LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er février 2002 par la société Sécurifrance, aux droits de laquelle vient la société Seris security, en qualité d'agent d'exploitation ; que, parti au Sénégal pendant la durée de ses congés payés, du 1er août au 3 septembre 2008, puis en congé sans solde du 4 au 24 septembre 2008, il a télécopié à son employeur le 25 septembre 2008 un certificat médical du même jour lui préconisant un repos de quinze jours ; que, par lettre du 29 octobre 2008, l'employeur a mis le salarié en demeure de justifier, par certificat médical émanant d'un médecin français, son absence pendant cette période et sa prolongation depuis le 13 octobre 2008 ; que par lettre du 10 novembre suivant il a réitéré ces demandes puis a licencié le salarié le 28 novembre 2008 pour faute grave ; que l'intéressé a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour décider que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur n'était pas fondé à faire grief au salarié d'un abandon de poste, mais seulement d'un manquement à l'obligation qui lui était imposée par son contrat de travail, par le règlement intérieur de l'entreprise et par la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, de prévenir son employeur de son impossibilité d'assurer son service à compter du 9 octobre 2008 et de lui faire parvenir, au plus tard dans les 48 heures de la période de prolongation de son absence, un nouvel avis médical d'arrêt de travail, le salarié ne prétendant pas qu'il ait été empêché de le faire en raison notamment de son état de santé ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'annexée à l'arrêt la lettre de licenciement, qui fixe l'objet du litige, ne retenait pas ce motif de licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, après avoir, par un chef non critiqué, écarté la faute grave, il déclare le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et déboute M. X... de sa demande en dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 9 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi sur l'absence de cause réelle et sérieuse ;
DECLARE le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Renvoie, mais seulement pour la fixation du montant du préjudice, devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;
Condamne la société Seris security aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Seris security à payer à la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour M. X....
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement de monsieur X... et, en conséquence, condamné la société Sécurifrance au paiement des sommes de 2.675,46 euros à titre de préavis, 267,54 euros à titre de congés payés sur préavis, 936,41 euros à titre d'indemnité de licenciement et 1.935,15 euros à titre de rappel de salaire pour les mois de janvier et février 2007 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE, dans son courrier recommandé adressé à Amadou X... le 29 octobre 2008, la société Sécurifrance avait admis avoir reçu le 25 septembre 2008 le certificat établi par un médecin au Sénégal selon lequel l'état du salarié nécessitait un repos de 15 jours à compter de cette date, sauf complications ultérieures ; que selon le certificat délivré le 14 novembre 2008 par un infirmier d'Etat du Sénégal, Amadou X... avait bien été hospitalisé dans ce pays du 9 octobre au 15 novembre 2008 pour traitement d'une longue maladie ; que le docteur Dominique Y..., médecin traitant en France d'Amadou X..., lui avait prescrit un arrêt de travail du 17 au 26 novembre 2008, et l'avait reçu en consultation les 27 novembre et 17 décembre 2008 et le 28 septembre 2009 ; qu'ayant examiné les documents présentés par son patient, il avait estimé que les certificats médicaux d'arrêt de travail rédigés en Afrique pendant la période du 25 septembre au 15 novembre 2008 étaient compatibles avec la pathologie alléguée, l'intéressé ayant eu pendant son séjour au Sénégal de graves troubles digestifs (hémorragies/rectorragies) nécessitant une hospitalisation ; qu'il avait lui-même délivré un avis d'arrêt de travail pour la période précitée en vue de régulariser la situation du salarié ; qu'il n'était pas établi qu'Amadou X... avait eu connaissance des courriers recommandés qui lui avaient été adressés par la société Sécurifrance le 29 octobre 2008 pour lui demander de se faire délivrer en France par son médecin un avis d'arrêt de travail pour la période de repos de 15 jours à compter du 25 septembre 2008, et de justifier de son absence depuis le 13 octobre 2008, et pour lui demander de nouveau de justifier ses absences et de se présenter le 21 novembre 2008 à l'entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement ; qu'en effet, l'avis de réception du premier courrier portait une signature très différente de la sienne et le deuxième courrier avait été retourné à l'employeur avec la mention « non réclamé » ; que dans ces conditions, la société Sécurifrance n'était pas fondée à faire grief à Amadou X... d'un abandon de poste, mais seulement d'un manquement à l'obligation qui lui était imposée par son contrat de travail, par le règlement intérieur de l'entreprise et par la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité, de prévenir son employeur de son impossibilité d'assurer son service à compter du 9 octobre 2008 et de lui faire parvenir, au plus tard dans les 48 heures de la période de prolongation de son absence, un nouvel avis médical d'arrêt de travail, le salarié ne prétendant pas qu'il avait été empêché de le faire en raison notamment de son état de santé ; que la société Sécurifrance ne produisait aucune pièce de nature à confirmer que le manquement imputable à Amadou X... aurait effectivement occasionné une gêne importante pour le client de l'entreprise ou une désorganisation de ses services ; que ce comportement du salarié, qui ne rendait pas impossible son maintien dans l'entreprise pendant le préavis, ne pouvait caractériser une faute grave mais seulement constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement (arrêt, p. 6) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige et que les griefs non énoncés dans la lettre de licenciement ne peuvent pas être examinés par le juge ; que la lettre de licenciement notifiée le 28 novembre 2008 reprochait à monsieur X... de ne jamais avoir justifié de son absence et, ainsi, de se « trouve r en situation d'abandon de poste » ; qu'en retenant néanmoins, pour juger le licenciement de monsieur X... doté d'une cause réelle et sérieuse, que ce dernier ne se trouvait pas en situation d'abandon de poste, mais avait manqué à son obligation, en cas de prolongation d'un arrêt de travail, d'en avertir son employeur et de lui adresser dans les 48 heures un nouvel avis médical, la cour d'appel, qui a pris en considération un motif qui n'était pas invoqué par la lettre de licenciement, a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le fait, pour un salarié ayant préalablement informé son employeur de son absence pour des raisons de santé et de l'éventualité de complications ultérieures, et faisant finalement l'objet d'une hospitalisation à l'étranger, de ne pas avertir son employeur de la prolongation de son absence, ni de lui adresser dans les 48 heures suivant son hospitalisation, un certificat médical, ne constitue pas une faute de nature à justifier le licenciement ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1331-1 du code du travail ;
ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l'existence d'une faute n'entraîne pas nécessairement celle d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il appartient au juge, saisi du litige, de rechercher si au cas particulier la faute imputée au salarié constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse, que le salarié avait manqué à son obligation de prévenir son employeur de son impossibilité d'assurer son service à compter du 9 octobre 2008 et de lui faire parvenir, au plus tard dans les 48 heures de la période de prolongation de son absence un nouvel avis médical d'arrêt du travail, la cour d'appel a statué par voie d'affirmation et ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.