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08/08/2012 | FRANCE | N°12-81732

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 août 2012, 12-81732


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Aboubacar X...,- M. Medhi Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 13 février 2012, qui, dans l'information suivie contre eux du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 30 avril 2012, joignant les pourvois en raison de la connexité et presc

rivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Attendu qu'il r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Aboubacar X...,- M. Medhi Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 13 février 2012, qui, dans l'information suivie contre eux du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 30 avril 2012, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, procédant à une enquête préliminaire à la suite de la dénonciation d'un trafic de produits stupéfiants, les gendarmes ont sollicité et obtenu du juge des libertés et de la détention l'autorisation d'effectuer des interceptions téléphoniques sur les lignes attribuées à MM. Diakanké Z..., Madiouma Z... et X... ; que, dans l'information ouverte le 30 novembre 2010 du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, MM. X... et Y..., placés en garde à vue puis mis en examen, le 7 février 2011, du chef susvisé, ont présenté, le 21 juillet 2011, des requêtes en annulation de la procédure ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 171, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale " ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'une pièce de la procédure examinée jusqu'à la cote D. 48888, et spécialement, du procès-verbal du 20 avril 2010 et des actes subséquents ;
" aux motifs que le procès-verbal en cause (coté D. 23), daté du 20 avril 2010, dont il est réclamé la nullité, comporte les mentions suivantes : " Agissant dans le cadre de l'enquête susmentionnée nous procédons à l'identification des lignes téléphoniques appartenant à MM. Madiouma, Z... et X..., susceptibles d'intéresser l'enquête en cours. Ces lignes téléphoniques proviennent d'archives de procédure de notre unité dont les intéressés ont fait l'objet de diverses enquêtes. Ces lignes sont consignées dans le tableau ci-dessous ", tableau qui comprend les numéros ... attribué à M. Diakouké Z..., ainsi que ceux de M. Madiouma Z...,..., et de M. X...
... ; qu'en exécution de l'arrêt du 15 décembre 2011, l'unité de gendarmerie concernée soit celle de la brigade de recherches d'Evry a rappelé dans un procès-verbal du 23 décembre 2011, ce que suit, s'agissant des archives de procédure qui étaient réclamées : " Nous effectuons des recherches sur les divers registres informatiques à partir des noms des titulaires des lignes. Nous consultons l'ensemble des archives relatives aux procédures où ses individus ont été mis en cause. Nous n'y découvrons aucun numéro de téléphone correspondant. Mentionnons que les titulaires des lignes ont pu être entendus en qualité de témoins par les militaires de la brigade de gendarmerie de Fleury-Mérogis, au cours desquelles les numéros de téléphone auraient pu apparaître, néanmoins cette unité établissant plus de 6 000 procédures par an, il nous a été techniquement impossible de toutes les consulter " ; que l'autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Evry d'interceptions de correspondances téléphoniques a porté sur la ligne de M. Diakanké Z...
..., sur une période de surveillance allant du 12 avril 2010 à 17h57 au 9 mai 2010 à 23h17 ; que cette surveillance a permis l'enregistrement de 528 communications entrantes et sortantes ainsi que de 338 SMS et de constater que la totalité des correspondances émises ou reçues l'avaient été par M. Diakanké Z... et M. Madiouma X..., utilisateur de ce numéro de téléphone, seul ce... s'étant révélé exploitable, puisque M. Madiouma Z... avait changé de numéro de téléphone et que M. X... ne possédait plus de téléphone portable ; qu'en dépit de l'absence de pièce matérielle tenant lieu d'archives de procédure, il résulte du procès-verbal de synthèse du 29 novembre 2010, qu'à compter du 19 février 2010, les militaires de la brigade de gendarmerie de recherches d'Evry avaient diligenté une enquête préliminaire pour trafic de stupéfiants qui se déroulait sur et autour de la place du 8 mai 1945 à Fleury-Mérogis, suite à de nombreux renseignements recueillis auprès du voisinage de ce lieux ; que dans le cadre des surveillances physiques mises en place, il avait été repéré le dénommé M. A... dont le comportement pouvait laisser penser qu'il se livrait quotidiennement à la revente de résine de cannabis ; qu'une interception technique de sa ligne téléphonique devait être mise en place, ce qui permettait de constater que l'intéressé était en contacts réguliers avec M. Madiouma Z..., frère de M. Diakanké Z..., qui était également en relations avec M. X... ; que les militaires de la gendarmerie dans le cadre de leurs surveillances sur place et des contrôles effectués mentionnaient dans leur procès-verbal d'enquête du 21 avril 2010 établi aux fins de présenter une demande d'interception téléphonique, qu'ils avaient antérieurement et régulièrement effectué des opérations de contrôle reposant sur un " bouclage " de la place du 8 mai 1945, notamment courant l'année 2009, au cours de laquelle il avait été établi un procès-verbal d'interpellation le 13 juin 2009, des dénommés MM. Madiouma et Diakanké Z... et M. X..., ce qui avait permis de trouver dix barrettes de résine de cannabis à proximité, ainsi qu'une somme de 370 euros sur M. Madiouma Z... ; qu'il était également précisé ce que suit en cotes D. 6 et D. 7 : " Renseignements mettant en cause les deux frères Z... et M. X..., le 20 février 2010 " un informateur ", côtoyant les mis en cause nous rapporte les faits suivants : le dénommé M. Diakanké Z... demeurant à Fleury-Mérogis se livre à un trafic de résine de cannabis, l'achat et la revente s'effectuent sur la place du 8 mai 1945 il nous précise que l'acheteur était entré en contact avec lui sur son téléphone portable, nous ne savons pas s'il a prévenu M. Diakanké Z... de l'annulation,- personnalité des mis en cause : 1) M. Diakanké Z... né le 28 mai 1987 à Villeneuve-Saint-Georges demeurant... à Fleury-Mérogis, portable ..., sans emploi, connu pour vol à main armée le 23 juillet 2003 à Chelles et vol à main armée le 14 juin 2006 à Fleury-Mérogis, 2) M. Aboubacar X... né le 4 février 1987 à Gennevilliers demeurant... à Fleury-Mérogis, connu pour trafic de stupéfiants et vol à main armée, vol avec arme blanche le 11 janvier 2001 à Saint-Geneviève-des-Bois, recel le 2 mars 2006 à Sucy-en-Brie, trafic de stupéfiants à Fleury-Mérogis le 1er janvier 2008, défaut de permis de conduire le 7 janvier 2008, 3) M. Madiouma Z... né le 12 juin 1990 à Courcouronnes demeurant au... à Fleury-Mérogis, connu pour détention et cession de produits stupéfiants le 13 juin 2009 ; que par ailleurs ultérieurement lors de leurs interpellations et de leurs placements en garde à vue respectifs, le 3 février 2011, tant M. X..., que M. Diakanké Z... reconnaîtront dans leurs auditions avoir été contrôlés dans le passé pour des problèmes de stupéfiants, que M. Diakanké Z... précisait même que depuis sa majorité, pour être né le 28 mai 1987, il avait été placé en garde à vue plusieurs fois et qu'il avait " quelques condamnations ", notamment, pour outrages et défaut de permis ; qu'il résulte de tout ce qui précède que le procès-verbal critiqué peut mentionner légitimement que les numéros de téléphone des trois intéressés provenaient d'archives de procédures, au regard des contrôles et/ ou des placements en garde à vue dont ces derniers avaient été incontestablement l'objet précédemment, et également compte tenu des renseignements délivrés par un " informateur " le 20 février 2010 qui connaissait particulièrement l'activité de M. Diakanké Z..., comme le fait que ce dernier avait un rendez-vous avec un acheteur de stupéfiants qui l'avait lui-même contacté, étant constaté que les forces de gendarmerie disposaient d'informations précises sur l'état civil des frères Z... et de M. X... bien avant le 3 février 2011 ; qu'en conséquence, il n'existe aucun motif pour mettre en cause la valeur probante du procès-verbal dénoncé, car il n'est pas établi qu'il a été dressé suite à des procédés déloyaux, cela d'autant que sur les trois numéros de téléphone individualisés, un seul a présenté un intérêt pour la poursuite de l'enquête, que le moyen de nullité soulevé de ce chef sera écarté, étant rappelé que la cour, dans son arrêt du 15 décembre 2011, n'avait posé le principe que de l'utilité possible des archives en litige ;

1°) " alors que seule la production, faisant défaut en l'espèce, des archives des procédures visées au procès-verbal 20 avril 2010 et évoquées par l'arrêt attaqué, était de nature à permettre de s'assurer efficacement que le numéro de téléphone de M. Diakanké Z..., dont l'utilisation dans la présente procédure avait permis l'enregistrement des communications de M. X... avec ce dernier, avait été régulièrement obtenu ou recueilli de manière loyale ; qu'en statuant aux motifs insuffisants et inopérants ci-dessus reproduits, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
2°) " alors encore qu'en statuant comme elle l'a fait, la chambre de l'instruction a méconnu le droit de M. X..., dans l'impossibilité de faire contrôler efficacement la régularité de la procédure, à un procès équitable " ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X... tendant à l'annulation du procès-verbal du 20 avril 2010 mentionnant que l'identification des lignes téléphoniques interceptées provenait de la consultation " d'archives de procédures " de l'unité de gendarmerie en charge de l'enquête qui ne figuraient pas au dossier, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, d'une part, les modalités d'identification de lignes téléphoniques sont laissées à la libre appréciation des enquêteurs, et que, d'autre part, ce procès-verbal ne vaut qu'à titre de simples renseignements, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ; D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation pour M. X..., pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 706-65, 100 et suivants, 81, 171, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'une pièce de la procédure examinée jusqu'à la cote D 48888, et spécialement, des écoutes téléphoniques ;
" aux motifs qu'il est acquis que la ligne téléphonique de M. Diakanké Z... a été initialement placée sur écoute à partir du 12 avril 2010, pour une durée de quinze jours en vertu d'une autorisation délivrée le 6 avril 2010, par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Evry ; qu'il n'a pas été versé au dossier d'instruction, une copie conforme ou en original de cette décision du 6 avril 2010, qui a cependant été réclamée par la cour dans son arrêt du 15 décembre 2011, cette pièce pouvant être utile à l'examen du moyen de nullité soulevé de ce chef ; que le requérant soutient que ce défaut ne permet pas de vérifier l'existence et la régularité de l'autorisation d'interceptions de correspondances téléphoniques du 6 avril 2010, alors qu'il n'existe de plus, aucune trace des réquisitions du procureur de la République préalables à cette décision ; que si le greffe du juge des libertés et de la détention ne conserve pas de minutes des décisions rendues, il a été produit la trace informatique de celle du 6 avril 2010, telle qu'elle existe au greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Evry, qui correspond à l'exemplaire de la décision qui a été mise en forme par le greffier et signée par le magistrat ; que cette trace informatique dans son édition permet de constater que la décision rendue l'a bien été le 6 avril 2010, par Mme Carole Chegaray vice-présidente, juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance d'Evry, au vu de l'enquête diligentée du chef d'acquisition, détention, offre ou cession illicite de stupéfiants, et de la requête du ministère public en la personne de Mme Claire Berger, substitut du procureur de la République, en date du 6 avril 2010, sollicitant l'interception téléphonique des trois lignes qui correspondaient exactement à celles identifiées par les services de gendarmerie dans le cadre de leur enquête préliminaire commencée le 19 février 2010, ayant donné lieu à un rapport du 21 avril 2010, visées par les archives de procédures, soit le... au nom de M. Diakanké Z..., n°... au nom de M. X..., et n°... au nom de M. Madiouma Z... ; que cette copie de décision comporte un dispositif qui autorise l'interception téléphonique réclamée pendant une durée de quinze jours, à compter du 12 avril 2010 à 9 heures ; que cette mesure a été strictement rappelée par l'officier de police judiciaire M. Stéphane Sauzeau, en cote D7, au titre " Eléments de procédure ", dans son rapport de clôture du 21 avril 2010 ; que la décision du 6 avril 2010 a été également mentionnée de manière non équivoque dans la saisine aux fins de prolongation d'interceptions téléphoniques, rédigée par l'officier de police judiciaire précité le 20 avril 2010, qui fait état de Mme Chegaray Carole, juge des libertés et de la détention qui a autorisé le 6 avril 2010, les interceptions de correspondances téléphoniques à partir du 12 avril 2010, pour une durée de quinze jours ; que la décision du 6 avril 2010 est à nouveau visée dans le procès-verbal de synthèse établi le 22 septembre 2010 par M. Jean-Christophe Mary, officier de police judiciaire, qui, dans le préambule de son rapport indique : " Le 6 avril 2010, Mme Carole Chegaray, juge des libertés et de la détention au tribunal de grande instance d'Evry, nous délivre une autorisation d'interceptions de correspondances de la ligne téléphonique ..., susceptible d'être utilisé par M. Diakanké Z.... Mentionnons que cette autorisation avait été sollicitée auprès de Mme Claire Berger substitut du procureur de la République " ; qu'enfin, la décision du 6 avril 2010 est expressément référencée dans la requête aux fins de prolongation d'interceptions téléphoniques de Mme Claire Berger substitut du 21 avril 2010 et dans la décision d'autorisation de prolongation du juge des libertés et de la détention du 22 avril 2010, qui a porté sur la seule ligne attribuée à M. Diakanké Z...
... ; qu'en conséquence, l'ensemble des actes ci-dessus rappelés établit la réalité et la régularité de la procédure ayant donné lieu à l'ordonnance du 6 avril 2010 ; que le moyen de nullité soulevé de ce chef sera rejeté ;
" alors que ni la mention de l'existence et de la teneur de la décision du 6 avril 2010 dans divers actes de la procédure ni la production d'une trace informatique ayant permis l'impression d'une copie non certifiée conforme et qui n'était pas signée par le juge des libertés et de la détention, ne font preuve de ce que cette décision répondait bien, pour avoir été régulièrement signée, aux conditions essentielles de son existence légale ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisé " ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation des interceptions téléphoniques de la ligne de M. Diakanké Z..., tirée de l'absence au dossier de l'original ou de la copie certifiée conforme de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, en date du 6 avril 2010, autorisant de telles interceptions, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'attestent de l'existence et de la teneur de cette ordonnance la " trace informatique " imprimée de la décision versée au dossier, et la référence expresse, dans divers procès-verbaux d'enquête, à l'autorisation d'interception donnée le 6 avril 2010 par le juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation pour M. X..., pris de la violation des articles 6 § 1 et § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 171, 174, 206, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'une pièce de la procédure examinée jusqu'à la cote D 48888, et notamment, des gardes à vue de MM. B..., C... et D... et des actes dont elles constituent le support nécessaire ;
" aux motifs que, suite à leurs interpellations respectives, M. B... a été placé en garde à vue, à compter du 3 février 2011, à 6 heures, M. C..., à compter du 3 février 2011 à 6h20 et M. D..., à compter du 7 février 2011 à 17 heures ; que, lors de ces mesures et des auditions recueillies, il n'a pas été notifié aux intéressés leur droit de se taire, de s'entretenir sans délai avec un avocat et de bénéficier de son assistance lors de leurs auditions ; qu'il apparaît que les gardés à vue ci-dessus nommés ont été privés de ces droits, seul celui de l'entretien prévu à l'issue de la soixante-douzième heure leur ayant été notifié, M. B... s'étant entretenu avec un avocat commis d'office le 6 février 2011 à 12h15, M. C... ayant renoncé à ce droit, M. D... ayant été l'objet d'une mesure de garde à vue qui a pris fin avant la soixante-douzième heure ; que M. X... invoque la nullité des mesures de garde à vue des intéressés aux motifs que ces derniers dans leurs déclarations l'ont mis en cause comme participant à un trafic de stupéfiants, alors que leurs auditions sont entachées de nullité en raison de l'absence de notification des droits ci-dessus rappelés, soit le droit de se taire, de s'entretenir avec un avocat et d'être assisté par un conseil, et que ces irrégularités portent atteinte à ses intérêts ; que, selon les exigences du procès équitable résultant de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne gardée à vue doit bénéficier de la notification de son droit au silence et de l'intervention d'un avocat lors de ses auditions ; qu'en l'espèce, il est constant que les intéressés n'ont pas bénéficié de ces dispositions durant leurs gardes à vue ; que, cependant, si les auditions recueillies l'ont été en méconnaissance des droits de la défense, il n'y a pas lieu à annulation car si la Cour européenne des droits de l'homme a rappelé dans plusieurs arrêts dont celui du 14 octobre 2010 mettant en cause l'Etat français, la nécessité de respecter à l'occasion d'une mesure de garde à vue les dispositions de l'article 6 § 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, cette juridiction n'a pas assorti expressément à titre de sanction de leur ignorance, la nullité des actes concernés, une telle solution étant renvoyée en application du droit national ; qu'aux termes de l'article 62 de la Constitution, les décisions du Conseil constitutionnel s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelle ; que si le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 2010, a estimé que les articles 62, 63, 63-1 et 63-4, alinéas 1 et 6, et 77 du code de procédure pénale alors applicables, n'instituaient pas les garanties appropriées à l'usage qui est fait de la garde à vue, il a été décidé qu'il y avait lieu de reporter au 1er juillet 2011, leur date d'abrogation afin de permettre au législateur de remédier à cette situation et que les mesures prises avant cette date ne pouvaient être contestées sur le fondement de l'inconstitutionnalité, les officiers de police judiciaire ayant en l'espèce appliqué avec loyauté les dispositions légales en vigueur ; qu'il en résulte que le principe de la sécurité juridique notamment protecteur des droits des victimes, confirmé par la Cour européenne des droits de l'homme, le Conseil constitutionnel ainsi que par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans ses arrêts rendus en formation plénière le 19 octobre 2010, permet de constater que les intéressés ont été placés sous le régime d'une garde à vue parfaitement conforme au droit positif à la date des 3 et 7 février 2011, à savoir, sans notification du droit de garder le silence, et avant la soixante-douzième heure, sans un entretien immédiat avec un avocat et son assistance durant les auditions, que les gardes à vue conduites l'ont été avec loyauté par les officiers de police judiciaire et dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de leur mise en oeuvre ; que M. X... invoque la nullité des mesures de garde à vue de MM. B..., C... et D..., alors que ce moyen n'est pas soutenu par les intéressés ; qu'il ne se prévaut pas quant à lui, de la méconnaissance de ses droits de se taire, de bénéficier d'un entretien avec un avocat et de son assistance qui ne lui ont pas été notifiés lors de sa propre garde à vue ; que ce moyen s'il pouvait être accueilli, serait de nature à porter atteinte aux droits de la défense particulièrement de MM. B..., C... et D..., qui ont accepté d'effectuer des déclarations de nature à leur permettre de bénéficier de circonstances atténuantes devant la juridiction de jugement, qui aura éventuellement à statuer, ayant fourni des renseignements sur le fonctionnement du trafic de stupéfiants en cause, et l'identité de ceux qui le dirigent, pour certains en ayant précisé qu'ils prenaient des risques pour leur intégrité et celle de leur famille pour avoir délivré des informations aux officiers de police judiciaire qui les interrogeait ; que la cour ne trouve en conséquence aucune cause de nullité s'agissant des gardes à vue contestées ;
1°) " alors qu'il se déduit de l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme que toute personne, placée en garde à vue, doit, dès le début de cette mesure, être informée de son droit de se taire et, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'affaire, non constatées en l'espèce, pouvoir bénéficier, en l'absence de renonciation non équivoque, de l'assistance d'un avocat ; qu'en rejetant le moyen pris de la nullité de la garde à vue de MM. B..., C... et D... aux motifs ci-dessus reproduits, alors qu'il lui appartenait, après avoir constaté que les auditions recueillies en garde à vue n'étaient pas conformes aux prescriptions de la Convention européenne des droits de l'homme, d'annuler ces actes puis de procéder ainsi qu'il est prescrit par les articles 174 et 206 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a méconnu le principe ci-dessus énoncé ;
2°) " alors que les déclarations émanant d'autres mis en cause, mettant en cause le requérant dans la commission des faits reprochés, mais irrégulièrement recueillies, faute de notification du droit de se taire et de l'assistance d'un avocat durant la garde à vue, portent nécessairement atteinte à ses intérêts ; que ce seul constat justifiait de sa qualité pour agir et le prononcé de la nullité ;
3°) " alors qu'en ne statuant pas sur la régularité de la garde à vue de Mme Catherine E..., dont elle était également saisie dans la requête en nullité, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X... tendant à l'annulation des auditions faites au cours de la garde à vue de plusieurs personnes qui l'ont mis en cause dans le trafic de stupéfiants sans avoir reçu notification du droit de se taire ni bénéficié de l'assistance d'un avocat, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors que la méconnaissance des formalités substantielles auxquelles est subordonnée la garde à vue ne peut être invoquée à l'appui d'une demande d'annulation d'acte ou pièce de la procédure que par la partie qu'elle concerne, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des articles 171 et 802 du code de procédure pénale, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le moyen unique de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 § 1 et § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 171, 174, 206, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'une pièce de la procédure examinée jusqu'à la cote D 48888 ;
" aux motifs que, selon les exigences du procès équitable résultant de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne gardée à vue doit bénéficier de la notification de son droit au silence et de l'intervention d'un avocat lors de ses auditions ; qu'en l'espèce, il est constant que les intéressés n'ont pas bénéficié de ces dispositions durant leurs gardes à vue, que cependant si les auditions recueillies l'ont été en méconnaissance des droits de la défense, il n'y a pas lieu à annulation car si la Cour européenne des droits de l'homme a rappelé dans plusieurs arrêts dont celui du 14 octobre 2010 mettant en cause l'Etat français, la nécessité de respecter à l'occasion d'une mesure de garde à vue les dispositions de l'article 6 § 1 et 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, cette juridiction n'a pas assorti expressément à titre de sanction de leur ignorance, la nullité des actes concernés, une telle solution étant renvoyée en application du droit national ; qu'aux termes de l'article 62 de la Constitution, les décisions du Conseil constitutionnel s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelle ; que si le Conseil constitutionnel dans sa décision du 30 juillet 2010, a estimé que les articles 62, 63, 63-1 et 63-4, alinéas 1 et 6, et 77 du code de procédure pénale alors applicables, n'instituaient pas les garanties appropriées à l'usage qui est fait de la garde à vue, il a été décidé qu'il y avait lieu de reporter au 1er juillet 2011, leur date d'abrogation afin de permettre au législateur de remédier à cette situation et que les mesures prises avant cette date ne pouvaient être contestées sur le fondement de l'inconstitutionnalité, les officiers de police judiciaire ayant en l'espèce appliqué avec loyauté les dispositions légales en vigueur ; qu'il en résulte que le principe de la sécurité juridique notamment protecteur des droits des victimes, confirmé par la Cour européenne des droits de l'homme, le Conseil constitutionnel ainsi que par la chambre criminelle de la Cour de cassation dans ses arrêts rendus en formation plénière le 19 octobre 2010, permet de constater que les intéressés ont été placés sous le régime d'une garde à vue parfaitement conforme au droit positif à la date des 3 et 7 février 2011, à savoir, sans notification du droit de garder le silence, et avant la soixante-douzième heure, sans un entretien immédiat avec un avocat et son assistance durant les auditions, que les gardes à vue conduites l'ont été avec loyauté par les officiers de police judiciaire et dans le respect des dispositions législatives en vigueur lors de leur mise en oeuvre ; que la cour ne trouve, en conséquence, aucune cause de nullité s'agissant des gardes à vue contestées ;
" alors qu'il se déduit de l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme que toute personne, placée en garde à vue, doit, dès le début de cette mesure, être informée de son droit de se taire et, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'affaire, non constatées en l'espèce, pouvoir bénéficier, en l'absence de renonciation non équivoque, de l'assistance d'un avocat ; que, pour rejeter le moyen pris de la nullité de la garde à vue de M. Y..., l'arrêt se prononce par les motifs repris au moyen ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait, après avoir constaté que les auditions recueillies en garde à vue n'étaient pas conformes aux prescriptions de la Convention européenne des droits de l'homme, d'annuler ces actes puis de procéder ainsi qu'il est prescrit par les articles 174 et 206 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a méconnu le principe ci-dessus énoncé " ;
Vu l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que toute personne, placée en garde à vue, doit, dès le début de cette mesure, être informée de son droit de se taire et, sauf exceptions justifiées par des raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l'espèce, pouvoir bénéficier, en l'absence de renonciation non équivoque, de l'assistance d'un avocat ;
Attendu que, pour rejeter le moyen pris de la nullité de la garde à vue de M. Y... qui soutenait que le droit de se taire ne lui avait pas été notifié et qu'il n'avait pas bénéficié de l'assistance d'un avocat, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait, après avoir constaté que les auditions recueillies en garde à vue n'étaient pas conformes aux prescriptions de la Convention européenne des droits de l'homme, d'annuler ces actes puis de procéder ainsi qu'il est prescrit par les articles 174 et 206 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a méconnu le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi de M. X... :
Le REJETTE ;
II-Sur le pourvoi de M. Y... :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 13 février 2012, en ses seules dispositions ayant dit n'y avoir lieu à annulation des auditions de M. Mehdi Y... recueillies en garde à vue, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Blondet conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Beauvais conseiller rapporteur, Mme Nocquet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-81732
Date de la décision : 08/08/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 13 février 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 aoû. 2012, pourvoi n°12-81732


Composition du Tribunal
Président : M. Blondet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:12.81732
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