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17/10/2012 | FRANCE | N°11-16022;11-16448

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 octobre 2012, 11-16022 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° T 11-16. 022 et F 11-16. 448 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Transports Jeanton le 10 juin 2003 en qualité de chauffeur poids-lourds ; que le salarié a été membre du comité d'entreprise ; que le 24 janvier 2007, l'employeur a proposé à l'ensemble des chauffeurs, dont M. X..., de les " mensualiser, sans perte de salaire, avec un salaire de base brut pour 200 heures, 210 heures, voire 220 heures, qui engloberait les primes de n

on-accident et entretien " ; que ces nouvelles dispositions ont été ac...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° T 11-16. 022 et F 11-16. 448 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Transports Jeanton le 10 juin 2003 en qualité de chauffeur poids-lourds ; que le salarié a été membre du comité d'entreprise ; que le 24 janvier 2007, l'employeur a proposé à l'ensemble des chauffeurs, dont M. X..., de les " mensualiser, sans perte de salaire, avec un salaire de base brut pour 200 heures, 210 heures, voire 220 heures, qui engloberait les primes de non-accident et entretien " ; que ces nouvelles dispositions ont été acceptées par M. X... qui a été rémunéré sur la base mensuelle de 200 heures ; que par lettres des 12 février et 12 juin 2007, le syndicat FO a mis l'employeur en demeure de faire apparaître sur les bulletins de paie les heures supplémentaires majorées à 25 % et 50 % ; que la société Transports Jeanton a procédé à la modification demandée des bulletins de paie, les salariés restant rémunérés sur la même base mensuelle ; que le 2 janvier 2008, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaires à titre d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, de prime d'ancienneté et de dommages-intérêts pour mesure discriminatoire ; que, postérieurement, l'employeur a décidé de modifier le mode de calcul des heures travaillées et de supprimer le caractère forfaitaire des heures supplémentaires, le temps de travail dans l'entreprise étant, à compter du mois de décembre 2009, fixé à 151, 57 heures, majoré des heures d'équivalence et des heures supplémentaires et le temps de travail étant calculé au moyen du système des disques et des chronotachygraphes numériques ;
Sur le moyen unique du pourvoi de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié un rappel de prime d'ancienneté, alors, selon le moyen :
1°/ que l'accord collectif est un acte écrit à peine de nullité et doit dès lors, pour être valable, comporter la signature des parties qui l'ont conclu ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la copie de l'accord en date du 12 février 1972 produite par le salarié mentionnant l'adhésion de l'UNOSTRA le 13 février 1972, syndicat dont est membre l'employeur, n'est pas signée par ce dernier ; qu'en jugeant néanmoins cet accord valablement conclu par l'UNOSTRA et par conséquent applicable à la société Transports Jeanton, la cour d'appel a violé l'article L. 2231-3 du code du travail ;
2°/ qu'il appartient au juge de vérifier la validité de l'accord collectif contestée devant lui ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que l'accord litigieux avait été déposé auprès de l'inspection du travail compétente pour en déduire qu'il était régulier, sans constater par elle-même que celui-ci avait été valablement signé par l'UNOSTRA, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2231-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que la copie de l'accord collectif produite par le salarié émanait de la direction départementale du travail, a pu en déduire que celle-ci, qui est chargée de recevoir le dépôt des conventions et accords collectifs en cinq exemplaires signés des parties, avait accepté le dépôt de l'accord litigieux après en avoir contrôlé la régularité formelle et que celui-ci était valable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi du salarié :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi du salarié :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de rappel de salaire, l'arrêt retient que le contrat de travail de M. X... du 10 juin 2003 stipule que la rémunération mensuelle du salarié sera déterminée en fonction du temps de service réalisé qui ne saurait être inférieur à 169 heures et ne comporte aucune clause l'obligeant à garantir à M. X... le paiement de 200 heures de travail, quel que soit le nombre des heures effectuées ; que l'employeur explique que jusqu'en décembre 2009, les modalités de paiement en usage dans l'entreprise ne reposaient pas sur l'utilisation des disques chronotachygraphes mais sur une forfaitisation des heures supplémentaires ; que la modification de ce mode de paiement, qui n'était pas conforme à la réglementation en vigueur, notamment aux dispositions du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transports routiers de marchandises, pour la mettre en conformité avec la réglementation, ne constitue pas une modification unilatérale du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que, par note du 24 janvier 2007, l'employeur avait proposé au salarié un avenant à son contrat de travail aux termes duquel, à compter de la paie de janvier 2007, il serait mensualisé, sans perte de salaire, avec un salaire de base brut pour 200 heures, 210 heures, voire 220 heures, englobant les primes de non-accident et entretien et que ces dispositions avaient été acceptées par le salarié qui avait été rémunéré sur la base de 200 heures par mois, la cour d'appel, qui ne s'est pas expliquée sur la portée de cet avenant, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de sa demande de rappel de salaire, l'arrêt rendu le 17 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne la société Transports Jeanton aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Transports Jeanton à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. Francis X..., demandeur au pourvoi n° T 11-16. 022

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande de rappel de salaire ;
AUX MOTIFS QUE le contrat de travail de M. X... dispose que sa rémunération mensuelle sera déterminée en fonction du temps de service réalisé qui ne saurait être inférieur à 169 heures et que dans le cas de réalisation d'heures supplémentaires et d'heures de nuit celles-ci seront décomptées, payées et majorées conformément aux dispositions légales et conventionnelles applicables ; que le contrat de travail ne comporte aucune clause obligeant la société à garantir à M. X... le paiement de 200 heures de travail, quelque soit le nombre des heures effectuées ; que la société Transports Jeanton explique que jusqu'en décembre 2009, les modalités de paiement en usage dans l'entreprise ne reposaient pas sur l'utilisation des disques chronotachygraphes, mais sur une forfaitisation des heures supplémentaires et qu'elle fait exactement observer que la modification de ce mode de paiement, qui n'était pas conforme à la réglementation en vigueur, notamment aux dispositions du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises, pour la mettre en conformité avec la réglementation, ne constitue pas une modification du contrat de travail de M. X... ;
ALORS, 1°), QUE, dans ses conclusions d'appel (pp. 16 et 17), M. X... se prévalait d'un avenant à son contrat de travail daté du 24 janvier 2007, qu'il versait aux débats (pièce n° 2), dont il faisait valoir qu'il lui ouvrait le droit d'être rémunéré sur une base mensuelle de 200 heures par mois, ses heures supplémentaires étant forfaitisées ; qu'en appréciant les droits du salarié uniquement au regard des termes du contrat initial signé le 10 juin 2003, sans s'expliquer sur la portée de l'avenant dont il avait fait l'objet, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QUE tant la durée du travail que la rémunération constituent des éléments du contrat de travail qui ne peuvent être modifiés sans l'accord du salarié ; que l'absence de conformité du mode de décompte des heures supplémentaires à la réglementation en matière de transports routiers ne saurait autoriser l'employeur, sous couvert de se conformer à cette règlementation, à mettre en place unilatéralement un nouveau mode de décompte ayant pour effet de réduire la rémunération du salarié ; qu'en considérant que l'abandon d'un système de forfaitisation des heures supplémentaires ne constituait pas une modification du contrat de travail dès lors qu'il avait pour objet de mettre l'entreprise en conformité avec la règlementation, sans rechercher si cette modification n'avait pas eu pour effet de réduire, pour une même quantité de travail effectuée, la rémunération du salarié, ce qui aurait constitué une modification de son contrat de travail qu'il était en droit de refuser, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale,
AUX MOTIFS QU'au soutien de cette demande, M. X... explique que les chauffeurs des entreprises Jeanton et Guyamier ont toujours eu la possibilité de conserver leur véhicule pour regagner leur domicile après le service ; qu'à compter du 7 septembre 2007, l'employeur a retiré cet avantage aux seuls salariés syndiqués ; qu'à l'appui de cette affirmation, il produit aux débats un procès-verbal, établi le 13 novembre 2007, par M. Z..., huissier de justice, duquel il ressort que dix véhicules étaient stationnés sur la voie publique en des lieux proches des domiciles de leurs conducteurs ; que des attestations en date du 26 octobre 2007, de M. A..., chauffeur, qui déclare que le juillet 2007, M. B... a demandé à M. X... de rentrer tous les soirs aux dépôts à Ambès pour poser le camion et faire désormais du régional ; que toutefois, la société Transports Jeanton explique que c'est en fonction de leurs trajets de livraison que les chauffeurs ont la possibilité de rentrer chez eux avec le camion ; qu'elle précise que la hausse des prix du carburant et la perte, en 2007, d'un client important, la société MSC, dont le bateau à décharger est situé sur le Verdon l'a conduit à rediriger les chauffeurs rendus disponibles par cette baisse d'activité, dont M. X... et les autres salariés syndiqués, mais aussi d'autres salariés, sur des trajets en direction D'Angoulême et/ ou de la Rochelle et que leurs logements ne se trouvant plus sur le trajet maison-client, il devenait plus logique qu'ils laissent leurs tracteurs aux dépôts ; qu'au soutien de cette affirmation, elle produit aux débats des attestations, en date du 5 août 2010, de MM. C... et D..., et des attestations en date du 6 août 2010, de Mme E... et de MM. F... et H..., tous chauffeurs, qui déclarent ne rentrer chez eux avec leurs tracteurs que lorsque leur travail est sur l'axe de leur domicile et sinon les laisser aux dépôts ; que dans ces conditions, tous les chauffeurs dont le domicile ne se trouve pas dans l'axe de leurs lieux de travail étant tenus de ramener leurs tracteurs aux dépôts, la discrimination syndicale alléguée n'est pas établie ;
ALORS QUE s'il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination syndicale, de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination, c'est à l'employeur qu'il incombe de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que, dans ses conclusions d'appel (p. 12), le salarié faisait valoir qu'à compter du mois de septembre 2007, son employeur lui avait interdit de regagner son domicile avec le véhicule de la société, contrairement à d'autres salariés, non syndiqués, qui avaient continué de bénéficier de cet avantage ; qu'en se fondant uniquement, pour écarter l'existence d'une discrimination, sur des attestations de salariés déclarant qu'ils ne conservaient le véhicule de la société que lorsque leur domicile était sur leur trajet, sans rechercher si le changement de trajet de M. X..., invoqué par l'employeur pour justifier le retrait de l'avantage, était établi et justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, la cour d'appel a méconnu les règles d'administration de la preuve applicable en la matière et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat,
AUX MOTIFS QUE la société Transports Jeanton explique, sans être contredite, que le fait de permettre aux chauffeurs de rentrer chez eux avec leur camion ne constitue pas un mode de fonctionnement généralisé et systématique de l'entreprise et que c'est la perte du client MSC, dont le bateau à décharger était situé sur le Verdon qui est la cause du changement de trajet de M. X... ; que dans ces conditions, M. X... qui n'établit pas l'intention malicieuse et délibérée de la société Transport Jeanton de modifier son trajet pour lui supprimer la possibilité de rentrer chez lui avec son camion, sera débouté de sa demande de dommages-intérêts ;
ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel (p. 14), M. X... soutenait que l'employeur ne produisait aucune pièce au soutien de ses affirmations et ne démontrait pas, en particulier, qu'il était amené à effectuer un trajet l'éloignant de son domicile ; qu'en estimant cependant que le salarié n'avait pas contredit l'employeur lorsque ce dernier avait expliqué que la perte d'un important client était la cause du changement de trajet du salarié, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ses conclusions, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Transports Jeanton, demanderesse au pourvoi n° F 11-16. 448
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société à verser au salarié un rappel de prime d'ancienneté ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
AUX MOTIFS PROPRES QUE « En ce qui concerne l'accord départemental du 12 février 1972 : Considérant que la SAS TRANSPORTS JEANTON conteste en premier lieu la validité du protocole d'accord départemental du 12 février 1972 au motif que le document produit par M. X... devant le conseil de prud'hommes n'est que la copie d'un document non signé et portant copie d'un cachet à peine lisible ; qu'elle demande en conséquence à la cour, sur le fondement de l'article 138 du code de procédure civile, d'ordonner la communication de ce document par la direction départementale du travail et par le conseil de prud'hommes de Bordeaux ; Considérant que l'article 138 du code de procédure civile dispose que : « Si, dans le cours d'une instance, une partie entend faire état d'un acte authentique ou sous seing privé auquel elle n'a pas été partie ou d'une pièce détenue par un tiers, elle peut demander au juge saisi de l'affaire d'ordonner la délivrance d'une expédition ou la production de l'acte ou de la pièce » ; Considérant que la société TRANSPORTS JEANTON, à qui il était loisible de solliciter directement auprès de l'inspection du travail ou du conseil de prud'hommes, ou même auprès de l'UNOSTRA dont il est membre, une expédition ou une copie du protocole litigieux, ne justifie, ni avoir effectué cette démarche, ni a fortiori s'être heurtée à un refus de communication de la part de l'inspection du travail ou du conseil de prud'hommes ; que dans ces conditions elle sera déboutée de sa demande parfaitement dilatoire fondée sur l'article 138 du code de procédure civile ; Considérant au demeurant que M. X... produit aux débats deux photocopies d'un protocole d'accord, en date du 12 février 1972, conclu entre d'une part l'union syndicale des transports publics routiers de la Gironde et le syndicat départemental des loueurs de véhicules industriels de la Gironde, d'autre part, les syndicats départementaux C. G. T., C. F. D. T., F. N. C. R., et F. O, que la première copie comporte les signatures manuscrites des représentants patronaux et des représentants ouvriers ; que la seconde copie comporte, d'une part, une mention indiquant que l'UNOSTRA, a adhéré au protocole, le 13 février 1972, et, sur chacune de ses deux pages, le timbre humide du ministère des transports-inspection du travail et mentionne les noms des représentants patronaux signataires : I..., J... et K... et les noms des représentants ouvriers signataire, pour F. O. G..., pour la C. F. D. T L..., pour la C. G. T. M... et pour la F. N. C. R. N... ; Considérant que c'est à juste titre dans ces conditions, que le conseil des prud'hommes, après avoir exactement relevé, d'une part, que les articles D. 2231-4 et D. 2231-5 du code du travail précisent que les conventions et accords collectifs sont déposés auprès de la direction départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle et que le service départemental dépositaire des conventions et accords collectifs de travail est celui dans le ressort duquel ils ont été conclus, d'autre part, que la copie du protocole produite par M. X..., émane de l'inspection du travail de la Gironde, puisqu'elle est revêtue de son cachet, a reconnu la validité de cet accord ; Considérant que c'est encore à juste titre que le conseil, après avoir relevé que la société TRANSPORTS JEANTON n'établit pas, ni même d'ailleurs n'allègue, que l'accord en cause a été régulièrement dénoncé, a déclaré cet accord applicable à la société TRANSPORTS JEANTON ; En ce qui concerne la prime d'ancienneté : Considérant que l'article 3° de l'accord du 12 février 2007 en réalité le 12 février 1972, intitulé « majoration pour ancienneté » dispose que : « Le salaire réel pour l'ensemble du personnel ouvrier sera majoré de 3 % tous les 3 ans jusqu'à 15 % à 15 ans » Considérant que M. X... est dès lors bien fondé à réclamer, sur la base de cette disposition de l'accord de 1972, la condamnation de la société TRANSPORTS JEANTON à lui verser un rappel de prime d'ancienneté selon son décompte arrêté au 30 juin 2010, que la société TRANSPORTS JEANTON ne discute pas »

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « M. X... base sa demande sur les dispositions d'un protocole d'accord départemental du 12 février 1972 qui, dans son article 3, prévoit que le salaire réel pour l'ensemble du personnel ouvrier des transports routiers de la Gironde, sera majoré de 3 % tous les 3 ans jusqu'à 15 % à 15 ans. De son côté, l'employeur affirme que les majorations pour ancienneté ont été calculées conformément aux dispositions de la Convention Collective et que M. X... ne rapporte pas la preuve que le protocole d'accord départemental du 12 février 1972 serait applicable. A ce sujet, l'article L 2232-5 du Code du Travail précise que le champ d'application territorial des conventions de branches et des accords professionnels peut être national, régional ou local. Par conséquent, un accord départemental est parfaitement admissible. De plus, l'article L 2261-1 du Code du Travail prévoit que les conventions et accords sont applicables, sauf stipulations contraires, à partir du jour qui suit leur dépôt auprès du service compétent, dans des conditions déterminées par voie réglementaire. Les articles D 2231-4 et D 2231-5 du Code du Travail précisent que les conventions et accords collectifs sont déposés auprès de la Direction Départementale du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle et que le service départemental dépositaire des conventions et accords collectifs de travail est celui dans le ressort duquel ils ont été conclus. En l'espèce, la copie de l'accord du 12 février 1972 produite par M. X... émane de l'Inspection du Travail des Transports de la Gironde, puisqu'elle est revêtue de son cachet. En conséquence, le Conseil ne peut que constater que l'accord départemental du 12 février 1972 a bien fait l'objet d'un dépôt auprès de l'Inspection du Travail compétente et, dans un tel cas, la Cour de Cassation a jugé, dans un arrêt du 21 février 2007, qu'un accord est réputé valable dès lors qu'il a fait l'objet d'un dépôt auprès de la Direction Départementale du Travail qui l'a accepté, après en avoir contrôlé la régularité formelle. En outre, cet arrêt du 21 février 2007 confirmait un jugement de la Section Commerce du Conseil de Prud'hommes de BORDEAUX du 17 février 2004 et concernait directement l'accord départemental du 12 février 1972, dont la Cour de Cassation a confirmé la validité en ces termes : " Le Conseil de Prud'hommes, qui a constaté que la copie de l'accord produite par le salarié émanait de la Direction Départementale du Travail, a pu en déduire que celle-ci, qui est chargée de recevoir le dépôt des conventions et accords collectifs en cinq exemplaires signés par les parties, avait accepté le dépôt de l'accord litigieux après en avoir contrôlé la régularité formelle, et que celui-ci était valable ». Dans ces conditions, en application de cette jurisprudence, le Conseil considère que cet accord départemental du 12 février 1972, est parfaitement valable. Par ailleurs, l'employeur ne rapporte pas la preuve que cet accord aurait été valablement dénoncé et donc il continue à s'appliquer aux entreprises de transports routiers de la Gironde et, en particulier, au sein de la SAS TRANSPORTS JEANTON. En application de cet accord, il est, par conséquent fait droit à la demande de l'appel de primes d'ancienneté de M, X... pour les années 2007 et 2008, conformément à ses calculs »

1. ALORS QUE l'accord collectif est un acte écrit à peine de nullité et doit dès lors, pour être valable, comporter la signature des parties qui l'ont conclu ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la copie de l'accord en date du 12 février 1972 produite par le salarié mentionnant l'adhésion de l'UNOSTRA le 13 février 1972, syndicat dont est membre l'employeur, n'est pas signée par ce dernier ; qu'en jugeant néanmoins cet accord valablement conclu par l'UNOSTRA et par conséquent applicable à la société exposante, la Cour d'appel a violé l'article L 2231-3 du Code du travail ;
2. ALORS QU'il appartient au juge de vérifier la validité de l'accord collectif contestée devant lui ; qu'en se fondant sur la seule circonstance que l'accord litigieux avait été déposé auprès de l'inspection du Travail compétente, pour en déduire qu'il était régulier, sans constater par elle-même que celui-ci avait été valablement signé par l'UNOSTRA, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 2231-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-16022;11-16448
Date de la décision : 17/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 17 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 oct. 2012, pourvoi n°11-16022;11-16448


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.16022
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