LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 9 novembre 2010), que M. X..., employé successivement comme manoeuvre, agent de production, préparateur livreur et décrocheur au service de différents employeurs, a présenté un syndrome du canal carpien dont il a sollicité la prise en charge au titre du tableau des maladies professionnelles n° 57 C ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Vaucluse (la caisse) lui ayant opposé un refus, M. X... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours alors, selon le moyen :
1°/ que, pour que l'affection soit présumée d'origine professionnelle, seule la constatation des lésions visées à l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale doit intervenir dans le délai de prise en charge, peu important que leur identification intervienne postérieurement ; que pour refuser à M. X... le bénéfice de la présomption d'imputabilité prévue à l'article L. 461-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a relevé que l'authentification clinique du syndrome du canal carpien bilatéral n'était intervenue qu'en janvier 2004, soit deux ans après la fin de l'activité professionnelle, et qu'ainsi le délai de prise en charge de trente jours avait été dépassé de deux ans ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant d'une part qu'il résultait de la décision du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont la cour d'appel a entériné l'avis, qu'au cours de son travail, M. X... avait exécuté des tâches l'exposant aux affections prévues au tableau n° 57 des maladies professionnelles, d'autre part qu'il résultait d'un certificat médical du 15 février 2007 que les douleurs dont se plaignait l'exposant remontaient à l'année 1990, date à laquelle il était encore en fonctions, enfin que les attestations des collègues de travail et de l'épouse de la victime permettaient de poser le constat de douleurs effectives pendant l'exposition au risque, d'où il résultait que la constatation des lésions était bien intervenue moins de trente jours après la cessation de l'exposition au risque, peu important que l'identification exacte de la pathologie soit intervenue postérieurement, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ qu'aux termes de l'article L. 461-1 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, lorsque la victime ne peut se prévaloir de la présomption d'imputabilité prévue à l'alinéa précédent, notamment en raison d'un dépassement du délai de prise en charge, elle demeure recevable à établir, par tous moyens, la preuve de l'origine professionnelle de sa maladie ; qu'en se bornant à énoncer que le délai de prise en charge était en l'espèce dépassé, que les témoignages produits au débat permettaient de poser le constat de douleurs effectives pendant l'exposition au risque, et que le certificat médical du 15 février 2007 indiquait que le patient présentait des douleurs articulaires depuis 1990, pour en déduire qu'il convenait d'entériner l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, selon lequel le dépassement du délai de prise en charge ne permettait pas de retenir un lien direct de causalité entre la pathologie présentée et le « contexte » professionnel, sans rechercher si, indépendamment de l'éventuel dépassement du délai de prise en charge, les douleurs décrites tant par les témoignages de salariés que par le certificat médical susvisé, survenues pendant l'exposition au risque, n'étaient pas liées à l'activité professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 461-1 alinéa 3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'arrêt relève que M. X..., qui a quitté son dernier poste en juillet 2002, a déclaré sa maladie professionnelle le 22 avril 2004, après une première constatation médicale du 25 mars 2004 ; que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles a fait remonter à janvier 2004 la constatation médicale du syndrome du canal carpien bilatéral ; qu'en toute hypothèse un délai supérieur à deux ans s'est écoulé entre la fin d'exposition au risque et la première constatation médicale ; qu'il retient que, si les attestations des collègues de travail et de l'épouse de M. X... permettent de poser le constat de douleurs effectives, manifestations cliniques du syndrome du canal carpien, pendant l'exposition aux risques, le certificat médical du médecin traitant du 15 février 2007 fait état de ce que M. X... présente des douleurs articulaires depuis 1990, d'origine tendineuse et arthrosique ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, en l'absence de l'une des conditions du tableau n° 57 C, a pu décider, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis aux fins d'évaluer l'existence d'un lien de causalité directe entre l'affection dont souffre M. X... et le travail habituel de l'intéressé, que la preuve de l'existence d'un tel lien n'était pas rapportée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR décidé que la pathologie dont souffre Monsieur Mohamed X... n'avait pas directement été causée par son travail habituel et rejeté son recours contre la décision de la CPAM ayant refusé de reconnaître le caractère professionnel de la maladie ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L 461-1 al. 2 du Code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ; que selon l'article L 461-1 al. 3 du Code de la sécurité sociale, si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime ; que le tableau 57 des maladies professionnelles fait état, pour le syndrome du canal carpien provoqué par des travaux comportant de façon habituelle soit des mouvements répétés ou prolongés d'extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main, d'un délai de prise en charge de 30 jours ; que s'agissant tant de la pathologie du canal carpien gauche que de celle du canal carpien droit, le Comité Régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Montpellier « considère qu'au cours de son travail Monsieur X... a pu réaliser des travaux comportant de manière habituelle soit des mouvements répétés ou prolongés d'extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main gauche, tels que prévus au tableau n° 57 des maladies professionnelles. L'authentification clinique et électromyographique du syndrome du canal carpien bilatéral intervient en janvier 2004, soit deux ans plus tard. Dans ce contexte, le très significatif dépassement du délai de prise en charge (2 ans versus 1 mois) ne permet pas de retenir un lien direct de causalité entre la pathologie présentée et le contexte professionnel » ; qu'il conclut en conséquence que la maladie dont est atteint Monsieur Mohamed X... n'a pas été directement causée par son travail habituel ; qu'est donc uniquement en cause en l'espèce le dépassement du délai de prise en charge de l'ordre de deux ans ; que Monsieur Mohamed X..., lorsqu'il déclare sa maladie professionnelle le 22 avril 2004 suite à son opération du canal carpien droit le 20 avril 2004 après première constatation médicale du 25 mars 2004, précise être en arrêt maladie depuis décembre 2001 ; que le Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles a fait remonter à janvier 2004 la constatation médicale du syndrome du canal carpien bilatéral ; qu'en toute hypothèse, un délai supérieur à deux ans s'est écoulé entre la fin d'exposition aux risques et la première constatation médicale ; que les attestations des collègues de travail et de l'épouse de Monsieur Mohamed X... selon lesquels il se plaignait de ses mains depuis 1996-1998 permettent de poser le constat de douleurs effectives pendant l'exposition aux risques ; que particulièrement, Monsieur Jean-Paul Y..., secouriste à l'infirmerie de la société TIRO CLAS, précise que Monsieur Mohamed X... se rendait régulièrement à l'infirmerie pour se plaindre de picotements et douleurs ; qu'il s'il s'agit de manifestations cliniques du syndrome du canal carpien, il convient de relever que le certificat médical du médecin traitant en date du 15 février 2007 qui suit Monsieur Mohamed X... depuis 24 ans fait état de ce que ce patient présente des douleurs articulaires depuis 1990, d'origine tendineuse et arthrosique ; que dès lors, le bien fondé de l'avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles sera retenu en l'état de l'ensemble des éléments d'appréciation (arrêt, pages 3 et 4) ;
ALORS, d'une part, QUE pour que l'affection soit présumée d'origine professionnelle, seule la constatation des lésions visées à l'article L 461-1 du Code de la sécurité sociale doit intervenir dans le délai de prise en charge, peu important que leur identification intervienne postérieurement ; que pour refuser à Monsieur X... le bénéfice de la présomption d'imputabilité prévue à l'article L 461-1 al. 2 du Code de la sécurité sociale, la cour d'appel a relevé que l'authentification clinique du syndrome du canal carpien bilatéral n'était intervenue qu'en janvier 2004, soit deux ans après la fin de l'activité professionnelle, et qu'ainsi le délai de prise en charge de trente jours avait été dépassé de deux ans ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant d'une part qu'il résultait de la décision du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont la cour d'appel a entériné l'avis, qu'au cours de son travail, Monsieur X... avait exécuté des tâches l'exposant aux affections prévues au tableau n° 57 des maladies professionnelles, d'autre part qu'il résultait d'un certificat médical du 15 février 2007 que les douleurs dont se plaignait l'exposant remontaient à l'année 1990, date à laquelle il était encore en fonctions, enfin que les attestations des collègues de travail et de l'épouse de la victime permettaient de poser le constat de douleurs effectives pendant l'exposition au risque, d'où il résultait que la constatation des lésions était bien intervenue moins de 30 jours après la cessation de l'exposition au risque, peu important que l'identification exacte de la pathologie soit intervenue postérieurement, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale ;
ALORS, d'autre part et subsidiairement, QU'aux termes de l'article L 461-1 al. 3 du Code de la sécurité sociale, lorsque la victime ne peut se prévaloir de la présomption d'imputabilité prévue à l'alinéa précédent, notamment en raison d'un dépassement du délai de prise en charge, elle demeure recevable à établir, par tous moyens, la preuve de l'origine professionnelle de sa maladie ; qu'en se bornant à énoncer que le délai de prise en charge était en l'espèce dépassé, que les témoignages produits au débat permettaient de poser le constat de douleurs effectives pendant l'exposition au risque, et que le certificat médical du 15 février 2007 indiquait que le patient présentait des douleurs articulaires depuis 1990, pour en déduire qu'il convenait d'entériner l'avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles, selon lequel le dépassement du délai de prise en charge ne permettait pas de retenir un lien direct de causalité entre la pathologie présentée et le « contexte » professionnel, sans rechercher si, indépendamment de l'éventuel dépassement du délai de prise en charge, les douleurs décrites tant par les témoignages de salariés que par le certificat médical susvisé, survenues pendant l'exposition au risque, n'étaient pas liées à l'activité professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 461-1 al. 3 du Code de la sécurité sociale.