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30/10/2012 | FRANCE | N°11-19879

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 octobre 2012, 11-19879


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen, relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu l'article 173 (2°) de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 623-4 (2°) du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, applicable à la cause, et les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu que même si les jugements par lesquels le tribunal statue sur le recours formé contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire dans la limite de ses

attributions, à l'exception de ceux statuant sur les revendications, ne so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen, relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu l'article 173 (2°) de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 623-4 (2°) du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, applicable à la cause, et les principes régissant l'excès de pouvoir ;
Attendu que même si les jugements par lesquels le tribunal statue sur le recours formé contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire dans la limite de ses attributions, à l'exception de ceux statuant sur les revendications, ne sont pas susceptibles d'un appel ou d'un recours en cassation, aucune disposition ne peut interdire de faire constater, selon les voies de recours du droit commun, la nullité d'une décision entachée d'excès de pouvoir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 22 avril 1993, l'exploitation agricole de M. et Mme X... et la SCI Le Vau ont été mises en redressement judiciaire, MM. Y... et Z... étant respectivement désignés représentant des créanciers et administrateur judiciaire ; que, par ordonnance du 17 mai 1993, le juge-commissaire a autorisé M. Z..., ès qualités, à retirer des marchandises gagées au profit de M. A... et détenues dans des magasins occupés par la société Auxiga et dit qu'il procéderait à la commercialisation des vins ; que, le 18 avril 1994, l'exploitation agricole de Mme X... a été mise en liquidation judiciaire, M. Y... étant désigné liquidateur ; que M. X... est décédé en cours de procédure ; que, par ordonnance du 19 mars 2009, le juge-commissaire a autorisé M. Y..., ès qualités, à procéder à la vente aux enchères publiques de l'actif immobilier de la SCI Le Vau, ainsi que de l'actif immobilier de Mme X... ; que, les 24 mars et 18 juin 2009, Mme X... a respectivement formé le recours prévu par l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 à l'encontre de chacune des deux ordonnances des 19 mars 2009 et 17 mai 1993 ; que, par jugement du 9 juillet 2009, le tribunal a débouté Mme X... de ses recours ; que Mme X... et son fils M. X... (les consorts X...) en ont relevé appel nullité ;
Attendu qu'en déclarant recevable l'appel nullité relevé par les consorts X... contre le jugement du 9 juillet 2009, pris dans ses dispositions visant l'ordonnance du 19 mars 2009, qui n'était pas ouvert et en statuant sur le fond, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les texte et principes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare Mme Annie B... veuve X... et son fils recevables mais non fondés en leur appel nullité du jugement déféré, pris dans ses dispositions visant l'ordonnance du 19 mars 2009, l'arrêt rendu le 8 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable l'appel nullité relevé par les consorts X... contre le jugement du 9 juillet 2009, pris dans ses dispositions visant l'ordonnance du 19 mars 2009 ;
Condamne les sociétés Coopérative agricole du pays de Loire, Royal Bank of Canada, HSBC France et Banque Espirito Santo et de la Vénétie, MM. Y... et C..., ès qualités, aux dépens, y compris ceux exposés devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour les consorts X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré Madame B..., veuve X... et Monsieur Thierry X... non fondés en leur appel-nullité du jugement du Tribunal de grande instance d'ANGERS pris dans ses dispositions visant l'ordonnance du 19 mars 2009 et d'AVOIR rejeté la demande de renvoi de l'affaire devant le juge-commissaire ;
AUX MOTIFS QUE les appelants invoquent deux griefs à l'appui de leur demande de nullité, à savoir que le Tribunal de Grande Instance d'Angers aurait statué sans motivation suffisante et qu'il aurait consacré un excès de pouvoir commis par le jugecommissaire dans son ordonnance du 17 mai 1993 ; sur le premier moyen ; qu'en l'absence d'une preuve de la notification à Annie B... veuve X... de l'ordonnance rendue le 17 mars 1993, c'est à juste raison que le jugement entrepris a d'abord déclaré l'opposition portée devant lui recevable ; qu'ensuite le Tribunal de Grande Instance d'Angers, après avoir constaté qu'effectivement, le jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire avait omis de nommer le juge-commissaire compétent, a relevé que, néanmoins, la requête aux fins d'ordonnance avait été présentée à ‘ Madame Dominique D..., juge-commissaire au Tribunal de Grande Instance d'Angers', démontrant par là que Madame D... était bien le juge-commissaire, admis comme tel par les débiteurs ; qu'il a relevé aussi que, dans leurs courriers, les débiteurs mentionnaient Madame D... comme leur juge-commissaire et qu'ils n'ont pas contesté les ordonnances subséquentes rendues par ce juge ; que le Tribunal a pris en compte le fait que la procédure collective n'avait pas souffert de l'absence de désignation d'un juge-commissaire et que, selon les éléments apportés, l'ordonnance critiquée n'avait pas reçu exécution et qu'aucun préjudice en était résulté pour les débiteurs ; que cette motivation est suffisante au regard de l'article 455 du Code de procédure civile et ne saurait ouvrir droit à nullité du jugement ; sur le second moyen ; que l'article L. 621-8 du Code de commerce applicable en 1993 imposait à la juridiction, saisie d'une demande de redressement judiciaire des débiteurs, de désigner un juge-commissaire ; que si aucun texte ne prévoyait de sanction visant le jugement d'ouverture de la procédure, quand ce juge n'était pas désigné, puisqu'il pouvait y être pourvu par une ordonnance ultérieure, il n'en demeure pas moins que tout juge, lorsqu'il rend une décision dans un dossier, tient son pouvoir de l'organe décisionnaire qui le nomme et qu'en l'absence de cette désignation effective toutes les décisions qu'il prend, sont empreintes d'un excès de pouvoir ; que s'agissant d'une règle de compétence judiciaire d'ordre public, il ne peut être tiré argument, pour valider rétroactivement l'ordonnance du 17 mai 1993, qu'Annie B..., veuve X... et Thierry X... ont entendu, par leur attitude ultérieure, admettre comme décision exempte de nullité, une telle décision ; qu'ils n'entraient pas en leur pouvoir, en effet, dans le contentieux régissant le droit de la faillite, de choisir et désigner leur juge ; que puisque l'ordonnance du 17 mai 1993 encourait la nullité, il est à juste titre reproché au Tribunal de Grande Instance d'Angers d'avoir, en refusant de faire droit au moyen de nullité qui lui était argué, consacré l'excès de pouvoir du juge-commissaire ; que ce faisant, le Tribunal de Grande Instance d'Angers a commis lui-même un excès de pouvoir qui conduit la Cour de céans à annuler l'ordonnance du 17 mai 1993 et le jugement déféré en ce qu'il rejette le recours présenté contre celui-ci ; qu'Annie B... veuve X... et Thierry X... ne démontrent pas la nécessité de recourir à une nouvelle ordonnance du jugecommissaire pour statuer sur l'objet visé par celle annulée ; que l'ordonnance annulée conférait autorisation à Maître Z... de procéder à la commercialisation de bouteilles de vins lesquelles étaient, à titre de gage avec dépossession, entre les mains d'un tiers détenteur et que cette ordonnance autorisait à consigner le prix de vente à la Caisse des Dépôts et Consignations ; qu'il n'est pas rapporté aujourd'hui que ces bouteilles de vins se trouveraient encore entre les mains du tiers détenteur et que le litige avec le créancier gagiste n'aurait pas, depuis 1993, connu son épilogue ; qu'il n'est pas démontré non plus que la liquidation judiciaire aurait à attendre le recouvrement d'une quelconque créance du chef de cette autorisation et dépendant d'une décision du juge-commissaire ; que les comptes découlant, éventuellement, de l'annulation de l'ordonnance du 17 mai 1993, peuvent être effectués par le liquidateur, qui a le pouvoir de saisir ultérieurement, en tant que de besoin, le juge-commissaire ; que la demande de renvoi de la cause devant une juge-commissaire n'est pas en l'état justifiée et sera repoussée ; du chef des dispositions visant l'ordonnance du 19 mars 2009 ; que les appelants n'ont formé aucun grief à l'appui de leur recours dirigé contre cette ordonnance, se contentant de solliciter un sursis à statuer sur le fond, jusqu'à reprise de comptes comme conséquence de la nullité de l'ordonnance du 17 mai 1993 ; qu'il n'a pas été fait droit à la demande de renvoi devant le juge-commissaire pour établissement de tels comptes ; qu'alors et en l'absence d'autres motifs de recours, Annie B..., veuve X... et Thierry X... seront déboutés, comme non fondés, de leur appel-nullité ;
1° ALORS QUE l'annulation de l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé le liquidateur à payer un créancier postérieur et à céder des biens du débiteur impose la remise des choses en l'état antérieur à l'annulation ; qu'en jugeant, pour débouter les consorts X... de leur demande de nullité de l'ordonnance du 19 mars 2009 qu'« il n'était pas démontré … que la liquidation judiciaire aurait à attendre une quelconque créance du chef de cette autorisation annulée » (arrêt, p. 5 § 6), cependant que la nullité de l'ordonnance qui avait autorisé le liquidateur à payer un créancier pour vendre les biens sur lesquels il exerçait un droit de rétention imposait la remise des choses dans leur état antérieur, la Cour d'appel a violé l'article L. 621-4 du Code de commerce dans sa version applicable aux faits de la cause ;
2° ALORS QUE le débiteur peut à tout moment solliciter la clôture des opérations de liquidation lorsque le liquidateur dispose des sommes nécessaires pour désintéresser les créanciers ; que l'obligation de restitution née de la nullité d'une autorisation de procéder au paiement d'un créancier postérieur oblige le liquidateur à reprendre les comptes de la liquidation ; qu'en jugeant, pour débouter les consorts X... de leur demande de nullité de l'ordonnance du 19 mars 2009 que « les comptes découlant, éventuellement, de l'annulation de l'ordonnance du 17 mai 1993 peuvent être effectués par le liquidateur, qui a le pouvoir de se saisir » (arrêt, p. 5 § 7) cependant que les créances de restitution nées dans le patrimoine du débiteur autorisaient ces derniers à solliciter la reprise des comptes de la liquidation afin de pouvoir solliciter, le cas échéant, la clôture de cette dernière, la Cour d'appel a violé l'article L. 622-30 du Code de commerce, dans sa version applicable aux faits de la cause ;
3° ALORS QUE le juge saisi d'une contestation relative à une ordonnance du jugecommissaire ayant ordonné une cession d'actifs ne peut la rejeter s'il n'est pas établi qu'elle est justifiée par l'existence d'un passif ; qu'en déclarant infondée la demande de nullité de l'ordonnance du 19 mars 2009 cependant que la nécessité de reprendre les comptes de la liquidation avait fait naître un doute sur l'existence d'un passif justifiant la vente des actifs immobiliers du débiteur et qu'elle avait rejeté la demande de sursis à statuer formée par les consorts X... dans l'attente de la reprise des comptes de la liquidation, la Cour d'appel qui s'est abstenue d'assurer le respect du droit de propriété du débiteur a méconnu ses pouvoirs et violé les articles 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et 544 du Code civil ;
4° ALORS QU'en toute hypothèse, toute personne a droit à un recours effectif ; que le débiteur doit pouvoir exercer un recours contre toute décision qui porte atteinte à son droit de propriété ; qu'en déclarant infondée la demande de nullité de l'ordonnance du 19 mars 2009 au motif que le Tribunal n'aurait pas excédé ses pouvoirs en refusant de déclarer nulle une ordonnance portant atteinte au droit de propriété du débiteur placé en liquidation, la Cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du protocole n° 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-19879
Date de la décision : 30/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 08 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 oct. 2012, pourvoi n°11-19879


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Boré et Salve de Bruneton

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19879
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