre 2006, à toute la branche de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie ; que les sociétés Boulangerie du village, exploitation des Etablissements Foguet, Le Meur et MM. X... et Y..., artisans boulangers, ayant adhéré, par un accord de groupe antérieur, à un autre organisme d'assurance complémentaire, ont refusé de s'affilier au régime géré par la société AG2R prévoyance ; que cette dernière, soutenant que l'adhésion était obligatoire, les a assignés en paiement des cotisations et en régularisation forcée de leur adhésion à compter du 1er janvier 2007 ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de faire droit aux demandes de la société AG2R, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de l'article L. 912-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale que lorsque des accords professionnels de mutualisation des risques s'appliquent à une entreprise qui, antérieurement à leur date d'effet, a adhéré ou souscrit un contrat auprès d'un organisme différent de celui prévu par les accords pour garantir les mêmes risques à un niveau équivalent, les dispositions de l'article L. 2253-2 du code du travail sont applicables ; qu'aux termes de ce dernier article, lorsqu'une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel vient à s'appliquer dans l'entreprise postérieurement à la conclusion de conventions ou d'accords d'entreprise ou d'établissement, les stipulations de ces derniers sont adaptées en conséquence ; que l'adaptation prévue par ces deux textes a alors pour objet de permettre aux entreprises concernées par un accord de mutualisation de conserver leur liberté d'adhésion, pourvu que la garantie des risques par elles souscrites antérieurement à l'accord soit équivalente ou supérieure à la garantie visée par celui-ci ; qu'en affirmant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article L. 912-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 2253-2 du code du travail ;
2°/ que si les articles 102 et 106 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ne s'opposent pas à ce que les pouvoirs publics investissent un organisme de prévoyance du droit exclusif de gérer un régime de remboursement complémentaire des frais de soins de santé pour l'ensemble des entreprises d'un secteur d'activité, sans possibilité, pour les entreprises de ce secteur, d'être dispensée de s'affilier audit régime, il appartient néanmoins aux pouvoirs publics, lorsqu'ils confient à un organisme de prévoyance la gestion d'un tel régime, de respecter les règles fondamentales du traité de l'Union européenne et notamment le principe de non-discrimination, lequel implique le respect d'une obligation de transparence consistant à garantir un degré de publicité adéquat permettant une mise en concurrence ainsi que le contrôle de l'impartialité des procédures de choix ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui s'est bornée à affirmer que le fait d'avoir confié à la société AG2R la gestion exclusive du régime complémentaire de santé institué par l'avenant n° 83 à la convention collective nationale des boulangeries et des boulangeries-pâtisseries était conforme au droit communautaire et notamment aux articles 102 et 106 du TFUE, sans rechercher si la société AG2R s'était vu confier cette mission dans le respect des principes communautaires régissant la commande publique et notamment du principe de transparence, a privé sa décision de base légale au regard dudit principe et de l'article 18 du TFUE ;
Mais attendu, d'une part, que, selon l'article L. 912-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, lorsque des accords professionnels ou interprofessionnels qui instituent des garanties collectives au profit des salariés, anciens salariés ou ayants droit en complément de celles qui sont déterminées par la sécurité sociale en prévoyant une mutualisation des risques dont ils organisent la couverture, s'appliquent à une entreprise qui, antérieurement à leur date d'effet, a adhéré ou souscrit un contrat auprès d'un organisme différent de celui prévu par les accords pour garantir les mêmes risques à un niveau équivalent, les dispositions du second alinéa de l'article L. 132-23 du code du travail sont applicables ; que, suivant celui-ci, devenu l'article L. 2253-2 de ce code, dans le cas où une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel vient à s'appliquer dans l'entreprise postérieurement à la conclusion de conventions ou d'accords d'entreprise ou d'établissement négociés conformément aux dispositions relatives aux conventions et accords collectifs de travail, les dispositions de ces conventions ou accords sont adaptées en conséquence ; qu'il résulte de ces textes que l'adaptation en matière de garantie de niveau équivalent consiste nécessairement dans la mise en conformité de l'accord d'entreprise avec l'accord professionnel ou interprofessionnel de mutualisation des risques imposant l'adhésion de l'entreprise au régime géré par l'institution désigné par celui-ci ;
Et attendu, d'autre part, que, selon l'article L. 2251-1 du code du travail, une convention ou un accord ne peuvent déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public ; que, suivant l'article L. 2253-3 du code du travail, en matière de garanties collectives mentionnées à l'article L. 912-1 du code de la sécurité sociale, une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels ; qu'il résulte de ces textes que l'obligation d'adhésion à l'organisme désigné par avenant pour gérer le régime complémentaire de remboursement de soins revêt un caractère d'ordre public et, ne comportant aucune dispense, exclut l'application du principe de faveur ;
Que la cour d'appel en exactement déduit que l'article 14 de l'avenant n° 83 du 24 avril 2006 étendu pouvait valablement faire obligation aux entreprises entrant dans le champ d'application de la convention collective des entreprises artisanales relevant du secteur de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie de souscrire aux garanties du dit avenant auprès de l'organisme de prévoyance désigné à son article 13 au plus tard le 1er janvier 2007 peu important le niveau de garantie souscrit antérieurement ;
D'où il suit que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit en sa seconde branche et, partant, irrecevable, n'est pas fondé en sa première ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen commun produit, aux pourvois n° X 11-18. 556 à B 11-18. 560, par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour la société Boulangerie du village, la société d'exploitation des Etablissements Foguet, la société Le Meur et MM. X... et Y...

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR ordonné à la société Boulangerie du village, à la société d'exploitation des Etablissements Foguet, à la société Le Meur et à MM. X... et Y... de régulariser, sous astreinte et dans les 15 jours de la signification de son arrêt, leur adhésion à la Société AG2R PREVOYANCE en retournant à cet organisme l'état nominatif du personnel et les bulletins individuels d'affiliation de tous les salariés complétés, signés et accompagnés de tous les justificatifs permettant d'enregistrer les affiliations et de les AVOIR en conséquence condamnés à lui payer, dans les 15 jours de la réception de l'appel des cotisations, les cotisations de l'ensemble de leurs salariés telles que prévues par l'avenant n° 83 du 24 avril 2006 et dues au titre de ce régime depuis le 1er janvier 2007 ;
AUX MOTIFS QUE « sur la licéité de l'avenant au regard du droit interne, les articles 13, 14 et 16 de l'avenant n° 83 à la convention collective nationale des entreprises artisanales de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie désignent l'AG2R PREVOYANCE comme organisme assureur unique du régime de remboursement obligatoire complémentaire de frais de santé et stipulent que l'adhésion de toutes les entreprises relevant de son champ d'application et l'affiliation de leurs salariés auprès de cet organisme assureur ont un caractère obligatoire à compter du 1er janvier 2007, y compris pour les entreprises ayant un contrat de complémentaire santé auprès d'un organisme assureur avec des garanties identiques ou supérieures à celles définies par cet avenant ; que l'arrêté ministériel d'extension de cet avenant n° 83 à tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ d'application de la convention collective nationale susvisée et a été validé par un arrêt du Conseil d'Etat du 19 mai 2008 ; les clauses de désignation et de migration contenues dans l'avenant sont conformes aux dispositions des articles L 911-1, L. 911-2 et L 912-1 du code de la sécurité sociale sans que l'appelante soit fondée à invoquer une violation de l'article L 132-23 du code du travail alors que le principe d'adaptation prévu par ce dernier texte consiste nécessairement dans la mise en conformité de l'accord d'entreprise avec l'accord professionnel ou interprofessionnel de mutualisation des risques qui impose l'adhésion de l'entreprise au régime géré par l'institution désigné par celui-ci ; qu'à cet égard, le délai accordé jusqu'au 1er janvier 2007 par l'article 16 susvisé de l'avenant aux entreprises de boulangerie leur a permis de s'adapter à leur obligation de changer d'assureur ; que l'appelante ne peut davantage invoquer le principe de la liberté d'adhésion au nom d'une minorité de boulangers qui disposeraient déjà, antérieurement à la mise en place du système, d'un régime de complémentaire santé plus favorable et qui à ce titre devraient bénéficier d'une dispense d'affiliation alors que l'article L 2253-2 du code du travail stipule que la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels et qu'aucun texte n'interdit à une entreprise, désireuse d'offrir à ses salariés un niveau de protection plus favorable, de souscrire une garantie supplémentaire » ;
ET AUX MOTIFS QUE « sur la licéité de l'avenant n° 83 au regard du droit communautaire, l'avenant n° 83 rappelle dans son préambule que la mise en place du régime de remboursement complémentaire de frais de santé, qui vise à garantir l'accès de tous les salariés concernés aux garanties collectives en palliant aux difficultés rencontrées par certaines entreprises de la profession, généralement de petite taille, sans considération de facteurs aggravants comme l'âge ou l'état de santé de leurs travailleurs, poursuit un objectif de solidarité. Dès lors, cet objectif risquerait de ne pas être atteint si une clause de dispense ou de retrait laissait la possibilité à une partie des entreprises assujetties de ne pas participer à la mutualisation du régime ; qu'à AG2R PREVOYANCE, organisme gérant un régime de prévoyance complémentaire instauré par la convention collective nationale étendue conclue entre les partenaires sociaux du secteur de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie et auquel l'affiliation a été rendue obligatoire par les pouvoirs publics pour tous les travailleurs de ce secteur, est une entreprise au sens de l'article 86 du Traité ; que la situation dominante exercée en l'espèce par l'AG2R PREVOYANCE sur le marché de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie ne peut être considérée comme abusive au sens de l'article 82 du Traité et ne rentre pas dans le champ d'application de l'article 81 de ce texte alors que la restriction à la concurrence découlant du droit exclusif conféré à cet assureur est justifiée en ce qu'elle est nécessaire à l'accomplissement de sa mission particulier. : d'intérêt général dans ! e cadre de l'objectif le. politique sociale poursuivi par l'avenant n° 83 dans le secteur de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie, et en ce qu'elle concerne un marché qui ne représente pas une part substantielle du marché européen de l'assurance complémentaire santé ; que la licéité de l'avenant n° 83 est en conséquence établie au regard des articles 81, 82 et 86 du Traité sans qu'il y ait lieu de surseoira statuer et de soumettre son examen à la Cour de justice de l'UE sur le fondement de l'article 234 du Traité alors que cette cour est juge de droit commun du droit communautaire et que le présent arrêt reste susceptible de pourvoi » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte de l'article L. 912-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale que lorsque des accords professionnels de mutualisation des risques s'appliquent à une entreprise qui, antérieurement à leur date d'effet, a adhéré ou souscrit un contrat auprès d'un organisme différent de celui prévu par les accords pour garantir les mêmes risques à un niveau équivalent, les dispositions de l'article L. 2253-2 du code du travail sont applicables ; qu'aux termes de ce dernier article, lorsqu'une convention de branche ou un accord professionnel ou interprofessionnel vient à s'appliquer dans l'entreprise postérieurement à la conclusion de conventions ou d'accords d'entreprise ou d'établissement, les stipulations de ces derniers sont adaptées en conséquence ; que l'adaptation prévue par ces deux textes a alors pour objet de permettre aux entreprises concernées par un accord de mutualisation de conserver leur liberté d'adhésion, pourvu que la garantie des risques par elles souscrites antérieurement à l'accord soit équivalente ou supérieure à la garantie visée par celui-ci ; qu'en affirmant l'inverse, la cour d'appel a violé l'article L. 912-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article L. 2253-2 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE si les articles 102 et 106 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ne s'opposent pas à ce que les pouvoirs publics investissent un organisme de prévoyance du droit exclusif de gérer un régime de remboursement complémentaire des frais de soins de santé pour l'ensemble des entreprises d'un secteur d'activité, sans possibilité, pour les entreprises de ce secteur, d'être dispensée de s'affilier audit régime, il appartient néanmoins aux pouvoirs publics, lorsqu'ils confient à un organisme de prévoyance la gestion d'un tel régime, de respecter les règles fondamentales du traité de l'Union européenne et notamment le principe de non-discrimination, lequel implique le respect d'une obligation de transparence consistant à garantir un degré de publicité adéquat permettant une mise en concurrence ainsi que le contrôle de l'impartialité des procédures de choix ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui s'est bornée à affirmer que le fait d'avoir confié à la société AG2R la gestion exclusive du régime complémentaire de santé institué par l'avenant n° 83 à la convention collective nationale des boulangeries et des boulangeries-pâtisseries était conforme au droit communautaire et notamment aux articles 102 et 106 du TFUE, sans rechercher si la société AG2R s'était vu confier cette mission dans le respect des principes communautaires régissant la commande publique et notamment du principe de transparence, a privé sa décision de base légale au regard dudit principe et de l'article 18 du TFUE.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-18556;11-18557;11-18558;11-18559;11-18560
Date de la décision : 27/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 29 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 nov. 2012, pourvoi n°11-18556;11-18557;11-18558;11-18559;11-18560


Composition du Tribunal
Président : M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18556
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