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02/10/2012 | FRANCE | N°11-20736

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 octobre 2012, 11-20736


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 mai 2011), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 2 mars 2010, pourvois n° 08-18.808 et 08-20.730), que la société Parfums Givenchy a confié l'organisation du transport de produits cosmétiques et de parfums d'Aulnay-sous-Bois (France) à Donaueschingen (Allemagne) à la société Groupe transit phocéen, ultérieurement mise en liquidation judiciaire, qui s'est substituée la société Transneu S

pedition (la société Transneu) ; qu'au cours de ce transport, la marchandise...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 mai 2011), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 2 mars 2010, pourvois n° 08-18.808 et 08-20.730), que la société Parfums Givenchy a confié l'organisation du transport de produits cosmétiques et de parfums d'Aulnay-sous-Bois (France) à Donaueschingen (Allemagne) à la société Groupe transit phocéen, ultérieurement mise en liquidation judiciaire, qui s'est substituée la société Transneu Spedition (la société Transneu) ; qu'au cours de ce transport, la marchandise a été volée dans le camion de la société Transneu ; que la société Axa corporate solutions assurances (la société Axa) et les autres co-assureurs de la société Parfums Givenchy, ayant versé à celle-ci 32 969,69 euros, ont assigné en responsabilité et indemnisation la société Groupe transit phocéen et son assureur, la société Helvetia, qui ont appelé en garantie la société Transneu ;
Attendu que la société Axa et les autres co-assureurs de la société Parfums Givenchy font grief à l'arrêt d'avoir condamné in solidum la société Transneu Spedition et la société Helvetia à leur payer la somme de 8,33 DTS x 304 x le cours du DTS au jour du prononcé de l'arrêt avec intérêts au taux de 5 % à compter du 30 avril 2003 et jusqu'au 28 février 2007, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute lourde s'entend d'un comportement d'une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur à l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'il avait été spécifié sans aucune équivoque sur la lettre de voiture CMR établie le 27 juin 2003 que la marchandise transportée était constituée de 27 colis de marque « Givenchy » ; qu'en énonçant que le transporteur n'avait pas reçu d'informations sur la nature et la valeur de la marchandise au motif inopérant que la mention manuscrite « Parf » figurant également sur la lettre de voiture était moins identifiable, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1150 du code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la Convention de Genève du 19 mai 1956 relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR ;
2°/ que la faute lourde s'entend d'un comportement d'une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur à l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée ; qu'il s'évince des énonciations de l'arrêt que la remorque était simplement bâchée, que le véhicule était plombé mais non cadenassé et que le vol était survenu alors que le chauffeur avait pris du repos à bord de son véhicule ; qu'en écartant la qualification de faute lourde au motif que « le véhicule à bord duquel il se trouvait, sur l'aire de stationnement d'une gare routière située en centre ville, dans un endroit éclairé en bordure d'une route nationale et à environ 600 mètres d'une gendarmerie » sans constater que cette aire de stationnement faisait l'objet d'une surveillance et que le véhicule n'aurait pas été le seul garé à cet endroit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1150 du code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, dite CMR ;
3°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en énonçant que le véhicule était stationné « sur l'aire de stationnement d'une gare routière située en centre ville » sans dire sur quel élément de preuve elle se fondait, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt constate que la lettre de voiture porte la mention manuscrite "Givenchy 27 colis 304 kg" et que sous la rubrique "nature de la marchandise" figure une indication manuscrite quasi illisible et pour le moins elliptique, "Parf", et relève que cette mention ne permettait pas au transporteur de connaître la valeur et la nature sensible de la marchandise transportée ; qu'appréciant souverainement les éléments du débat, l'arrêt retient ensuite que le chauffeur a stationné son véhicule sur l'aire de stationnement d'une gare routière située en centre ville, dans un endroit éclairé en bordure d'une route nationale et à environ 600 mètres d'une gendarmerie et que le vol est survenu quand celui-ci dormait dans la cabine ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, par une décision motivée, a pu retenir que la société Transneu n'avait pas commis de faute lourde ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Axa corporate solutions, CNA insurance company limited, XL insurance company limited, Ace european group limited, Allianz global corporate et specialty France, le syndicat 3000 (MKL), le syndicat 839 (TWK) John Spicer et le syndicat 2488 Joseph England Ace underwriting Ace global markets limited aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Transneu Spedition la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Axa corporate solutions assurances et sept autres.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum la société Transneu Spedition et la société Helvetia Assurances à payer aux sociétés Axa Corporate Solutions, CNA Insurance Company Limited, XL Insurance Company Limited, Ace European Group Limited, Allianz Global Corporate and Specialty (France), Syndicat 3000 (MKL), au syndicat 839 (TWK) John Spicer et au Syndicat 2488 (AGM) Joseph England Ace Underwriting Ace Global Markets Limited la seule somme de 8,33 DTS x 304 x le cours du DTS au jour du prononcé de l'arrêt avec intérêts au taux de 5 % à compter du 30 avril 2003 et jusqu'au 28 février 2007 ;
Aux motifs que « sur la lettre CMR de Transneu, il est indiqué de façon manuscrite Givenchy 27 colis 304 kgs ; que sous la rubrique « Nature de la marchandise » figure une indication manuscrite dont Transneu Spedition admet qu'elle signifierait « Parf » tout en indiquant qu'elle est « pour le moins elliptique, surtout lorsqu'elle s'adresse à un chauffeur ne maniant pas la langue française et « que parf » n'est pas un diminutif habituellement employé ni en français ni en allemand lorsque l'on fait référence à des parfums » ; que, comme le souligne Transneu Spedition, « parf » est une mention pour le moins elliptique, surtout lorsqu'elle s'adresse à un chauffeur ne maniant pas la langue française et n'est pas un diminutif habituellement employé ni en français ni en allemand, lorsque l'on fait référence à des parfums ; qu'au surplus et surabondamment, l'examen de la lettre de voiture ne permet même pas de lire, sous la rubrique « Nature de la marchandise », les lettres qui sont censées former « Parf », mais plutôt celles qui formeraient « Pay » ou « Paij », le « r » n'étant pas correctement formé et ressemblant à un « i » auquel il n'aurait pas été mis de point ou à la première partie notamment de la lettre « Y » et le « f » étant, quant à lui, totalement illisible comme ne possédant pas de boucle en partie supérieure ; que, dans ces conditions, et Transneu Spedition n'a pas reçu de Groupe Transit Phocéen d'informations lui permettant de connaître la nature sensible de la marchandise transportée à destination des économats de l'armée – qui ne sont pas, par nature, les destinataires naturels de parfums ; que, comme l'ont exactement estimé les premiers juges, dont la décision sera dès lors confirmée, le chauffeur, faute d'avoir reçu des informations sur la nature et la valeur des marchandises, et qui n'a pas commis de négligence d'une extrême gravité en stationnant son véhicule à bord duquel il se trouvait, sur l'aire de stationnement d'une gare routière située en centre ville, dans un endroit éclairé en bordure d'une route nationale, et à environ 600 mètres d'une gendarmerie, n'a pas commis de faute lourde » ;
Alors, d'une part, que la faute lourde s'entend d'un comportement d'une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur à l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt qu'il avait été spécifié sans aucune équivoque sur la lettre de voiture CMR établie le 27 juin 2003 que la marchandise transportée était constituée de 27 colis de marque « Givenchy » ; qu'en énonçant que le transporteur n'avait pas reçu d'informations sur la nature et la valeur de la marchandise au motif inopérant que la mention manuscrite « Parf » figurant également sur la lettre de voiture était moins identifiable, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1150 du Code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la Convention de Genève du 19 mai 1956 relative au contrat de transport international de marchandises par route, dite CMR ;
Alors, d'autre part, que la faute lourde s'entend d'un comportement d'une extrême gravité, confinant au dol et dénotant l'inaptitude du transporteur à l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée ; qu'il s'évince des énonciations de l'arrêt que la remorque était simplement bâchée, que le véhicule était plombé mais non cadenassé et que le vol était survenu alors que le chauffeur avait pris du repos à bord de son véhicule ; qu'en écartant la qualification de faute lourde au motif que « le véhicule à bord duquel il se trouvait, sur l'aire de stationnement d'une gare routière située en centre ville, dans un endroit éclairé en bordure d'une route nationale et à environ 600 mètres d'une gendarmerie » sans constater que cette aire de stationnement faisait l'objet d'une surveillance et que le véhicule n'aurait pas été le seul garé à cet endroit, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1150 du Code civil, ensemble les articles 23 et 29 de la Convention de Genève du 19 mai 1956, dite CMR ;
Alors enfin que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en énonçant que le véhicule était stationné « sur l'aire de stationnement d'une gare routière située en centre ville » sans dire sur quel élément de preuve elle se fondait, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-20736
Date de la décision : 02/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 05 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 oct. 2012, pourvoi n°11-20736


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.20736
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