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03/10/2012 | FRANCE | N°11-13152

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 octobre 2012, 11-13152


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Bastia, 15 avril 2009, 28 octobre 2009, 15 décembre 2010), que MM. Jean-Paul et Victor X...ont acquis par acte notarié du 17 octobre 2000, sur le territoire de la commune de Calacuccia, la parcelle cadastrée section D n 600 anciennement D 379 ; que, soutenant que des ouvertures et balcons avaient été réalisés par les époux Y..., propriétaires du fonds cadastré section D n 599, anciennement D 377, sur la façade donnant à l'Est de leur maison en empiétant sur leu

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Bastia, 15 avril 2009, 28 octobre 2009, 15 décembre 2010), que MM. Jean-Paul et Victor X...ont acquis par acte notarié du 17 octobre 2000, sur le territoire de la commune de Calacuccia, la parcelle cadastrée section D n 600 anciennement D 379 ; que, soutenant que des ouvertures et balcons avaient été réalisés par les époux Y..., propriétaires du fonds cadastré section D n 599, anciennement D 377, sur la façade donnant à l'Est de leur maison en empiétant sur leur propriété, alors que celle-ci avait été reconnue par un jugement définitif du tribunal de grande instance de Bastia en date du 11 janvier 2005, ainsi qu'au mépris des règles de distance légales, M. Jean-Paul X...a assigné les époux Y... en démolition de ces ouvrages aux frais de leurs auteurs et remise en état des lieux ; que les époux Y... ont formé tierce opposition incidente au jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 11 janvier 2005 rendu entre Jean-Paul X...et la commune de Calacuccia, selon eux en fraude de leurs droits, demandant de dire que la bande de terrain non cadastrée séparant les parcelles D 599 et D 600, et supportant actuellement un chemin, est une copropriété indivise entre les propriétaires des fonds D 598, D 599 et D 600, d'ordonner la modification du cadastre, et de débouter Jean-Paul X...de toutes ses demandes ;

Sur le cinquième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant, d'une part, constaté que les consorts X...se fondaient sur le jugement du 11 janvier 2005 pour voir juger, en application des dispositions de l'article 678 du code civil, que les ouvrages réalisés en 2000 par les époux Y... ne respectaient pas les règles de distances légales réglementant les vues droites entre deux fonds contigus et, d'autre part, retenu que le caractère absolu et exclusif du droit de propriété s'opposait à ce que le jugement du 11 janvier 2005 puisse, à la fois, continuer à produire ses effets quant au droit de propriété de M. X...entre celui-ci et la commune, et être réformé relativement à ce même droit de propriété à l'égard des époux Y... seulement, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé l'intérêt à agir des époux Y... et l'indivisibilité du litige, a pu accueillir la tierce opposition des époux Y... ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le septième moyen :

Vu l'article 678 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande en suppression des vues réalisées en 2000 par les époux Y..., l'arrêt relève que l'article 678 du code civil ne s'appliquerait pas en l'espèce dans la mesure où, en l'absence de droit de propriété des consorts X...sur la bande de terrain de 10 mètres carrés litigieuse, les parcelles D 600 et D 599 ne sont pas contiguës ;

Qu'en statuant ainsi, dès lors que les prescriptions de l'article 678 du code civil, relatives à la distance légale pour l'établissement de vues droites, s'appliquent lorsque le fonds dans lequel la vue a été établie est séparé du fonds sur lequel elle donne par un espace privé commun, sans rechercher le titulaire du droit de propriété sur la bande de terrain litigieuse, la cour d'appel n'a pas donné de base à sa décision de ce chef ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation sur le septième moyen entraîne la cassation par voie de conséquence de la disposition critiquée par le troisième moyen ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les premier, deuxième, quatrième et sixième moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les arrêts rendus les 15 avril 2009 et 28 octobre 2009 par la cour d'appel de Bastia ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Victor et Jean-Paul X...de leurs demandes en suppression de vues sur leurs fonds et les a condamnés à payer aux époux Y... la somme de cinq mille euros (5 000 euros) de dommages-intérêts pour procédure abusive, l'arrêt rendu le 15 décembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bastia, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour les consorts X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(sur l'arrêt avant-dire-droit de la Cour d'appel de Bastia du 15 avril 2009

Il est fait grief à l'arrêt avant-dire-droit du 15 avril 2009, d'avoir invité Jean-
Paul X...à assigner en intervention forcée la commune de Calacuccia ;

AUX MOTIFS QUE « si la recevabilité de la tierce opposition incidente formée par les époux Y... par voie de conclusions n'a pas été discutée, en première instance comme en cause d'appel, il importe néanmoins de rappeler qu'en vertu des dispositions de l'article 584 la tierce opposition n'est recevable, en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, que si toutes ces parties sont appelées à l'instance ; de plus, l'article 591 du même code dispose que la décision qui fait droit à la tierce opposition ne rétracte ou ne réforme le jugement attaqué que sur les chefs préjudiciables au tiers opposant, le jugement primitif conservant ses effets entre les parties, même sur les chefs annulés, sauf en cas d'indivisibilité, la chose jugée sur tierce opposition l'étant à l'égard de toutes les parties appelées à l'instance en application de l'article 584 précité ; qu'il est constant que l'indivisibilité résulte de l'impossibilité d'exécuter en même temps la décision faisant droit à la tierce opposition et le jugement attaqué ; que dès lors, et tenant en outre au caractère absolu et exclusif du droit de propriété qui conduit nécessairement à ce que la décision à intervenir doive produire effet à l'égard de toutes les parties concernées par la question de la propriété de la bande de terrain litigieuse, il apparaît nécessaire que la commune de Calacuccia, partie au jugement attaqué, soit partie à la présente instance sur tierce opposition ; qu'il convient en conséquence d'inviter Jean-Paul X...à assigner en intervention forcée la commune de Calacuccia ».

1. ALORS QU'en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties au jugement attaqué, la tierce opposition n'est recevable que si toutes les parties ont été appelées à l'instance ; qu'il incombait donc aux époux Y..., opposants au jugement rendu le 11 janvier 2005 par le Tribunal de grande instance de Bastia outre Jean-Paul X...et la commune de Calacuccia d'y procéder ; qu'en effet, la Cour d'appel constatait que la commune de Calacuccia, partie au jugement attaqué, devait être partie à la présente instance sur tierce opposition, tout en invitant Jean-Paul X...à assigner en intervention forcée la commune de Calacuccia lors même que ce sont les époux Y... qui ont formé la tierce opposition et qui étaient, par conséquent, tenus d'attraire toutes les parties concernées, sauf à être irrecevables en leur action, comme le faisait d'ailleurs valoir M. X..., lequel n'avait pas à pallier la carence du tiers-opposant sur ce point ; qu'ainsi, la Cour d'appel n'a pas déduit les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 584 du Code de procédure civile, ensemble l'article 591 du même code ;

2. ALORS QUE l'arrêt attaqué ne pouvait considérer que la recevabilité de la tierce opposition incidente n'a pas été discutée, en première instance comme en cause d'appel, sans dénaturer les éléments du débat et, notamment, les conclusions des consorts X...demandant, précisément, à la Cour de confirmer le jugement « sauf en ce qu'il a déclaré recevable la tierce opposition », violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile ;

3. ALORS QU'aux termes de l'article 125 du Code de procédure civile le juge ne peut soulever d'office que certaines fins de non-recevoir limitativement énumérées, au nombre desquelles ne figure pas l'hypothèse où le tiers opposant n'a pas appelé toutes les parties nécessaires à la cause ; que la Cour d'appel a violé l'article 125 du Code de procédure pénale et excédé ses pouvoirs ;

4° ALORS QUE le juge, lorsqu'il soulève une fin de non-recevoir, ne peut le fait sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen ; que la Cour d'appel a violé le principe de la contradiction, l'article 16 du Code de procédure civile et les droits de la défense.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(sur l'arrêt avant-dire-droit du 28 octobre 2009)

Il est fait grief à l'arrêt avant-dire-droit du 28 octobre 2009, d'avoir invité les époux Y... à assigner en intervention forcée la commune de Calacuccia ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le fondement des mêmes motifs que ceux retenus par l'arrêt avant-dire-droit du 15 avril 2009, au visa des dispositions de l'article 591 du Code de procédure civile, et tenant au principe d'indivisibilité des faits de la cause, l'intervention, à la présente instance, de la commune de Calacuccia, partie au jugement initial sur la base duquel la tierce opposition a été formée, est nécessaire. Il est donc regrettable qu'au vu dudit arrêt, aucune des parties n'ait pris cette initiative, notamment en ce qui concerne Monsieur X...du fait de l'invitation qui lui avait été faite expressément par la Cour. Compte tenu des écritures des époux Y... qui se proposent d'y procéder, ces derniers sont donc invités à formaliser cette mise en cause, à défaut d'intervention volontaire de cette collectivité ».

1° ALORS QUE l'arrêt sera annulé par voie de conséquence de l'annulation du précédent arrêt du 15 avril 2009 dont il est le sujet et la conséquence ;

2° ALORS QUE faute d'avoir procédé à la mise en cause de toutes les parties lors de l'introduction de l'instance sur tierce opposition, et notamment, de la commune de Calacuccia, en raison du principe d'indivisibilité des faits de la cause, les époux Y... devaient être déclarés irrecevables en leur tierce opposition, comme le demandaient les consorts X...; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 584 du Code de procédure civile ;

3° ALORS QU'en toute hypothèse, la Cour d'appel ne pouvait soulever d'office une telle fin de non-recevoir sans violet l'article 125 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(sur l'arrêt au fond en date du 15 décembre 2010)

En ce que l'arrêt attaqué a condamné Victor et Jean-Paul X...à payer aux époux Y... la somme de 5. 000 € de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

AUX MOTIFS QUE « Il résulte des écritures des parties et des pièces justificatives produites que les consorts X...ont acquis en 2000 la parcelle D 600 alors que les travaux de rénovation de leur maison par les époux Y... étaient en cours de réalisation et qu'ils n'ont eu de cesse d'entraver la réalisation de ces travaux en prétendant qu'ils réalisaient des vues droites sur une parcelle dont ils ont pourtant reconnu et admis qu'elle supportait une servitude de passage au profit de propriétaires riverains, soit ceux de la parcelle D 598 ; que par ailleurs, la configuration des biens telle qu'elle ressort du rapport d'expertise, met en évidence l'absence de construction sur le fonds des consorts X...et l'absence de préjudice réel consécutif aux vues litigieuses ; qu'enfin, le comportement procédural de Jean-Paul X...apparaît également constitutif d'une faute caractérisant un abus du droit d'agir en justice, celui-ci s'étant volontairement abstenu d'appeler en cause les époux Y... dans le cadre de l'instance en revendication de la bande de terrain litigieuse, alors que celle-ci avait pour seul objectif de voir statuer sur le droit de propriété sur ladite bande de terrain aux fins de pouvoir ensuite obtenir la démolition des balcons de la maison des époux Y... ; que cet abus du droit d'agir en justice a incontestablement causé aux époux Y... un préjudice qu'il convient de réparer par l'allocation d'une somme de 5. 000 euros de dommages et intérêts ».

1° ALORS QUE la Cour d'appel ne pouvait déclarer abusive une procédure en la considérant manifestement dépourvue de bien fondé, alors que les consorts X...avaient obtenu entière satisfaction en première instance, tant sur la confirmation de leurs droits de propriété que sur leur demande en fermeture de vues irrégulières ; que dès lors la seule infirmation du jugement ne caractérise pas une faute de leur part ; que la Cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;

2° ALORS QUE les consorts X...n'avaient commis aucune faute en n'appelant pas les époux Y... à l'instance en revendication qu'ils avaient lancée contre la commune, dès lors que seule la commune prétendait avoir des droits sur la bande de terrain litigieuse, et que les époux Y... n'ont jamais prétendu avoir le moindre droit sur ce terrain et ne l'ont jamais revendiqué ; qu'en l'absence de toute revendication émanant de leur part, tous les voisins d'un terrain n'ont pas à être appelés dans une instance en revendication ; qu'en qualifiant de fautif le comportement des consorts X..., la Cour d'appel a encore violé les articles 1382 et 1383 du Code civil.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué du 15 décembre 2010 d'avoir rejeté la fin de non-recevoir soulevée en cause d'appel par les consorts X..., tirée de l'absence en première instance de la commune de Calacuccia ;

AUX MOTIFS QUE « Par ailleurs, en application des dispositions de l'article 584 du Code de procédure civile, la tierce opposition n'est recevable, en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties que si toutes ces parties sont appelées à l'instance ; que c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la Cour a dû, par deux fois, inviter les parties à appeler en cause la commune de Calacuccia, alors pourtant que Jean-Paul X..., alors seul demandeur, n'avait nullement soulevé l'irrecevabilité de la tierce opposition formée par les époux Y... en raison de l'absence de la commune ; que par ailleurs, en application des dispositions de l'article 588 du même code, la tierce opposition incidente a une contestation dont est saisie une juridiction est tranchée par cette dernière si elle est de degré supérieur à celle qui a rendu le jugement ou si, étant d'égal degré, aucune règle de compétence d'ordre public n'y fait obstacle, et elle est alors formée de la même manière que les demandes incidentes ; qu'aux termes des dispositions de l'article 68 dudit code, les demandes incidentes sont faites à l'encontre des parties défaillantes ou des tiers dans les formes prévues par l'introduction de l'instance. En appel, elles le sont par voie d'assignation ; qu'enfin, il résulte de l'article 126 du Code de procédure civile que, dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue ; de plus, aucune disposition légale n'interdit de régulariser en cause d'appel la fin de non-recevoir susceptible d'être opposée à la personne qui forme tierce opposition en raison de l'absence d'une ou plusieurs parties au jugement attaqué ; qu'il s'ensuit que la tierce opposition incidente formée par les époux Y... suivant conclusions du 31 mars 2006 et assignation du 20 novembre 2009 a l'encontre du jugement du 11 janvier 2005 est recevable ; qu'il n'est pas inutile de souligner qu'en toute hypothèse, seule la commune de Calacuccia aurait eu qualité pour soulever l'irrecevabilité de la tierce opposition en raison du caractère tardif de son appel en cause, et en aucun cas Jean-Paul X...qui s'est en outre abstenu tant en première instance qu'en cause d'appel de soulever les dispositions de l'article 584 sur lesquelles la Cour s'est fondée pour solliciter des parties qu'elles provoquent l'intervention de la commune ».

1° ALORS QUE la cassation des deux arrêts avant-dire-droit du 15 avril 2009 et 28 octobre 2009 entraînera l'annulation par voie de conséquence du présent arrêt qui en est la suite et la conséquence, en application de l'article 618 Code de procédure civile ;

2° ALORS QU'en cas d'indivisibilité démontrée entre plusieurs parties à une procédure, la recevabilité de la tierce opposition est subordonnée à la mise en cause de tourtes les parties à l'instance ; qu'il s'agit là d'une fin de nonrecevoir qui ne pouvait être soulevée d'office par la Cour d'appel, dans la mesure où il ne s'agissait pas d'une fin de non-recevoir ayant un caractère d'ordre public ou tirée d'un défaut d'intérêt, de qualité ou de la chose jugée, fût-ce pour inviter les parties à régulariser la procédure ; qu'en statuant donc comme elle l'a fait, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs et méconnu les dispositions de l'article 125 du Code de procédure civile.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

En ce que l'arrêt attaqué du 15 décembre 2010 a déclaré recevable la tierce opposition des époux Y..., dit que les consorts X...ne sont pas propriétaires de la bande de terrain litigieuse, débouté les consorts X...de leurs demandes de démolition des ouvrages des époux Y... et de suppression de vues sur leurs fonds ;

AUX MOTIFS QUE « Les consorts X..., soutenaient que la mise en case de la commune ne se justifiait pas au regard de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement d'origine entre les parties initiales, ont refusé de déférer à l'invitation faite par la Cour en son premier arrêt avant-dire-droit du 15 avril 2009, la contraignant ainsi par un second arrêt du 28 octobre 2009, à formuler la même demande à l'égard des époux Y... ; que reprenant la même argumentation en leurs dernières écritures, ils prétendent en outre en tirer la conséquence que les demandes de la commune, qui n'en formule cependant aucune si ce n'est au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et se contente de conclure à l'absence de preuve par les consorts X...de leur droit de propriété, sont irrecevables, et que la question du droit de propriété sur la bande de terrain litigieuse ayant été définitivement tranchée entre Jean-Paul X...et la commune, elle ne peut être remise en cause en application de l'article 591 du Code de procédure civile ; que toutefois, il importe de souligner que, certes, en application des dispositions des articles 582 et 591 alinéa 1er du Code de procédure civile, la tierce opposition n'a pour objet que de remettre en question relativement à son auteur les oints jugés qu'il critique, de sorte que le jugement attaqué n'est rétracté ou réformé que sur les chefs préjudiciables au tiers opposant et lui est alors seulement inopposable, mais conserve tous ses effets entre les parties même sur les chefs annulés ; mais que cette indifférence de la solution rendue sur tierce opposition au regard des parties d'origine a ses limites, précisément en cas d'indivisibilité comme le prévoit l'alinéa 2 de l'article 591 précité, lequel dispos que « la chose jugée sur tierce opposition l'est à l'égard de toutes les parties appelées à l'instance en application de l'article 584 ». Or, comme cela a été souligné en l'arrêt avant-dire-droit du 15 avril 2009, l'indivisibilité résulte de l'impossibilité d'exécuter en même temps la décision faisant droit à la tierce opposition et le jugement attaqué ; qu'en l'espèce, le caractère absolu et exclusif du droit de propriété s'oppose à ce que le jugement primitif puisse, à la fois, continuer à produire ses effets quant au droit de propriété de Jean-Paul X...entre celui-ci et la commune, et être réformé relativement à ce même droit de propriété à l'égard des époux Y... seulement ; que c'est d'ailleurs la raison pour laquelle la Cour, estimant que l'indivisibilité du litige devait conduire à ce que la décision à intervenir sur la tierce opposition doive produire effet à l'égard de toutes les parties concernées par la question de la propriété de la bande de terrain litigieuse, a jugé nécessaire que la commune de Calacuccia, partie au jugement attaqué, soit partie à la présente instance sur tierce opposition ; qu'il résulte de ce qui précède que non seulement les « demandes » présentées par la commune de Calacuccia ne se heurtent nullement à l'autorité de la chose jugée par le jugement objet de la tierce opposition, mais que la décision à intervenir sur la tierce opposition, et partant sur la question du droit de propriété de la bande de terrain litigieuse, aura autorité de la chose jugée à l'égard de toutes les parties à la présente instance, et anéantira nécessairement le jugement primitif sur cette question ».

1° ALORS QUE la tierce opposition n'est recevable que dans la mesure où le tiers opposant a intérêt à agir, c'est-à-dire qu'il dispose d'un droit concurrent à ceux qui étaient en cause dans le litige auquel il n'était pas partie, ou à tout le moins d'un droit directement atteint par la solution de ce litige ; qu'en matière de revendication immobilière ne sont recevables à former tierce opposition contre une décision statuant sur une telle revendication que des tiers prétendant avoir des droits de propriété sur le terrain revendiqué ; qu'ils ne sauraient intervenir pour faire trancher des droits de propriété entre les parties au litige au seul gré d'intérêts étrangers à la question même du droit de propriété ; qu'en déclarant recevable la tierce opposition des époux Y... contre un jugement statuant sur une action en revendication, tierce opposition qui ne comportait aucune revendication immobilière et n'avait d'autre but que de faire juger les consorts X...auraient été irrecevables à faire fermer leurs vues irrégulières, faute d'être propriétaires du terrain sur lequel elles ont été ouvertes, la Cour d'appel a violé les articles 591 et 583 du Code de procédure civile ;

2° ALORS QUE les époux Y... n'ont aucun intérêt personnel et direct à intervenir par la voie de la tierce opposition à l'instance en déclaration de propriété de M. X...sur une bande de terrain contigüe à leur fonds sur laquelle ils ne revendiquent aucun droit, la question de l'irrégularité de l'ouverture de vues directement sur le fonds voisin, à moins de 19 dm de distance étant indépendante de celle de savoir qui est propriétaire de ce fonds et afférente au caractère construit, ou non, de ce fonds ; qu'en jugeant, ainsi, que la question de la régularité des ouvertures dépendait de celle de la personne du propriétaire voisin, la Cour d'appel n'a pu donner une base légale à sa décision au regard des articles 678 et 544 du Code civil ;

3° ALORS QUE le caractère absolu et perpétuel du droit de propriété, la chose jugée sur cette question, et la nécessité d'une sécurité juridique immobilière, font obstacle à ce qu'un tiers puisse, à l'occasion d'un litige de voisinage, remettre en question ce qui a été jugé sur la propriété d'une parcelle sur laquelle il ne revendique aucun droit, en violation des articles 480, 500 et 591 du Code de procédure civile, ensemble de l'article 544 du Code civil.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué du 15 décembre 2010 d'avoir dit que Victor et Jean-Paul X...ne rapportaient pas la preuve de leur droits de propriété sur la bande de terrain non numérotée au cadastre séparant les parcelles D 600 et D 599 et débouté Victor et Jean-Paul X...de leurs demandes tendant à se voir déclarer propriétaires de ladite bande de terrain ;

AUX MOTIFS QUE : « Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les consorts X...ne démontrent pas leur droit de propriété sur la parcelle non numérotée d'une superficie de 10 centiares, séparant la parcelle D 600, de 21 centiares, de la parcelle D 599 appartenant aux époux Y..., de sorte qu'il convient d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 22 janvier 2008 en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à réformation du jugement du tribunal de grande instance de Bastia en date du 11 janvier 2005, et statuant de nouveau, de réformer le jugement du 11 janvier 2005 en toutes ses dispositions, et de débouter les consorts X...de leurs demandes tendant à se voir déclarer propriétaires de la bande de terrain séparant ces deux parcelles par inclusion dans la D 600, avec toutes conséquences quant à la rectification du cadastre et de l'acte de vente du 17 octobre 2000 ».

ALORS QUE la Cour d'appel qui infirme le jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Bastia le 22 janvier 2008, lequel avait constaté que « le chemin de 5, 5 mètres de long et 1, 8 mètres de large, sans numéro cadastral, séparant les parcelles D 600 et D 599, a été créé pour donner à la parcelle D 598 un accès à la voie publique », est rattachée à la parcelle D 600 propriété de M. X...et ne constitue pas un chemin communal, devait avant d'infirmer le jugement, s'expliquer sur les motifs ayant fondé celui-ci et notamment sur le fait que le « chemin » n'était qu'un passage pris sur la parcelle D 600 sans que la propriété en ait été perdue ; qu'en se bornant, ainsi, à débouter les consorts X...de leur demande sans s'expliquer sur ce motif et sur le rattachement de la bande de terrain litigieuse à la parcelle D 600, la Cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 544 et suivants, ensemble 637 et suivants du Code civil.

SEPTIEME MOYEN DE CASSATION :

En ce que l'arrêt attaqué du 15 décembre 2010 a débouté les consorts X...de leurs demandes en démolition des ouvrages (vues) réalisées courant 2000 par les époux Y... ;

AUX MOTIFS QUE « La demande en démolition des terrasses de la maison des époux Y... et en fermeture des ouvertures donnant des vues droites sur le fonds des consorts X..., repose d'une part sur les dispositions de l'article 544 du Code civil prétendant les empiètements, y compris en surplomb, sur la propriété d'autrui, et d'autre part sur celles de l'article 678 du Code civil duquel il résulte qu'on ne peut avoir des vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin s'il n'y a dix neuf décimètres de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage, à moins que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s'exerce la vue ne soit déjà grevé au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage faisant obstacle à l'édification de constructions ; que concernant la demande de démolition des balcons, elle ne pourra qu'être rejetée dès lors qu'il est établi que ces constructions s'arrêtent au droit du trottoir dont le rapport d'expertise précité a précisé qu'il était en totalité inclus dans la parcelle D 599 appartenant aux époux Y... ; que le Tribunal de Grande Instance de BASTIA, se fondant sur le rapport d'expertise de monsieur A..., expert désigné par précédent jugement avant dire droit du 9 septembre 2003, duquel il ressort que le chemin de 5, 5 mètres de long sur 1, 8 mètres de large, sans numéro cadastral, séparant les parcelles D 600 et D 599, a été créé par le géomètre du cadastre pour donner à la parcelle enclavée D 598 un accès à la voie publique et ne constitue pas un chemin communal, a retenu, dans son jugement du 11 janvier 2005, que la bande de terrain litigieuse située entre les fonds D 600 et D 599 était rattachée à la parcelle D 600, propriété de monsieur X...; qu'il convient d'observer que les consorts Y..., attraits en référé par monsieur X...pour faire cesser les travaux litigieux et obtenir la remise en état des lieux, n'ont jamais revendiqué un quelconque droit de propriété sur la bande de terre en cause, soutenant, comme précisé suivant les termes de l'ordonnance de référé du 2 mai 2001 (et comme la commune de CALACUCCIA qui est intervenue volontairement à cette procédure) mais également du jugement du Tribunal d'Instance de CORTE du 23 septembre 2002, que les propriétés n'étaient pas contiguës puisque séparées par un passage non cadastré relevant du domaine public communal ; qu'outre le fait qu'aucun élément ne permet d'accréditer ici la thèse suivant laquelle ce chemin a été utilisé depuis temps immémorial par les propriétaires de la parcelle D 599, aucune pièce n'est versée conduisant d'une part à écarter le droit de propriété de monsieur X...au profit de la commune, (laquelle n'a pas fait appel du jugement et n'est pas partie à la présente instance), ou, d'autre part, à limiter le droit de propriété de monsieur X...et à admettre que les consorts Y..., dont la revendication paraît au demeurant tardive au regard des moyens développés à l'occasion des instances précédentes et en tout état de cause opportuniste en l'état de la demande de démolition, ont acquis la copropriété du passage par prescription ; que, par suite, la tierce opposition des époux Y... ne peut prospérer et il n'y a pas lieu de réformer le jugement querellé du 11 janvier 2005 qui consacre le droit de propriété de monsieur X...s'agissant des 21 ça de la parcelle D 600, tels qu'indiqués à l'acte de vente, mais également de la bande de terre formant chemin de servitude de 10 m2 qui doit y être rattachée, l'ensemble pour une contenance totale de 31 m2 ; qu'en revanche le trottoir bétonné se trouve, selon les termes non contestés des écritures des défendeurs et du rapport de l'expert judiciaire, monsieur A..., du 15 avril 2004, bien inclus dans sa totalité dans la parcelle D 599 (propriété des époux Y...) et que la limite de cet ouvrage constitue la limite de cette propriété D 599 ; que cependant, la prise en considération de cette limite s'avère sans incidence dés lors qu'il n'est pas contesté que les deux portes-fenêtres et balcons ont été créées en façade EST de l'habitation Y... en violation des règles de distance légales imposées par les articles 678 et suivants du code civil ; que, à supposer que ces constructions aient empiété sur la bande de terrain non numérotée séparant les parcelles D 660 et D 599, la démolition n'aurait en toute hypothèse pu être ordonnée dès lors que cette bande de terrain n'est pas la propriété des consorts X.... Par ailleurs, l'article 678 ne saurait trouver application en l'espèce dans la mesure où, de par l'absence de droit de propriété des consorts X...sur la bande de terrain de 10 m ² litigieuse, les parcelles D 600 et D 599 ne sont pas contigües ; qu'il s'ensuit que le jugement déféré doit être également infirmé en ce qu'il a constaté que la propriété de Jean-Paul X...s'entend sur la parcelle D 600 comme précité audit jugement s'agissant de la bande de terrain litigieuse, dit que les ouvrages réalisés courant 2000 par les époux Y..., savoir l'aménagement de deux portes-fenêtres et de deux balcons en façade Est de leur immeuble, ne respectant pas les règles de distance légales, et ordonné aux époux Y... de procéder ou faire procéder à leurs frais à la remise des lieux en leur état initial, savoir leur état avant travaux, dans un délai de 10 mois à compter de la signification du présent jugement, et passé ce délai sous astreinte de 100 euros par jour de retard et pendant trois mois après quoi, l'astreinte pourra être liquidée et le cas échéant reconduite ou modifiée, et les consorts X...déboutés de toutes leurs demandes aux mêmes fins ».

ALORS QUE quel que soit le titulaire du droit de propriété sur la bande de terrain litigieuse, d'une longueur de 1, 8 mètre, dont il n'est pas établi qu'elle ait perdu son caractère privatif, la Cour d'appel devait rechercher si les ouvertures pratiquées dans le mur de l'immeuble des époux Y... ne constituaient pas, néanmoins, des vues droites prohibées, car pratiquées à moins de 1, 90 m entre leur mur et l'héritage clos ou non clos d'un voisin ; vues droits illégales dont les consorts X...pouvaient demander la suppression dès lors qu'elles leur causaient un préjudice, leur propre fonds étant à tout le mois situé à moins de 19 décimètres de ces vues illicites ; qu'en statuant donc comme elle l'a fait, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 578, 544 et 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 11-13152
Date de la décision : 03/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 15 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 oct. 2012, pourvoi n°11-13152


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.13152
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