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13/11/2012 | FRANCE | N°11-22716

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 novembre 2012, 11-22716


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 6 juin 2011), que, selon acte du 11 octobre 2000, la société Sainte-Marthe immobilier a donné à bail à la société Centre médical Renée Lacrosse (la société CMRL) des locaux commerciaux en vue d'y exploiter une clinique chirurgicale et gynéco-obstétricale ; que la locataire n'ayant pu exploiter les lieux, en raison de leur absence de conformité aux normes de sécurité, les a restitués en janvier 2008 ; que la société Sainte-Marthe immobilier l'a as

signée en paiement des loyers arriérés et du coût de la remise en état des l...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 6 juin 2011), que, selon acte du 11 octobre 2000, la société Sainte-Marthe immobilier a donné à bail à la société Centre médical Renée Lacrosse (la société CMRL) des locaux commerciaux en vue d'y exploiter une clinique chirurgicale et gynéco-obstétricale ; que la locataire n'ayant pu exploiter les lieux, en raison de leur absence de conformité aux normes de sécurité, les a restitués en janvier 2008 ; que la société Sainte-Marthe immobilier l'a assignée en paiement des loyers arriérés et du coût de la remise en état des locaux ; que la société CMRL a soulevé l'exception d'inexécution, faute de délivrance par la bailleresse d'un bien conforme à sa destination contractuelle et a sollicité l'indemnisation de sa perte d'exploitation ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 1719-1° et 2° du Code civil ;
Attendu que le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;
Attendu que, pour condamner la société CRML au paiement des loyers jusqu'à la restitution des lieux, l'arrêt, après avoir relevé que la commission départementale de sécurité avait émis un avis défavorable sur les conditions de fonctionnement de l'établissement, retient que le locataire est tenu, d'une part, de prendre les lieux dans l'état où ils se trouvent sans exiger aucune remise en état à l'exception du clos et du couvert ni exercer aucun recours contre le bailleur notamment pour vétusté, insalubrité ou mauvais état des constructions, d'autre part, d'effectuer toutes les réparations aux systèmes de canalisations et de distribution de l'eau et de la force électrique et de remplacer à ses frais tous éléments défectueux par suite d'usure, vétusté, force majeure ou dont le remplacement sera imposé ou recommandé par mesures administratives, enfin, de satisfaire à toutes les charges de ville et de police, règlements sanitaires, voirie, hygiène, salubrité ainsi qu'à celles qui pourraient être imposées par tous plans d'urbanisme ou d'aménagement, et en déduit que le cumul de ces clauses doit s'analyser comme une clause expresse de transfert au preneur des travaux de remise aux normes de sécurité ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence d'une stipulation expresse du bail mettant les travaux de sécurité prescrits par l'autorité administrative à la charge du preneur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le pourvoi incident :
Sur le premier moyen :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la bailleresse de sa demande en paiement des frais de remise en état des lieux, l'arrêt retient que ses demandes complémentaires visant les travaux de remise en état seront écartées comme non justifiées dans leur montant ;
Qu'en statuant ainsi, sans analyser, même sommairement, le devis produit par la société Sainte-Marthe immobilier et procéder elle-même, le cas échéant, à l'évaluation des désordres, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Sur le second moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour débouter la bailleresse de sa demande en paiement de la taxe foncière due pour l'année 2007, l'arrêt retient que l'inoccupation au 1er janvier 2007 des locaux par la société CMRL n'étant pas contestée, la société Sainte-Marthe immobilier ne peut prétendre à la prise en charge de la taxe foncière par la locataire ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que la société CMRL avait restitué les lieux en janvier 2008 et qu'elle rejetait l'exception d'inexécution soulevée par celle-ci, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit à l'appui du pourvoi principal par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Centre médical Renée Lacrosse Gai Foyer Choisy, dite CMRL.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement de première instance ayant condamné la société CMRL à payer à la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER la somme de 859.892,75 € représentant le « montant lié à sa jouissance des lieux jusqu'au 9 janvier 2008 » ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le bail objet de la cession est un bail commercial du 24 décembre 1996, il porte sur « un ensemble immobilier, bâti et non bâti, situé sur le territoire de la commune de BASSE-TERRE au lieudit MONTBAZIN consistant en : - un bâtiment principal construit et couvert, - diverses constructions légères séparées de lui, à usage de local poubelles, abri pour véhicules de services, abri pour le matériel de jardinage - des cours intérieures - un jardin, le tout d'un seul tènement, prenant accès sur le chemin vicinal, clôturé de tous côtés et figurant au cadastre rénové de la commune de BASSE-TERRE sous le n° 605 de la section AC, pour une contenance de 6.335 m² ; sous la rubrique : DESTINATION DES LIEUX, il est ainsi libellé : « les lieux loués sont destinés à l'exploitation d'une clinique chirurgicale et gynéco-obstétricale avec un service de rééducation fonctionnelle et kinésithérapie » ; sous la rubrique : CHARGES ET CONDITIONS : A. Concernant le preneur : Le présent bail est fait sous les charges et conditions suivantes que le preneur s'oblige d'exécuter, à peine de tous dépens et dommages et intérêts, et même de résiliation des présentes, si bon semble au bailleur : 1 – Etat des lieux du matériel et des équipements, il prendra les biens loués dans l'état où ils se trouveront lors de l'entrée en jouissance. En ce qui concerne les bâtiments sols et terrains, il ne pourra exiger aucune remise en état ni réparation autre que celles qui seraient nécessaires pour que les lieux soient clos et couverts et ne pourra élever aucune réclamation ni exercer aucun recours contre le bailleur pour vices apparents ou cachés, erreur dans la désignation ou la contenance, vétusté, mauvais état des constructions, sols et terrains, dégradations, insalubrité, cas de force majeure et toutes causes quelconques intéressant lesdits bâtiments, sols et terrains, le preneur se déclarant prêt à supporter les inconvénients pouvant en résulter et à effectuer, à ses frais, tous les travaux de réparations, remises en état et réfections que nécessiterait l'état des lieux, quel que soit cet état et quelle qu'en soit la cause ; Un état des lieux sera dressé contradictoirement par les parties dans le mois de l'entrée en jouissance aux frais du preneur. A défaut de cet état, le preneur sera réputé avoir reçu les lieux en parfait état sans que, postérieurement, il puisse établir la preuve contraire ; 2 - Entretien - Réparations - Le preneur devra, pendant le cours du bail, entretenir les lieux loués constamment en bon état de réparations locatives et d'entretien ; il effectuera notamment toutes les réparations aux systèmes de canalisation et de distribution de l'eau, de la force électrique, remplacera à ses frais, tous éléments défectueux ou qui le deviendraient soit par suite d'usure, vétusté, force majeure, ou dont le remplacement sera imposé ou recommandé par mesures administratives ; il supportera toutes réparations qui seraient rendues nécessaires par suite du défaut d'exécution des réparations locatives ou de dégradations résultant de son fait ou de celui de sa clientèle, ses fournisseurs ou son personnel ; Il entretiendra le matériel fixe avec soin, il pourra l'augmenter ou l'améliorer comme bon lui semblera, mais sans pouvoir demander au bailleur de contribuer aux changements, modifications, améliorations et renouvellements ; 3 - Garantie - La clinique devra être et rester constamment garnie de matériel et équipement en état de fonctionnement normal et de valeur au moins équivalente à la valeur de celui objet de l'inventaire ci-annexé pour répondre du loyer et de l'exécution des conditions du bail ; 4 - Conditions générales de jouissance - Le preneur devra jouir des biens loués en bon père de famille suivant leur destination. Il veillera à ne rien faire ni laisser faire qui puisse apporter aucun trouble de jouissance au voisinage, notamment quant aux bruits, odeurs et fumées, et d'une façon générale, ne devra commettre aucun abus de jouissance, à peine de résiliation immédiate du présent bail, alors même que cet abus n'aurait été que provisoire et de courte durée. Il devra satisfaire à toutes les charges de ville et de police, règlements sanitaires, voirie, hygiène, salubrité ainsi qu'à celles qui pourraient être imposées par tous plans d'urbanisme ou d'aménagement, de manière que le bailleur ne puisse jamais être inquiété ou recherché à ce sujet… » ; 5 - Conditions spéciales à l'activité médicale et chirurgicale - Le preneur fera son affaire personnelle, de façon que le bailleur ne soit jamais inquiété ni recherché à ce sujet, de toutes réclamations ou contestations qui pourraient survenir du fait de son activité dans les lieux ; qu'il devra exercer cette activité conformément aux prescriptions législatives, réglementaires et administratives qui la concernent. Toute infraction concernant ces dispositions qui serait relevée contre lui constituera de son chef une faute grave vis-à-vis du bailleur justifiant la résiliation du présent bail, si bon semble au bailleur sans préjudice de tous dommages-intérêts le cas échéant. La clinique devra être tenue en état d'activité normale et constante, sauf fermetures nécessitées par cas de force majeure ; que l'ensemble du tènement devra toujours présenter une apparence d'ordre, de propreté et de bonne tenue ; que les cours intérieures devront constamment être libres et non encombrées ; que les entrées de marchandises et produits se feront par l'accès prévu à cet effet ; que c'est également par là que les fournisseurs auront accès à la clinique ; que les entrées et sorties du personnel se feront par l'accès prévu à cet effet ; que les approvisionnement seront stockés dans les bâtiments et lieux destinés à cet usage également ; qu'ils seront évacués dans le respect des dispositions légales ; qu'il ne devra être emmagasiné ou entreposé dans quelque partie que ce soit de la clinique, aucune matière qui présenterait des risques sérieux quels qu'ils soient, plus particulièrement d'incendie ; que le preneur pourra installer à ses frais, risques et périls, à l'entrée principale de la clinique une plaque indiquant le nom de la clinique, ses spécialités, conformément aux usages ; 6 - Modification matérielle des lieux - Le preneur ne pourra faire aucune démolition, percement de murs, changement de distribution ou autres travaux intéressant le gros oeuvre, sans le consentement formel et par écrit du bailleur ; que les travaux qui seraient autorisés par celui-ci seront faits aux frais du preneur, sous la surveillance et le contrôle de l'architecte du bailleur dont les honoraires et vacations seront payés par ledit preneur ; - Travaux - Le preneur souffrira que le bailleur fasse, pendant le cours du bail, aux lieux loués, quelle qu'en soit l'importance et quelle qu'en soit la durée, alors même que celle-ci excéderait quarante jours, et sans pouvoir prétendre à aucune indemnité, interruption ou diminution de loyer, tous travaux quelconque qui pourraient devenir nécessaires aux bâtiments et tous travaux de passage de canalisations anciennes ou nouvelles, pose de poteaux ou piliers, et aussi tous travaux d'améliorations ou constructions nouvelles que le bailleur jugerait convenable d'exécuter ; qu'il devra de la même façon supporter tous travaux qui seraient éventuellement exécutés sur la voie publique, alors même qu'il en résulterait une gêne pour son exploitation ou pour pénétrer dans les lieux sauf recours contre l'administration ou l'entrepreneur de ces travaux s'il y a lieu, mais en laissant le propriétaire hors de cause ; …/… B - Concernant le bailleur : De son côté, le bailleur s'oblige à tenir les lieux loués clos et couverts selon l'usage, mais sans que cette obligation déroge en quoi que ce soit à tout ce qui a été dit ci-dessous et notamment aux obligations mises à la charge du preneur en ce qui concerne les travaux qui deviendraient nécessaires ; que le bailleur décline toutes responsabilité en ce qui concerne notamment tous troubles apportés à la jouissance du preneur par des tiers par voie de fait, en cas d'interruption dans le service des eaux, de l'électricité provenant soit du fait de l'Administration, qui en dispose, soit de travaux, accidents ou réparations ou tous autres cas de force majeure, en cas d'accident pouvant survenir du fait des équipements et installations quelconques, en cas d'inondation par les eaux pluviales ou autres, fuites d'eau, le preneur acceptant expressément ces exonérations de responsabilité, même en ce qu'elles pourraient déroger à toute jurisprudence contraire qui pourrait prévaloir et s'engageant à faire son affaire personnelle des cas ci-dessus et généralement de tous autres cas fortuits et imprévus sauf son recours contre qui de droit, en dehors du bailleur ; ledit preneur s'engage en outre à contracter toutes assurances nécessaires de façon que la responsabilité du bailleur soit entièrement dégagée ; LOYER : 820.000 francs de loyer annuel, soit 68.333,33 francs par mois (ou 11.742,19 € au 1er janvier 2002) ; que la cession de gré à gré de ce bail a été autorisée par le juge-commissaire de la société SODEX MONTBAZIN au prix de 400.000 francs comptant par ordonnance du 3 février 2000, « le bien (le bail en l'espèce) étant vendu dans l'état où il se trouvera au jour de la signature de l'acte et l'acquéreur ne pouvant se retourner contre le vendeur pour quelque raison que ce soit ; que ces deux conditions sont reprises dans l'acte de cession notarié des 11 et 12 octobre 2000, étant précisé en outre que le cessionnaire « exécutera aux lieu et place du cédant toutes les clauses, charges, et conditions dont l'accomplissement lui incombait aux termes du bail de manière à ce que ce dernier ne soit jamais inquiété ni recherché directement ou indirectement à ce sujet : s'il en était autrement, le cessionnaire serait passible de tous dommages et intérêts au profit du cédant pour le préjudice, les frais, pertes de temps et autres inconvénients qui en résulteraient pour lui ; que ce titre notarié de cession de bail, et non du fonds, n'est pas remis en cause par les parties, qui n'en ont demandé ni l'annulation ni la résiliation ; que les moyens suggérés sur les vices cachés ou la non-conformité de la chose vendue n'ont ainsi leur place dans le présent débat que pour le bail et non les murs, le débat portant sur la charge des obligations respectives du bailleur et du preneur au regard du bail qui les lie quant aux travaux de mise aux normes de sécurité préalable à l'exploitation d'un établissement recevant du public ; qu'il est constant que la divergence des parties sur la charge des travaux a bloqué ces travaux et par voie de conséquence l'ouverture de la clinique, ce qui a justifié pour le preneur l'interruption du paiement de ses loyers à compter du 1er janvier 2002 et l'engagement par bailleur et preneur de procédures croisées jusqu'à la remise au bailleur début janvier 2008 des lieux objet du bail ; qu'il est produit au dossier le procès-verbal de visite périodique de la commission de sécurité du 17 septembre 1996 qui, compte tenu de la non présentation du registre de sécurité, de l'absence de dispositif d'alarme, de l'absence d'éclairage de sécurité, de l'absence de balisage de sécurité a émis à l'unanimité un avis défavorable sur les conditions de fonctionnement de l'établissement, télécopie de transmission de ce procès-verbal par la préfecture à la société Le Centre Médical Renée Lacrosse le 30 septembre 2002 ; qu'il est également produit l'offre de la société Le Centre Médical Renée Lacrosse du 25 novembre 2000 qui porte la mention : « le développement des activités ci-après précisées suppose la réalisation de travaux importants de mise aux normes de sécurité et d'accessibilité » qui démontre que la société Le Centre Médical Renée Lacrosse avait une connaissance précise de l'état des lieux avant sa formulation, comme de la circonstance, mentionnée au rapport SOCOTEC du 19 juin 2000, p. 4 que « l'établissement n'était plus en service (à cette date) depuis une année auparavant » soit depuis juin 1999, ainsi que le procès-verbal de constat d'état des lieux établi à la demande et en présence des parties le 20 octobre 2000 qui établit l'interruption de l'exploitation depuis de longs mois et doit être lu au regard de l'article 1 alinéa 2 du bail « Un état des lieux sera dressé contradictoirement par les parties dans le mois de l'entrée en jouissance, aux frais du preneur. A défaut de cet état, le preneur sera réputé avoir reçu les lieux en parfait état sans que, postérieurement, il puisse établir la preuve contraire » ; que ces éléments établissent la parfaite connaissance par la société Le Centre Médical Renée Lacrosse de l'état des murs objet du bail lors de la reprise, qui n'ont ensuite cessé de se dégrader comme en attestent les procès-verbaux de constat du 26 août 2002, puis celui du 1er juin 2007, dressés à l'initiative de la société Sainte Marthe Immobilier qui font état de leur état d'abandon aggravé par un climat tropical très humide, enfin de remise des clefs du 9 janvier 2008 ; qu'une demande de la société Le Centre Médical Renée Lacrosse au titre de la garantie des vices cachés ne peut ainsi prospérer ; que ce n'est qu'à compter du 26 octobre 2000, soit 15 jours après la signature de l'acte notarié de cession du 11 octobre que s'est fait jour la divergence entre les parties par l'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception de la société Le Centre Médical Renée Lacrosse demandant expressément au bailleur « la prise en charge des travaux de sécurité permettant d'exercer dans les lieux loués les activités prévues au bail » pour un montant alors estimé à 880.000 francs selon estimation du cabinet d'architectes HIRTH, les travaux distincts de transformation et d'aménagement étant alors estimés à la somme de 3.276.700 francs dont la prise en charge n'était pas demandée au bailleur ; que le courrier du 7 novembre 2000 de la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER fait émerger cette divergence « bien que nous n'y soyons nullement obligés, nous sommes disposés à procéder aux travaux ci-dessous énumérés, ne relevant pas de la sécurité : « clôture complémentaire du terrain, traitement antitermites extérieur et intérieur, révision de la toiture, révision du parking extérieur et amélioration de l'accès à la clinique, reprise du jardin sud, reprise des carrelages et peintures de la façade sud » ; que l'incertitude laissée par les parties sur le coût des travaux nécessités par la remise en marche de l'activité comme de leur répartition est à l'origine du litige qui doit être réglé par référence aux textes et conventions passées entre elles ; qu'il n'en reste pas moins qu'en possession des rapports SOCOTEC dès le 19 juin et le 7 juillet 2000, il revenait à la société Le Centre Médical Renée Lacrosse qui avait pris soin de faire la distinction entre des travaux de sécurité qu'elle estimait d'ores et déjà de la responsabilité du bailleur et de ceux de réaménagement qu'elle admettait a contrario relever d'elle, de faire part de sa position, arrêtée en ce sens dès le 21 janvier 2000 suivant lettre adressé au juge commissaire à cette date par le conseil de la société Le Centre Médical Renée Lacrosse avant la signature de l'action de cession afin d'éclairer la rédaction des clauses de cette cession, ce qu'elle s'est abstenue de faire ; que l'obligation de délivrance pèse sur le bailleur ; qu'il s'agit non seulement de la délivrance matérielle des locaux qui doivent être aptes à recevoir la destination contractuellement prévue mais également d'une délivrance juridique portant sur des locaux affectés des autorisations leur permettant de recevoir cette destination ; qu'ainsi, le bailleur est obligé notamment de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée : la clause par laquelle le locataire prend les lieux dans l'état où ils se trouvent ne décharge pas le bailleur de son obligation de délivrance qui ne peut, fût-ce sous couvert de la clause par laquelle le locataire déclare prendre les locaux en l'état, se décharger de son obligation essentielle de délivrance, sous peine de ruiner l'existence même du bail ; qu'il en va ainsi : * de l'obligation pour le bailleur d'obtenir l'avis favorable de la commission de sécurité permettant l'ouverture des bâtiment au public, le bailleur devant assurer le coût des travaux de sécurisation de l'immeuble (Civ 3ème, 3 février 2009, Rev. Loyers 2009. 175) ; * de l'obtention des autorisations de la copropriété même lorsque le preneur déclare faire son affaire personnelle de toutes autorisations nécessaires à son activité, cette clause ne pouvant concerner que les autorisations administratives, à l'exclusion de celles de la copropriété alors que le bailleur est le seul interlocuteur du syndicat des copropriétaires (Paris, 16è ch. A, 14 janvier 2009, AJDI 2009) ; que de même que la clause de prise des locaux en l'état n'exonère pas le bailleur de son obligation de délivrance, la clause de non-recours pour vice caché ou apparent ne l'exonère pas de sa responsabilité dans l'arrêt de l'exploitation du preneur après un dégât des eaux, s'il ne rétablit pas les lieux en état d'être exploités, cette obligation s'imposant à lui au titre de l'obligation de délivrance et de réparation, cette obligation portant en l'espèce sur le clos et le couvert (Civ 3ème, 18 mars 2009, AJDI 2009. 539) ; que sur le même fondement de l'obligation de délivrance, la jurisprudence impose au bailleur la réalisation des travaux de mise en conformité aux normes administratives, sauf clause expresse de transfert sur le locataire Civ 3ème, 26 mai 2009, Administrer Juillet 2009. 49, rappelant que la mise à la charge du preneur de l'obligation d'entretenir les locaux en bon état de réparations locatives et d'entretien ne s'analyse pas en une clause de transfert sur ledit locataire des travaux prescrits par l'autorité administrative ; que lorsque le bail énonce que le locataire aura la charge des travaux d'entretien dans les lieux loués, et qu'il dispose que de son côté le bailleur s'engage à tenir les lieux clos et couverts suivant l'usage, il en résulte a contrario que le preneur doit assumer les autres charges d'entretien et de réparations des parties communes dont il a la jouissance (Paris 16 ch. A, 1er octobre 2008, AJDI 2009) ; que c'est au regard de ces principes affirmés en 2009 que doit s'analyser le contenu d'un bail pourtant établi en 1996 ; qu'il ne peut être passé sous silence que ce bail porte, au vu et au su du preneur, sur des locaux inoccupés depuis de longs mois, dont les autorisations d'exploitation étaient rendues caduques notamment du fait de ce défaut d'exploitation pendant plus de six mois – cf. à cet égard le courrier du 21 janvier 2000 suscité du conseil de la Société Le Centre Médical Renée Lacrosse au Juge-commissaire pour justifier, sans doute, le montant modéré de l'offre de reprise (400.000 francs) ; que le cumul des clauses selon lesquelles : « il prendra les biens loués dans l'état où ils se trouvent lors de l'entrée en jouissance. En ce qui concerne les bâtiments sols et terrains, il ne pourra exiger aucune remise en état ni réparation autre que celles qui seraient nécessaires pour que les lieux soient clos et couverts et ne pourra élever aucune réclamation ni exercer aucun recours contre le bailleur pour vices apparents ou cachés, erreur dans la désignation ou la contenance, vétusté, mauvais état des constructions, sols et terrains, dégradations, insalubrité, cas de force majeure et toutes causes quelconques intéressant lesdits bâtiments, sols et terrains, le preneur se déclarant prêt à supporter les inconvénients pouvant en résulter et à effectuer à ses frais tous les travaux de réparations, remises en état et réfections que nécessiterait l'état des lieux, quel que soit cet état et quelle qu'en soit la cause » - au titre des réparations locatives, « il effectuera notamment toutes les réparations aux systèmes de canalisation et de distribution de l'eau, de la force électrique, remplacera à ses frais tous éléments défectueux ou qui le deviendraient soit par suite d'usure, vétusté, force majeure ou dont le remplacement sera imposé ou recommandé par mesures administratives », - et enfin, au titre des conditions générales de jouissance : « il devra satisfaire à toutes les charges de ville et de police, règlements sanitaires, voirie, hygiène, salubrité ainsi qu'à celles qui pourraient être imposées par tous plans d'urbanismes ou d'aménagement, de manière que le bailleur ne puisse jamais être inquiété ou recherché à ce sujet » doit s'analyser en l'espèce comme une clause expresse de transfert au preneur des travaux de remise aux normes dont la société Le Centre Médical Renée Lacrosse avait la responsabilité expresse de les rediscuter lors de la présentation de l'offre, au vu des informations dont elle disposait, ce qu'elle n'a pas cru devoir faire sans pouvoir prétendre s'en plaindre à ce jour ; que les loyers sont impayés depuis le 1er janvier 2002 ; que la remise des clefs est en date du 9 janvier 2008 ; qu'aucun moyen tiré de la prescription quinquennale des loyers ou du montant de ceux-ci ou de l'indemnité d'occupation due n'est soulevée par la société Le Centre Médical Renée Lacrosse ; que le jugement portant condamnation à la somme de 859.892,75 € sera dans ces conditions confirmé » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « dans le contrat de bail, dans le chapitre consacré aux charges du preneur, il a été fait expressément référence aux conditions spéciales nécessitées par l'activité médicale et chirurgicale devant s'exercer « conformément aux prescriptions législatives, réglementaires et administratives qui la concernent » ; qu'au regard de la clause dérogatoire au droit commun, insérée dans le même chapitre, par laquelle le preneur déclare prendre les lieux en l'état sans exiger aucune réparation ou remise en état « même en cas de force majeure et toutes causes quelconques intéressant lesdits bâtiments (…) et à effectuer à ses frais tous travaux de réparations, remises en état et réfections que nécessiteraient l'état des lieux quelque soit cet état et quelle qu'en soit la cause », ces stipulations ont eu pour effet de décharger le bailleur des travaux qui pourraient être imposés en vertu des textes prescrits au titre de la destination du bail ; la mention réitérée « toutes causes quelconques » et « quelle qu'en soit la cause », lesquelles imposeraient la réalisation de travaux de remise en état ou de réfection concerne dès lors de plein droit les conditions spécifiques de son activité médicale dans les lieux loués ; De la même façon, selon la clause 6 de ce même paragraphe, le preneur, avec autorisation du bailleur, pourra effectuer des travaux de gros oeuvre, à ses frais ; que ces clauses dérogatoires sont encore rappelés dans le paragraphe B du contrat de bail sur les obligations du bailleur, lequel mentionne pour ce dernier sa seule obligation de « tenir les lieux clos et couverts selon l'usage, mais sans que cette dérogation déroge en quoi que ce soit à tout ce qui a été dit ci-dessus et notamment aux obligations mises à la charge du preneur, en ce qui concerne les travaux qui deviendraient nécessaires » et ce faisant « quelque soit la cause », laquelle intègre nécessairement les travaux nécessités par son activité ; que le preneur est ainsi présumé avoir pris à sa charge les risques de non-conformité qu'il connaissait ou aurait dû connaître (…) » ;
1°/ ALORS QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d'entretenir cette chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ; que les travaux de sécurité prescrits par l'autorité administrative sont, sauf stipulation expresse contraire, à la charge du bailleur qui doit supporter la mise en conformité des lieux loués à leur destination contractuelle ; que ne constitue pas une telle stipulation dérogatoire expresse mettant les travaux de mise en conformité prescrits par l'autorité administrative à la charge du preneur la clause du bail selon laquelle celui-ci « devra prendre les lieux en l'état où ils se trouvent », pas plus que celle stipulant qu'« il ne pourra exiger aucune remise en état ni réparation autre que celles qui seraient nécessaires pour que les lieux soient clos et couverts » ou encore celle indiquant qu'il « devra satisfaire à toutes les charges de ville et de police, règlements sanitaires, voirie hygiène et salubrité » ; qu'aucune de ces stipulations contractuelles, non plus que leur cumul, ne transférait expressément à la charge du preneur les travaux de mise en conformité imposés par l'administration en matière de sécurité, lesquels relèvent de l'obligation de délivrance du bailleur et ne constituent pas des « réparations » ; qu'en décidant du contraire, sans constater qu'une clause expresse du bail mettait à la charge du preneur les travaux de sécurité prescrits par l'autorité administrative pour la mise en conformité des locaux au regard de leur destination contractuelle, la Cour d'appel a violé l'article 1719 alinéa 2 du Code civil ;
2°/ ALORS QU'en décidant que « le cumul des clauses du bail (…) doit s'analyser en l'espèce comme une clause expresse de transfert au preneur des travaux de remise aux normes » cependant que le rapprochement de diverses stipulations contractuelles entre elles ne peut jamais avoir pour effet de rendre « expresse » une clause non précisément stipulée par le contrat, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a derechef violé l'article 1719 alinéa 2 du Code civil.Moyens produits au pourvoi incident par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Sainte-Marthe immobilier.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR débouté la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER de sa demande tendant à faire condamner la société LE CENTRE MÉDICAL RENÉE LACROSSE au paiement de la somme de 399.900 € correspondant au coût de remise en état de l'immeuble loué ;
AU MOTIF QUE « les demandes complémentaires de la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER visant les travaux de remise en état seront écartées comme non justifiées dans leur montant » ;
ALORS QUE selon l'article 4 du Code civil, le juge ne peut se rendre coupable d'un déni de justice ; qu'il en résulte qu'un juge ne peut rejeter une demande en paiement au seul motif que cette demande est mal chiffrée sans rechercher si elle est fondée et, dans l'affirmative, sans procéder à sa juste évaluation ; qu'en l'espèce, pour débouter la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER de sa demande en paiement des travaux de remise en l'état du bien loué dirigée contre la société LE CENTRE MÉDICAL RENÉE LACROSSE, la Cour d'appel s'est bornée à décider qu'elle n'était pas justifiée dans son montant ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher le bien-fondé de la demande et sans procéder, le cas échéant, à sa juste évaluation, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code civil ;
ET ALORS QUE la Cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer que le montant des travaux de remise en état n'était pas justifié dans leur montant sans se prononcer sur l'évaluation provisionnelle établie par Monsieur X..., architecte, pour une somme qui ne serait être inférieure à 399.900 € et régulièrement versée aux débats (production n° 22) ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans s'expliquer sur ce document invoqué par la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR débouté la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER de sa demande en paiement de la taxe foncière due pour l'année 2007 ;
AUX MOTIFS QUE « L'inoccupation au 1er janvier 2007 des locaux par la société LE CENTRE MÉDICAL RENÉE LACROSSE n'étant pas contestée, la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER ne peut prétendre à la prise en charge de la taxe foncière par la cessionnaire » ;
ALORS QU'une partie ne peut pas, par son propre comportement, se soustraire unilatéralement à ses obligations contractuelles ; que le fait pour le locataire de refuser, de son propre chef, d'occuper et d'exploiter l'immeuble loué ne peut pas le dispenser de payer la taxe foncière mise contractuellement à sa charge ; qu'en en décidant autrement, sans constater une inexécution de la part de la société SAINTE MARTHE IMMOBILIER qui, seule, aurait pu justifier ce refus de la société LE CENTRE MÉDICAL RENÉE LACROSSE de payer le montant de la taxe foncière, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-22716
Date de la décision : 13/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 06 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 13 nov. 2012, pourvoi n°11-22716


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.22716
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