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26/09/2012 | FRANCE | N°10-24104

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 10-24104


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1233-4 et L. 1235-3 du code du travail et 28 de l'Accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 ;
Attendu que, d'une part, l'article 28 de l'Accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 impose à l'employeur qui envisage de prononcer des licenciements pour motif économique de rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi ; que, d'autre part, la m

éconnaissance par l'employeur de dispositions conventionnelles qu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1233-4 et L. 1235-3 du code du travail et 28 de l'Accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 ;
Attendu que, d'une part, l'article 28 de l'Accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 impose à l'employeur qui envisage de prononcer des licenciements pour motif économique de rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi ; que, d'autre part, la méconnaissance par l'employeur de dispositions conventionnelles qui étendent le périmètre de reclassement et prévoient une procédure destinée à favoriser un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, avant tout licenciement, constitue un manquement à l'obligation de reclassement préalable au licenciement et prive celui-ci de cause réelle et sérieuse ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par jugement du 22 octobre 2001 le tribunal de commerce a arrêté un plan de redressement de la société Moulinex par voie de cession partielle d'actifs au profit de la société SEB et a autorisé le licenciement de salariés pour motif économique ; que des salariés ont saisi le conseil de prud'hommes afin que soient fixées au passif de la société Moulinex diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour rejeter ces demandes, l'arrêt retient que la recherche de reclassement externe à l'entreprise et au groupe s'est traduite par la mise en oeuvre de la part de la société Moulinex, puis des organes de la procédure relayés par les pouvoirs publics, de moyens tout à fait exceptionnels et qu'il avait été fait appel, dans ce cadre, aux commissions territoriales de l'emploi de l'Orne et du Calvados dont les membres ont pu participer parmi d'autres et dans un environnement élargissant de façon considérable leurs moyens d'action habituels à un dispositif de recherche hors du commun ;
Qu'en statuant ainsi sans rechercher ainsi qu'il lui était demandé si la saisine des commissions territoriales de l'emploi, prévue par des dispositions conventionnelles étendant le périmètre de reclassement et destinée à favoriser, avant tout licenciement, un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, avait été mise en oeuvre et était intervenue avant le prononcé des licenciements, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé les jugements ayant débouté les salariés de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 28 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne MM. X..., Y..., B..., C..., ès qualités et la société Moulinex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne MM. X..., Y..., B..., C..., ès qualités et la société Moulinex à payer aux salariés la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme Z... et vingt trois autres salariés.
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUE D'AVOIR, confirmé les jugements entrepris ayant débouté les exposants de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'il n'est pas sérieusement contesté qu'aucune possibilité de reclassement ne s'offrait – ni au sein de l'entreprise, la SA MOULINEX ayant cessé toute activité et licencié 3064 salariés-, ni au sein du groupe constitué avec la société BRANDT, laquelle, avec ses douze filiales, a été également placée en redressement judiciaire, a procédé à des licenciements massifs (1170 salariés) et a fait l'objet d'un plan de cession au profit d'une société israélienne ; que la déconfiture de l'ensemble du groupe rendait toute perspective de reclassement interne parfaitement inexistante ; que la recherche de reclassement s'est étendue à l'extérieur du groupe ; qu'il pesait à cet égard sur la SA MOULINEX une obligation conventionnelle tirée de l'article 28 de l'accord national du 12 juin 1987 intitulé « accord sur les problèmes généraux de l'emploi » et disposant que l'employeur, amené à envisager un licenciement collectif d'ordre économique, doit notamment « rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en particulier dans le cadre des industries des métaux, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi » ; qu'en l'espèce, la recherche de reclassement externe à l'entreprise et au groupe s'est traduite par la mise en oeuvre, de la part de la SA MOULINEX puis des organes de la procédure, relayés par pouvoirs publics, de moyens tout à fait exceptionnels allant jusqu'à la désignation d'un délégué interministériel ou encore la réactivation, pour les seuls salariés MOULINEX, des conventions de conversion qui avaient été abrogées quelques mois auparavant ; que, dans ce cadre, il a été fait appel aux commissions territoriales de l'emploi de l'Orne et du Calvados, qui ont été saisies, comme en attestent les diligences qu'elles ont accompli (pièces 8 et 9 de la SA MOULINEX) et dont les membres (deux représentants de chacune des organisations syndicales signataires et un nombre de représentants patronaux égal au total des membres des organisations syndicales, selon l'article 2 de l'accord du 12 juin 1987) ont pu participer, parmi d'autres, et dans un environnement élargissant de façon considérable leurs moyens d'action habituels, un dispositif de recherche hors du commun ; que c'est ainsi que le « délégué interministériel aux restructurations MOULINEX », Monsieur Michel A..., indique dans un courrier du 18 novembre 2008 (pièce 10 de la SA MOULINEX) dont les termes ne sont en rien contestés par les appelants : « il est apparu indispensable aux pouvoirs publics d'élaborer et de mettre en oeuvre un plan pour atténuer l'impact des suppressions d'activité de MOULINEX (…). Dès l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, les pouvoirs publics ont décidé de centraliser l'ensemble des moyens destinés non seulement à la réindustrialisation des sites de production MOULINEX et à la redynamisation des bassins industriels, mais également au reclassement des salariés dont le licenciement allait être inévitablement prononcé (…). Bien avant l'homologation du plan de redressement judiciaire et donc avant notification des licenciements, mes initiatives ont été nombreuses, ayant conduit à ce que se réunissent régulièrement tous les acteurs concernés : ANPE, ASSEDIC, AFPA, DATAR, Chambres de Commerce et d'Industrie, Chambres de Métiers, organisations patronales (MEDEF) et les représentants des principales organisations syndicales (…). En outre, j'ai personnellement contacté de nombreuses entreprises susceptibles de constituer le cadre de reclassement possible de salariés » ; qu'il est joint à ce courrier des documents de travail démontrant le sérieux et l'ampleur des actions menées dans chacun des bassins d'emploi concernés ; qu'il s'avère ainsi que l'employeur, par lui-même comme avec le concours particulièrement volontariste des pouvoirs publics, a satisfait pleinement à ses obligations légales conventionnelles et contractuelles de reclassement et que le débouter des demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être confirmé ;
ALORS QUE l'article 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987 impose à l'employeur qui envisage de prononcer des licenciements pour motif économique, de « rechercher les possibilités de reclassement à l'extérieur de l'entreprise, en faisant appel à la commission territoriale de l'emploi » ; que c'est préalablement à tout licenciement que l'employeur doit satisfaire à la procédure destinée à favoriser un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, telle qu'elle ressort de dispositions conventionnelles étendant le périmètre de reclassement et ce, à peine de manquement à l'obligation de reclassement préalable au licenciement, privant celui-ci de cause réelle et sérieuse ; qu'en se bornant, pour conclure que l'employeur avait satisfait pleinement à ses obligations légales conventionnelles et contractuelles de reclassement et débouter les salariés de leurs demandes en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à relever qu'en l'espèce « la recherche de reclassement externe à l'entreprise et au groupe s'est traduite par la mise en oeuvre de la part de la SA MOULINEX puis des organes de la procédure, relayés par les pouvoirs publics, de moyens tout à fait exceptionnels allant jusqu'à la désignation d'un délégué interministériel ou encore la réactivation, pour les seuls salariés MOULINEX, des conventions de conversion qui avaient été abrogées quelques mois auparavant, et qu'il avait été fait appel, dans ce cadre, aux commissions territoriales de l'emploi de l'Orne et du Calvados qui ont été saisies comme en attestent les diligences qu'elles ont accomplies et dont les membres ont pu participer parmi d'autres et dans un environnement élargissant de façon considérable leurs moyens d'action habituels à un dispositif de recherche hors du commun », sans nullement rechercher ni apprécier, ainsi qu'elle y était pourtant expressément invitée, si cette procédure de recherche de solutions de reclassement externe et notamment la saisine des Commissions territoriales de l'emploi, prévue par des dispositions conventionnelles étendant le périmètre de reclassement et destinée à favoriser, avant tout licenciement, un reclassement à l'extérieur de l'entreprise, avait été mise en oeuvre et était intervenue avant les licenciements prononcés le 19 novembre 2001, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 28 de l'accord national sur l'emploi dans la métallurgie du 12 juin 1987, L 1233-1, L 1233-3, L 1233-4 et L 1235-3 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-24104
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°10-24104


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.24104
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