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21/11/2012 | FRANCE | N°11-21881

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 novembre 2012, 11-21881


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2011), qu'engagée le 20 février 2006 en qualité d'assistante de direction des affaires juridiques par la Société civile des auteurs multimédias (SCAM), Mme X... a été licenciée le 11 juillet 2008 pour des manquements à ses obligations contractuelles et réglementaires ayant abouti à la perte de confiance de son employeur ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail ;>Attendu que l'employeur reproche à la cour d'appel de le condamner à paye...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 mai 2011), qu'engagée le 20 février 2006 en qualité d'assistante de direction des affaires juridiques par la Société civile des auteurs multimédias (SCAM), Mme X... a été licenciée le 11 juillet 2008 pour des manquements à ses obligations contractuelles et réglementaires ayant abouti à la perte de confiance de son employeur ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail ;
Attendu que l'employeur reproche à la cour d'appel de le condamner à payer des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges sont tenus de vérifier la réalité et le sérieux des griefs énoncés dans la lettre de licenciement ; que la lettre de licenciement de Mme X... invoque, d'une part, "des manquements à vos obligations contractuelles et réglementaires", caractérisés par l'utilisation frauduleuse de l'appareil de pointage lors des heures de repas et, d'autre part, la "perte de confiance" consécutive aux mensonges de la salariée qui persistait à nier des faits matériellement avérés ; qu'en se bornant à retenir, pour juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, que la "perte de confiance" ne pouvait constituer en tant que telle une cause suffisante de licenciement, sans rechercher si le fait pour une salariée occupant le poste d'assistante de direction juridique de persister à donner une fausse version de ses horaires de pointage en dépit des preuves réunies ne constituait pas une exécution déloyale du contrat de travail pouvant objectivement légitimer la perte de confiance de l'employeur et constituer ainsi un grief distinct de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-3 du code du travail ;
2°/ que l'utilisation frauduleuse par un salarié des systèmes de pointage mis en place dans l'entreprise afin de tromper l'employeur sur le nombre réel d'heures de travail accomplies, constitue une faute ; qu'en se fondant sur la circonstance selon laquelle le comportement reproché à Mme X... aurait été ponctuel pour excuser le comportement de cette dernière, cependant qu'elle constatait par ailleurs que la salariée avait délibérément omis d'utiliser son badge pendant la pause déjeuner les 9, 11, 17, 18, 24, 25 et 26 juin 2008, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 1222-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le comportement de la salariée ne constituait pas une cause sérieuse de licenciement ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Société civile des auteurs multimédias aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la Société civile des auteurs multimédias.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société SCAM à payer à la salariée la somme de 18.591 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'à lui verser la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'AVOIR ordonné à la Société SCAM de rembourser au Pôle Emploi les allocations de chômage versées à Madame X... dans la limite de trois mensualités ;
AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'aux termes de la lettre du 11 juillet 2008, le licenciement de Mme X... a été prononcé pour manquements à ses obligations contractuelles et réglementaires pour n'avoir pas respecté l'usage de la badgeuse de l'entreprise ; que sur les manquements de Mme X... à ses obligations contractuelles et réglementaires, la faute disciplinaire est constituée par la violation des règles de discipline de l'entreprise ; que le licenciement peut être la sanction ultime des agissements fautifs du salarié ; qu'il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement au vu des pièces versées par les parties et les débats ; que la Société Civile des Auteurs Multimédias soutient que Mme X... a commis des erreurs d'utilisation de badgeuse à plusieurs reprises les 9, 11, 17, 18, 24, 25 et 26 juin 2008 pendant sa pause déjeuner ; qu'elle verse aux débats le règlement intérieur et la charte d'usage des moyens techniques mis à disposition par l'entreprise qui font état de l'obligation qu'ont les salariés de badger quatre fois par jour leurs entrées et sorties de l'entreprise afin de contrôler le temps de travail effectif de chaque salarié ; qu'elle produit le relevé de badgeuse de Mme X... ; qu'il révèle des manquements de la part de Mme X... qui n'a pas utilisé la badgeuse à ces dates pendant sa pause déjeuner ; que par ailleurs, la Société Civile des Auteurs Multimédias verse aux débats deux attestations aux fins de confirmer les manquements commis par Mme X... : deux salariées de l'entreprise affirment avoir été témoins que Mme X... ne badgeait qu'a son retour de sa pause déjeuner les 18, 25 et 26 juin 2008 ; que Mme X..., quant à elle, reconnaît lors de l'entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire avoir oublié d'utiliser la badgeuse le 25 juin ; qu'en revanche, elle nie la fraude dont elle est accusée pour les autres jours ; qu'elle affirme avoir déjeuné à son poste de travail et ne pas sortir, vingt minutes de pause étant décomptées automatiquement tous les jours ; qu'au vu des éléments qui précédent, si le motif économique au titre de l'usage de la badgeuse est réel, il n'est pas sérieux, le comportement reproché à la salariée ayant été ponctuel ; que la perte de confiance de l'employeur ne peut par ailleurs constituer en tant que telle une cause de licenciement, même lorsqu'elle repose sur des éléments objectifs ; que seuls de tels éléments peuvent le cas échéant constituer une cause de licenciement mais non la perte de confiance qui a pu en résulter pour l'employeur ; que le licenciement prononcé étant sans cause réelle et sérieuse, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a fait application de l'article L1235-3 alinéa 2 du code du travail au regard de l'effectif de l'entreprise et de l'ancienneté de la salariée ; qu'en application de l'article L. 1235-4 le remboursement des allocations chômage par l'employeur fautif est de droit ; qu'il doit être ordonné en l'espèce dans la limite de trois mensualités » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « les principaux reproches faits à Madame Geneviève X... sont d'avoir commis divers erreurs de badgeuses à plusieurs reprises soit les 9, 11, 17, 18, 24, 25 et 26 juin 2008 pendant sa pause déjeuner ; 1/ que la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée ne peut être justifiée par d'autres griefs que ceux dénoncés dans la lettre de licenciement ; que le Conseil a retenu, d'une part, que Madame Geneviève X... a reconnu lors de son entretien préalable avoir oublié de badger le 25 juin 2008 en sortant pendant sa pause déjeuner ; que le Conseil, au vu des attestations fournies par Madame Geneviève X... et de la lettre de son supérieur hiérarchique, retient de la part de Madame Geneviève X..., une attitude fautive le 25 juin 2008 en ne pointant pas à la badgeuse pour sortir déjeuner mais que pour les autres jours, le Conseil retient qu'elle n'a pris que 20 minutes de pause déjeuner conformément aux règles à la SOCIETE CIVILE DES AUTEURS MULTIMEDIA ; qu'en se fondant ainsi sur ce grief énoncé dans la lettre de licenciement pour justifier la rupture du contrat de travail à durée indéterminée, le Conseil fait application ensemble des articles L.1332-1 et L.1232-6 du Code du travail ; 2/ que le fait isolé d'avoir oublié de pointer à la badgeuse en date du 25 juin 2008 ne suffit pas à caractériser un manquement de sa loyauté et de ses obligations contractuelles car Madame Geneviève X... reconnaît dans un entretien en date du 7 juillet 2008 d'avoir oublié de pointer ce jour là ; que le Conseil ne peut considérer cette erreur comme une violation du règlement intérieur de la SOCIETE CIVILE DES AUTEURS MULTIMEDIA en ses articles 2.3 et 3.2 ; qu'en retenant la perte de confiance professionnelle à l'encontre de Madame Geneviève X... alors qu'aucune faute ne pouvait lui être reprochée dans l'exercice de leur droit de mettre fin aux contrats qui les unissaient, alors qu'agit avec une légèreté blâmable et commet une faute l'employeur qui justifie le licenciement d'un salarié par un comportement déloyal de Madame Geneviève X..., l'imputation inexacte d'une faute mettant en cause la conscience professionnelle de la salariée étant de nature à lui causer un préjudice, de telle sorte que le Conseil a recherché si Madame Géneviève X... avait réellement commis des fautes, comme l'affirme l'employeur, ou si les faits qui lui ont été reprochés n'existaient pas, comme l'avait soutenu l'intéressée, alors, d'autre part, que le Conseil retient légalement que Madame Geneviève X... n'a pas eu un comportement répressif ; qu'il ne pourra être retenu la violation du règlement intérieur mais juste d'un oubli de la part de Madame Geneviève X... » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les juges sont tenus de vérifier la réalité et le sérieux des griefs énoncés dans la lettre de licenciement ; que la lettre de licenciement de Madame X... invoque, d'une part, « des manquements à vos obligations contractuelles et réglementaires », caractérisés par l'utilisation frauduleuse de l'appareil de pointage lors des heures de repas et, d'autre part, la « perte de confiance » consécutive aux mensonges de la salariée qui persistait à nier des faits matériellement avérés ; qu'en se bornant à retenir, pour juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, que la « perte de confiance » ne pouvait constituer en tant que telle une cause suffisante de licenciement, sans rechercher si le fait pour une salariée occupant le poste d'assistante de direction juridique de persister à donner une fausse version de ses horaires de pointage en dépit des preuves réunies ne constituait pas une exécution déloyale du contrat de travail pouvant objectivement légitimer la perte de confiance de l'employeur et constituer ainsi un grief distinct de nature à justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1222-1, L.1232-1, L. 1232-6 et L.1235-3 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'utilisation frauduleuse par un salarié des systèmes de pointage mis en place dans l'entreprise afin de tromper l'employeur sur le nombre réel d'heures de travail accomplies, constitue une faute ; qu'en se fondant sur la circonstance selon laquelle le comportement reproché à Madame X... aurait été ponctuel pour excuser le comportement de cette dernière, cependant qu'elle constatait par ailleurs que la salariée avait délibérément omis d'utiliser son badge pendant la pause déjeuner les 9, 11, 17, 18, 24, 25 et 26 juin 2008, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L.1222-1, L.1232-1 et L.1235-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-21881
Date de la décision : 21/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 nov. 2012, pourvoi n°11-21881


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.21881
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