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07/11/2012 | FRANCE | N°11-23677

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 07 novembre 2012, 11-23677


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 juin 2011), que le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a prononcé le divorce des époux X...-Y... aux torts exclusifs du mari et a condamné celui-ci à payer à l'épouse, à titre de prestation compensatoire, une rente mensuelle de 1 000 euros ;
Sur le premier moyen ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de prononcer le divorce aux torts partagés ;
Attendu que c'est dans l'exercice de son po

uvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a, après avoir analysé les ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 juin 2011), que le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Bordeaux a prononcé le divorce des époux X...-Y... aux torts exclusifs du mari et a condamné celui-ci à payer à l'épouse, à titre de prestation compensatoire, une rente mensuelle de 1 000 euros ;
Sur le premier moyen ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de prononcer le divorce aux torts partagés ;
Attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a, après avoir analysé les éléments de preuve produits par les parties, retenu que chaque époux qui avait manifesté de façon non équivoque, à une période différente, la volonté de ne plus vivre ensemble, était ainsi responsable de la cessation de la cohabitation ;
Que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen, pris en ses deux branches, ci-après annexé :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt de limiter la condamnation de M. X... à payer une prestation compensatoire de 1 000 euros par mois jusqu'en décembre 2016 et de 800 euros par mois à compter de janvier 2017 ;
Attendu que, sous couvert de griefs non-fondés de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par la cour d'appel du montant de la prestation compensatoire ; qu'il n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé le divorce des époux X... à leurs torts partagés et d'AVOIR en conséquence débouté l'exposante de la demande indemnitaire qu'elle formait sur le fondement de l'article 266 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE « la femme reproche au mari d'avoir commis un adultère et d'avoir refusé qu'elle vienne le rejoindre à Paris ; que le mari conteste et soutient que la séparation est due au refus de sa femme de venir le rejoindre à Paris. Les époux X... se sont mariés en 1981, âgés respectivement de 24 ans pour le mari et 27 ans pour l'épouse ; qu'ils demeuraient alors à Bordeaux où Patrick X... terminait ses études à l'Ecole de Santé Navale, Marie-Thérèse Y... travaillait en qualité de vendeuse ; qu'à partir de septembre 1981, le couple a résidé dans les différents endroits où Patrick X... a été affecté (Marseille où est né leur premier enfant en 1982 – Nouvelle Calédonie où est né le second enfant en 1984 – Poitiers – Baden-Baden où est né le troisième enfant en 1988 – Hambourg) ; qu'en septembre 1997, le mari est affecté à Strasbourg où la femme ne le suit pas ; qu'elle soutient qu'il avait été décidé d'un commun accord entre les époux qu'elle s'installerait dans la maison récemment achetée à Bar-sur-Seine avec les trois enfants, ce qui est contesté par le mari qui invoque une décision prise par son épouse seule qu'elle lui a imposée ; qu'en juillet 1999, Patrick X... est affecté à Bordeaux où le couple s'installe dans une nouvelle maison acquise après la vente de la maison de Bar-sur-Seine ; qu'en mai 2001, Patrick X... est affecté à Paris ; que Marie-Thérèse Y... soutient que le couple décidait d'un commun accord, pour ne pas bouleverser la scolarité des enfants, que le mari partirait seul dans un premier temps et que le reste de la famille le rejoindrait plus tard, qu'il choisissait d'habiter une petite chambre et rentrait à Bordeaux tous les week-ends lorsqu'il n'était pas en déplacement à l'étranger ce qui était alors fréquent ; que Patrick X... soutient quant à lui qu'après discussion avec son épouse, il acceptait le principe d'un célibat à Paris en semaine pour une durée de seulement deux ans et qu'il était convenu que cette dernière viendrait alors le rejoindre avec leur fils Charles ; qu'il poursuit en expliquant - qu'à partir de 2003, il a sans discontinué demandé à son épouse de venir le rejoindre à Paris et qu'à chacune de ses visites il lui présentait des lieux de résidence possibles et des appartements dont aucun ne lui convenait, - que cette séparation géographique a été une réelle souffrance pour lui, vivant dans une grande solitude sociale et affective, alors que son épouse vivait une vie confortable à Bordeaux avec ses enfants et ses amis, - que les relations du couple se distendaient progressivement, l'éloignement géographique faisant son oeuvre, - qu'il conteste avoir eu une quelconque relation adultère à Paris, - que le refus de Marie-Thérèse Y... de le rejoindre à Paris le laissant vivre seul durant plus de quatre ans est la seule et unique cause de la distance qui s'est peu à peu insérée entre eux, qu'il produit une attestation de Monique A..., sa mère, (pièce 71), qui déclare : « j'ai vu son état physique et moral se dégrader surtout à partir de 2003 quand il est devenu clair que son épouse refusait de venir le rejoindre à Paris. Elle l'a exprimé à de très nombreuses reprises lors de réunions de famille chez moi ou à Bordeaux. Elle était enthousiaste et absorbée par ses activités professionnelles, très bien installée dans sa maison de Bordeaux, proche de sa famille, de ses amis ; elle exposait toujours le désintérêt pour elle de venir à Paris où elle disait que Patrick était très bien installé dans sa chambre qui lui suffisait amplement » ; qu'elle ajoute que fin 2004 Marie-Thérèse Y... lui a dit qu'il « n'était pas question qu'elle aille à Paris » ; qu'il communique également deux témoignages de collègues qui l'ont côtoyé de 2001 à 2005 (pièces 66 et 67) qui attestent de son travail acharné, de ses retours réguliers à Bordeaux les week-ends, de sa vie de célibataire à Paris et de la fatigue physique et morale qu'entraînait cette situation, de ses démarches pour trouver un logement pour sa famille ; qu'il présente comme élément déclencheur de la rupture une soirée à la Dame de Shangaï en avril 2005 au cours de laquelle sa femme, ivre, a fait une crise de jalousie publique injustifiée à son mari, génératrice d'un véritable scandale ; que Patrick X... veut pour preuve de ce refus de son épouse de le rejoindre à Paris le fait qu'en mai 2005, elle avait accepté une nouvelle fois de prendre en pension deux lycéennes du lycée Gustave Eiffel pour l'année scolaire 2005-2006 ; que Marie-Thérèse Y... conteste cette présentation ; qu'elle soutient - qu'au mois de mai 2005, elle commençait d'interroger son mari sur les modalités de sa future installation à Paris et celui-ci finissait par lui avouer qu'il était tombé amoureux d'une autre femme, avait décidé de prendre un appartement et de s'y installer seul ; qu'il interdisait à son épouse de le rejoindre. Qu'à l'appui, elle produit un écrit du 30 août 2005 rédigé par le mari de la manière suivante : « je certifie m'installer à Paris dans un appartement de location avec mon fils Charles, à compter du 1er septembre 2005. Je ne souhaite pas que mon épouse vienne demeurer à temps complet dans cet appartement parisien » ; que Patrick X... conteste toute portée à ce document en expliquant qu'il a été écrit dans un contexte de crise extrême de son épouse face à la volonté de l'enfant Charles de suivre son père à Paris ; qu'il a accepté de le signer devant la menace d'une scène publique en pleine rue dans le souci de protéger leur fils qui venait de porter atteinte à ses jours et à qui il voulait à tout prix éviter le spectacle d'une crise d'hystérie de sa mère ; que Marie-Thérèse Y... produit plusieurs attestations dont celles de - Monique D... (pièce 116) qui témoigne que Marie-Thérèse Y... était seule avec des enfants, sans son mari, à l'enterrement de sa mère en avril 2005 - Catherine E... (pièce 118) qui déclare le 29 septembre 2009 avoir connu Marie-Thérèse Y... il y a quelques années, avoir vu qu'elle était dans une grande détresse, son coeur brisé par le départ de son mari – 3 ans plus tard, elle dit l'avoir trouvée dans la même souffrance, acculée au divorce, - Françoise F... (pièce 131) amie de Marie-Thérèse Y... à Bordeaux dit avoir recueilli les confidences de Marie-Thérèse Y..., ses propos élogieux et admiratifs pour son mari et son souhait de le rejoindre à Paris ; en avril 2005, Marie-Thérèse Y... lui apprend que son mari ne veut pas qu'elle le rejoigne à Paris – Elle est effondrée ; que de l'ensemble de ces éléments, la cour considère qu'il est établi que chacun des époux, à une période différente, a manifesté de façon non équivoque la volonté de ne pas réunir le couple à Paris où le mari, militaire, avait été muté dès 2001, chacun étant ainsi responsable de la cessation de la cohabitation ; qu'il est ainsi établi des faits constituant des violations à la fois graves et renouvelées des devoirs et obligations du mariage imputables à chaque époux, rendant intolérable le maintien de la vie commune » ;
ALORS QUE les juges d'appel doivent réfuter les motifs des premiers juges lorsqu'ils réforment une décision ; qu'en l'espèce, les premiers juges avaient retenu que, par un écrit du 30 août 2005, Monsieur X... avait manifesté clairement son refus de cohabitation avec son épouse, en écrivant « je certifie m'installer à Paris dans un appartement de location avec mon fils Charles à compter du 1er septembre 2005. Je ne souhaite pas que mon épouse vienne demeurer à temps complet dans cet appartement parisien » ; qu'en décidant au contraire que chacun des époux avait manifesté sa volonté de maintenir la séparation, en se référant sans plus d'explications aux « éléments du dossier », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'attaqué d'AVOIR condamné Monsieur X... à payer seulement, à titre de prestation compensatoire, une somme mensuelle de 1 000 euros jusqu'au mois de décembre 2016 inclus et d'un montant mensuel de 800 euros à compter du mois de janvier 2017 ;
AUX MOTIFS QUE « le juge, pour apprécier la nécessité d'une prestation compensatoire, doit rechercher si la rupture du mariage crée une disparité dans les conditions de vie respectives des parties ; que cette prestation a pour but de compenser, autant que possible, cette disparité en fonction des besoins de l'époux à qui elle est versée et des ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce, soit le présent arrêt, et de l'évolution dans un avenir prévisible ; que pour la détermination des besoins et ressources il convient de relever les éléments suivants : mari né le 19 janvier 1957, femme née le 25 juillet 1954,mariage célébré le 27 juin 1981, résidence séparée par ordonnance de non conciliation du 25 avril 2008 mais il n'est pas contesté qu'ils vivent séparément depuis au moins 2005, soit une vie conjugale de 30 ans avec vie commune de 24 ans, Qu'ils ont eu trois enfants ; que Marie-Thérèse Y... est âgée de 57 ans ; qu'elle a quitté son travail en 1981 pour suivre son mari et s'est consacrée durant de nombreuses années à son foyer et à l'éducation des enfants dans les différents lieux d'affectation de son mari, militaire ; qu'elle justifie avoir validé au 31 décembre 2008, soit à l'âge de 54 ans, 68 trimestres au titre du régime général plus 24 trimestres de majorations pour trois enfants ; que depuis plusieurs années, elle exerce une activité de VRP (vente à domicile de linge de maison) ; qu'elle a déclaré les revenus suivants : En 2008 : salaires + BNC : 14.857 € En 2009 : salaires + BNC : 7.967 € ; que dans son attestation sur l'honneur du 25 janvier 2011, elle déclare que cette activité lui rapporte actuellement un revenu mensuel moyen de 300 € (cf. tableau de répartition des commissions du deuxième trimestre 2010) ; qu'avec sa part du prix de vente de l'immeuble commun, elle a fait l'acquisition d'une maison à Floirac, moyennant le prix principal de 190.000 €, dans laquelle elle habite ; qu'elle déclare avoir des liquidités à hauteur de 7.300 € alors que son mari invoque l'existence d'autres placements à son nom (CE Poitou-Charentes – CICSB B X) sans en justifier ; qu'elle possède en propre des parcelles de terre à St Laurent du Médoc, de peu de valeur, A la suite de la donation, la nue-propriété en indivision avec ses 2 soeurs, d'une maison à Laruns dont elle dit qu'elle est vétuste et nécessite des travaux d'entretien et de réparations ; cet immeuble a été évalué en 2004 dans l'acte de donation, en pleine propriété, 113.000 € ; que le mari conteste cette évaluation sans apporter de justification ; que Patrick X... est âgé de 54 ans. Il est médecin des armées et travaille actuellement au ministère de la défense ; qu'il perçoit une solde, primes comprises, de 6.600 € net et reconnaît que ses revenus pourront augmenter, d'ici sa retraite à 60 ans, dans une limite de 400 € mensuel ; que la projection de retraite qu'il produit, effectuée en 2009 pour un départ en 2017, sur une solde brute de base en activité de 5.121 € (actuellement solde brute : 5.273 €) fait apparaître une pension de 3.785 € à laquelle il convient d'ajouter une retraite additionnelle pour laquelle il cotise chaque mois 52,74 € ; qu'il déclare avoir une épargne de 8.000 € ; qu'avec sa part du prix de vente de l'immeuble commun, il a acheté en 2009 un appartement à Paris moyennant le prix de 445.000 € (220.000 € comptant + un emprunt qu'il rembourse par mensualités de 2.157 € jusqu'en 2024) ; qu'il assume l'enfant Charles (22 ans), que l'immeuble commun a été vendu en 2007 et le prix partagé, chaque époux ayant reçu 249.000 € qu'il existe une assurance-vie GMO au nom de l'épouse d'un montant de 33.000 € (reliquat du prix de vente de l'immeuble) qui serait à partager entre les époux ; qu'ainsi la femme, qui a consacré plusieurs années à son foyer et à l'éducation des enfants, a une capacité de gains très inférieure à celle du mari et aura également des droits à retraite moindres ; que ses conditions de vie tant actuellement qu'à l'âge de la retraite, sont moins favorables que celles de l'époux ; que ces éléments mettent en évidence une disparité telle que sus définie au détriment de l'épouse ; qu'à titre exceptionnel, et par application de l'article 276 CC, il convient de relever que l'âge du créancier, soit 57 ans, ne lui permet pas d'exercer une activité professionnelle durant un laps de temps suffisant pour se constituer des droits à retraite lui permettant de subvenir à ses besoins ; la prestation compensatoire sera ainsi fixée sous forme de rente viagère, indexée, de la manière suivante : - jusqu'au mois de décembre 2016 inclus, la rente viagère sera d'un montant mensuel de 1.000 €, - à compter du mois de janvier 2017, la rente viagère s'élèvera à la somme mensuelle de 800 € » ;
ALORS 1°) QUE l'état de santé des époux constitue l'un des éléments à prendre en considération lors de l'appréciation de la disparité ; qu'en l'espèce, Madame X... démontrait qu'elle souffrait d'hypertension artérielle sévère depuis qu'elle avait subi une opération du coeur, qu'elle faisait l'objet d'un traitement contre la dépression depuis l'abandon de son mari, qu'elle venait en outre de subir l'ablation d'une tumeur, qu'elle connaissait des troubles du sommeil et, en outre, que son audition et sa vue se dégradaient gravement ; qu'en omettant purement et simplement de prendre en considération l'état de santé de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 271 du code civil ;
ALORS 2°) QUE : le fait de payer des mensualités importantes en vue d'opérer un investissement immobilier de grande envergure est un choix personnel, de sorte qu'il n'y a pas lieu, lors de l'évaluation des éléments passifs du patrimoine de l'époux débiteur, de retenir comme des charges les mensualités de remboursement du prêt immobilier conclu en conséquence ; qu'en prenant en considération l'alourdissement des charges de Monsieur X... en raison de son investissement immobilier, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-23677
Date de la décision : 07/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 07 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 07 nov. 2012, pourvoi n°11-23677


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Laugier et Caston, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23677
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