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11/07/2012 | FRANCE | N°11-24668;11-24669;11-24670;11-24671;11-24672;11-24673;11-24674

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 juillet 2012, 11-24668 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joins les pourvois n°s R 11-24.668 à X 11-24.674 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Versailles, 21 juillet 2011), que Mme X... et six autres opératrices de fabrication employées par la société Monin se sont vu notifier le 10 septembre 2008 une proposition de transfert de leur lieu de travail de Nogent-le-Rotrou sur le site de Fougères pour motif économique ; qu'ayant refusé cette modification de leurs contrats de travail et trois propositio

ns de reclassement, elles ont été licenciées le 7 novembre 2008 en raiso...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joins les pourvois n°s R 11-24.668 à X 11-24.674 ;
Sur le moyen unique commun aux pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Versailles, 21 juillet 2011), que Mme X... et six autres opératrices de fabrication employées par la société Monin se sont vu notifier le 10 septembre 2008 une proposition de transfert de leur lieu de travail de Nogent-le-Rotrou sur le site de Fougères pour motif économique ; qu'ayant refusé cette modification de leurs contrats de travail et trois propositions de reclassement, elles ont été licenciées le 7 novembre 2008 en raison de la restructuration de l'entreprise nécessitée par la sauvegarde de la compétitivité entraînant la suppression de leurs postes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer aux salariées des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1°/ que la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; que, s'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation ; qu'en l'espèce, pour dire que le licenciement des salariées était dénué de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que la réorganisation de l'entreprise avait conduit à supprimer la totalité des postes de travail des salariées affectées à l'activité de conditionnement dans l'établissement de Nogent-le-Rotrou sans compensation en termes d'embauches sur le site de Fougères, cependant qu'il était initialement envisagé de transférer les postes de ces salariées en même temps que l'activité d'emballage sur le site de Fougères, ce qu'elles avaient refusé, et qu'en conséquence, la réorganisation avait eu pour but principal de supprimer des emplois permanents, le critère de la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise n'étant qu'accessoire ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel qui a porté une appréciation sur le choix de la mesure de réorganisation opéré par l'employeur, sans tenir compte de ce que cette réorganisation était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, a violé les articles L. 1233-3 et L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ que dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, une réorganisation constitue un motif économique de licenciement ; qu'il ne peut être reproché à l'employeur d'être de mauvaise foi, lorsqu'il invoque une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité ; qu'à supposer que la cour d'appel ait, comme le soutenaient les salariées, considéré que la société Monin a appliqué de mauvaise foi les dispositions de l'article L. 1233-3 du code du travail, dès lors que la réorganisation de l'entreprise a été présentée, au départ, comme n'emportant aucune suppression de poste et a finalement conduit à supprimer des emplois, sans tenir compte de ce que cette réorganisation répondait au critère de sauvegarde de la compétitivité, elle aurait, en tout état de cause, violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
3°/ que tout jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à affirmer, sans préciser sur quels éléments elle se fondait, ni analyser même sommairement ces éléments, qu'une partie de l'activité d'emballage aurait été maintenue sur le site de Nogent-le-Rotrou où deux personnes s'occupent de l'emballage de la plasturgie, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ en tout état de cause, que la cour d'appel a constaté que les emplois des salariées licenciées ont été supprimés et que l'activité d'emballage qu'elles exerçaient a été reprise par les salariés de l'établissement de Fougères ; qu'il en résulte que la suppression de poste invoquée dans les lettres de licenciement était établie ; qu'en se fondant encore sur la considération qu'une partie de l'activité d'emballage aurait été maintenue dans l'établissement de Nogent-le-Rotrou, inopérante pour retenir que le motif de licenciement n'était pas réel et sérieux, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1233-3 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve, a fait ressortir que le transfert en un autre lieu de l'activité de conditionnement et des emplois occupés par les salariés ne s'était pas réalisé, a pu en déduire que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Monin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demandede la société Monin et la condamne à payer au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme globale de 2 500 euros à la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen commun produit aux pourvois n°s R 11-24.668 à X 11-24.674 par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Monin.
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR dit que les licenciements prononcés par la société MONIN sont dépourvus de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR en conséquence condamné la société MONIN à verser à chacune des défenderesses aux pourvois des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE « Sur le grief d'application de mauvaise foi des dispositions de l'article L. 1233-3 du code du travail : L'article L.1233-3 du code du travail édicte que « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par l'employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'employeur peut proposer à un ou plusieurs salariés des modifications de leur contrat de travail tel notamment un changement de lieu de travail ; que l'appelante invoque que toutefois ces dispositions ne peuvent être envisagées que si l'employeur fait preuve d'un minimum de bonne foi et qu'en l'espèce en proposant à la totalité des salariés d'un atelier un changement non seulement de lieu de travail, mais également de lieu de résidence, la SAS Monin savait que ces propositions ne pouvaient être acceptées compte tenu qu'aucune des salariées concernées, toute originaires de la région de Nogent le Retrou, ayant leur maison et la totalité de leur famille sur place, ne pouvait accepter d'aller vivre dans la région de Fougères ; que la SAS Monin réplique que les licenciements prononcés sont la conséquence des difficultés économiques rencontrées par elle et la réorganisation de l'entreprise ayant pour objectif de sauvegarder sa compétitivité dans la mesure où les difficultés économiques rencontrées ne justifiaient plus qu'il y ait deux activités de conditionnement sur les deux sites de l'entreprise multipliant ainsi les navettes inter-sites et donc les coûts et que la faible activité actuelle et l'amélioration de l'organisation a permis d'absorber la charge de travail avec l'effectif sur le site de Fougères sans nouvelle embauche ; mais que la cour constate que si ces licenciements se présentent comme la simple conséquence du refus des salariés d'accepter de travailler sur le site de Fougères et qu'il n'était pas en principe question de les licencier au départ mais de transférer l'atelier dans lequel elles travaillaient, ainsi qu'il résulte de la réunion du comité d'entreprise du 10 septembre 2008, il apparaît cependant que l'objectif atteint a conduit d'une part à supprimer la totalité des postes de travail des appelantes sur le site de Nogent sans qu'aucune compensation en termes d'embauches n'intervienne sur le site de Fougères pour remplacer les salariées dont la mutation était prévue et d'autre part que si l'activité d'emballage a été en partie reprise par les salariés de Fougères, elle a cependant été en partie maintenue sur le site de Nogent le Retrou où deux personnes s'occupent de l'emballage de la plasturgie ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments il apparaît que la SAS Monin a privilégié la mise en place d'une réorganisation dans le but principal de supprimer des emplois permanents, le critère de sauvegarde de la compétitivité n'étant qu'un accessoire à cette mesure de réorganisation » ;
1. ALORS QUE la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique de licenciement dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; que, s'il appartient au juge, tenu de contrôler le caractère sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, il ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation ; qu'en l'espèce, pour dire que le licenciement des salariées était dénué de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que la réorganisation de l'entreprise avait conduit à supprimer la totalité des postes de travail des salariées affectées à l'activité de conditionnement dans l'établissement de Nogent-le-Rotrou sans compensation en termes d'embauches sur le site de Fougères, cependant qu'il était initialement envisagé de transférer les postes de ces salariées en même temps que l'activité d'emballage sur le site de Fougères, ce qu'elles avaient refusé, et qu'en conséquence, la réorganisation avait eu pour but principal de supprimer des emplois permanents, le critère de la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise n'étant qu'accessoire ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel qui a porté une appréciation sur le choix de la mesure de réorganisation opéré par l'employeur, sans tenir compte de ce que cette réorganisation était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, a violé les articles L. 1233-3 et L. 1235-1 du Code du travail ;
2. ALORS QUE dès lors qu'elle est nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, une réorganisation constitue un motif économique de licenciement ; qu'il ne peut être reproché à l'employeur d'être de mauvaise foi, lorsqu'il invoque une réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité ; qu'à supposer que la cour d'appel ait, comme le soutenaient les salariées, considéré que la société MONIN a appliqué de mauvaise foi les dispositions de l'article L. 1233-3 du Code du travail, dès lors que la réorganisation de l'entreprise a été présentée, au départ, comme n'emportant aucune suppression de poste et a finalement conduit à supprimer des emplois, sans tenir compte de ce que cette réorganisation répondait au critère de sauvegarde de la compétitivité, elle aurait, en tout état de cause, violé l'article L. 1233-3 du Code du travail ;
3. ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à affirmer, sans préciser sur quels éléments elle se fondait, ni analyser même sommairement ces éléments, qu'une partie de l'activité d'emballage aurait été maintenue sur le site de Nogent-le-Rotrou où deux personnes s'occupent de l'emballage de la plasturgie, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la cour d'appel a constaté que les emplois des salariées licenciées ont été supprimés et que l'activité d'emballage qu'elles exerçaient a été reprise par les salariés de l'établissement de Fougères ; qu'il en résulte que la suppression de poste invoquée dans les lettres de licenciement était établie ; qu'en se fondant encore sur la considération qu'une partie de l'activité d'emballage aurait été maintenue dans l'établissement de Nogent-le-Rotrou, inopérante pour retenir que le motif de licenciement n'était pas réel et sérieux, la cour d'appel a encore violé l'article L. 1233-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-24668;11-24669;11-24670;11-24671;11-24672;11-24673;11-24674
Date de la décision : 11/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 21 juillet 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 jui. 2012, pourvoi n°11-24668;11-24669;11-24670;11-24671;11-24672;11-24673;11-24674


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.24668
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