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11/09/2012 | FRANCE | N°11-19592

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 septembre 2012, 11-19592


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 février 2011), que, par acte sous seing privé du 2 février 2005, Basiel X... et son épouse ont promis de vendre à M. et Mme Y..., au prix de 125 000 euros, une maison située au Cannet et que, par un second acte du même jour, ils ont donné à ces derniers une somme de 120 000 euros ; que Basiel X... est décédé le 19 février 2005 et que, le 28 juillet suivant, sa veuve a signé l'acte authentique de vente de la maison du Cannet à M. et Mme Y... ; que, le 29

juin 2007, l'administration fiscale a notifié à ces derniers une pr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 février 2011), que, par acte sous seing privé du 2 février 2005, Basiel X... et son épouse ont promis de vendre à M. et Mme Y..., au prix de 125 000 euros, une maison située au Cannet et que, par un second acte du même jour, ils ont donné à ces derniers une somme de 120 000 euros ; que Basiel X... est décédé le 19 février 2005 et que, le 28 juillet suivant, sa veuve a signé l'acte authentique de vente de la maison du Cannet à M. et Mme Y... ; que, le 29 juin 2007, l'administration fiscale a notifié à ces derniers une proposition de rectification, rehaussant la valeur du bien ainsi vendu et requalifiant l'acte de vente en donation déguisée ; qu'après mise en recouvrement des droits de mutation correspondants et rejet de leur réclamation, M. et Mme Y... ont saisi le tribunal de grande instance afin d'être déchargés de cette imposition ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt d'avoir dit régulier et fondé le redressement alors, selon le moyen :
1°/ qu'en vertu de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, la proposition de rectification doit énoncer les raisons de fait et de droit qui la fondent de façon suffisamment claire pour permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître, le cas échéant, son acceptation ; qu'en se référant, pour juger que la proposition de rectification reçue par M. et Mme Y... énonçait suffisamment en fait les raisons pour lesquelles l'administration avait entendu faire application du paragraphe 1er de l'article 750 ter du code général des impôts relatif aux droits de mutation dus lorsque le donateur ou le défunt avait son domicile fiscal en France, à des éléments établissant selon elle la domiciliation en France des époux X... mais qui n'étaient pas mentionnés par ce document, et que les contribuables n'avaient pu alors discuter, la cour d'appel a violé ledit article ;
2°/ qu'ayant constaté que la proposition de rectification mentionnait tout à la fois d'une part que la maison située au Cannet, et faisant l'objet du compromis de vente, constituait la résidence principale des époux X... et, d'autre part, que ces derniers étaient considérés comme étant domiciliés en Belgique, ce que confirmaient les renseignements obtenus de l'administration fiscale belge dans le cadre de l'assistance administrative prévue par la convention franco-belge, d'où il suit que ce document ne faisait pas clairement connaître par cette motivation ambigüe les raisons de fait justifiant la mise en oeuvre par l'administration des dispositions du premier paragraphe de l'article 750 ter du code général des impôts sur lesquelles elle se serait fondée, et ne permettait dès lors pas de les contester en toute connaissance de cause, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé un tel document suffisamment motivé en droit comme en fait, a encore violé l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que l'arrêt constate que, dans sa proposition de rectification, l'administration fiscale avait invoqué les dispositions de l'article 750 ter du code général des impôts dont elle avait reproduit le premier paragraphe du premier alinéa et que, dans l'acte de vente notarié, figurait une déclaration de domiciliation de la venderesse à l'adresse du bien vendu avec indication qu'elle dépendait du service des impôts de Cannes et s'engageait à signaler à ce dernier tout changement d'adresse ; que l'arrêt relève qu'en page 6 de la proposition de rectification, l'administration rappelait que Mme X... avait souscrit la déclaration de succession de son époux en y précisant qu'elle résidait avec lui, de son vivant, à l'adresse du bien litigieux au Cannet, raison pour laquelle l'administration entendait faire application des dispositions dudit article 750 ter, pour assujettir la cession de celui-ci à la fiscalité française ; qu'il retient que, si la proposition de rectification mentionnait que les époux X... étaient considérés en Belgique comme y étant domiciliés, c'était pour expliquer qu'une taxe de 7 % avait été perçue par le Trésor belge sur la donation ; que la cour d'appel a pu déduire de ces constatations et appréciations que la proposition de rectification était dépourvue d'ambiguïté et régulièrement motivée en fait et en droit ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. et Mme Y... font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que la procédure de répression des abus de droit n'est applicable que si l'abus de droit relève, dans tous ses éléments constitutifs, du droit fiscal français ; qu'en s'abstenant de toute réponse au moyen opérant tiré par M. et Mme Y... de ce que, s'agissant d'une opération réalisée par des résidents belges, et consistant, notamment, en une donation enregistrée en Belgique et assujettie dans ce pays à la taxe de donation de 7 %, les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales n'étaient pas applicables, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant notamment relevé l'absence des deniers représentant le prix de la cession dans la succession de Basiel X... qui avait atteint un âge avancé et était décédé peu après celle-ci, l'absence d'héritier direct et son lien de parenté avec l'un des acquéreurs, ainsi que la minoration du prix de vente au regard des éléments de comparaison fournis par l'administration, et retenu que cette dernière était fondée à requalifier l'acte de vente en donation déguisée, la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer la somme globale de 2 500 euros au directeur général des finances publiques ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

M. et Mme Y... font grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le redressement était fondé et régulier à leur égard
AUX MOTIFS QUE dans sa proposition de rectification, l'administration fiscale a invoqué les dispositions de l'article 750 ter du code général des impôts dont elle a reproduit le 1er aliéna, paragraphe « 1° », à savoir : « sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit les biens meubles et immeubles situés en France ou hors de France, et notamment les fonds publics, parts d'intérêt, créances et généralement toutes les valeurs mobilières françaises ou étrangères de quelque nature qu'elles soient lorsque le donateur ou le défunt a son domicile fiscal en France au sens de l'article 4B » ; l'article 4A du code général des impôts édicte que les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus ; selon les dispositions de l'article 4 B du code général des Impôts, sont considérés comme ayant leur domicile fiscale en France au sens de l'article 4 A, notamment les personnes qui ont en Franc leur foyer ou le lieu de leur séjour principal, et celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. Il ressort des pièces versées aux débats que les époux X... – B... ont régulièrement souscrits des déclarations de revenus depuis 1998 auprès du centre des impôts du Cannet en faisant figurer comme adresse :... ; par ailleurs, à la suite du décès, le 19 février 2005 de M. Basiel X..., alors retraité, la déclaration de succession souscrite par Mme Adriana X... née B... a été effectuée auprès de la recette des impôts de Cannes-Le Cannet, et non pas au centre des non résidents, comme cela aurait été le cas si ces derniers étaient résidents à l'étranger, ladite déclaration mentionnant que le défunt était « résident à... – à 06110 Le Cannet (Cannes) depuis 1979 » ; en outre il n'est pas contesté que les époux X... – B... étaient titulaires de deux comptes Codevi auprès de la Bnp Paribas du Cannet et d'un livret à la Banque Postale, pour un montant au jour du décès de 19 566, 09 €, alors qu'en Belgique, ils avaient deux comptes à la Fortis Bank déclarés pour une valeur totale de 7 303, 29 € ; il ressort de l'examen de l'acte notarié de vente du 28 juillet 2005 reçu par Me A..., notaire à Cannes, que figure au titre du domicile fiscale la déclaration suivante : « en outre, il (le vendeur) déclare être effectivement domicilié à l'adresse sus-indiquée (au Cannet,...) et dépendre actuellement du service des impôts de Cannes, boulevard Leader et s'engager à signaler à ce dernier tout changement d'adresse » ; il y a lieu de constater ainsi que les époux X... – B... tant dans leurs déclarations de revenus que dans l'acte de vente que dans la déclaration de succession ont toujours déclaré être domiciliés au Cannet ; dans la mesure où ils y résidaient ensemble, que leur fils unique était décédé en 1975, il y a lieu d'en conclure qu'ils y avaient également leur foyer ; il est donc suffisamment établi que les époux X... – B... résidaient au... au Cannet depuis 1979, y avaient le lieu de leur séjour principal et de leur foyer, donc leur domicile fiscal, aucune des pièces versées aux débats ne démontrant qu'ils aient effectivement résidé au 17 Schoolstraat, 9630, commune de Zwalm (Belgique), adresse figurant également sur la déclaration de succession, ni qu'ils y aient eu le centre de leurs intérêts économiques ; en conséquence les conditions prévues à l'alinéa premier, paragraphe 1 de l'article 750 ter du code général des impôts étant réunies, les dispositions de ce texte sont applicables en l'espèce ; dans sa proposition de rectification l'administration fiscale ne mentionne que ce paragraphe, ce qui montre qu'elle entendait en faire application et ne pas se baser sur les dispositions du paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 750 ter du CGI, et qu'elle entend nécessairement invoqué le fait que le domicile fiscale des époux X... – B... était situé en France ; au demeurant, en page 6 de la proposition de rectification, l'administration fiscale que Mme Adriana X... née B..., qui a souscrit la déclaration de souscription, résidait « avec son époux de son vivant Villa ..., au... au Cannet (06110) ». C'est donc en raison de cette circonstance qu'elle entendait faire application du paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 750 ter du CGI. Si par la suite elle mentionne que Monsieur et Madame X... étaient considérés comme étant domiciliés en Belgique c'est pour expliquer ce qu'elle mentionne juste avant, c'est-à-dire que « la taxe de la donation de 7 % a été perçue par le Trésor belge ». Elle cite d'ailleurs à la suite, en complément des explications fournies par les autorités fiscales belges qui considèrent que « M. Basiel X... était, au moment de son décès, toujours considéré comme habitant du Royaume », ce qui n'était manifestement pas la thèse des autorités fiscales françaises, puisqu'elles faisaient état d'une résidence Villa ..., au... au Cannet (06110) ; il y a lieu de constater que dans sa proposition de rectification, l'administration fiscale a suffisamment motivé en fait et en droit sa position quant à l'assujettissement de la cession immobilière à la fiscalité française ;
ALORS QU'en vertu de l'article L. 57 du Livre des procédures fiscales, la proposition de rectification doit énoncer les raisons de fait et de droit qui la fondent de façon suffisamment claire pour permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître, le cas échéant, son acceptation ; qu'en se référant, pour juger que la proposition de rectification reçue par M. et Mme Y... énonçait suffisamment en fait les raisons pour lesquelles l'administration avait entendu faire application du paragraphe 1er de l'article 750 ter du code général des impôts relatif aux droits de mutation dus lorsque le donateur ou le défunt avait son domicile fiscal en France, à des éléments établissant selon elle la domiciliation en France des époux X... mais qui n'étaient pas mentionnés par ce document, et que les contribuables n'avaient pu alors discuter, la cour d'appel a violé ledit article.
ET ALORS QU'ayant constaté que la proposition de rectification mentionnait tout à la fois d'une part que la maison située au Cannet, et faisant l'objet du compromis de vente, constituait la résidence principale des époux X... et, d'autre part, que ces derniers étaient considérés comme étant domiciliés en Belgique, ce que confirmaient les renseignements obtenus de l'administration fiscale belge dans le cadre de l'assistance administrative prévue par la convention franco-belge, d'où il suit que ce document ne faisait pas clairement connaître par cette motivation ambigüe les raisons de fait justifiant la mise en oeuvre par l'administration des dispositions du 1er paragraphe de l'article 750 ter du CGI sur lesquelles elle se serait fondée, et ne permettait dès lors pas de les contester en toute connaissance de cause, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé un tel document suffisamment motivé en droit comme en fait, a encore violé l'article L. 57 du Livre des procédures fiscales.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

M. et Mme Y... font grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le redressement était fondé et régulier à leur égard
ALORS QUE la procédure de répression des abus de droit n'est applicable que si l'abus de droit relève, dans tous ses éléments constitutifs, du droit fiscal français ; qu'en s'abstenant de toute réponse aux moyen opérant tiré par M. et Mme Y... de ce que, s'agissant d'une opération réalisée par des résidents belges, et consistant, notamment, en une donation enregistrée en Belgique et assujettie dans ce pays à la taxe de donation de 7 %, les dispositions de l'article L. 64 du Livre des procédures fiscales n'étaient pas applicables, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-19592
Date de la décision : 11/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 22 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 sep. 2012, pourvoi n°11-19592


Composition du Tribunal
Président : M. Espel (président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19592
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