LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 18 janvier 2011), que M. X... a souscrit le 30 août 1996 auprès de la société ACEP, aux droits de laquelle se trouve la société Aviva vie (l'assureur), un contrat d'assurance sur la vie libellé en unités de compte, dénommé "Cyrus architecture", offrant au souscripteur des supports diversifiés entre lesquels il pouvait arbitrer, sans limitation, selon la valeur retenue à la dernière bourse de la semaine précédente, en application d'une clause dite d'arbitrage à cours connu ; qu'en janvier 1998, l'assureur a modifié unilatéralement la liste des supports éligibles au profit de supports obligataires ou monétaires ne présentant pratiquement plus de caractère spéculatif ; que le 13 novembre 1998, M. X... a signé un avenant aux termes duquel il renonçait au bénéfice de l'arbitrage à cours connu ; que reprochant à l'assureur d'avoir illicitement supprimé les supports spéculatifs attachés au contrat pour interdire le fonctionnement de l'arbitrage à cours connu et soutenant qu'il n'avait signé l'avenant que par suite des manoeuvres dolosives pratiquées par l'assureur, M. X... l'a assigné par acte du 2 mai 2006 en annulation de l'avenant litigieux, en restitution des supports illicitement supprimés et en indemnisation après expertise ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite son action en nullité pour dol de l'avenant du 13 novembre 1998 et de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, que le délai de prescription de l'action en nullité d'un contrat d'assurance pour dol ne commence à courir qu'à compter du jour où le vice invoqué par l'assuré lui a été révélé ; que le dol de la société Aviva vie invoqué par M. X... résultait de ce que cet assureur qui avait illégalement supprimé les supports spéculatifs du contrat originaire, lui avait fait croire que la signature de l'avenant du 13 novembre 1998 était l'unique moyen d'obtenir la restitution desdits supports ; qu'en affirmant néanmoins que M. X... avait pu avoir connaissance du dol commis par la société Aviva vie le jour même de la signature dudit avenant du 13 novembre 1998, aux motifs inopérants qu'à cette date il avait pu appréhender la modification de son contrat (originaire), et que l'avenant l'informait clairement de la suppression du système d'arbitrage à cours connu, sans rechercher comme elle y était invitée, à quelle date M. X... a pu réaliser qu'il aurait pu obtenir la restitution sur son contrat originaire des supports spéculatifs sans devoir renoncer à la clause d'arbitrage à cours connu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1116 et 1304 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la prescription quinquennale définie à l'article 1304 du code civil court du jour où le dol a été découvert ; que M. X... ne conteste pas avoir reçu avant la signature de l'avenant la liste des supports éligibles en cas de signature de cet acte ; qu'il a été en mesure d'appréhender exactement la modification du contrat originaire, l'avenant du 13 novembre 1998 comportant une mention l'informant sans ambiguïté de la suppression du système d'arbitrage à cours connu ; qu'entre la date de la signature de l'avenant et celle de l'assignation, aucun élément nouveau n'est intervenu qui aurait dévoilé des manoeuvres dolosives que M. X... n'aurait pu découvrir le 13 novembre 1998 ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, faisant ressortir que les manoeuvres invoquées par M. X... pouvait être décelées dès la signature de l'avenant, la cour d'appel qui n'avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu décider que le délai de la prescription quinquennale avait commencé à courir du jour de la signature de cet acte et en déduire que l'action en nullité pour dol introduite par M. X... par assignation du 2 mai 2006 était prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le deuxième moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé par M. Bizot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du quatre octobre deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré prescrite l'action de Monsieur X... en nullité pour dol de l'avenant du 13 novembre 1998 et de l'AVOIR débouté de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE le contrat souscrit par M. X... le 30 août 1996 ne comporte aucune mention relative à la prescription, en dépit de l'article R 112-1 du code des assurances, selon lequel les polices d'assurance doivent rappeler les dispositions de la loi concernant la prescription des actions dérivant des contrats d'assurance ;
Que contrairement à ce que prétend la société AVIVA VIE, l'article R 112-1 concerne les contrats d'assurance-vie ; qu'en effet cet article dans sa rédaction issue du décret du 20 septembre 1990, prévoit que les entreprises mentionnées au 5° de l'article L 310-1 du code des assurances doivent indiquer, notamment, les dispositions relatives à la prescription ; que la loi du 4 janvier 1994 modifiant le code des assurances, en vue notamment de la transposition des directives n° 92-49 et n° 92-96 des 18 juin et 10 novembre 1992 du Conseil des communautés européennes, a refondu l'article L 310-1 du code des assurances, et modifiant la classification des catégories des entreprises soumises au contrôle de l'Etat, a supprimé le 5°, de sorte que ce qui relevait de cette catégorie se trouve englobé dans les 1ères, 2èmes et 3èmes catégories ; qu'il s'ensuit que les contrats d'assurance-vie doivent, conformément aux dispositions de l'article R 112-1, mentionner les stipulations relatives à la prescription et que l'inobservation de cette disposition est sanctionnée par l'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L 114-1 du code des assurances ;
Qu'en conséquence, il y a lieu à application de la prescription quinquennale édictée par l'article 1304 du code civil, qui constitue, dans tous les cas où l'action n'est pas limitée à un moindre temps par une disposition particulière, la règle de droit commun en matière d'action en nullité relative pour vice du consentement ;
Que le point de départ de la prescription quinquennale se situe au jour où l'assuré a pu appréhender exactement les modifications de son contrat quant à la substitution des supports et à la suppression de la clause d'arbitrage à cours connu ; qu'en l'espèce, d'une part, M. X... ne conteste pas avoir reçu avant la signature de l'avenant la liste des unités de compte éligibles en cas de signature dudit avenant, d'autre part, il apparaît que compte tenu de l'information claire et précise contenue de celui-ci, c'est à la date même de sa signature, soit le 13 novembre 1998, qu'il pouvait appréhender exactement la modification de son contrat ; qu'en effet, l'avenant comportait la mention suivante informant l'assuré sans ambiguïté de la suppression du système d'arbitrage à cours connu : « La date de valeur retenue pour l'achat des parts ou actions (investissement des versements, arbitrage) ou leur vente (arbitrage, avance, rachat ou décès) dépend de la nature de l'opération et du type de support. Elle est donnée par le tableau figurant ci-dessous », suivie d'un tableau prévoyant pour chaque « événement » la date de la valeur liquidative devant être retenue ; que la prescription a ainsi été acquise le 13 novembre 2000 ; que l'assignation étant en date du 2 mai 2006, la demande doit être déclarée irrecevable comme prescrite ;
ALORS QUE le délai de prescription de l'action en nullité d'un contrat d'assurance pour dol ne commence à courir qu'à compter du jour où le vice invoqué par l'assuré lui a été révélé ; que le dol de la Société AVIVA VIE invoqué par Monsieur X... résultait de ce que cet assureur qui avait illégalement supprimé les supports spéculatifs du contrat originaire, lui avait fait croire que la signature de l'avenant du 13 novembre 1998 était l'unique moyen d'obtenir la restitution desdits supports ; qu'en affirmant néanmoins que Monsieur X... avait pu avoir connaissance du dol commis par la société AVIVA VIE le jour même de la signature dudit avenant du 13 novembre 1998, aux motifs inopérants qu'à cette date il avait pu appréhender la modification de son contrat (originaire), et que l'avenant l'informait clairement de la suppression du système d'arbitrage à cours connu, sans rechercher comme elle y était invitée, à quelle date Monsieur X... a pu réaliser qu'il aurait pu obtenir la restitution sur son contrat originaire des supports spéculatifs sans devoir renoncer à la clause d'arbitrage à cours connu, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1116 et 1304 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré prescrite l'action de Monsieur X... en nullité pour dol de l'avenant du 13 novembre 1998 et de l'AVOIR en conséquence débouté de sa demande tendant à voir fixer l'indemnisation de son préjudice résultant du dol commis par la Société AVIVA VIE ;
AUX MOTIFS QUE le contrat souscrit par M. X... le 30 août 1996 ne comporte aucune mention relative à la prescription, en dépit de l'article R 112-1 du code des assurances, selon lequel les polices d'assurance doivent rappeler les dispositions de la loi concernant la prescription des actions dérivant des contrats d'assurance ;
Que contrairement à ce que prétend la société AVIVA VIE, l'article R 112-1 concerne les contrats d'assurance-vie ; qu'en effet cet article dans sa rédaction issue du décret du 20 septembre 1990, prévoit que les entreprises mentionnées au 5° de l'article L 310-1 du code des assurances doivent indiquer, notamment, les dispositions relatives à la prescription ; que la loi du 4 janvier 1994 modifiant le code des assurances, en vue notamment de la transposition des directives n° 92-49 et n° 92-96 des 18 juin et 10 novembre 1992 du Conseil des communautés européennes, a refondu l'article L 310-1 du code des assurances, et modifiant la classification des catégories des entreprises soumises au contrôle de l'Etat, a supprimé le 5°, de sorte que ce qui relevait de cette catégorie se trouve englobé dans les 1ères, 2èmes et 3èmes catégories ; qu'il s'ensuit que les contrats d'assurance-vie doivent, conformément aux dispositions de l'article R 112-1, mentionner les stipulations relatives à la prescription et que l'inobservation de cette disposition est sanctionnée par l'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L 114-1 du code des assurances ;
Qu'en conséquence, il y a lieu à application de la prescription quinquennale édictée par l'article 1304 du code civil, qui constitue, dans tous les cas où l'action n'est pas limitée à un moindre temps par une disposition particulière, la règle de droit commun en matière d'action en nullité relative pour vice du consentement ;
Que le point de départ de la prescription quinquennale se situe au jour où l'assuré a pu appréhender exactement les modifications de son contrat quant à la substitution des supports et à la suppression de la clause d'arbitrage à cours connu ; qu'en l'espèce, d'une part, M. X... ne conteste pas avoir reçu avant la signature de l'avenant la liste des unités de compte éligibles en cas de signature dudit avenant, d'autre part, il apparaît que compte tenu de l'information claire et précise contenue de celui-ci, c'est à la date même de sa signature, soit le 13 novembre 1998, qu'il pouvait appréhender exactement la modification de son contrat ; qu'en effet, l'avenant comportait la mention suivante informant l'assuré sans ambiguïté de la suppression du système d'arbitrage à cours connu : « La date de valeur retenue pour l'achat des parts ou actions (investissement des versements, arbitrage) ou leur vente (arbitrage, avance, rachat ou décès) dépend de la nature de l'opération et du type de support. Elle est donnée par le tableau figurant ci-dessous », suivie d'un tableau prévoyant pour chaque « événement » la date de la valeur liquidative devant être retenue ; que la prescription a ainsi été acquise le 13 novembre 2000 ; que l'assignation étant en date du 2 mai 2006, la demande doit être déclarée irrecevable comme prescrite ;
ALORS QUE le droit de demander la nullité d'un contrat pour dol n'exclut pas l'exercice par la victime de manoeuvres dolosives d'une action en responsabilité délictuelle pour obtenir de leur auteur réparation du préjudice qu'elle a subi, cette action n'étant pas soumise à la prescription quinquennale de l'article 1304 du Code civil ; qu'outre sa demande de nullité pour dol de l'avenant du 13 novembre 1998, Monsieur X... demandait dans ses conclusions d'appel que soit ordonnée une mesure d'expertise afin d'évaluer le préjudice qu'il avait subi du fait de la suppression illicite des supports par AVIVA VIE depuis le 13 novembre 1998 jusqu'à la décision à intervenir ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande en réparation du préjudice subi en raison du dol de la Société AVIVA VIE, au seul motif que son action en nullité pour dol de l'avenant du 13 novembre 1998 était prescrite, la Cour d'appel a violé l'article 1304 du Code civil par fausse application, les articles 1116 et 1117 du même Code par fausse interprétation et l'article 2270-1 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi du 5 juillet 1985, par refus d'application.