La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/09/2012 | FRANCE | N°11-19875

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 septembre 2012, 11-19875


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 12 janvier 2011), que par contrat du 11 février 2003, la société Promod a consenti à la société Avantage la distribution exclusive de ses produits sur le territoire de la Guyane ; que ce contrat a été résilié par la société Promod le 29 mars 2005 ; que le 10 septembre 2008, la société Avantage a assigné la société Promod pour, notamment, voir prononcer la nullité du contrat aux torts exclusifs de cette dernière, subsidiairement juger abusive et fautive la rÃ

©siliation, et obtenir le paiement de diverses sommes au titre du préjudice ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 12 janvier 2011), que par contrat du 11 février 2003, la société Promod a consenti à la société Avantage la distribution exclusive de ses produits sur le territoire de la Guyane ; que ce contrat a été résilié par la société Promod le 29 mars 2005 ; que le 10 septembre 2008, la société Avantage a assigné la société Promod pour, notamment, voir prononcer la nullité du contrat aux torts exclusifs de cette dernière, subsidiairement juger abusive et fautive la résiliation, et obtenir le paiement de diverses sommes au titre du préjudice subi et de la rémunération restant due en exécution du contrat ; Sur le premier moyen :
Attendu que la société Avantage fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de prononcé de la nullité du contrat, alors, selon le moyen :
1°/ que la validité du consentement doit être appréciée au moment de la formation du contrat ; qu'en l'espèce, pour affirmer que le consentement du distributeur n'avait pas été vicié à l'occasion de la conclusion du contrat de distribution litigieux signé le 11 février 2003, l'arrêt attaqué a retenu diverses circonstances afférentes à un échange de courriers en 2005, à des règlements intervenus entre les parties en cours d'exécution du contrat, à la fin de chaque période commerciale, et à la lettre de résiliation du 29 mars 2005 ; qu'en se fondant de la sorte sur des circonstances exclusivement postérieures à la conclusion du contrat litigieux, la cour d'appel a violé les articles 1109 et suivants du code civil ;
2°/ que, en toute hypothèse, la société Avantage rappelait, pièces à l'appui, que, « dès le 16 février 2004 », elle avait protesté contre les « prélèvements excessifs » pratiqués par la société Promod, qui avaient eu pour résultat « que le taux de marge garanti de 33,5 n'(était) pas atteint » et qu'il y avait lieu à « régularisations », notamment en ce qui concernait « la marge garantie » ; qu'en affirmant qu'elle aurait attendu un courrier du 14 avril 2005 comportant une allusion à des « erreurs de marge », pour protester contre le comportement de sa cocontractante, délaissant ainsi les conclusions par lesquelles elle démontrait avoir, bien plus tôt, émis de telles protestations, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le document d'information pré-contractuelle avait été remis le 16 février 2002 et que les modifications apportées au cours des négociations, consistant en une diminution des frais et du chiffre d'affaires à atteindre ainsi qu'en une réduction exceptionnelle du montant de la lettre de crédit, l'avaient été en faveur de la société Avantage, ce qui démontrait une relation équilibrée entre les parties, la cour d'appel n'a pas apprécié la validité du consentement de la société Avantage au regard de circonstances exclusivement postérieures à la conclusion du contrat ; Attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'avait pas, pour se prononcer sur la nullité du contrat, à répondre à des conclusions invoquées au soutien de la demande tendant à voir dire abusive et fautive la résiliation de ce contrat ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Avantage fait encore grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à voir dire abusive et fautive la résiliation du contrat et à obtenir réparation de son préjudice, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit mentionner et examiner, au moins succinctement, les éléments qui lui sont soumis et au vu desquels il se détermine ; qu'en affirmant que le caractère récurrent des retards de paiement allégués était étayé par des « pièces » sans procéder à la moindre analyse, même sommaire, desdites pièces qu'elle n'a pas davantage identifiées, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le contrat de distribution du 11 février 2003 précisait que « l'aménagement et l'agencement du point de vente » s'effectuaient sous les directives des « architectes agréés » par le fournisseur qui apportait « mobilier » et « matériels », les travaux étant « agréés » par lui, qu'en outre le fournisseur assurait « à tout moment » le « contrôle du stock » et fixait les « prix de revente maximum », y compris « à l'occasion des soldes et promotions » ; qu'en énonçant cependant qu'aucun élément concret n'établissait que la gestion du magasin eût relevé de la responsabilité du fournisseur, dénaturant ainsi le contenu dudit contrat d'où il résultait clairement que le fournisseur imposait ses directives sur de nombreux aspects de cette gestion, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ; Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé l'existence de nombreux rappels envoyés par la société Promod avant et après la réception de la lettre de crédit, la cour d'appel a pu en déduire l'existence de retards de paiement récurrents ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel n'a pu dénaturer des stipulations contractuelles auxquelles elle ne s'est pas référée, au demeurant non invoquées, la société Avantage ayant fait valoir des arguments tirés de l'exécution du contrat ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Avantage aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Promod la somme de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour la société Avantage
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le titulaire d'un contrat de distribution exclusif (la société AVANTAGE, l'exposante) conclu avec un fournisseur (la société PROMOD), de sa demande tendant à voir annuler ce contrat ;
AUX MOTIFS QUE la société AVANTAGE plaidait une mauvaise exécution immédiate du contrat par une surfacturation commise par la société PROMOD ; qu'elle n'apportait pas le moindre élément ni n'avançait le moindre calcul étayé ; que le contrat avait débuté en mars 2003 et qu'il avait fallu attendre un courrier du 14 avril 2005 pour naître l'allusion à des « erreurs de marge » qui ne reprenaient absolument pas les chiffres avancés aujourd'hui et que la société AVANTAGE qualifiait elle-même d'incidents, décrits comme réparés et qui ne l'avaient pas « démotivée » dans son attachement à développer la société PROMOD ; que l'argument manquait de sérieux et principalement de preuve ; que, comme en attestaient les pièces 39 et 40, la société AVANTAGE avait été réglée de ses droits à la fin de chaque période commerciale ; qu'elle n'avait jamais contesté les comptes établis entre elles ; que si ceux-ci lui avaient paru entachés d'une erreur, elle n'aurait pas manqué d'en faire part à son interlocutrice au moment de l'émission des documents comptables ; qu'elle n'était pas crédible à le faire bien après et surtout alors qu'elle avait réceptionné la lettre de résiliation et qu'elle voulait ériger cette contestation en argument de défense ; que le tribunal avait à juste titre souligné que les changements apportés au projet à l'issue des négociations étaient survenus à la suite d'avantages consentis par la société PROMOD, preuve s'il en était que le consentement de la société AVANTAGE n'avait pas été vicié (arrêt attaqué, p. 4, motifs) ;
ALORS QUE la validité du consentement doit être appréciée au moment de la formation du contrat ; qu'en l'espèce, pour affirmer que le consentement du distributeur n'avait pas été vicié à l'occasion de la conclusion du contrat de distribution litigieux signé le 11 février 2003, l'arrêt attaqué a retenu diverses circonstances afférentes à un échange de courriers en 2005, à des règlements intervenus entre les parties en cours d'exécution du contrat, à la fin de chaque période commerciale, et à la lettre de résiliation du 29 mars 2005 ; qu'en se fondant de la sorte sur des circonstances exclusivement postérieures à la conclusion du contrat litigieux, la Cour d'appel a violé les articles 1109 et suivants du Code civil ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, le distributeur rappelait, pièces à l'appui, que, « dès le 16 février 2004 », il avait protesté contre les « prélèvements excessifs » pratiqués par la société PROMOD, qui avaient eu pour résultat « que le taux de marge garanti de 33,5 n'(était) pas atteint » et qu'il y avait lieu à « régularisations », notamment en ce qui concernait « la marge garantie » (v. ses concl. avec pièces signifiées le 30 novembre 2009, p. 27, 1er al., courrier du 17 février 2004 cit., et p. 29 ; courrier du 26 février 2004 cit., prod.) ; qu'en affirmant que l'exposante aurait attendu un courrier du 14 avril 2005 comportant une allusion à des « erreurs de marge », pour protester contre le comportement de sa cocontractante, délaissant ainsi les conclusions par lesquelles le distributeur démontrait avoir, bien plus tôt, émis de telles protestations, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté le titulaire d'un contrat de distribution exclusif (la société AVANTAGE, l'exposante) de sa demande tendant à voir dire abusive et fautive la résiliation de ce contrat par le fournisseur (la société PROMOD) et, en conséquence, à le voir condamner à l'indemniser de son préjudice ;
AUX MOTIFS QUE les retards de paiement invoqués étaient étayés par les nombreux rappels envoyés par la société PROMOD à la société AVANTAGE, avant et après la réception de la lettre de crédit ; qu'il s'agissait d'un cas de résiliation ; que la débitrice ne pouvait prétendre contre la vérité, étayée par des pièces, que ces retards n'auraient été que ponctuels ; qu'ils avaient été récurrents ; que s'agissant de la non-réalisation de l'objectif en termes de chiffre d'affaires qui avait été fixé à 550.000 € et qui n'avait pas été atteint, la société AVANTAGE tentait pour s'en dédouaner d'affirmer que la société PROMOD assurait la gestion du magasin tandis qu'elle ne mettait à disposition que le local et le personnel, mais n'apportait aucun élément concret à l'appui de cette affirmation ; que l'argument ne tenait pas car si la société AVANTAGE s'était engagée à respecter les propositions de réassort de son stock formulées par la société PROMOD comme contractuellement prévu, il avait été constaté qu'elle avait gardé sa liberté de le gérer comme elle l'entendait ; qu'en outre, vu la distance, les moyens informatiques ne solutionnant pas tout, il était difficile d'affirmer que la société PROMOD aurait gardé la complète maîtrise des choix de gestion, d'autant que la société AVANTAGE connaissait le marché local ; qu'elle assumait seule la responsabilité de son exploitation et des choix qu'elle avait la liberté de faire dans ce cadre, cette direction d'entreprise ne se limitant pas à une mise à disposition de moyens et ne relevant pas de la responsabilité du fournisseur, fût-il lié par un contrat d'objectif (arrêt attaqué, p. 5, 3ème et 5ème al.) ;
ALORS QUE le juge doit mentionner et examiner, au moins succinctement, les éléments qui lui sont soumis et au vu desquels il se détermine ; qu'en affirmant que le caractère récurrent des retards de paiement allégués était étayé par des « pièces » ; sans procéder à la moindre analyse, même sommaire, desdites pièces qu'elle n'a pas davantage identifiées, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE le contrat de distribution du 11 février 2003 (prod.) précisait que « l'aménagement et l'agencement du point de vente » s'effectuaient sous les directives des « architectes agréés » par le fournisseur qui apportait « mobilier » et « matériels », les travaux étant « agréés » par lui (titre III du contrat, art. 11.1, 11.2), qu'en outre le fournisseur assurait « à tout moment » le « contrôle du stock » (article 17.2.2) et fixait les « prix de revente maximum », y compris « à l'occasion des soldes et promotions » (art. 17.3.1) ; qu'en énonçant cependant qu'aucun élément concret n'établissait que la gestion du magasin eût relevé de la responsabilité du fournisseur, dénaturant ainsi le contenu dudit contrat d'où il résultait clairement que le fournisseur imposait ses directives sur de nombreux aspects de cette gestion, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-19875
Date de la décision : 18/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 12 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 sep. 2012, pourvoi n°11-19875


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19875
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award